Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SCI A... et sœurs, la SARL C... Girard, Mme E... A... et Mme D... C..., ont demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la commune de Lyon à verser, respectivement, à la SCI A... et sœurs la somme de 314 037,38 euros, à la SARL C... Girard la somme de 220 868,44 euros, à Mmes E... A... et D... C... la somme de 3 000 euros chacune et à Mmes A... et C... et à la SCI A... et Sœurs la somme de 36 841,82 euros en réparations de leurs préjudices.
Par un jugement n° 2108166 du 2 février 2023, le tribunal administratif de Lyon, d'une part, a condamné la commune de Lyon à verser, respectivement, à la SCI A... et sœurs la somme de 144 824,42 euros, à la société C... la somme de 32 582 euros et à Mme E... A... et Mme D... C... la somme de 2 000 euros chacune, d'autre part, a condamné la société Colas France à garantir la commune de Lyon à hauteur d'un tiers des condamnations prononcée à son encontre et, enfin, a mis les frais d'expertise à la charge de la commune de Lyon, pour un montant de 8 907,40 euros et de la société Colas France, pour un montant de 4 453,70 euros, a mis à la charge de la société Colas France et de la commune de Lyon une somme de 700 euros chacune à verser aux requérantes sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la cour :
I - Par une requête enregistrée sous le n° 23LY01082 le 28 mars 2023 la société Colas, représentée par la SCP Ducrot Associés " DPA ", agissant par Me Ducrot, demande à la cour :
1°) de réformer le jugement n° 2108166 du 2 février 2023 du tribunal administratif de Lyon en tant qu'il l'a condamnée à garantir la commune de Lyon à hauteur d'un tiers des condamnations prononcées à l'encontre de cette dernière et a mis à sa charge une somme de 4 453,70 euros au titre des frais d'expertise ;
2°) de rejeter les conclusions à fin d'appel en garantie de la commune de Lyon ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Lyon le versement d'une somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la commune de Lyon n'est pas fondée à rechercher sa responsabilité dès lors que les travaux de réfection des allées du cimetière de Loyasse Nouveau, qu'elle a effectué en 2012 pour le compte de la commune, ont fait l'objet d'une réception sans réserve ;
- c'est à tort que le tribunal a fait droit à la demande de la commune sur le fondement de la responsabilité décennale dès lors que l'entretien des canalisations d'évacuation des eaux pluviales ne lui incombait pas et que la canalisation fendue ne relevait pas du marché qu'elle a conclu ;
- les désordres à l'origine des préjudices des requérantes sont sans lien avec les travaux qu'elle a effectués.
Par un mémoire en défense enregistré le 4 septembre 2024, la ville de Lyon, représentée la SELARL Abeille et Associés agissant par Me Pontier conclut, à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce que la société Colas France soit condamnée à la garantir à hauteur de 50 % des condamnations prononcées à son encontre et, en toute hypothèse, à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la société Colas sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les fuites constatées sur le réseau d'évacuation des eaux traduisent bien un désordre de nature décennale qui est imputable à la société Colas, venue au droit de la société SCREG Sud-Est ;
- en ce qui concerne la canalisation fendue, il résulte de l'expertise que ce sont bien les travaux de réfection de chaussée qui sont à l'origine de ce dommage.
