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19/12/2003 | FRANCE | N°00MA02746

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5eme chambre - formation a 3, 19 décembre 2003, 00MA02746


Vu, la requête, enregistrée le 11 décembre 2000 sous le n° 00MA02746, présentée par Maître Darmanin, avocat, pour M. Nicolas X, demeurant ... ;

M. X demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 0000431 du 12 octobre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à titre principal à l'annulation de la décision du maire de Cristinacce (Corse du Sud) refusant de lui communiquer copie de délibérations du conseil municipal en date des 16 décembre 1996, 10 septembre 1999 et 20 octobre 1999 relatives à la création d'une piste au l

ieudit Altonne et à la réalisation de travaux sous des châtaigneraies ;

2'/...

Vu, la requête, enregistrée le 11 décembre 2000 sous le n° 00MA02746, présentée par Maître Darmanin, avocat, pour M. Nicolas X, demeurant ... ;

M. X demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 0000431 du 12 octobre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à titre principal à l'annulation de la décision du maire de Cristinacce (Corse du Sud) refusant de lui communiquer copie de délibérations du conseil municipal en date des 16 décembre 1996, 10 septembre 1999 et 20 octobre 1999 relatives à la création d'une piste au lieudit Altonne et à la réalisation de travaux sous des châtaigneraies ;

2'/ d'annuler la décision susmentionnée du maire de Cristinacce et de lui enjoindre de délivrer copie des délibérations ci-dessus mentionnées dans le délai de trente jours suivant la lecture de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 F par jour de retard ;

Classement CNIJ : 26-06

C

3'/ de condamner la commune de Cristinacce à lui verser une somme de 20.000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux et des cours administratives d'appel ;

Il soutient qu'il a qualité et intérêt pour agir ; que les délibérations des conseils municipaux sont des documents administratifs communicables, dont il est en droit de demander copie ; que sa demande n'est pas abusive et peut matériellement être satisfaite ; que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, sa demande était recevable ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 11 juin 2001 présenté par la commune de Cristinacce (Corse du Sud) qui demande à la Cour de rejeter la requête et de condamner M. X à lui verser une somme de 20.000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux et des cours administratives d'appel ;

Elle soutient que, comme l'a jugé le tribunal, la demande contentieuse n'avait pas été précédée de la saisine de la CADA et était donc irrecevable ; que la demande du requérant, qui s'ajoute à de nombreuses autres, présente un caractère abusif ; que compte tenu des moyens limités de la commune la consultation sur place est le seul accès possible aux documents ;

Vu le mémoire enregistré le 7 février 2002 présenté pour M. X qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré le 17 juillet 2002 présenté par la commune de Cristinacce qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 et le décret n° 88-465 du 28 avril 1988 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, ensemble le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 novembre 2003 :

- le rapport de M. Moussaron, président assesseur ;

- et les conclusions de M. Louis, commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret susvisé du 28 avril 1988 Le silence gardé pendant plus d'un mois par l'autorité compétente, saisie d'une demande de communication de documents administratifs en application du titre Ier de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978, vaut décision de refus. En cas de refus exprès ou tacite, l'intéressé dispose d'un délai de deux mois à compter de la notification du refus ou de l'expiration du délai fixé au premier alinéa du présent article pour saisir la commission instituée à l'article 5 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978. La saisine de la commission, dans les conditions prévues au deuxième alinéa du présent article, est obligatoire préalablement à tout recours contentieux. La commission notifie, dans un délai d'un mois à compter de sa saisine, son avis à l'autorité compétente qui informe la commission, dans le mois qui suit la réception de cet avis, de la suite qu'elle entend donner à la demande. Le silence gardé par l'autorité compétente pendant plus de deux mois à compter de la saisine de la commission par l'intéressé vaut décision de refus. Le délai de recours contentieux est prorogé jusqu'à la notification à l'intéressé de la réponse de l'autorité compétente ;

Considérant que, par une lettre enregistrée le 5 janvier 2000, M. X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs du refus du maire de Cristinacce de lui délivrer copie d'une délibération du conseil municipal en date du 16 décembre 1996 relative à la réalisation d'une piste au lieudit Altonne , et de deux délibérations en date des 10 septembre 1999 et 20 octobre 1999 relatives à la réalisation de travaux dans ses châtaigneraies ; que la commission, après que le maire lui eut indiqué que ces documents avaient été communiqués à M. X, a estimé par un avis du 3 février 2000 qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur le litige ; qu'en réponse à une lettre du conseil de M. X soutenant que le maire de Cristinacce avait refusé de délivrer copie des documents en cause, la commission a fait connaître par lettre du 16 février 2000 qu'elle avait épuisé sa compétence sur le litige ; que, par lettre du 3 avril 2000 adressée au conseil de M. X, le maire de Cristinacce a indiqué que M. X pouvait consulter les documents à la mairie, ainsi qu'il l'avait d'ailleurs déjà fait, mais que les moyens de la commune ne permettaient pas la délivrance de copies ; que c'est cette décision du 3 avril 2000, laquelle doit être regardée comme un refus de délivrer copie des trois délibérations susmentionnées, qui a été attaquée par M. X devant le Tribunal administratif de Bastia par la demande enregistrée le 3 juin 2000 et a donné lieu au jugement attaqué ;

