Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le
24 mars 2000, sous le n° 00 MA00593 présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :
1°) d'annuler l'article 1er du jugement en date du 10 novembre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Nice a accordé à M. X la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il avait été assujetti au titre des années 1987 et 1988, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de rétablir M. et Mme X au rôle de l'impôt sur le revenu des années 1987 et 1988 sur les bases d'imposition primitivement établies ;
.................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu la mise en demeure adressée le 12 février 2003 à M. X ;
Vu l'ordonnance fixant au 15 décembre 2003 la clôture de l'instruction de l'affaire ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 janvier 2005,
- le rapport de Mme Paix, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Bonnet, commissaire du gouvernement ;
Considérant que le MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE relève régulièrement appel du jugement en date du 10 novembre 1999, par lequel le Tribunal administratif de Nice a déchargé M. X des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il avait été assujetti au titre des années 1987, 1988, et 1989, ainsi que des pénalités y afférentes ; que le recours du ministre est limité aux années 1987 et 1988 ;
Sur la méconnaissance des dispositions de l'article L.47 du livre des procédures fiscales :
Considérant qu'aux termes de l'article L.47 du livre des procédures fiscales : Un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi où la remise d'un avis de vérification ;
Considérant que M. Charles X a transféré son lieu de résidence de Cannes à Monaco au cours du mois de juin 1989 ; que pour estimer que l'administration fiscale n'établissait pas que le contribuable avait effectivement reçu l'avis de vérification de sa situation fiscale personnelle, adressé à son ancienne adresse, à Cannes, le tribunal a relevé d'une part que M. X faisait valoir que l'avis d'imposition de ses revenus de l'année 1989 lui avait été adressé à son nouveau domicile à Monaco, que donc l'administration fiscale connaissait cette adresse, et d'autre part que l'administration fiscale ne produisait aucun élément permettant d'établir la réception par le contribuable de l'avis de vérification litigieux au mois d'août 1990 ; que le ministre produit, pour la première fois en appel, l'avis de vérification, adressé le
13 août 1990 à M. ou Madame X, et reçu par les contribuables le 16 août suivant ; que compte-tenu de cette nouvelle pièce, l'administration fiscale établit la réception, par les contribuables, de l'avis de vérification de leur situation fiscale personnelle ; que dans ces conditions le MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a accordé à M. Charles X la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu résultant de la procédure engagée à son encontre ;
Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les moyens présentés tant en première instance qu'en appel par les parties ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant en premier lieu, qu'en application des dispositions de l'article 168 du code général des impôts, l'administration fiscale est en droit de procéder à l'évaluation forfaitaire de la base d'imposition sur le revenu d'un contribuable, en cas de disproportion marquée entre son train de vie et ses revenus ; que M. Charles X ne conteste pas les modalités d'application de ces dispositions en ce qui le concerne au titre de l'année 1987, mais se borne à soutenir qu'en faisant usage de ces dispositions, l'administration fiscale aurait méconnu les termes de l'instruction n° 13 L 2374 en date du 8 novembre 1974, et aurait ainsi commis un détournement de procédure ; que, toutefois, l'instruction du 8 novembre 1974 ne comporte aucune interprétation formelle de la loi fiscale dont peuvent se prévaloir les contribuables, mais ne fait que rappeler des recommandations adressées aux services d'assiette ; qu'il suit de là que
M. X n'est pas fondé à se prévaloir de ladite instruction sur le fondement de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts, repris à l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ou sur le fondement du décret n° 83 1025 du 28 novembre 1983 ;
Considérant, en deuxième lieu qu'aux termes de l'article L.76 du livre des procédures fiscales : Les bases ou les éléments servant au calcul des impositions d'office sont portés à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d'une notification qui précise les modalités de leur détermination... ; que M. Charles X soutient que la notification de redressement en date du 28 juin 1991, ne serait pas suffisamment motivée s'agissant des revenus d'origine indéterminée, en ce qu'elle ne comporterait pas le détail des sommes taxées pour chacune des années ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que la notification de redressement litigieuse se réfère, s'agissant des revenus d'origine indéterminée, aux demandes de justifications précédemment adressées les 9 et
24 avril 1991, dans lesquelles sont détaillés chacun des crédits à justifier ; que dans ces conditions, le moyen tiré par M. X de l'insuffisance de motivation la notification de redressement manque en fait ;
Considérant en troisième lieu qu'aux termes de l'article L.72 du livre des procédures fiscales : Sont taxées d'office à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés, lorsqu'elles n'ont pas satisfait dans le délai de 90 jours à la demande de l'administration des impôts les invitant à désigner un représentant en France : 1° les personnes physiques exerçant des activités en France ou y possédant des biens sans y avoir leur domicile fiscal... ; qu'il est constant qu'aucun redressement suivant la procédure de taxation d'office n'est résulté, au titre des années d'imposition en cause, de l'application de ces dispositions ; que dans ces conditions, le moyen tiré par M. X de ce que l'administration ne lui aurait pas demandé de désigner un représentant fiscal en France est inopérant ;
