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30/04/2025 | FRANCE | N°23LY02141

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 4ème chambre, 30 avril 2025, 23LY02141


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner la commune de Nolay à lui verser la somme de 17 315,36 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2016, capitalisés, en réparation des préjudices que la résiliation du marché de maîtrise d'œuvre lui aurait fait subir, à titre subsidiaire, en paiement du reliquat des prestations livrées et de la révision des prix prévue à l'article 5 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP)

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Par jugement n° 1903200 du 26 avril 2023, le tribunal a rejeté sa demande.
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner la commune de Nolay à lui verser la somme de 17 315,36 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2016, capitalisés, en réparation des préjudices que la résiliation du marché de maîtrise d'œuvre lui aurait fait subir, à titre subsidiaire, en paiement du reliquat des prestations livrées et de la révision des prix prévue à l'article 5 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP).

Par jugement n° 1903200 du 26 avril 2023, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 juin 2023 et le 9 octobre 2024, M. A..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la commune de Nolay à lui verser la somme de 15 962,18 euros HT, soit 19 154,62 euros TTC, ou, à titre subsidiaire, la somme de 11 762,50 euros HT, soit 14 115,00 euros TTC, au titre de l'actualisation des prix du marché initial et 816,73 euros HT soit 980,08 euros TTC pour l'exécution de la prestation AOR, assorties des intérêts au taux légal à compter du 16 août 2016, capitalisés ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Nolay la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- il est fondé à solliciter l'actualisation des prix en vertu de l'article V du cahier des clauses particulières du marché de maîtrise d'œuvre ;

- il a droit au paiement des prestations réalisées au titre des opérations de réception.

Par mémoires enregistrés le 1er février 2024 et le 23 octobre 2024, la commune de Nolay, représentée par Me Gourinat, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de M. A... la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance est irrecevable pour tardiveté ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le décret n° 78-1306 du 26 décembre 1978 ;

- le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Evrard,

- les conclusions de Mme C...,

- et les observations de Me A... pour M. A... et de Me Gourinat pour la commune de Nolay.

Une note en délibéré, enregistrée le 16 avril 2025, a été présentée pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre d'une opération, engagée avec le département de la Côte-d'Or en 2002, d'aménagement de la voie principale traversant son territoire, la commune de Nolay a confié la mission de maîtrise d'œuvre d'aménagement d'une place publique à un groupement solidaire composé notamment de M. B... A..., par acte d'engagement du 20 décembre 2002. A la suite d'un sinistre survenu le 3 mars 2008, ayant nécessité une modification d'une partie de l'opération, elle a conclu avec M. A... un nouveau contrat après mise en concurrence, que les parties qualifient de marché complémentaire, le 15 novembre 2012. M. A... a établi une facture, le 16 août 2016, d'un montant de 17 157,63 euros TTC, au titre du solde des prestations du second marché et d'une actualisation des prix appliqués aux éléments de mission des deux marchés, liquidée en fonction de l'index en vigueur au cours des mois d'exécution de chaque prestation. Il relève appel du jugement du 4 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune à lui verser cette somme, et demande à la cour de condamner la commune de Nolay à lui verser la somme de 15 962,18 euros HT, soit 19 154,62 euros TTC, ou, à titre subsidiaire, la somme de 11 762,50 euros HT, soit 14 115,00 euros TTC, au titre de l'actualisation des prix et de l'exécution de la prestation correspondant à l'élément de mission Assistance aux opérations de réception (AOR), outre intérêts au taux légal à compter du 16 août 2016, capitalisés.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 11 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de prestations intellectuelles (CCAG-PI) issu du décret du 26 décembre 1978, auquel se réfèrent les marchés en litige : " (...) 11.2. Détermination des prix de règlement. Dans le silence du marché, les prix sont considérés comme fermes. 11.22. Les prix fermes sont actualisables si le marché le prévoit et s'il comporte une formule d'actualisation (...) ". Aux termes de l'article I de l'acte d'engagement du marché de maîtrise d'œuvre du 20 décembre 2002 : " Forfait de rémunération. Les prestations de maîtrise d'œuvre seront rémunérées par application d'un prix forfaitaire, produit d'un taux de rémunération établi sur la base des conditions économiques du mois précédant la date de signature de l'acte d'engagement par le titulaire (ce mois est appelé mois zéro) par le montant d'une enveloppe prévisionnelle réservée pour les travaux qui s'élève à 1 500 000 HT comme précisé dans le programme de l'opération. Les modalités de fixation du forfait définitif de rémunération sont définies à l'article IV du C.C.P ". Aux termes de l'article V du cahier des clauses particulières (CCP) du 19 novembre 2002 applicable au marché de maîtrise d'œuvre : " Prix 5.1 / Forme du prix Les prix sont fermes et actualisables. / 5.2 Mois d'établissement des prix du marché Les prix du marché sont réputés établis sur la base des conditions économiques du mois mO (mO études) fixé dans l'acte d'engagement. / (...) 5.4 Prix ferme Le prix ferme sera actualisé si un délai supérieur à 3 mois s'écoule entre le mois d'établissement des prix du marché et la date de commencement d'exécution des prestations. Cette actualisation est effectuée par application au prix du marché d'un coefficient d'actualisation C donné par la formule : C= lm-3/ 1O Dans laquelle : 1O : index ingénierie du mois mO (mois d'établissement du prix) ; lm-3 : index ingénierie du mois antérieur de trois mois au mois m contractuel de commencement des études. Ce mois m est celui de l'accusé réception par le titulaire de la notification de son marché soit de la décision prescrivant le commencement de la tranche du marché soit de la date de commencement portée sur la décision ". Enfin, aux termes de l'article 5 du second marché, conclu le 15 novembre 2012 : " Toutes les clauses du marché initial demeurent applicables tant qu'elles ne sont pas contraires aux nouvelles dispositions, dans le présent avenant, lesquelles prévalent en cas de contestations ".