Considérant que le litige soumis au tribunal administratif n'était pas dépourvu d'objet dès lors qu'il est constant que le maire de Cristinacce n'avait pas satisfait la demande de M. X tendant à la délivrance de copies des documents ; que, dès lors que ce litige, comme il vient d'être rappelé, avait été soumis à la commission d'accès aux documents administratifs, la recevabilité de la demande contentieuse n'était pas subordonnée à une nouvelle saisine de la commission ; que, par suite , M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia a déclaré sa demande irrecevable ; que le jugement attaqué est, dès lors, entaché d'irrégularité ; qu'il y a lieu de l'annuler, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif ;

Sur la légalité de la décision du maire de Cristinacce en date du 3 avril 2000 :

Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi susvisée du 17 juillet 1978 Sous réserve des dispositions de l'article 6 les documents administratifs sont de plein droit communicables aux personnes qui en font la demande, qu'ils émanent des administrations de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics ou des organismes, fussent-ils privés, chargés de la gestion d'un service public ; qu'aux termes de l'article 4 de la même loi L'accès aux documents administratifs s'exerce : a) Par consultation gratuite sur place, sauf si la préservation du document ne le permet pas ou n'en permet pas la reproduction ; b) Sous réserve que la production ne nuise pas à la conservation du document, par délivrance de copies en un seul exemplaire, aux frais de la personne qui les sollicite, et sans que ces frais puissent excéder le coût réel des charges de fonctionnement créées par l'application du présent titre. Le service doit délivrer la copie sollicitée ou la notification de refus de communication prévue à l'article 7 ;

Considérant que les trois délibérations ci-dessus mentionnées dont M. X demande copie présentent le caractère de documents administratifs communicables ; qu'en admettant même que la demande de M. X à fin d'obtenir copie de ces documents ait fait suite à de nombreuses autres réclamations adressées au maire de Cristinacce, notamment en vue d'obtenir communication de documents administratifs, le caractère abusif de la présente demande n'est pas suffisamment établi pour justifier qu'un refus lui soit opposé ; que, d'ailleurs, la copie de deux des délibérations en cause avait été demandée à M. X par le tribunal administratif pour l'instruction d'instances contentieuses pendantes devant lui ; qu'il n'est pas non plus établi, compte tenu notamment des termes de l'arrêté du maire de Cristinacce du 27 mars 1997 réglementant l'accès aux documents administratifs, que la délivrance d'une copie des trois délibérations en cause excéderait les possibilités matérielles de la commune ;

Considérant enfin que la circonstance que le préfet puisse délivrer copie des délibérations litigieuses est sans incidence sur l'application par le maire de Cristinacce des dispositions précitées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler la décision du maire de Cristinacce en date du 3 avril 2000 ;

Sur l'application des articles L.911-1 et L.911-3 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant que, dans les circonstances de l'affaire, la présente décision implique nécessairement que le maire de Cristinacce délivre à M. X copie des trois délibérations susmentionnées ; qu'il y a lieu de lui enjoindre de délivrer lesdites copies dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. X, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer une somme au titre des frais exposés par la commune de Cristinacce et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'affaire, il n'est pas inéquitable de laisser à M. X la charge des frais exposés ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement n° 0000431 du 12 octobre 2000 du Tribunal administratif de Bastia et la décision du maire de Cristinacce (Corse du Sud) en date du 3 avril 2000 refusant de délivrer à M. Nicolas X copie d'une délibération du conseil municipal en date du 16 décembre 1996 relative à la réalisation d'une piste au lieudit Altonne et de deux délibérations en date des 10 septembre 1999 et 20 octobre 1999 relatives à la réalisation de travaux dans ses châtaigneraies sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au maire de Cristinacce de délivrer à M. X, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, copie en un seul exemplaire de format A4 des trois délibérations mentionnées à l'article 1er.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. X et par la commune de Cristinacce sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. X et à la commune de Cristinacce.

Délibéré à l'issue de l'audience du 24 novembre 2003, où siégeaient :

Mme Bonmati, président de chambre,

M. Moussaron, président assesseur,

M. Alfonsi, premier conseiller,

assistés de Mme Ranvier, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 19 décembre 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Dominique Bonmati Richard Moussaron

Le greffier,

Signé

Patricia Ranvier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N° 00MA02746


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA02746
Date de la décision : 19/12/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONMATI
Rapporteur ?: M. MOUSSARON
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : DARMANIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-12-19;00ma02746 ?
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