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23/01/2025 | FRANCE | N°24LY01368

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 2ème chambre, 23 janvier 2025, 24LY01368


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 11 janvier 2024 par lesquelles le préfet de la Loire a retiré son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, ainsi que la décision du 21 mars 2024 par laquelle le préfet l'a assigné à résidence dans le dépar

tement de la Loire pour une durée de quarante-cinq jours.



Par un jugement n° 2401678...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 11 janvier 2024 par lesquelles le préfet de la Loire a retiré son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, ainsi que la décision du 21 mars 2024 par laquelle le préfet l'a assigné à résidence dans le département de la Loire pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2401678 - 2402898 du 9 avril 2024, la magistrate désignée du tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes en tant qu'elle concerne la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 mai et 24 novembre 2024, M. D..., représenté par Me Basmadjian, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses demandes ;

2°) d'annuler les décisions l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, fixant le pays de destination, lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, et l'assignant à résidence ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 920 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- il n'est pas suffisamment motivé ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de départ volontaire de trente jours :

- elle est illégale, par voie d'exception, du fait de l'illégalité de la décision de retrait de titre de séjour ;

- la décision de retrait de titre de séjour est entachée d'un vice de procédure contradictoire et d'une mise en œuvre déloyale de cette procédure ;

- elle est entachée d'insuffisance de motivation et de défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'erreur d'appréciation sur la menace à l'ordre public ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'insuffisance de motivation et de défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision de délai de départ volontaire de trente jours est illégale, par voie d'exception, du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle est illégale, par voie d'exception, du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français durant deux ans :

- elle est illégale, par voie d'exception, du fait de l'illégalité de la décision de retrait du titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'insuffisance de motivation ;

- elle est entachée d'erreur d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne l'assignation à résidence :

- la procédure de retenue est illégale ;

- elle est entachée d'insuffisance de motivation et de défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'erreur d'appréciation.

Le préfet de la Loire, qui a reçu communication de la requête, n'a pas présenté d'observations.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 août 2024.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pruvost, président,

- et les observations de Me Basmadjian représentant M. C... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant serbe, né le 12 avril 1982, qui est entré sur le territoire français en 2009 selon ses déclarations, a déposé une demande d'asile qui a été rejetée, puis il s'est vu délivrer une carte de séjour pluriannuelle mention " salarié " valable du 4 juin 2020 au 3 juin 2024. Par des décisions du 11 janvier 2024, le préfet de la Loire a retiré ce titre de séjour sur le fondement de l'article L. 432-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a obligé M. C... à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office et a prononcé, à son encontre, une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Par une décision du 21 mars 2024, le préfet de la Loire l'a assigné à résidence dans le département de la Loire pour une durée de quarante-cinq jours. Par un jugement du 9 avril 2024, la magistrate désignée du tribunal administratif de Lyon, après avoir joint les demandes en annulation des décisions des 11 janvier et 21 mars 2024 et renvoyé devant une formation collégiale du tribunal les conclusions de M. C... tendant à l'annulation de la décision de retrait du titre de séjour, a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire, de la décision fixant le pays de destination, de l'interdiction de retour sur le territoire et de la décision l'assignant à résidence. M. C... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ces conclusions.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. La magistrate désignée du tribunal administratif, qui n'était pas tenue de se prononcer sur tous les arguments de M. C..., a répondu aux points 8, 9, 11, 13 et 24 de son jugement, de manière suffisamment circonstanciée, aux moyens de première instance tirés de l'insuffisance de motivation entachant l'obligation de quitter le territoire français, du défaut d'examen particulier de sa situation personnelle, de l'absence de menace à l'ordre public, de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de l'obligation de quitter le territoire français sur sa situation personnelle et du caractère infondé de l'interdiction de retour sur le territoire français. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué ne serait pas suffisamment motivé sur ces points doit être écarté.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

En ce qui concerne l'exception d'illégalité du retrait de titre de séjour :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'administration n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre ou leur caractère répétitif ou systématique. ".

4. Il ressort des pièces du dossier que, par un courrier recommandé avec avis de réception du 19 décembre 2023 envoyé à l'adresse déclarée par le requérant auprès de ses services, le préfet de la Loire a invité M. C... à présenter ses observations dans un délai de quinze jours et à lui transmettre tous les éléments relatifs à sa vie privée et familiale en France, dans la perspective d'une décision éventuelle de retrait de la carte de séjour pluriannuelle pour menace à l'ordre public. Ce courrier a été retourné à la préfecture, revêtu de la mention " pli avisé et non réclamé ". Les dispositions précitées n'imposent pas au préfet d'informer l'étranger de ses droits à présenter des observations orales et à se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. Le préfet n'avait pas à envoyer ce courrier à l'adresse mentionnée dans l'arrêt de la cour d'assises de Paris du 3 décembre 2023 quand bien même il en avait eu connaissance. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions précitées et de la mise en œuvre déloyale de cette procédure doivent être écartés.

5. En deuxième lieu, M. C... reprend en appel les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen particulier de sa situation personnelle entachant la décision de retrait de titre de séjour qu'il avait invoqués en première instance. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif au point 8 de son jugement.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 432-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle peut, par une décision motivée, être retirée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public. ".

