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17/11/2005 | FRANCE | N°05MA00854

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Juge des reconduites, 17 novembre 2005, 05MA00854


Vu la requête enregistrée le 11 avril 2005, présentée pour Mme Chahla X élisant domicile ..., par Me Oberti ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 050213 en date du 10 février 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 10 janvier 2005 par lequel le préfet du Var a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

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Vu les accords franco-tunisiens des 29 janvier 1964, 31 août 1983, 17...

Vu la requête enregistrée le 11 avril 2005, présentée pour Mme Chahla X élisant domicile ..., par Me Oberti ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 050213 en date du 10 février 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 10 janvier 2005 par lequel le préfet du Var a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

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Vu les accords franco-tunisiens des 29 janvier 1964, 31 août 1983, 17 mars 1988 et 19 décembre 1991 modifiés dans leur rédaction issue de la loi n°2002-1304 du 29 octobre 2002 publiée au journal officiel du 30 octobre 2002 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

Vu l'ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision en date du 27 décembre 2004 par laquelle le président de la Cour a notamment délégué M. François Bourrachot, président, pour statuer sur l'appel des jugements rendus en matière de reconduite à la frontière ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 octobre 2005 :

- le rapport de M. Bourrachot, Président rapporteur ;

- et les conclusions de M.Trottier, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, de nationalité tunisienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 19 novembre 2004, de la décision du 16 novembre 2004 du préfet du Var lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant, en premier lieu qu'aux termes des dispositions de l'article 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : I. - Sauf en cas de comportements de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l'Etat, ou liés à des activités à caractère terroriste, ou constituant des actes de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à raison de l'origine ou de la religion des personnes, ne peut faire l'objet d'une mesure d'expulsion, y compris dans les hypothèses mentionnées au dernier alinéa de l'article 25 : (…) 5° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (…) Ces mêmes étrangers ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application de l'article 22. ; que ces dispositions trouvent à s'appliquer alors même que l'étranger n'aurait pas demandé de titre de séjour sur le fondement des dispositions du 5° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient le préfet, la requérante, qui a contesté devant le tribunal administratif la légalité interne de la décision du préfet, est recevable, même pour la première fois en appel, à se prévaloir de ces dispositions ;

Considérant, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de l'avis médical motivé émis par un médecin inspecteur de la direction départementale de l'action sanitaire et sociale à la demande du préfet, lequel n'est pas contredit par les attestations insuffisamment précises produites par la requérante, que les troubles tant physiques que psychologique, ne nécessitent pas une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, dès lors, le préfet n'a pas méconnu les dispositions du 5° de l'article 26 précité ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'indépendamment de l'énumération donnée par les article 25 et 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifié des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'un arrêté d'expulsion pris selon la procédure normale ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi ou une convention internationale prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (…) 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant. Les années durant lesquelles l'étranger s'est prévalu de documents d'identité falsifiés ou d'une identité usurpée ne sont pas prises en compte ; (…) 7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (…) ;

Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 7 ter de l'accord franco-tunisien dans sa rédaction issue du deuxième avenant du 8 septembre 2000 : d) Reçoivent de plein droit un titre de séjour renouvelable valable un an et donnant droit à l'exercice d'une activité professionnelle dans les conditions fixées à l'article 7 : les ressortissants tunisiens qui justifient par tous moyens résider habituellement en France depuis plus de dix ans, le séjour en qualité d'étudiant n'étant pas pris en compte dans la limite de cinq ans ;

Considérant, d'une part, que Mme X, de nationalité tunisienne, ne saurait utilement se prévaloir, à l'encontre de l'arrêté du 6 mai 2004, des dispositions du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, qui ne sont pas applicables aux ressortissants tunisiens depuis l'entrée en vigueur le 1er novembre 2003 du deuxième avenant de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ; que, cependant, aux termes de l'article 7 ter de cet accord dans sa rédaction issue du deuxième avenant du 8 septembre 2000 comporte des stipulations de portée équivalente dont elle peut se prévaloir ; que, toutefois, si Mme X fait valoir qu'elle serait présente sur le territoire depuis plus de dix ans, les attestations qu'elle produit, lesquelles ne sont pas corroborées par d'autres pièces sont insuffisantes pour établir une résidence habituelle pendant une telle durée ; qu'ainsi, elle ne remplit ni les conditions prévues par les stipulations de l'article 7 ter précitées ; qu'il suit de là qu'elle n'est pas non plus fondée à exciper de l'illégalité de la décision de refus de séjour du 16 novembre 2004 ;

Considérant, d'autre part, que si Mme X soutient vivre en concubinage et souhaite construire sa vie avec son compagnon tandis qu'elle affirme n'avoir plus de famille en Tunisie, l'intéressée, qui n'apporte aucune preuve à l'appui de ses allégations, n'établit pas, la réalité d'une vie familiale et privée en France à la date de l'arrêté attaqué ; qu'ainsi, elle ne remplit pas davantage les conditions prévue par les dispositions précitées du 7 ° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant qu'en se bornant à faire état de son souhait de construire une vie commune avec son compagnon la requérante n'établit pas la réalité d'une vie familiale et privée à la date de la décision attaquée ; que, dès lors, le préfet n'a pu y porter aucune atteinte ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 10 janvier 2005 par lequel le préfet du Var a décidé sa reconduite à la frontière ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme Chahla X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X, au préfet du Var et au ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : Juge des reconduites
Numéro d'arrêt : 05MA00854
Date de la décision : 17/11/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. TROTTIER
Avocat(s) : OBERTI

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2005-11-17;05ma00854 ?
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