3. Il résulte de ces dispositions et stipulations que l'actualisation des prix a pour but de compenser l'érosion des marges du titulaire en raison de l'évolution des conditions économiques lorsqu'un délai anormalement long, supérieur à trois mois, imputable au pouvoir adjudicateur sépare l'établissement des prix du marché et la date de commencement d'exécution des prestations. En revanche, le titulaire du marché est sensé avoir intégré dans sa proposition de prix ferme l'ensemble des aléas pesant sur l'exécution du marché dont la durée prévisible est portée à sa connaissance à l'occasion de la mise en concurrence. Il suit de là, d'une part, que l'actualisation ne trouve pas à s'appliquer lorsque le délai de commencement d'exécution n'ayant pas excédé trois mois, l'allongement de l'opération est dû à d'autres causes exposant les responsables à en réparer les conséquences, d'autre part, que l'actualisation s'appliquant à l'offre de prix ferme, elle doit être mise en œuvre distinctement pour chaque marché, même si des contrats successifs signés par les mêmes parties ont concouru à la réalisation d'une seule opération, dès lors que chacun d'eux a donné lieu à la formation d'un prix ferme, enfin, qu'en cas de dépassement du délai de trois mois, elle ne s'applique qu'au prix global selon le différentiel entre l'index en vigueur au cours du mois de début d'exécution du marché et l'index d'origine de ce marché, et non pas de manière échelonnée, par élément de mission et selon un différentiel intégrant l'index en vigueur à la période d'exécution de l'élément de mission considéré.

4. Il résulte de l'instruction qu'à la date de conclusion du second contrat, dit marché complémentaire, le 15 novembre 2012, le premier contrat, conclu le 20 décembre 2002, avait été exécuté dans tous ses éléments. Dans ces conditions, et dès lors que les deux contrats constituent des contrats distincts ayant chacun donné lieu à une offre de prix, l'actualisation des prix prévue par l'article 5.4 du CCP cité au point 2, doit être appliquée distinctement pour chacun de ces deux contrats, l'article 5 du second marché n'ayant pour objet que de reconduire les clauses du premier marché pour les besoins de l'exécution de la nouvelle opération, non de prolonger les effets des obligations du premier marché, entièrement exécuté.

