Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, d'annuler la décision du 4 octobre 2024 par laquelle la préfète du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et, d'autre part, d'enjoindre à la préfète du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement et de le munir sans délai d'un récépissé l'autorisant à travailler ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois et de le munir, dans l'attente, d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans un délai de quinze jours.
Par un jugement n° 2304686 du 10 décembre 2024 le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 4 octobre 2024 par laquelle la préfète du Rhône a refusé à M. A... la délivrance d'un titre de séjour, a enjoint à la préfète du Rhône de délivrer à l'intéressé un certificat de résidence algérien d'un an portant la mention " salarié " dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et de le munir, dans l'attente, d'un récépissé l'autorisant à travailler dans un délai de 8 jours et a condamné l'Etat à verser à M. A... une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée le 5 février 2025 sous le n° 25LY00325, la préfète du Rhône demande à la cour d'annuler le jugement n° 2304686 du 10 décembre 2024 du tribunal administratif de Lyon et de rejeter la demande de M. A....
Elle soutient qu'au regard de la situation personnelle et familiale de M. A..., elle n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice de son pouvoir de régularisation à titre exceptionnel en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 avril 2025, M. A..., représenté par Me Zouine, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'usage d'un faux document ne fait pas obstacle à ce que l'administration examine l'opportunité de régulariser sa situation administrative au regard de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, familiale et professionnelle ;
- la durée de son activité salariée n'est pas remise en cause ; l'emploi occupé est un emploi en tension ; il donne entière satisfaction à son employeur qui lui a confié des responsabilités ;
- par ailleurs, il justifie avoir fixé le centre de ses intérêts privés et familiaux en France où il réside depuis six années avec son épouse et leurs trois enfants.
Par une décision du 2 avril 2025, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
II° Par une requête enregistrée le 5 février 2025, la préfète du Rhône demande à la cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 2304686 du 10 décembre 2024 du tribunal administratif de Lyon.
Elle soutient que l'erreur de droit commise par les premiers juges, qui se sont bornés à reprendre les éléments tirés de la situation professionnelle de l'intéressé en faisant fi des éléments tirés de sa vie privée et familiale et de la circonstance déterminante qu'il a obtenu son emploi en se présentant sous une fausse nationalité, constitue un moyen sérieux de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué et le rejet des conclusions à fin d'annulation contenues dans la demande.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 avril 2025, M. A..., représenté par Me Zouine, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'unique moyen soulevé par le préfet n'est pas de nature à justifier le sursis à exécution du jugement du 10 décembre 2024 du tribunal administratif de Lyon ;
- l'usage d'un faux document ne fait pas obstacle à ce que l'administration examine l'opportunité de régulariser sa situation administrative au regard de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, familiale et professionnelle ;
- la durée de son activité salariée n'est pas remise en cause ; l'emploi occupé est un emploi en tension ; il donne entière satisfaction à son employeur qui lui a confié des responsabilités ;
- par ailleurs, il justifie avoir fixé le centre de ses intérêts privés et familiaux en France où il réside depuis six années avec son épouse et leurs trois enfants.
Par une décision du 2 avril 2025, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, modifié, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991et le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vergnaud, première conseillère ;
- et les observations de Me Zouine, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant algérien né le 26 juin 1981, est entré régulièrement en France en dernier lieu le 17 octobre 2019 sous couvert de son passeport revêtu d'un visa valable du 19 septembre 2019 au 19 décembre 2019. Le 9 décembre 2022, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ou de l'article 7 b) de ce même accord. Le silence gardé par la préfète du Rhône sur cette demande pendant plus de quatre mois a fait naître une décision implicite de rejet, puis, par un arrêté du 4 octobre 2024, qui s'y est substitué, la préfète du Rhône a expressément refusé de délivrer un titre de séjour à M. A..., assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et d'une décision fixant le pays de destination. Par un jugement du 10 décembre 2024, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 4 octobre 2024 par laquelle la préfète du Rhône a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A... et a enjoint à l'autorité préfectorale de délivrer à l'intéressé un certificat de résidence algérien d'un an portant la mention " salarié " dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et de le munir, dans l'attente, d'un récépissé l'autorisant à travailler dans un délai de 8 jours. La préfète du Rhône relève appel de ce jugement et, par une requête séparée, demande qu'en soit ordonné le sursis à exécution. Ces requêtes étant dirigées contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoient la possibilité d'admettre au séjour un ressortissant étranger lorsque cette admission répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels, ne sont pas applicables aux ressortissants algériens dès lors que leur droit au séjour en France est régi de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, lorsqu'il est saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour, de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit et il appartient alors au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.
3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré en France le 19 septembre 2019 avec son épouse, ressortissante algérienne née en 1982, et leurs trois enfants, nés en 2009, 2012 et 2014, leur dernier fils étant né en France au cours d'un précédent séjour, et que les enfants sont scolarisés en France depuis 2019, avec des résultats satisfaisants. Il est par ailleurs constant que M. A... a été recruté comme ouvrier le 10 novembre 2020 en contrat à durée indéterminée. Son employeur, qui a déposé une demande d'autorisation de travail, a spécialement attesté qu'il présente des qualités professionnelles importantes, qu'il a été promu chef d'équipe et qu'il constitue un " salarié clef de l'entreprise ". Enfin, M. A... et son épouse justifient d'éléments d'insertion, notamment par la participation associative. Dès lors, compte tenu notamment de leur insertion professionnelle et sociale, même si le couple ne dispose pas d'un logement stable, faute d'être en situation régulière sur le territoire français, et même si M. A... s'est prévalu de la nationalité italienne pour obtenir son emploi, il résulte de tout ce qui précède que la préfète du Rhône n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a en l'espèce annulé la décision du 4 octobre 2024 par laquelle elle a refusé la délivrance d'un titre de séjour à M. A... et lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un certificat de résidence algérien d'un an portant la mention " salarié " dans un délai de deux mois et de le munir, dans l'attente, d'un récépissé l'autorisant à travailler dans un délai de 8 jours.
Sur les conclusions tendant à ce que soit ordonné le sursis à exécution du jugement du 10 décembre 2024 :
4. Dès lors que le présent arrêt se prononce sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement n° 2304686 du 10 décembre 2024 du tribunal administratif de Lyon, les conclusions aux fins de sursis à exécution de ce jugement deviennent sans objet et il n'y a plus lieu d'y statuer.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Dans les circonstances de l'espèce, il n'apparait pas inéquitable de rejeter les conclusions présentées dans les mémoires en défense au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête n° 25LY00325 de la préfète du Rhône est rejetée.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins de sursis à exécution présentées par la préfète du Rhône.
Article 3 : Le surplus des conclusions des mémoires présentés pour M. A... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Zouine et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.
Délibéré après l'audience du 14 avril 2025, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Stillmunkes, président assesseur,
Mme Vergnaud, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 mai 2025.
La rapporteure,
E. Vergnaud
Le président,
F. Pourny
La greffière,
B. Berger
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 25LY00325-25LY00327