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22/01/2025 | FRANCE | N°23LY03688

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 3ème chambre, 22 janvier 2025, 23LY03688


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'une part d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2022 par lequel le préfet de l'Ardèche a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi de cette mesure d'éloignement, d'autre part, d'enjoindre au préfet de l'Ardèche de lui délivrer un titre de séjour ou de procéder au réexamen de sa situation.



Par un jugement n° 2302752 du 20 juillet 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demand...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'une part d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2022 par lequel le préfet de l'Ardèche a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi de cette mesure d'éloignement, d'autre part, d'enjoindre au préfet de l'Ardèche de lui délivrer un titre de séjour ou de procéder au réexamen de sa situation.

Par un jugement n° 2302752 du 20 juillet 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 1er décembre 2023, M. B... A..., représenté par Me Bruna-Rosso, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 20 juillet 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2022 par lequel le préfet de l'Ardèche a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi de cette mesure d'éloignement ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Ardèche, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation en lui délivrant durant cet examen une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 400 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

la décision portant refus de séjour :

- est entachée d'un vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;

- méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur de droit en l'absence d'examen de sa situation personnelle et familiale au regard de ces dispositions ;

- est entachée d'erreur de droit dès lors que le préfet s'est cru lié par le non-respect des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a ainsi méconnu l'étendue de sa compétence ;

- est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- est illégale par exception d'illégalité de la décision portant refus de séjour ;

- est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet n'a pas examiné sa situation ;

- méconnaît les dispositions du 3° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet de l'Ardèche qui n'a pas présenté d'observations.

Par une décision du 18 octobre 2023, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code du travail ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Felmy, présidente-assesseure,

- et les observations de Me Bruna-Rosso, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant marocain né le 20 décembre 1987, déclare être entré pour la dernière fois en France, le 5 septembre 2019, sous couvert de son titre de séjour portant la mention " travailleur saisonnier ", valable du 20 juin 2017 au 19 juin 2020. Par un arrêté du 16 décembre 2020 du préfet de Vaucluse, confirmé par un jugement du tribunal administratif de Nîmes du 6 avril 2021 et un arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 28 février 2022, le préfet de Vaucluse a rejeté la demande de M. A... tendant à l'obtention d'un titre de séjour, et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Le 7 juin 2022, l'intéressé a sollicité auprès des services de la préfecture de l'Ardèche, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 30 septembre 2022, le préfet de l'Ardèche a refusé d'admettre M. A... au séjour, a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi de cette mesure d'éloignement. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

2. En premier lieu, il convient, par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 2 et 3 de leur jugement, d'écarter le moyen tiré du vice de procédure lié à l'absence de consultation de la commission du titre de séjour. Le requérant expose d'ailleurs lui-même qu'il a circulé entre la France et le Maroc avec son titre de séjour saisonnier, en fonction de ses contrats de travail, entre 2011 et 2020, impliquant dès lors son absence régulière du territoire français au cours de ces années. En outre, la production d'un passeport délivré par le royaume du Maroc le 11 août 2017 ne peut suffire à établir la résidence habituelle en France dont M. A... se prévaut au titre des années antérieures. Enfin, les documents produits ne permettent pas d'établir une continuité de résidence au cours des premiers trimestres des années 2015 et 2016 ni la présence de M. A... en France pour le second semestre 2021.

3. En deuxième lieu, il y a également lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 5 du jugement entrepris, d'écarter les moyens tirés de la méconnaissance des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le requérant se prévalant de nouveau et sans autre élément produit à hauteur d'appel, de nombreuses pièces relatives à sa présence sur le territoire national depuis douze ans, de ses importantes attaches familiales présentes en France, des liens amicaux qu'il y a noués et de son insertion par le travail, justifiée par la production de nombreux bulletins de salaire.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ". Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain. Toutefois, si l'accord franco-marocain ne prévoit pas de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, il y a lieu d'observer que ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant marocain qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a bénéficié d'une carte de séjour pluriannuelle valable en dernier lieu du 20 juin 2017 au 19 juin 2020 en qualité de travailleur saisonnier. Contrairement à ce qu'il indique, la circonstance que ses parents résideraient en France, notamment son père sous couvert d'une carte de résident, et qu'il n'aurait plus d'attaches familiales au Maroc, ne répond pas aux considérations relatives aux " motifs exceptionnels " ou aux " considérations humanitaires " visées à l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de régulariser sa situation. En outre et ainsi que les premiers juges l'ont relevé au point 7 de leur jugement, il ne ressort pas des termes de la décision attaquée, ni d'ailleurs des autres pièces du dossier, que le préfet de l'Ardèche n'aurait pas procédé à l'examen de la demande d'admission exceptionnelle au séjour de M. A... au titre de la vie privée et familiale. Enfin, il ressort des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 7 à 9 de leur jugement que les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation de la situation de M. A... et de l'erreur de droit, eu égard aux conditions de séjour de ce dernier, doivent être écartés.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Il convient, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 10 à 16 du jugement attaqué et qui n'ont pas été critiqués en appel, d'écarter les moyens invoqués à l'encontre de la décision d'éloignement, tirés de son insuffisance de motivation, de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de séjour, de l'erreur de droit que le préfet aurait commise en s'estimant lié par la décision de refus de séjour, de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 611-3 3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des dispositions de l'article L. 423-23 du même code, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et de l'erreur manifeste d'appréciation.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse une somme au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et à Me Bruna-Rosso.

Copie en sera adressée au préfet de l'Ardèche.

Délibéré après l'audience du 7 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,

Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 janvier 2025.

La rapporteure,

Emilie FelmyLe président,

Jean-Yves TallecLa greffière,

Péroline Lanoy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

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N° 23LY03688


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY03688
Date de la décision : 22/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Emilie FELMY
Rapporteur public ?: Mme LORDONNE
Avocat(s) : BRUNA-ROSSO

Origine de la décision
Date de l'import : 26/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-22;23ly03688 ?
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