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05/02/2025 | FRANCE | N°24LY00888

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 3ème chambre, 05 février 2025, 24LY00888


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure



M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2023 par lequel le préfet de Saône-et-Loire a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office.



Par jugement n° 2303175 du 28 mars 2024, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour



Par une requête, enregistrée le 3 avril 2024, M. A..., représenté par Me Betea-de-Monredon, demande à la cour :

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2023 par lequel le préfet de Saône-et-Loire a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office.

Par jugement n° 2303175 du 28 mars 2024, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 3 avril 2024, M. A..., représenté par Me Betea-de-Monredon, demande à la cour :

1°) de lui accorder à titre provisoire le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement ainsi que l'arrêté susvisé ;

3°) d'enjoindre au préfet de Saône-et-Loire de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ont méconnu son droit d'être entendu garanti par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ce qui ne lui a pas permis de faire état de sa contribution à l'entretien et l'éducation de ses trois enfants mineurs ;

- ces décisions sont entachées d'un défaut de motivation ;

- les décisions contestées sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision portant refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet de Saône-et-Loire qui n'a pas produit d'observations.

Le bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle de M. A... par une décision du 12 juin 2024.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant tunisien né le 10 novembre 1996, est entré irrégulièrement en France le 2 janvier 2017. Père de trois enfants de nationalité française nés les 21 avril 2020, 7 août 2021 et 12 juillet 2022, il s'est vu délivrer le 17 août 2020 un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français, valable jusqu'au 16 août 2021. Il a sollicité le 22 juillet 2021 le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il s'est vu délivrer plusieurs récépissés de demande de renouvellement de titre de séjour. Par un arrêté du 6 novembre 2023, le préfet de Saône-et-Loire a refusé de lui renouveler ce titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office. L'intéressé relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire :

2. La demande d'aide juridictionnelle de M. A... ayant été déclarée caduque, les conclusions qu'il présente tendant à son admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. En premier lieu, M. A... soutient qu'il aurait dû être mis en mesure de présenter des observations avant l'édiction du refus de renouvellement de son titre de séjour dès lors qu'il justifie avoir contribué à l'entretien et l'éducation de ses enfants depuis leur naissance et que ce n'est qu'en raison des carences éducatives de leur mère, Mme D..., ressortissante française, que ces derniers ont été placés auprès du service social de l'aide à l'enfance par décision judiciaire en janvier 2023. Toutefois, les principes généraux du droit de l'Union européenne, parmi lesquels figure le droit de toute personne d'être entendue préalablement à toute décision affectant sensiblement et défavorablement ses intérêts, ne trouvent à s'appliquer dans l'ordre juridique national que dans le cas où la situation juridique dont a à connaître le juge administratif français est régie par le droit de l'Union européenne. Tel n'est pas le cas des règles relatives au séjour des étrangers, qui n'ont fait l'objet d'aucune harmonisation. Contrairement à ce que soutient M. A..., le refus de séjour en litige est un refus de renouvellement de son titre de séjour obtenu en qualité de parent d'enfant français et non un retrait du même titre. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu garanti par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne soulevé à l'encontre des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français doit être écarté comme inopérant.

4. En deuxième lieu, en vertu de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dès lors que, comme en l'espèce, cette décision a été prise sur le fondement du 3° de l'article L. 611-1 du même code. Il ressort de la décision portant refus de séjour en litige que le préfet de Saône-et-Loire a visé notamment les dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, fondement de la demande de renouvellement de titre de séjour, ainsi que le 3° de l'article L. 611-1 du code précité concernant la décision portant obligation de quitter le territoire. Il a par ailleurs fait état des motifs de fait justifiant l'édiction du refus de séjour en mentionnant les éléments afférents à la situation particulière de M. A... tant sur le plan administratif et familial que ses conditions d'entrée et de séjour en France. Ainsi, le moyen tiré de l'insuffisante motivation des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

5. En troisième lieu, M. A... réitère en appel le moyen tiré de ce que la décision portant refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans apporter aucun élément nouveau de fait ou de droit à l'appui de celui-ci. Il y a lieu pour la cour d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges aux points 5 à 7 de leur jugement.

6. En quatrième lieu, il ressort des pièces versées au dossier que M. A... est entré en France à l'âge de 20 ans. Il a été rappelé qu'il ne justifie pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses trois enfants mineurs de nationalité française. Il conserve dans son pays d'origine des attaches familiales dont son père. La circonstance qu'il ait travaillé quelques mois entre 2020 et 2022 en qualité d'intérimaire et de livreur de pizza ne saurait démontrer une insertion professionnelle particulière dans la société française. Il ressort en outre des mentions de la décision portant obligation de quitter le territoire français en litige, confirmées par celles du bulletin B2 du casier judiciaire de M. A..., que ce dernier a été condamné le 23 novembre 2022 à quatre mois d'emprisonnement avec sursis pour des faits de soustraction par un parent à ses obligations légales compromettant la santé, la sécurité, la moralité ou l'éducation de son enfant, commis le 25 août 2021 au motif qu'il avait laissé à la portée de l'un de ses enfants, alors âgé d'environ seize mois, un morceau de résine de cannabis que l'enfant a ingéré. Il a également été condamné le 2 décembre 2021 à 300 euros d'amende pour conduite d'un véhicule sans assurance le 28 septembre 2021, le 7 février 2022 à 300 euros d'amende pour des faits de conduite d'un véhicule sous l'empire d'un état alcoolique commis le 22 novembre 2021, à trois mois d'emprisonnement avec sursis le 15 avril 2022 pour des faits commis le 7 janvier 2022 de port sans motif légitime d'arme blanche ou incapacitante de catégorie D et violences par une personne en état d'ivresse manifeste sans incapacité. Ces condamnations, récentes et répétées, démontrent que le comportement de M. A... constitue une menace pour l'ordre public. Elles ne témoignent pas en outre d'une volonté de se conformer aux lois de la République et de s'intégrer au sein de la société française. Eu égard à ces éléments, caractérisant la situation personnelle de M. A... et ses conditions d'entrée et de séjour en France, la décision portant obligation de quitter le territoire français en litige n'a pas porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs pour lesquels elle a été édictée. Elle n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. En cinquième et dernier lieu, il résulte de ce que vient d'être énoncé notamment concernant la situation personnelle et familiale de M. A... que le préfet de Saône-et-Loire n'a pas entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 21 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,

Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 février 2025.

La rapporteure,

Vanessa Rémy-NérisLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Péroline Lanoy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière

2

N° 24LY00888


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY00888
Date de la décision : 05/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: Mme LORDONNE
Avocat(s) : BETEA-DE MONREDON

Origine de la décision
Date de l'import : 09/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-05;24ly00888 ?
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