La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/02/2005 | FRANCE | N°00MA02481

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3eme chambre - formation a 3, 24 février 2005, 00MA02481


Vu I, la télécopie enregistrée le 27 octobre 2000, et la requête enregistrée le 9 novembre 2000, sous le n° 00MA02481, présentée pour Mme Francine X, M. Fernand X et M. Bruno X par Me Bismuth, et le mémoire complémentaire en date du 27 décembre 2004 ; Mme Francine X, M. Fernand X et M. Bruno X demandent à la Cour :

- d'annuler le jugement n° 9907738 du 30 mai 2000 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté les conclusions de la requête dirigées contre le docteur Y et ordonné un complément d'expertise relativement à la requête tendant à la condamnatio

n du professeur Y et de l'Assistance publique à Marseille à leur payer la ...

Vu I, la télécopie enregistrée le 27 octobre 2000, et la requête enregistrée le 9 novembre 2000, sous le n° 00MA02481, présentée pour Mme Francine X, M. Fernand X et M. Bruno X par Me Bismuth, et le mémoire complémentaire en date du 27 décembre 2004 ; Mme Francine X, M. Fernand X et M. Bruno X demandent à la Cour :

- d'annuler le jugement n° 9907738 du 30 mai 2000 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté les conclusions de la requête dirigées contre le docteur Y et ordonné un complément d'expertise relativement à la requête tendant à la condamnation du professeur Y et de l'Assistance publique à Marseille à leur payer la somme de 7.767.023,85 francs en réparation du préjudice, arrêtée au 31 octobre 1999, résultant de l'intervention chirurgicale subie par Mme X le 15 septembre 1998 à l'hôpital de la Timone, à leur payer les frais d'expertise et une somme de 50.000 francs au titre des frais irrépétibles ;

- de condamner l'Assistance publique à Marseille à leur payer la somme de 7.767.023,85 francs en réparation du préjudice, arrêtée au 31 octobre 1999, résultant de l'intervention chirurgicale subie par Mme X le 15 septembre 1998 à l'hôpital de la Timone, à leur payer les frais d'expertise ;

- de condamner l'Assistance publique à Marseille à leur verser une somme de 50.000 francs au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

..................

Vu II, la requête enregistrée le 25 juin 2002, sous le n° 02MA01178, pour Mme Francine X, M. Fernand X et M. Bruno X par Me Bismuth ; Mme Francine X, M. Fernand X et M. Bruno X demandent à la Cour :

- d'annuler le jugement n° 9907738 du 23 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté les conclusions de la requête de Mme Francine X, M. Fernand X et M. Bruno X ;

- de condamner l'Assistance publique à Marseille à leur payer la somme de 1.184.075,15 euros soit 7.767.023,85 francs en réparation du préjudice, arrêtée au 31 octobre 1999, résultant de l'intervention chirurgicale subie par Mme X le 15 septembre 1998 à l'hôpital de la Timone, à leur payer les frais d'expertise et la somme de 304.898,03 euros soit 2.000.000 francs à titre de provision ;

- de condamner l'Assistance publique à Marseille à leur verser une somme de 50.000 francs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..................

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 janvier 2005,

- le rapport de M. Marcovici, rapporteur ;

- les observations de Me Calandri, du cabinet Tardonnet, Roussin, Richard, pour Mme X, M. Fernand X et M. Bruno X, et Me Demailly, substituant Me Le Prado, pour l'assistance publique à Marseille ;

- et les conclusions de M. Trottier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées n°'00MA02481 et 02MA01178 ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par une même décision ;

En ce qui concerne la responsabilité de l'Assistance publique à Marseille :

Considérant que Mme Francine X, qui est née en 1932, a subi une intervention chirurgicale le 15 septembre 1995 destinée à traiter une maladie de Parkinson diagnostiquée en 1985, par insertion de deux électrodes dans le cerveau destinées à stimuler les noyaux sous-thalamiques ; que cette intervention a provoqué une incapacité permanente de 98 % dont elle est demeurée atteinte jusqu'à son décès survenu le 18 février 2003 ;

Considérant que les consorts X ont fait valoir, d'une part, que le rapport déposé le 31 août 1999 serait irrégulier dès lors que l'expert chargé par le Tribunal administratif de Marseille d'examiner Mme Francine X a omis d'informer les parties de la teneur d'une réunion à laquelle ils auraient été privés de la possibilité de se faire assister d'un médecin, et, d'autre part, que le complément d'expertise ordonné par le jugement en date du 30 mai 2000 serait également irrégulier dès lors qu'il n'ont pas eu la possibilité de faire connaître leurs observations avant le dépôt dudit rapport, le 13 novembre 2000 ; qu'à supposer même que l'expert ait conduit les opérations d'expertise de façon irrégulière, cette irrégularité ne fait pas obstacle à ce que les deux rapports d'expertise soient retenus à titre d'élément d'information dès lors que les consorts X, ayant pu présenter leurs observations au cours des procédures écrites qui ont suivi le dépôt des rapports d'expertise, et la Cour administrative d'appel de Marseille disposant des éléments d'informations nécessaires à la solution du litige, il soit statué au fond sans qu'il soit besoin de recourir à une nouvelle expertise ;

