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18/11/2005 | FRANCE | N°02MA01795

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6eme chambre - formation a 3, 18 novembre 2005, 02MA01795


Vu la requête, enregistrée le 28 août 2002, présentée pour M. Jean-François X, élisant domicile ... (84000), par la SCP Me Albertini, Alexandre et Marchal, avocats ;

M. X demande à la Cour :

- d'annuler le jugement n°953199 du 5 juin 2002 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier l'a condamné solidairement à indemniser la commune de Sommières des dommages affectant la halle des sports ;

- de le mettre hors de cause, en tout cas de limiter sa part de responsabilité à 5% ;

- de dire que les constructions ne doivent supporter le coût des trav

aux de réfection que pour un montant hors taxe ;

- de condamner l'Etat, SOCOTEC et l...

Vu la requête, enregistrée le 28 août 2002, présentée pour M. Jean-François X, élisant domicile ... (84000), par la SCP Me Albertini, Alexandre et Marchal, avocats ;

M. X demande à la Cour :

- d'annuler le jugement n°953199 du 5 juin 2002 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier l'a condamné solidairement à indemniser la commune de Sommières des dommages affectant la halle des sports ;

- de le mettre hors de cause, en tout cas de limiter sa part de responsabilité à 5% ;

- de dire que les constructions ne doivent supporter le coût des travaux de réfection que pour un montant hors taxe ;

- de condamner l'Etat, SOCOTEC et la société SEGAUD à le garantir des condamnations qui pourraient être prononcées contre lui ;

- de condamner la commune de Sommières à lui verser 2000 euros au titre des frais de procédure ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2002, présenté par la SCP Sarlin Chabaud, avocats, pour la Société SOGIC, représentée par son mandataire judiciaire Me d'Abrigeon ; la SOGIC demande à la Cour :

- de réformer le jugement du tribunal de Montpellier du 2 juin 2002 en ce qu'il prononce une condamnation contre une société en liquidation judiciaire, ce qu'interdit l'article L.621-40 du code de commerce ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 avril 2003, présenté par le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, qui demande à la Cour de réformer le jugement du tribunal administratif et d'écarter toute responsabilité de la DDE du Gard ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 juin 2003, présenté pour la société SOCOTEC par la SCP Tertian-Bagnoli, avocats ; SOCOTEC demande à la Cour :

- de réformer partiellement le jugement en ce que, la mettant justement hors de cause, il a omis de statuer sur la part de provision que SOCOTEC avait versée en février 1996 ; de confirmer ledit jugement pour le surplus et de condamner tout succombant à lui verser 1 500 euros au titre des frais de procédure ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 juin 2004, présenté pour la société SEGAUD, par Me Sanguinede, avocat ; la société demande à la Cour : de confirmer le jugement en ce qu'il la met hors de cause et de le réformer en ce qu'il ne statue pas sur la provision de 100 000 Frs qu'elle a versée le 28 mars 1996 ; elle demande également la condamnation de tout succombant à lui verser 1 500 euros au titre des frais de procédure ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 août 2004, présenté pour la commune de Sommières par Me Redaud, avocat ;

