Vu la requête et les pièces enregistrées les 2 juillet et 17 septembre et 2001 ainsi que le 2 avril 2002 présentées pour Mme Nicole X par Me Bensa, élisant domicile ...) ; Mme Nicole X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9702678 en date du 16 mars 2001, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête tendant à la condamnation de l'Etat à réparer les conséquences dommageables de son hospitalisation du 12 mai 1996 et à lui verser la somme de 10.000 F au titre des frais d'instance ;
2°) de désigner un collège d'experts de la région parisienne en vue de déterminer son état physique avant la pratique de l'artériographie subie le 12 mai 1996, les conditions dans lesquelles se sont déroulées cette intervention et les conséquences de celle-ci en fixant la date de consolidation et en précisant la nature et l'importance des préjudices corporels et personnels ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 octobre 2004,
- le rapport de Mme Massé-Degois, rapporteur ;
- les observations de Me Chabas substituant Me Depieds pour la caisse primaire d'assurance maladie ;
- et les conclusions de M. Cherrier, commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mme X, qui souffrait d'une tumeur intracrânienne, a été admise à l'hôpital Sainte Anne à Toulon pour y subir une artériographie le 13 mai 1996 afin de connaître la vascularisation de ce méningiome frontal droit en vue de pratiquer une embolisation destinée à réduire les risques hémorragiques au cours de l'exérèse tumorale prévue pour le 15 mai suivant ; qu'à la suite de cet examen réalisé sur la carotide droite, la patiente a été victime d'un accident ischémique cérébral du territoire sylvien gauche secondaire à une thrombose du siphon carotidien gauche ; que Mme X interjette appel de la décision du tribunal administratif qui a rejeté sa requête tendant à la réparation de ses préjudices corporels et personnels ;
Sur le rapport d'expertise :
Considérant que si le rapport d'expertise mentionne en page 3 que vers 17 heures Mme X s'est plainte de brûlures au niveau de la tête alors qu'en page 8, il est indiqué que ces douleurs ont été ressenties aux alentours de 16 heures, cette contradiction d'horaire n'est pas de nature à entacher d'irrégularité le rapport d'expertise ; que de même, la confusion faite par l'expert relative à l'identité du docteur qui a réalisé l'écho-doppler le 26 janvier 1998 est sans incidence sur la régularité des opérations d'expertise ; qu'il ne peut être reproché à l'expert de ne pas avoir déterminé la date de consolidation de l'intéressée dès lors qu'il n'est pas sérieusement contesté que son état n'était pas encore consolidé à la date du dépôt des conclusions expertales ; qu'enfin, il résulte des opérations d'expertise que l'expert et ses sapiteurs ont eu connaissance de l'ensemble des éléments leur permettant d'apporter une réponse pertinente aux questions posées par le juge des référés ; que, par suite, il n'y a pas lieu d'écarter le rapport d'expertise ;
Sur la responsabilité pour faute :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise réalisé par un expert assisté de deux sapiteurs dont les spécialités sont la neuroradiologie et la neurochirurgie que Mme X a présenté un accident vasculaire cérébral ischémique de l'hémisphère gauche dans les vingt-quatre heures suivant l'artériographie carotidienne droite réalisée par voie fémorale, que l'indication de l'artériographie était justifiée et qu'aucune faute ou négligence ne peut être relevée dans l'accomplissement de cet acte effectué par un praticien expérimenté ; que, d'autre part, un angio scanner ne pouvait se substituer à l'artériographie dans la mesure où il n'a aucune indication dans l'embolisation endovasculaire consistant à oblitérer les artères nourricières avant l'exérèse de la masse tumorale laquelle, en l'occurrence, située en zone très vascularisée, est connue pour son caractère hémorragique ; qu'il résulte également de l'instruction, que l'absence de déplacement du médecin de garde dans la nuit suivant la réalisation de l'artériographie, bien qu'injustifiable, n'a pas été dommageable pour l'état de santé de la patiente dès lors qu'elle était porteuse d'un méningiome contro-latéral avec hypertension intracrânienne sans possibilité de prescription de traitement anti-coagulant ni de thrombolyse et sans qu'aucun traitement puisse modifier les conséquences cliniques de l'oblitération carotidienne ; que si ces appréciations expertales sont contestées par Mme X, elles ne sont cependant pas démenties par les autres pièces du dossier et les allégations de son médecin, par ailleurs non spécialisé dans le domaine de la neurochirurgie ou neuro-radiologie, qui ne sont justifiées par aucune littérature médicale, ne peuvent être regardées comme remettant sérieusement en cause les conclusions de l'expert et de ses sapiteurs ; que, par suite, aucune faute ne peut être relevée dans l'exécution de l'artériographie subie par la patiente ;
Considérant, en second lieu, que lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que, si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité, de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les praticiens de leur obligation ; que, s'il est constant que Mme X n'a pas été informée des risques inhérents à la réalisation d'une artériographie par voie fémorale, il ne résulte toutefois pas de l'instruction qu'un accident vasculaire cérébral ischémique de l'hémisphère gauche consécutif à la pratique d'une artériographie carotidienne droite réalisée par voie fémorale en constitue un risque prévisible ; que par suite, Mme X ne peut rechercher la responsabilité de l'Etat sur ce fondement ;
Sur la responsabilité sans faute :
Considérant que lorsqu'un acte médical nécessaire au diagnostic ou traitement du malade présente un risque dont l'existence est connue mais dont la réalisation est exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y soit particulièrement exposé, la responsabilité du service public hospitalier est engagée si l'exécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec l'état initial du patient comme avec l'évolution prévisible de cet état, et présentant un caractère d'extrême gravité ; que, s'il est constant que la réalisation de l'artériographie était nécessaire au traitement de Mme X dont le pronostic était rapidement mortel en l'absence d'ablation de la tumeur, en revanche, il n'est pas établi que les dommages incontestables subis par cette dernière sont en relation avec le cathétérisme dès lors que l'artère carotide primitive gauche n'a pas été cathétérisée ; qu'en outre, et dans l'hypothèse où l'artère carotide primitive gauche l'aurait été, une dissection iatrogène de la partie proximale de l'artère serait tout à fait improbable chez un patient de cet âge ; que, par suite, la responsabilité sans faute ne saurait être engagée ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise compte-tenu des éléments ci-dessus exposés, que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; que par voie de conséquence, les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie du Var et par la mutuelle nationale aviation marine doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à Mme X, à la caisse primaire d'assurance maladie du Var et à la mutuelle nationale aviation marine les sommes qu'elles demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie du Var et par la mutuelle nationale aviation marine sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Nicole X, à la caisse primaire d'assurance maladie du Var, à la mutuelle nationale aviation marine et au ministre de la défense.
Copie en sera adressée à Me Bensa, Me Depieds, Me Connault et au ministre de la santé et de la protection sociale.
N° 01MA01475 2