7. Il ressort de l'arrêt du 3 décembre 2023 de la cour d'assises de Paris spécialement composée en matière de terrorisme que M. C... a été condamné à une peine de trois ans d'emprisonnement, dont dix-huit mois avec sursis, pour avoir acquis, détenu en réunion, sans autorisation, et transporté hors de son domicile et sans motif légitime, dans les départements de la Loire et de Meurthe-et-Moselle, ainsi qu'en Allemagne, entre les 1er janvier 2015 et 12 septembre 2017, deux pistolets à répétition semi-automatique avec cartouches de catégorie B. Il ressort également de cet arrêt qu'une mallette découverte lors de la perquisition au domicile de M. C... du 12 septembre 2017 contenait sept cartouches de calibre 7,65 Browning, que le requérant éprouve une fascination pour les armes, qu'il a exercé une activité dans un établissement de prostitution en Allemagne, que les autorités allemandes ont délivré à son encontre un mandat d'arrêt européen pour vol par effraction commis en avril 2016 et que son casier judiciaire mentionne une condamnation le 21 janvier 2021 à une amende pour conduite d'un véhicule malgré une injonction de restitution de son permis de conduire. Dans ces conditions, la présence en France de M. C... constitue une menace réelle et actuelle pour l'ordre public. Le moyen tiré de l'erreur d'appréciation du préfet sur ce point doit être écarté.

8. En quatrième et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

9. M. C..., qui séjourne sur le territoire français depuis 2009 selon ses déclarations, a travaillé en Allemagne à partir de 2015 et y a été placé en détention provisoire du 15 septembre 2017 au 31 mai 2019. Si l'épouse du requérant séjourne régulièrement sur le territoire français, il n'est pas démontré qu'elle continuerait à travailler à la date de la décision en litige, ni que des circonstances feraient obstacle à la reconstitution du couple avec leur fils mineur dans leur pays d'origine, et les cinq autres enfants du couple qui séjournent en France, dont deux vivant en couple, sont majeurs. M. C... ne peut être regardé comme justifiant d'une insertion particulière dans la société française alors qu'il déclare vivre en France depuis 2009 et qu'il y a commis des infractions graves et n'a occupé un emploi qu'à partir du 15 juin 2020. M. C... ne démontre pas être dépourvu de toute attache familiale et personnelle dans son pays d'origine où il a vécu la plus grande partie de son existence. Dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, le préfet de la Loire n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale du requérant, une atteinte disproportionnée au but de prévenir toute atteinte à l'ordre public en vue duquel la décision de retrait de titre de séjour a été prise en décidant de l'éloigner. Dès lors, il n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de retrait de titre de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français.

En ce qui concerne les autres moyens :

11. En premier lieu, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur la situation personnelle du requérant, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 9 du présent arrêt.

12. En second lieu, M. C... reprend en appel les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen particulier de sa situation personnelle entachant l'obligation de quitter le territoire français, de l'exception d'illégalité de cette dernière décision à l'encontre du délai de départ volontaire de trente jours et de l'erreur manifeste d'appréciation entachant ce délai de départ volontaire. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif aux points 8, 13, 15 et 17 de son jugement.

Sur la décision fixant le pays de destination :

13. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination.

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français durant deux ans :

14. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de retrait de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'interdiction de retour sur le territoire français.

15. En deuxième lieu, la décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit, par ailleurs, faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

16. La décision d'interdiction de retour sur le territoire français vise les articles L. 612-8 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne que M. C... est entré en France selon ses déclarations en 2009, qu'il a toutefois travaillé en Allemagne à compter de 2015 et a été emprisonné entre 2017 et 2019, que son épouse et ses enfants résident en France mais que rien ne s'oppose à la reconstitution de la cellule familiale hors de France, et que s'il ne s'est pas soustrait à une précédente mesure d'éloignement, il constitue en revanche une menace pour l'ordre public qui a été motivée dans le cadre de la décision de retrait du titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté.

17. En troisième et dernier lieu, l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères précités, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les motifs qu'invoque l'autorité compétente sont de nature à justifier légalement dans son principe et sa durée la décision d'interdiction de retour et si la décision ne porte pas au droit de l'étranger au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise.

18. Les moyens tirés de l'erreur d'appréciation et de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 9 du présent arrêt.