5. Or, il résulte de l'article 1 de l'acte d'engagement du 20 décembre 2002 que la date d'établissement des prix du marché, au sens des stipulations de l'article 5.4 du CCP, correspond, pour le premier marché, conclu le 20 décembre 2002, au mois de novembre 2002 et que la date de commencement d'exécution des prestations correspond au mois d'avril 2002, M. A... indiquant avoir commencé ses études avant même la conclusion du contrat. De même, il résulte des stipulations de l'article 5.4 du CCP, rendues applicables au contrat conclu le 15 novembre 2012 par l'article 5 de ce contrat, que la date d'établissement des prix du marché correspond au mois d'octobre 2012, et que la date de commencement d'exécution des prestations correspond au mois de décembre 2012, date à laquelle M. A... indique avoir commencé ses études.

6. Pour chaque contrat, le délai séparant la date d'établissement du prix du marché et la date de commencement d'exécution des prestations, est demeuré inférieur à trois mois. Par suite, M. A... n'est pas fondé à demander la condamnation de la commune de Nolay à lui verser une quelconque somme au titre de l'actualisation des prix des marchés.

7. En second lieu, d'une part, aux termes de l'article 12.3 du CCAG-PI : " 12.31. Après réception, selon les stipulations du chapitre V, des prestations faisant l'objet du marché ou, si le marché est fractionné, d'une phase assortie d'un paiement partiel définitif, le titulaire doit adresser à la personne responsable du marché le projet de décompte correspondant aux prestations fournies ". Aux termes de l'article 3 de l'acte d'engagement : " Paiements. 3.1 Le maître d'ouvrage se libérera des sommes dues au titre du présent marché, sur présentation d'une demande de paiement récapitulative à l'échéance d'un élément de mission (...) ". Et aux termes de l'article XXII du CCP : " Achèvement de la mission. La mission du maître d'œuvre s'achève à la fin du délai de garantie de parfait achèvement (...) ou après prolongation de ce délai si les réserves signalées lors de la réception ne sont pas toutes levées à la fin de cette période. Dans cette hypothèse, l'achèvement de la mission intervient lors de la levée de la dernière réserve ".

8. D'autre part, aux termes de l'article 11 du décret du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'œuvre confiées par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé, alors applicable : " L'assistance apportée au maître de l'ouvrage lors des opérations de réception et pendant la période de garantie de parfait achèvement a pour objet : a) D'organiser les opérations préalables à la réception des travaux ; b) D'assurer le suivi des réserves formulées lors de la réception des travaux jusqu'à leur levée ; c) De procéder à l'examen des désordres signalés par le maître de l'ouvrage ; d) De constituer le dossier des ouvrages exécutés nécessaires à leur exploitation ".

9. Il résulte de l'instruction, et, notamment, du procès-verbal des opérations préalables à la réception du lot n° 3 du marché de travaux Revêtement de sols scellés, que des réserves ont été émises, le 18 décembre 2014, par M. A.... Par courrier du 12 septembre 2016, le maire de Nolay, en réponse à la demande de paiement de M. A..., relève que ces réserves n'ont pas été levées, si bien que l'ouvrage n'a pas été réceptionné. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir avoir réalisé la mission AOR comportant, ainsi que le prévoit l'article 11 du décret du 29 novembre 1993, le suivi des réserves formulées à la réception des travaux. Dès lors que cette mission n'a pas été achevée, M. A... ne peut en obtenir le paiement, en vertu de l'article 3 de l'acte d'engagement. Il s'ensuit qu'il n'est pas fondé à demander la condamnation de la commune de Nolay à lui verser une quelconque somme à ce titre.

10. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance, M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

11. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

12. Les dispositions précitées font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Nolay, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. A.... Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier le paiement des frais exposés par la commune de Nolay, en application de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Nolay en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Nolay.

Délibéré après l'audience du 10 avril 2025 à laquelle siégeaient :

M. Arbaretaz, président,

Mme Evrard, présidente-assesseure,

M. Savouré, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 avril 2025.

La rapporteure,

A. Evrard

Le président,

Ph. Arbarétaz

La greffière,

F. Faure

La République mande et ordonne au préfet de la Côte-d'Or, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Une greffière,

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N° 23LY02141


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY02141
Date de la décision : 30/04/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-01-01 Marchés et contrats administratifs. - Exécution financière du contrat. - Rémunération du co-contractant. - Prix.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Aline EVRARD
Rapporteur public ?: Mme PSILAKIS
Avocat(s) : MARTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-30;23ly02141 ?
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