Considérant en quatrième lieu, que M. Charles X soutient qu'à la suite de son déménagement, au mois de juin 1989, la direction régionale de Provence-Alpes-Côte d'Azur n'aurait plus été compétente pour engager l'examen de sa situation fiscale personnelle ; qu'aux termes de l'article 122 de la loi de finances rectificative pour 1996 en date du 30 décembre 1996 : Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les contrôles engagés par les services déconcentrés de la direction générale des impôts avant l'entrée en vigueur du décret n° 96-804 du 12 septembre 1996 et des arrêtés du 12 septembre 1996 régissant leur compétence ainsi que les titres exécutoires émis à la suite de ces contrôles pour établir les impositions sont réputés réguliers en tant qu'ils seraient contestés par le moyen tiré de l'incompétence territoriale ou matérielle des agents qui ont effectué ces contrôles ou délivré ces titres à la condition que ces contrôles aient été effectués conformément aux règles de compétence fixées par les textes précités. ; que ces dispositions font, en tout état de cause, obstacle à ce que la régularité du contrôle engagé à l'encontre de M. X par l'inspecteur des impôts de la direction des services fiscaux des Alpes-Maritimes auprès de laquelle il avait souscrit ses déclarations d'activité professionnelle et de revenus soit discutée par la voie contentieuse par le motif tiré de ce que cet agent était territorialement incompétent pour procéder à ce contrôle, dès lors que, s'il est constant que celui-ci avait déménagé de Cannes à Monaco, il ne résulte pas de l'instruction et il n'est pas contesté que le contrôle en litige ait été effectué conformément aux règles de compétence fixées par le décret n° 96-804 du 12 septembre 1996, et notamment l'article 350 terdecies de l'annexe III au code général des impôts dans sa rédaction issue du décret du 12 septembre 1996 ;
Considérant, en cinquième lieu, que le moyen tiré par le contribuable de l'irrégularité des redressements résultant de la vérification de comptabilité de son activité, par suite d'envoi des documents à Monaco, lieu de sa résidence, alors que son activité professionnelle était développée à Vallauris, est inopérant dès lors qu'aucun redressement issu de la vérification de comptabilité ne demeure en litige ;
Sur le bien-fondé des impositions de l'année 1988 :
Considérant que les impositions en litige ayant été établies suivant la procédure de taxation d'office, la charge de la preuve de leur caractère exagéré incombe au contribuable ;
Considérant, en premier lieu, que les sommes de 174.998 F, créditée le 2 mars 1988 sur le compte BNP n° 825 provenant de la vente d'une oeuvre d'art, et de 200.000 F créditée le
14 mars 1988 sur le compte Société marseillaise de crédit n° 701 M, ont été considérées comme justifiées par l'administration fiscale et n'ont pas fait l'objet de taxation d'office ; que les moyens invoqués par M. Charles X sont, s'agissant de ces sommes, sans objet ;
Considérant, en deuxième lieu, que M. X soutient que la somme de 200.000 F, inscrite sur son compte n° 772 au Crédit du Nord le 16 septembre 1988, proviendrait d'une vente immobilière effectuée dans le cadre de son activité de marchand de biens, à M. Y ; que toutefois la seule production d'un acte de vente, en date du 12 janvier 1988 ne permet pas, compte tenu du délai de plusieurs mois séparant la date la vente effectuée, et la remise des sommes en banque, d'établir que cette vente serait à l'origine du crédit de 200.000 F litigieux ;
Considérant, en troisième lieu que M. X soutient que les sommes de 50.000 F, et 85.000 F, créditées respectivement le 15 septembre 1988 et le 10 octobre 1988 sur le compte BNP nº 825 proviendraient de la vente d'une oeuvre d'art à M. Z ; que toutefois s'il produit une attestation de l'acquéreur ainsi que des relevés bancaires permettant d'établir la remise à sa banque de ces sommes, il ne produit aucun élément permettant de prouver l'identité du tiré ; que dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration fiscale a regardé ces sommes comme insuffisamment justifiées ;
Considérant, en quatrième lieu, que les crédits de 1 million de francs, remis le
18 janvier 1988 sur le compte BNP n° 087, et de1.475.000 F remis le 17 mars 1988 sur le compte BNP n° 191 ne peuvent être regardés comme justifiés en l'absence de documents bancaires établissant l'identité du tiré ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède, que M. Charles X n'apporte pas la preuve du caractère exagéré des revenus d'origine indéterminée demeurant en litige au titre de l'année 1988 ;
Sur les pénalités :
Considérant que la notification de redressement adressée à M. et Mme X le
26 juin 1991 mentionnait tout à la fois l'importance des redressements omis, mais également leur caractère intentionnel et répété ; que dans ces conditions, le moyen tiré par M. Charles X de l'insuffisance de motivation de ces pénalités manque en fait ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a accordé à M. Charles X la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu des années 1987 et 1988 ;
DECIDE :
Article 1er : L'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Nice est annulé.
Article 2 : M. Charles X est rétabli aux rôles des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1987 et 1988, en droits et pénalités.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Charles X et au MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE.
N° 00MA00593 2