Sur l'assignation à résidence :

19. En premier lieu, aux termes de l'article L. 813-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et droit d'asile : " Si, à l'occasion d'un contrôle mentionné à l'article L. 812-2, il apparaît qu'un étranger n'est pas en mesure de justifier de son droit de circuler ou de séjourner en France, il peut être retenu aux fins de vérification de son droit de circulation ou de séjour sur le territoire français. Dans ce cadre, l'étranger peut être conduit dans un local de police ou de gendarmerie et y être retenu par un officier de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale. ". Aux termes de l'article L. 813-3 de ce code : " L'étranger ne peut être retenu que pour le temps strictement exigé par l'examen de son droit de circulation ou de séjour et, le cas échéant, le prononcé et la notification des décisions administratives applicables. La retenue ne peut excéder vingt-quatre heures à compter du début du contrôle mentionné à l'article L. 812-2. (...) ". Aux termes de l'article L. 813-4 du même code : " Le procureur de la République est informé dès le début de la retenue et peut y mettre fin à tout moment. ". Aux termes de l'article L. 813-5 du même code : " L'étranger auquel est notifié un placement en retenue en application de l'article L. 813-1 est aussitôt informé par l'officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par l'agent de police judiciaire, dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend, des motifs de son placement en retenue, de la durée maximale de la mesure et du fait qu'il bénéficie des droits suivants : 1° Être assisté par un interprète ; 2° Être assisté, dans les conditions prévues à l'article L. 813-6, par un avocat désigné par lui ou commis d'office par le bâtonnier, qui est alors informé de cette demande par tous moyens et sans délai ; 3° Être examiné par un médecin désigné par l'officier de police judiciaire ; le médecin se prononce sur l'aptitude au maintien de la personne en retenue et procède à toutes constatations utiles ; 4° Prévenir à tout moment sa famille et toute personne de son choix et de prendre tout contact utile afin d'assurer l'information et, le cas échéant, la prise en charge des enfants dont il assure normalement la garde, qu'ils l'aient ou non accompagné lors de son placement en retenue, dans les conditions prévues à l'article L. 813-7 ; 5° Avertir ou de faire avertir les autorités consulaires de son pays. Lorsque l'étranger ne parle pas le français, il est fait application des dispositions de l'article L. 141-2. ".

20. La mesure de retenue que prévoient ces dispositions est uniquement destinée à la vérification du droit de séjour et de circulation de l'étranger qui en fait l'objet et est placée sous le contrôle du procureur de la République. Elle est distincte de la mesure par laquelle le préfet assigne à résidence l'étranger. Dès lors, il n'appartient pas au juge administratif de se prononcer sur la régularité des conditions de la retenue qui ont, le cas échéant, précédé l'intervention de l'assignation à résidence. Ainsi, les conditions dans lesquelles M. C... a été retenu en application des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont sans incidence sur la légalité de la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré d'éventuelles irrégularités entachant la mise en œuvre de cette mesure ne peut qu'être écarté.

21. En deuxième lieu, M. C... reprend en appel les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen particulier de sa situation personnelle entachant la décision l'assignant à résidence qu'il avait invoqués en première instance. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif au point 28 du jugement.

22. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants : 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins d'un an auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé (...) ". Aux termes de l'article L. 732-3 de ce code : " L'assignation à résidence prévue à l'article L. 731-1 ne peut excéder une durée de quarante-cinq jours. Elle est renouvelable deux fois dans la même limite de durée. ". Aux termes de l'article L. 733-1 du même code : " L'étranger assigné à résidence en application du présent titre se présente périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie (...) ". Aux termes de l'article R. 733-1 du même code : " L'autorité administrative qui a ordonné l'assignation à résidence de l'étranger en application des articles L. 731-1, L. 731-3, L. 731-4 ou L. 731-5 définit les modalités d'application de la mesure : 1° Elle détermine le périmètre dans lequel il est autorisé à circuler muni des documents justifiant de son identité et de sa situation administrative et au sein duquel est fixée sa résidence ; 2° Elle lui désigne le service auquel il doit se présenter, selon une fréquence qu'elle fixe dans la limite d'une présentation par jour, en précisant si l'obligation de présentation s'applique les dimanches et les jours fériés ou chômés ; 3° Elle peut lui désigner une plage horaire pendant laquelle il doit demeurer dans les locaux où il réside. ".

23. Le préfet a assigné à résidence M. C... dans le département de la Loire pour une durée de quarante-cinq jours, renouvelable deux fois, dans l'attente de l'exécution de la mesure d'éloignement, avec obligation de se présenter du lundi au dimanche à 10 heures, y compris les jours fériés, au commissariat de police de Saint-Etienne. M. C... ne conteste pas qu'il n'a pas présenté son passeport lors de son audition du 21 mars 2024, qu'il a déclaré être en possession d'un passeport périmé depuis le 15 décembre 2019 détenu à son domicile sans en apporter la preuve, qu'il a indiqué ne pas vouloir repartir dans son pays d'origine et que son éloignement demeure une perspective raisonnable. L'assignation à résidence, qui ne porte pas atteinte de manière disproportionnée à l'exercice par M. C... de sa vie privée et familiale, ne saurait faire obstacle à l'exercice par le requérant d'une activité professionnelle pour laquelle il ne bénéficie plus d'autorisation de travail depuis la décision de retrait de son titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation doit être écarté.

24. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Lyon a rejeté ces conclusions. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

M. Haïli, président-assesseur,

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 janvier 2025.

Le président-rapporteur,

D. Pruvost

Le président-assesseur,

X. Haïli

La greffière,

M. A...

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 24LY01368


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY01368
Date de la décision : 23/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Dominique PRUVOST
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : BASMADJIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-23;24ly01368 ?
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