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28/06/2004 | FRANCE | N°00MA02294

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5eme chambre - formation a 3, 28 juin 2004, 00MA02294


Vu, transmis le 19 septembre 2000 par télécopie, régularisé le 22 septembre 2000 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 00MA02294, le recours par lequel le MINISTRE DE L'AGRICULTURE demande que la Cour annule le jugement n° 9700237 du Tribunal administratif de Bastia en date du 29 juin 2000 annulant la décision implicite du Trésorier payeur général de la Haute Corse rejetant l'opposition formée par Mme X... Y à l'encontre d'un titre exécutoire du 2 juillet 1996, émis à la suite d'une décision rapportant une Indemnité Compensatoire aux Handicap natu

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Vu, transmis le 19 septembre 2000 par télécopie, régularisé le 22 septembre 2000 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 00MA02294, le recours par lequel le MINISTRE DE L'AGRICULTURE demande que la Cour annule le jugement n° 9700237 du Tribunal administratif de Bastia en date du 29 juin 2000 annulant la décision implicite du Trésorier payeur général de la Haute Corse rejetant l'opposition formée par Mme X... Y à l'encontre d'un titre exécutoire du 2 juillet 1996, émis à la suite d'une décision rapportant une Indemnité Compensatoire aux Handicap naturels (ICHN) de 20.618 F dont elle a bénéficié au titre de l'année 1990 ;

Le MINISTRE DE L'AGRICULTURE soutient :

- que l'aide sollicitée et octroyée nécessite, aux termes des articles R.113-18 à R.113-28 du code rural que le bénéficiaire réside de manière permanente en zone de montagne ;

- qu'à la suite d'un contrôle effectué en 1994 à la fois par la Commission Européenne et la Direction Départementale de l'Agriculture et de la Forêt de Haute Corse, a révélé que Mme Y réside de manière permanente en zone de plaine, à l'Île Rousse ;

- que les dispositions précitées du code rural appliquées en l'espèce sont intervenues en conformité avec celles du règlement communautaire n° 2328/91 du 15 juillet 1991 et de la directive n° 75/268 du 28 avril 1975 du conseil des communautés européennes ;

- que les premiers juges ont fait une interprétation erronée de l'arrêt C-9/97 et C-118/97 de la cour de justice des communautés européennes dès lors que celui-ci rappelle expressément que les états membres peuvent prévoir des conditions complémentaires ou limitatives pour l'octroi de l'indemnité ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 2 mars 2001 au greffe de la Cour, le mémoire par lequel le MINISTRE DE L'AGRICULTURE demande à la Cour d'ordonner le sursis à l'exécution du jugement du Tribunal administratif de Bastia en date du 29 juin 2000 ;

Vu, enregistré le 25 avril 2002 au greffe de la Cour, le mémoire complémentaire par lequel le MINISTRE DE L'AGRICULTURE maintient ses précédentes conclusions par les mêmes moyens ;

Vu, enregistré le 23 juillet 2002 au greffe de la Cour, le mémoire en défense présenté pour Mme X... Y, par Me Jacques Y..., avocat, qui demande à la Cour :

1°/ de rejeter le recours du MINISTRE DE L'AGRICULTURE ;

2°/ de surseoir à statuer à fin de question préjudicielle à la cour de justice des communauté européennes en vue de savoir s'il est conforme aux normes communautaires citées par le MINISTRE d'accorder l'I.C.H.N. uniquement aux agriculteurs qui résident de manière permanente en zone de montagne ;

Elle fait valoir :

- que le MINISTRE procède à une interprétation abusive de l'arrêt de la cour de justice des communautés européennes du 22 octobre 1998 dès lors que la question préjudicielle qui lui était posée portait sur la possibilité de ne pas imposer la résidence dans l'exploitation subventionnée et non pas celle, à contrario, d'imposer une telle condition ;

- que la commission européenne a estimé quant à elle que la poursuite des activités agricoles ne requiert pas obligatoirement une résidence permanente dans l'exploitation ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement des communautés européennes n° 2328/91 du 15 juillet 1991 ;

Vu la directive des communautés européennes n° 75/268 du 28 avril 1975 ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mai 2004 :

- le rapport de M. Francoz, premier conseiller ;

- les observations de Me Y... pour Mme X... Y ;

- et les conclusions de M. Louis, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la directive n°75/268 du Conseil des communautés européennes du 28 avril 1975 : En vue d'assurer la poursuite de l'activité agricole et, ainsi, le maintien d'un minimum de peuplement ou l'entretien de l'espace naturel dans certaines zones défavorisées (...) les Etats membres sont autorisés à instaurer le régime particulier d'aides visé à l'article 4, destiné à favoriser les activités agricoles et à améliorer le revenu des agriculteurs dans ces zones. L'application des mesures prévues par ce régime doit tenir compte de la situation et des objectifs de développement propres à chaque région ; qu'aux termes de l'article 4 de ladite directive : 1. Le régime particulier d'aides visé à l'article 1er comporte les mesures suivantes : - L'octroi, dans les conditions prévues au titre II, d'une indemnité qui compense les handicaps naturels permanents (...) ; qu'en vertu de l'article 17 du règlement n° 2328/91 du Conseil des communautés européennes du 15 juillet 1991, alors en vigueur : Dans les régions qui figurent sur la liste communautaire des zones agricoles défavorisées établie conformément à la directive 75/268 CEE, les Etats membres peuvent octroyer en faveur des activités agricoles une indemnité compensatoire annuelle qui est fixée en fonction des handicaps naturels permanents (...) ; que selon le paragraphe 3 de l'article 18 dudit règlement relatif aux conditions d'attribution de l'indemnité : Les Etats membres peuvent prévoir des conditions complémentaires ou limitatives pour l'octroi de l'indemnité compensatoire ;