La commune demande à la Cour, à titre principal, de confirmer le jugement en ce qu'il retient la responsabilité des maîtres d'oeuvre, y compris la société SOGIC, de limiter la condamnation à l'architecte et à la DDE, dès lors qu'elle dispose d'une action directe contre l'assureur de SOGIC, et de condamner M. X, la DDE, SOCOTEC et la SA SEGAUD à lui payer la somme de 15 244 euros au titre du préjudice moral et des troubles de jouissances dès lors que la salle des sports a été inutilisable pendant plusieurs années, ainsi que 2 000 euros au titre des frais de procédure ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 août 2004, présenté par Me d'Abrigeon, liquidateur judiciaire de la SARL SOGIC ; elle demande à la cour de réformer le jugement du tribunal administratif en ce qu'il a condamné à tort une société en liquidation judiciaire en méconnaissance des dispositions de l'articleL.621-4 du code de commerce, alors même que la commune de Sommières n'a plus aucune créance contre la SARL SOGIC à défaut d'avoir produit dans les délais au bilan ; que, par ailleurs, il conteste la responsabilité que lui impute la commune, l'architecte assurant à la fois la conception et la maîtrise totale de l'opération ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 juillet 2005, présenté pour la société SEGAUD par Me Sanguinede, avocat ; la société demande à la Cour : à titre principal, de déclarer irrecevable la requête de la commune de Sommières, à titre subsidiaire, de confirmer le jugement qui la met hors de cause, de condamner l'Etat et M. X à lui verser 15 000 euros et, à titre infiniment subsidiaire, de rejeter les appels en garantie formés à son encontre et de condamner tout succombant à lui verser 1 500 euros au titre des frais de procédure ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 octobre 2005, présenté pour M. X par Me Albertini, avocat. M. X réitère ses conclusions initiales ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du commerce ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 octobre 2005 :

- le rapport de M. Chavant,

- les observations de Me Ladouari de la SCP Tertian-Bagnoli pour la Sté SOCOTEC ;

- et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité de la requête introductive d'instance

Considérant que M. X soutient, en premier lieu, que le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 5 juin 2002 serait irrégulier en ce qu'il aurait écarté à tort la fin de non-recevoir soulevée par le requérant et tirée de ce que la requête introductive d'instance, présentée par la commune de Sommières, ne précisait pas sur quel fondement juridique elle entendait voir les constructeurs de la halle des sports condamnés à l'indemniser de son préjudice, en méconnaissance des dispositions de l'article R.411-1 du code de justice administrative ; que, cependant, ces dispositions sont à concilier avec celles de l'article R.421-1 du même code, qui disposent que : « sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée » ; qu'il est constant que dans le mémoire enregistré le 5 juin 2000, la commune de Sommières a précisé qu'elle entendait se placer sur le terrain de la responsabilité décennale des constructeurs de l'ouvrage public ; qu'en énonçant ainsi le fondement de sa demande, elle a, avant la clôture de l'instruction, régularisé sa requête ; que, par suite, les premiers juges ont écarté à bon droit la fin de non-recevoir soulevée ;

Sur la responsabilité

Considérant qu'entre décembre 1990 et juillet 1991, la commune de Sommières a fait construire une halle des sports ; que M. X, architecte, s'est vu confier, conjointement avec la SARL d'ingénierie SOGIC, une mission complète de maîtrise d'oeuvre ; que la direction départementale de l'équipement du Gard a été chargée, d'une part, d'une mission de conduite d'opération-assistance à maître d'ouvrage, limitée au bâtiment de la halle reçu sans réserve le 11 juillet 1991, puis d'une mission de maîtrise d'oeuvre pour la réalisation des VRD et des abords de la halle immédiatement après à la réception ; que la société SOCOTEC est intervenue en qualité de contrôleur technique et que la société SEGAUD a été chargée du revêtement de sol ;

Considérant que des désordres consistant en cloquages et décollement du revêtement de sol posé mois d'un moins après la finition de la dalle, ont rendu l'ouvrage impropre à sa destination dans les mois qui suivirent la réception ; que l'expert nommé en référé attribue l'origine de ces désordres à l'insuffisante épaisseur du «hérisson » supportant la dalle, à l'absence d'un système de drainage périphérique, susceptible d'évacuer efficacement les eaux pluviales, à la situation de l'ouvrage à proximité immédiate d'une zone inondable, avec présence connue de la nappe phréatique et à la surélévation des talus en bordure nord de l'ouvrage par rapport au sol inférieur de la dalle ;

