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03/04/2025 | FRANCE | N°24LY02955

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 5ème chambre, 03 avril 2025, 24LY02955


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 28 mai 2024 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de destination et d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer le titre de de séjour sollicité.



Par un jugement n° 2402081 du 4 octobre 2024, le tribunal administratif de Di

jon a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour



Par une requête, enregistrée le 16 oct...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 28 mai 2024 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de destination et d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer le titre de de séjour sollicité.

Par un jugement n° 2402081 du 4 octobre 2024, le tribunal administratif de Dijon a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 16 octobre 2024, le préfet de la Côte-d'Or demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de Mme A... ;

3°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que c'est à tort que le tribunal a jugé que son arrêté portait une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme A..., dont l'époux ne résidait pas régulièrement en France à la suite du retrait du titre de séjour dont il bénéficiait.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mars 2025, Mme A..., représentée par Me Faivre, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable si la compétence de sa signataire n'est pas établie ;

- le moyen soulevé par le préfet de la Côte-d'Or n'est pas fondé ;

- son arrêté était illégal pour les moyens qu'elle a soulevés devant le tribunal administratif de Dijon.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Soubié, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante albanaise, est entrée irrégulièrement en France le 8 août 2021. Le 13 juillet 2023, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 28 mai 2024, le préfet de la Côte-d'Or a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office. Par un jugement du 4 octobre 2024 dont le préfet de la Côte-d'Or relève appel, le tribunal administratif de Dijon a annulé cet arrêté et enjoint au préfet de délivrer à Mme A... le titre de séjour sollicité.

Sur la recevabilité de la requête :

2. En vertu des dispositions de l'article R. 414-4 du code de justice administrative, lorsqu'une partie adresse au juge administratif une requête par l'intermédiaire de l'application informatique dénommée Télérecours, son identification selon les modalités prévues pour le fonctionnement de cette application vaut signature pour l'application des dispositions du code de justice administrative. La requête du préfet de la Côte-d'Or ayant été présentée au moyen de l'application Télérecours, la fin de non-recevoir opposée par Mme A... tirée de l'incompétence de sa signataire doit être rejetée.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme A..., née en 1992, ne réside en France que depuis le mois d'août 2021 et que son époux n'est plus en situation régulière sur le territoire français depuis le retrait, par un arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 8 janvier 2024, du titre de séjour pluriannuel portant la mention " salarié" qui lui avait été délivré, quand bien même cet arrêté, portant en outre obligation de quitter le territoire français, n'aurait pas été notifié à l'intéressé. Par ailleurs, Mme A... n'établit pas son insertion sociale en France par les seules circonstances qu'elle suit des cours de français depuis septembre 2022 et que pendant l'année scolaire 2023-2024, ses deux enfants étaient scolarisés et l'un d'entre eux était licencié de la Fédération française de football. Dans ces conditions et en l'absence d'obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue en Albanie, pays dans lequel Mme A... a vécu jusqu'âge de vingt-neuf ans, le préfet de la Côte-d'Or n'a pas porté au droit de cette dernière au respect de sa vie privée et familiale, garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a refusé de lui délivrer un titre de séjour. Il suit de là que le préfet de la Côte-d'Or est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler son arrêté du 8 avril 2024, le tribunal administratif de Dijon a accueilli le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A... devant le tribunal administratif de Dijon.

6. L'arrêté du 28 mai 2024 a été signé par Mme Armelle Ghayou, secrétaire générale adjointe de la préfecture de la Côte-d'Or, qui disposait d'une délégation à fin de signer toutes décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département, consentie par un arrêté du 18 janvier 2024, régulièrement publié. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision de refus de titre de séjour, qui manque en fait, doit être écarté.

7. Aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. (...). / Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. (...). ".

8. La décision de refus de titre de séjour rappelle les éléments factuels propres à la situation de Mme A..., sans se borner à une motivation stéréotypée. Elle comprend ainsi les éléments de fait permettant à l'intéressée d'en contester utilement le bien-fondé. Les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français doivent, par suite, être écartés. Cette motivation révèle également que le préfet de la Côte-d'Or a procédé à un examen particulier et circonstancié de la situation de Mme A....

9. Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / (...). ".

10. Compte tenu de ce qui est jugé au point 3 et de ce qu'il n'est pas établi que les enfants de Mme A... ne pourraient pas poursuivre leur scolarité en Albanie, le préfet de la Côte-d'Or n'a méconnu ni l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni l'intérêt supérieur des enfants de Mme A..., protégé par le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant, en refusant de délivrer à leur mère un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français, et ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en décidant son éloignement et en fixant l'Albanie comme pays de renvoi.

11. Eu égard à ce qui précède, les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du délai de départ volontaire et du pays de renvoi ne sont pas illégales en conséquence des illégalités successives invoquées.

12. Il suit de là que le préfet de la Côte-d'Or est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué qui doit être annulé, le tribunal administratif de Dijon a annulé son arrêté du 28 mai 2024.

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme demandée au titre des mêmes dispositions par le préfet de la Côte-d'Or.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2402081 du tribunal administratif de Dijon du 4 octobre 2024 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Dijon et ses conclusions présentées en appel au titre des frais du litige sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à Mme B....

Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Dijon en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Michel, présidente de chambre,

Mme Vinet, présidente-assesseure,

Mme Soubié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 avril 2025.

La rapporteure,

A.-S. SoubiéLa présidente,

C. Michel

La greffière,

F. Bossoutrot

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

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N° 24LY02955

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY02955
Date de la décision : 03/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme MICHEL
Rapporteur ?: Mme Anne-Sylvie SOUBIE
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : FAIVRE ALEXIS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-03;24ly02955 ?
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