Considérant qu'en vertu de l'article R.113-13 du code rural, pris pour l'application de ces dispositions : Les zones agricoles défavorisées comprennent des zones de montagne ainsi que d'autres zones dans lesquelles l'activité agricole est nécessaire afin d'assurer le maintien d'un minimum de peuplement et la sauvegarde de l'espace naturel ; que selon l'article R.113-18 de ce code : Les exploitants agricoles en activités dans les zones agricoles défavorisées définies aux articles R.113-13 à R.113-17 peuvent bénéficier d'aides compensatoires annuelles destinées à compenser les handicaps naturels permanents ; que l'article R.113-19 du même code précise que cette aide compensatoire porte le nom respectivement d'indemnité spéciale de montagne, d'indemnité spéciale de Piedmont, d'indemnité compensatoire dans les autres régions défavorisées, selon la zone considérée ; qu'en vertu de l'article R.113-20 du même code : Peut bénéficier de l'indemnité spéciale de montagne mentionnée à l'article R.113-19, tout agriculteur qui en présente la demande et répond aux conditions suivantes : 1°) Résider de façon permanente en zone de montagne... ;

Considérant qu'il ressort de l'arrêt de 22 octobre 1998 rendu par la cour de justice des communautés européennes dans les instances C-9/97 et C-118/97 que si les dispositions communautaires précitées ont pour objectif de soutenir l'activité agricole dans des zones où celle-ci s'avèrerait compromise sans que rien ne s'oppose par principe à ce que l'indemnité en litige soit accordée à un agriculteur lorsque celui-ci ne réside pas dans son exploitation de manière permanente, ces dispositions communautaires, en particulier le paragraphe 3 de l'article 18 du règlement n°2328/91 du 15 juillet 1991 doivent être interprétées comme ne s'opposant pas à ce que les Etats membres prévoient, comme en l'espèce s'agissant de l'obligation de résidence permanente en zone de montagne, des conditions complémentaires ou limitatives pour l'octroi de l'indemnité ;

Considérant que, par suite et sans qu'il y ait lieu de poser une question préjudicielle à la cour de justice des communautés européennes, le MINISTRE DE L'AGRICULTURE est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler la décision implicite du Trésorier payeur général de Haute Corse rejetant l'opposition formée par Mme Y à l'encontre du titre exécutoire du 2 juillet 1996, le Tribunal de Bastia a considéré que l'article R.113-20 du code rural, en tant qu'il impose une obligation de résidence permanente aux personnes qui revendiquent le bénéfice de ladite indemnité, contrevenait aux articles 17 et 18 du règlement communautaire n° 2328/91 du 15 juillet 1991 et 1er de la directive européenne n° 75-268 du 28 avril 1975 ;

Considérant qu'il ressort du dossier que Mme Y dont la résidence permanente est située à l'Île Rousse et non pas à Monticello, commune de montagne où elle gère une exploitation agricole ne remplissait pas l'une des conditions d'attribution fixée par les dispositions de l'article R.113-20 du code rural pour prétendre à l'indemnité compensatoire concernée ;

Considérant toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par Mme Y devant le Tribunal administratif de Bastia ;

Considérant que la prescription quadriennale prévue par la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 n'est pas applicable aux créances de l'Etat ; que Mme Y ne saurait donc utilement s'en prévaloir à l'encontre de l'état exécutoire en litige ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, le MINISTRE DE L'AGRICULTURE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia a annulé la décision attaquée ;

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à verser à Mme Y la somme qu'elle demande au titre des frais engagés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Bastia en date du 29 juin 2000 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme X... Y devant le Tribunal administratif de Bastia est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme Y sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE ET DES AFFAIRES RURALES et à Mme Y.

Copie en sera adressée au préfet et au trésorier payeur général de Haute-Corse.

Délibéré à l'issue de l'audience du 28 mai 2004, où siégeaient :

Mme Bonmati, président de chambre,

M. Moussaron, président assesseur,

M. Francoz, premier conseiller,

assistés de Mme Ranvier, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 28 juin 2004.

Le président de chambre, Le rapporteur,

Signé Signé

Dominique Bonmati Patrick-Gilbert Francoz

Le greffier,

Signé

Patricia Ranvier

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

Classement CNIJ : 15-05-03

C

2

N° 00MA02294


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA02294
Date de la décision : 28/06/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONMATI
Rapporteur ?: M. Patrick FRANCOZ
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : VAILLANT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-06-28;00ma02294 ?
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