Considérant qu'il est constant que le rapport initial de SOCOTEC, en date du 11 octobre 1990, indique expressément : « 3. dallage : prévoir une forme d'au moins 30 cms soigneusement compactée afin d'obtenir une réaction du sol égale à K =70MPA /cm²… ; dans les aménagements des extérieurs, il y aura lieu de prévoir un drain périphérique pour collecter les eaux pluviales » ; que cet avis, qui exonère SOCOTEC de toute responsabilité, n'a pas été suivi tant en ce qui concerne l'épaisseur du hérisson composé, selon les dires mêmes de l'architecte, de « tout venant » et sur une hauteur ne dépassant pas 20 cm, qu'en ce qui concerne l'absence de tout système de drainage périphérique qui incombait à la DDE ; que ces vices de conception sont à l'origine directe et exclusive des remontées d'humidité constatées, l'absence de pose d'une couche de « Primer Sepox » n'y ayant pris aucune part ; que, dès lors, les premiers juges ont pu à bon droit mettre hors de cause la société SEGAUD et retenir la responsabilité conjointe de l'architecte, du bureau d'études SOGIC et de la DDE, à égale proportion, dans l'origine des désordres et les condamner solidairement à payer à la commune de Sommières la somme non contestée de 102 983,73 euros en réparation de son préjudice, déduction à faire de la provision accordée par le tribunal de Montpellier par ordonnance de référé du 18 janvier 1996 ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de confirmer à titre principal le jugement du tribunal administratif, en ce compris les appels en garantie des parties ;

Considérant que la commune de Sommières réitère ses conclusions de 1ère instance tendant à la condamnation des maîtres d'oeuvre à lui verser 100 000 Frs au titre du préjudice moral et des troubles de jouissance qu'elle a dû supporter ; que le tribunal administratif a rejeté à tort ces conclusions, dès lors qu'il n'est pas contesté que l'ouvrage rendu impropre à sa destination est resté inutilisable de 1991 à 1995 ; que cette impossibilité d'utiliser un ouvrage public immédiatement après sa réception constitue un trouble de jouissance, suffisamment établi en l'espèce pour qu'il soit fait droit aux conclusions de la commune sur ce point ; qu'il y a lieu, en conséquence, de porter le montant global du préjudice à la somme de 118.227,73 euros ;

Considérant que si le liquidateur judiciaire du bureau d'études SOGIC soutient que l'état de liquidation de la société s'oppose à sa condamnation et que, n'ayant pas produit dans les délais légaux au passif de liquidation, la commune de Sommières verrait sa créance en tout état de cause prescrite, l'indépendance des législations et l'autonomie du contentieux administratif, par rapport au droit commercial conduisent à écarter ce moyen comme inopérant devant la juridiction administrative, et à déclarer le BET SOGIC, maître d'oeuvre à ce qui est imputable ; responsable de l'insuffisance du hérisson, responsable d'un tiers des désordres ayant affecté la halle des sports ;

Considérant, par ailleurs, que l'instruction révèle, sans qu'il y ait de contestation sur ce point, que SOCOTEC et la société SEGAUD ont versé 100 000 Frs chacune à la commune de Sommières à titre de provision ; qu'en l'état du présent arrêt les mettant définitivement hors de cause, il y a lieu de condamner la commune de Sommières à rembourser lesdites provisions et de réformer le jugement attaqué en ce qu'il a, à tort, écarté les conclusions reconventionnelles des deux sociétés à cette fin ;

DÉCIDE :

Article 1er : M. X, la SARL SOGIC et l'Etat (ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer) sont déclarés responsables à concurrence d'un tiers chacun des désordres ayant affecté la halle des sports de Sommières.

Article 2 : Le montant total du préjudice subi par la ville de Sommières est fixé à 118.227,73 euros., à la charge de M. X, de la SARL SOGIC et de l'Etat pour un tiers chacun.

Article 3 : La commune de Sommières remboursera à SOCOTEC et à la société SEGAUD les sommes qu'elle a perçues à titre de provisions.

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : La requête de M. X et le surplus des conclusions des parties sont rejetés.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-François X, à la commune de Sommières, à la société SOCOTEC, à la société SEGAUD, à la société SOGIC et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

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N° 02MA1795


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 02MA01795
Date de la décision : 18/11/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GANDREAU
Rapporteur ?: M. Jacques CHAVANT
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : ALBERTINI

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2005-11-18;02ma01795 ?
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