Considérant que lorsqu'un acte médical nécessaire au diagnostic ou au traitement du malade présente un risque dont l'existence est connue mais dont la réalisation est exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y soit particulièrement exposé, la responsabilité du service public hospitalier est engagée si l'exécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec l'état initial du patient comme avec l'évolution prévisible de cet état, et présentant un caractère d'extrême gravité ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des rapports d'expertise, qu'aucune faute ne peut être imputée à l'Assistance publique à Marseille, tant en ce qui concerne le diagnostic et les actes chirurgicaux ; que, toutefois, l'expert a estimé le risque de complications à 1% ; que dès lors, le risque de formation d'un hématome intracérébral, qui s'est réalisé, et qui est à l'origine de l'état de la patiente, avait une probabilité de se produire inférieure à 1% et peut donc être qualifié d'exceptionnel ; qu'il est constant que l'état de Mme X présentait un caractère d'extrême gravité ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les conséquences de l'acte chirurgical qui est à l'origine de l'état de Mme X soit en rapport avec son état initial ; que dès lors, l'Assistance publique à Marseille doit être condamnée à réparer les préjudices subis en raison de l'opération en cause, alors même qu'aucune faute ne lui serait imputable ;

Sur l'évaluation du préjudice subi par Mme X :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les frais médicaux et pharmaceutiques résultant directement des conséquences dommageables de l'intervention s'élèvent à un montant de 79.882,71 euros ; que le taux d'incapacité résultant de l'opération doit être évalué à 98 % et le préjudice subi à ce titre à une somme de 250.000 euros ; qu'ainsi le préjudice corporel subi par Mme X s'élève à 329.882,71 euros ;

Considérant qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice d'agrément, ainsi que des souffrances physiques endurées à la suite de l'intervention et du préjudice esthétique en les fixant à la somme globale de 15.000 euros ;

Considérant que Mme X est décédée le 18 février 2003 ; que Messieurs Francis et Bruno X doivent être regardés comme ayant repris l'instance par le mémoire en date du 27 décembre 2004 ; qu'il y a lieu de condamner l'Assistance publique à Marseille à leur verser les sommes de 329.882,71 euros et 15.000 euros ;

Sur le préjudice subi par Messieurs Francis et Bruno X :

Considérant que Messieurs Francis et Bruno X ont subi, en raison respectivement de l'état de leur épouse et mère , des troubles dans leurs conditions d'existence ; que ces troubles seront justement évalués en condamnant l'Assistance publique à Marseille à verser une somme de 15.000 euros à M. Francis X et une somme de 7.500 euros à M. Bruno X ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant que les expertises ont été prescrites afin de permettre au tribunal et à la Cour administrative de Marseille de se prononcer sur la responsabilité de l'Assistance publique à Marseille ; que la présente décision retenant la responsabilité de l'établissement public, il y a lieu de condamner l'Assistance publique à Marseille à rembourser aux consorts X les frais qu'ils ont exposés à ces différents titres ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Messieurs X sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code des tribunaux administratifs et de cours administratives d'appel : Dans les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative de condamner l'Assistance publique à Marseille à payer aux consorts X la somme de 3.000 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1 : Les jugements susvisés du 30 mai 2000 et 25 juin 2002 du Tribunal administratif de Marseille sont annulés.

Article 2 : L'Assistance publique à Marseille est condamnée à verser la somme de 344.882,71 euros à Messieurs Francis et Bruno X en réparation des préjudices subis par Mme X.

Article 3 : L'Assistance publique à Marseille est condamnée à verser la somme de 15.000 euros à M. Francis X et la somme de 7.500 euros à M. Bruno X en réparation des préjudices qu'ils ont subis.

Article 4 : L'Assistance publique à Marseille remboursera les frais d'expertise exposés par les consorts X devant le Tribunal administratif de Marseille.

Article 5 : L'Assistance publique à Marseille versera aux consorts X une somme de 3.000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. Fernand X, à M. Bruno X et l'Assistance publique à Marseille.

Copie en sera adressée au cabinet Tandennet, Roussin, Richard, à Me Le Prado, au préfet des Bouches-du-Rhône et au ministre des solidarités, de la santé et de la famille.

N° 00MA02481 02MA01178 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA02481
Date de la décision : 24/02/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. Laurent MARCOVICI
Rapporteur public ?: M. TROTTIER
Avocat(s) : BISMUTH

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2005-02-24;00ma02481 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award