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27/02/2025 | FRANCE | N°24LY01830

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 7ème chambre, 27 février 2025, 24LY01830


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 26 octobre 2022 par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud-Est n'a pas retenu sa candidature pour intégrer la réserve opérationnelle de la police nationale.



Par un jugement n° 2208084 du 13 mai 2024, le tribunal a fait droit à sa demande et a enjoint à la préfète de la zone de défense et de sécurité Sud-Est de permettre à M. A... de poursuivre le processus de r

ecrutement dans la réserve de la police nationale et de le soumettre à un contrôle de son aptitude...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 26 octobre 2022 par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud-Est n'a pas retenu sa candidature pour intégrer la réserve opérationnelle de la police nationale.

Par un jugement n° 2208084 du 13 mai 2024, le tribunal a fait droit à sa demande et a enjoint à la préfète de la zone de défense et de sécurité Sud-Est de permettre à M. A... de poursuivre le processus de recrutement dans la réserve de la police nationale et de le soumettre à un contrôle de son aptitude physique, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 26 juin et 2 octobre 2024, ce dernier n'ayant pas été communiqué, le ministre de l'intérieur demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de M. A....

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce que les premiers juges ne pouvaient, sans se substituer à la commission de recrutement, enjoindre à la préfète de la zone de défense et de sécurité Sud-Est de procéder à la deuxième étape d'un processus de sélection qui en comporte trois, le contrôle de l'aptitude physique ne pouvant s'effectuer en l'absence d'un nouvel entretien avec la commission de recrutement ; si le tribunal entendait prononcer d'office une injonction, il n'en a pas informé les parties en application de l'article R. 611-7-3 du code de justice administrative ;

- la décision n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation.

Par des mémoires enregistrés les 13 juillet et 6 septembre 2024, M. A..., représenté par Me Morisson-Cardinaud, conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 1 000 euros soit mise à la charge de l'État en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- l'avis de la commission de recrutement n'est pas un avis conforme ; dès lors que la décision de refus a été annulée pour erreur manifeste d'appréciation, le tribunal était fondé à enjoindre de poursuivre le processus de recrutement, et non de procéder à un simple réexamen ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par une ordonnance du 2 octobre 2024, l'instruction a été close au 7 novembre 2024.

Par un courrier du 31 janvier 2025, la cour a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, qu'elle était susceptible de soulever d'office le moyen tiré de ce qu'en application de l'article 4 de l'arrêté du 13 juillet 2022 relatif au recrutement et à la préparation à la réserve opérationnelle de la police nationale, le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud-Est se trouvait en situation de compétence liée pour refuser à M. A... de poursuivre la procédure de recrutement en vue d'intégrer la réserve de la police nationale, dès lors que le jury de la commission de recrutement avait refusé de retenir sa candidature suite à l'entretien du 10 octobre 2022.

Par un mémoire enregistré le 7 février 2025, M. A... a présenté ses observations sur le moyen soulevé d'office par la cour.

Il soutient que :

- le préfet ne se trouvait pas en situation de compétence liée, dès lors que le recrutement dans la réserve opérationnelle n'est ni un concours ni un examen ; l'avis de la commission de recrutement ne lui a été communiqué qu'en appel ;

- il est fondé à exciper de l'illégalité de la décision de la commission de recrutement, laquelle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses compétences et qualités professionnelles.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- l'arrêté du 13 juillet 2022 relatif au recrutement et à la préparation à la réserve opérationnelle de la police nationale ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Boffy, première conseillère ;

- les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;

- et les observations de Me Morisson-Cardinaud, pour M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A... a déposé le 13 juin 2022 sa candidature pour intégrer la réserve opérationnelle de la police nationale et a été auditionné le 10 octobre 2022 par le jury de la commission de recrutement. Par une décision du 26 octobre 2022, le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud-Est a informé M. A... que le jury de la commission de recrutement n'avait pas retenu sa candidature pour intégrer cette réserve opérationnelle. M. A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler cette décision. Par un jugement du 13 mai 2024 dont le ministre de l'intérieur relève appel, le tribunal a fait droit à sa demande et a enjoint à la préfète de la zone de défense et de sécurité Sud-Est de permettre à M. A... de poursuivre le processus de recrutement dans la réserve de la police nationale et de le soumettre à un contrôle de son aptitude physique, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 411-7 du code de la sécurité intérieure : " La réserve opérationnelle de la police nationale est destinée à des missions de renfort temporaire des forces de sécurité intérieure et à des missions de solidarité, en France et à l'étranger, à l'exception des missions de maintien et de rétablissement de l'ordre public. /Elle est constituée :(...) /3° De personnes volontaires justifiant, lors de la souscription du contrat d'engagement, avoir eu la qualité de policier adjoint pendant au moins trois années de services effectifs ; /4° De personnes volontaires, dans les conditions définies aux articles L. 411-9 à L. 411-11. (...) ". Aux termes de l'article L. 411-9 de ce code : " Peuvent être admis dans la réserve opérationnelle de la police nationale, au titre des 3° et 4° de l'article L. 411-7, les candidats qui satisfont aux conditions suivantes :/1° Être de nationalité française ; /2° Être âgé de dix-huit à soixante-sept ans ; /3° Ne pas avoir été condamné soit à la perte des droits civiques ou à l'interdiction d'exercer un emploi public, soit à une peine criminelle ou correctionnelle inscrite au bulletin n° 2 du casier judiciaire ; /4° Être en règle au regard des obligations du service national ; exercer une activité dans la réserve, dont les conditions sont prévues par arrêté du ministre de l'intérieur. /Nul ne peut être admis dans la réserve s'il résulte de l'enquête administrative, à laquelle il peut être procédé dans les conditions prévues au I de l'article L. 114-1, que le comportement du candidat est incompatible avec les missions envisagées. (...). ". Aux termes de l'article R. 411-26 du même code : " La signature du contrat d'engagement du policier réserviste est subordonnée à la reconnaissance préalable, par l'administration, que l'ensemble des conditions d'admission à la réserve opérationnelle ainsi que l'ensemble des aptitudes requises à l'issue de la préparation à la réserve opérationnelle de la police nationale sont satisfaites. (...) Le ministre de l'intérieur précise, par arrêté, les modalités du recrutement, de la préparation et de la vérification de l'aptitude physique des réservistes opérationnels de la police nationale. ".

3. Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 13 juillet 2022 relatif au recrutement et à la préparation à la réserve opérationnelle de la police nationale : " Le recrutement des candidats à la réserve opérationnelle de la police nationale qui remplissent les conditions mentionnées à l'article L. 411-9 du code de la sécurité intérieure est composée de trois phases de sélection distinctes : - un entretien avec une commission de recrutement ; - un contrôle de l'aptitude physique ; - une préparation à la réserve opérationnelle. / Ce recrutement a pour but de sélectionner et de préparer les candidats à l'accès à la réserve opérationnelle de la police nationale en fonction de leurs aptitudes physique, comportementale et technique. Il permet de vérifier l'aptitude des candidats au port et à l'usage de l'arme ainsi qu'à l'exercice des missions prévues par l'article L. 411-10 du code de la sécurité intérieure. ". Aux termes de son article 4 : " I. - Les candidats sont convoqués à un entretien devant la commission de recrutement compétente afin d'apprécier leur motivation et leurs compétences à exercer une mission dans la réserve opérationnelle de la police nationale. (...)/ II. - Les candidats qui ne sont pas retenus par la commission de recrutement sont informés individuellement par courrier. " et de son article 5 : " Les candidats sélectionnés à l'issue de l'entretien prévu à l'article 4 font l'objet d'un contrôle de leur aptitude physique à exercer les fonctions de réserviste de la police nationale. ".

4. Il résulte de ces dispositions que le bénéfice d'un contrat d'engagement à servir dans la réserve opérationnelle de la police nationale ne constitue pas un droit et que, dans le cas où la commission de recrutement, dont l'appréciation est souveraine, décide de ne pas retenir une candidature à l'issue de l'entretien prévu à l'article 2 de l'arrêté du 29 avril 2022, l'administration, qui doit informer le candidat, se trouve en situation de compétence liée pour rejeter sa candidature.

5. En l'espèce, M. A... s'est présenté le 10 octobre 2022 devant la commission de recrutement instaurée par l'article 2 précité de l'arrêté du 29 avril 2022. A l'issue de l'entretien, la commission de recrutement a décidé de ne pas retenir sa candidature. Dès lors, le préfet de la zone de défense et de sécurité sud-est, qui ne pouvait qu'en informer le candidat évincé, se trouvait en situation de compétence liée pour refuser de l'admettre à poursuivre les étapes de la procédure de recrutement. C'est donc à tort que, pour l'annuler, les premiers juges ont estimé que la décision du 26 octobre 2022 du préfet de la zone de défense et de sécurité Sud-Est était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, un tel moyen étant inopérant.

6. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal et devant la cour.

7. Il n'appartient pas au juge de l'excès de pouvoir de contrôler l'appréciation faite par une commission de recrutement, qui s'apparente à un jury de sélection, de la valeur des candidats. Si, dans sa réponse au moyen soulevé d'office par la cour, M. A... se prévaut, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision de la commission de recrutement au regard de ses compétences et qualités professionnelles, un tel moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation, est, en tout état de cause, inopérant.

8. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité de l'injonction prononcée par les premiers juges, que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a annulé la décision du préfet de la zone de défense et de sécurité Sud-Est du 26 octobre 2022 et prononcé à son encontre une injonction. La demande de M. A... devant le tribunal doit être rejetée.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. A... la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 13 mai 2024 est annulé.

Article 2 : La demande de M. A... devant le tribunal est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre d'État, ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 13 février 2025 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

Mme Boffy, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 février 2025.

La rapporteure,

I. BoffyLe président,

V-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre d'État, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 24LY01830

kc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY01830
Date de la décision : 27/02/2025
Type de recours : Contentieux des pensions

Analyses

36-03-02 Fonctionnaires et agents publics. - Entrée en service. - Concours et examens professionnels.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Irène BOFFY
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : MORISSON--CARDINAUD MORGANE

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-27;24ly01830 ?
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