Par ordonnance du 30 septembre 2024, la clôture immédiate de l'instruction a été prononcée en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
II - Par une requête enregistrée sous le n° 23LY01177 le 31 mars 2023 et des mémoires enregistrés les 27 novembre 2023 et 26 septembre 2024, la SCI A... et sœurs, la SARL C... Girard, Mme E... A... et Mme D... C..., représentées par la SELARL Concorde-Droit immobilier, agissant par Me Naz, demandent à la cour :
1°) de réformer le jugement n° 2108166 du 2 février 2023 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) de condamner la ville de Lyon à verser à la SARL C... Girard une somme de 227 577,22 euros, à la SCI A... et Sœurs une somme de 314 037,38 euros, à Mme A... et Mme C... une somme de 1 650 euros chacune au titre de leurs préjudices respectifs et à la SCI A... et Sœurs et à mesdames A... et C... une somme de 10 000 euros au titre de leur préjudice moral ;
3°) de condamner solidairement la ville de Lyon et la société Colas France à leur verser une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Les requérantes soutiennent que :
- le cimetière de Loyasse, contigu à l'immeuble sinistré et dans lequel se situe l'origine des désordres, est un ouvrage public relevant de la Ville de Lyon ;
- les canalisations ayant pour objet l'évacuation des eaux du cimetière sont des accessoires de cet ouvrage public ; le mauvais fonctionnement du système de drainage ou d'évacuation des eaux de ruissellement du cimetière ou sa mauvaise conception sont susceptibles d'engager la responsabilité de la commune en qualité de maître de l'ouvrage ;
- les fissurations traversantes, qui ont été de nature à mettre en péril la solidité de l'immeuble appartenant à la SCI A... et Sœurs, ont pour origine les eaux de ruissellement du cimetière qui convergent vers le bâtiment, le caractère fuyard du réseau d'évacuation des eaux situé le long du bâtiment et sous le cimetière ainsi que la circulation des eaux souterraines du cimetière qui provoquent des affaissements de sol ;
- la ville de Lyon doit être considérée comme intégralement responsable des préjudices subis ;
- aucune faute ne saurait leur être imputée dans la réalisation des dommages dès lors qu'un cabinet d'études structures a été sollicité en 2012 et que des travaux de ravalement de façades et de reprise des fissures ont été effectués en 2015 ;
- la SCI A... et Sœurs est fondée à demander une indemnisation de 160 512 euros au titre des travaux de remise en état de l'immeuble, une somme de 143 525,38 euros au titre des travaux de rénovation de l'intérieur de l'immeuble et une somme de 10 000 euros au titre des frais de relogement de Mme C... pendant la durée des travaux ;
- la SARL C... Girard est fondée à demander une somme de 64 164 euros au titre des travaux de conservation, une somme de 15 279 euros au titre des frais engagés pour la mission d'audit et de conception des travaux de reprise de l'immeuble, une somme de 9 084,66 euros au titre des frais engagés pour le remplacement de la porte de l'immeuble, une somme de 444,09 euros au titre des frais d'huissier, une somme de 3 365,47 euros au titre des frais financiers résultant de l'emprunt contracté en vue de la réalisation des travaux, une somme de 30 240 euros au titre des frais de déménagement et de stockage des meubles pendant la durée des travaux de reprise, une somme de 100 000 euros au titre des frais fixes liés à la fermeture du magasin pendant la durée de ces travaux et une somme de 5 000 euros au titre de son préjudice de jouissance ;
- Mesdames C... et A... sont fondées à demander une somme de 1 650 euros chacune au titre de leur préjudice de jouissance ;
- la SCI A... et Sœurs et Mesdames C... et A... ont subi un préjudice moral qui pourra être évalué à la somme de 10 000 euros.
Par des mémoires enregistrés les 31 juillet 2023, 26 février, 7 mars et 27 septembre 2024, la société Colas France, représentée par la SCP Ducrot Associés " DPA ", agissant par Me Ducrot, demande à la cour, par la voie de l'appel provoqué :
1°) de réformer le jugement n° 2108166 du 2 février 2023 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) de rejeter les conclusions présentées à son encontre ;
3°) de mettre à la charge de la SCI A... et sœurs, de la SARL C... Girard, de Mme A... et de Mme C... le versement d'une somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la commune de Lyon n'est pas fondée à rechercher sa responsabilité dès lors que les travaux de réfection des allées du cimetière de Loyasse Nouveau, qu'elle a effectués pour le compte de la commune en 2012, ont fait l'objet d'une réception sans réserve ;
- c'est à tort que le tribunal a fait droit à la demande de la commune de Lyon sur le fondement de la responsabilité décennale dès lors que l'entretien des canalisations d'évacuation des eaux pluviales ne lui incombait pas, que la canalisation fendue ne relevait pas du marché qu'elle a conclu et, qu'en outre, les critères permettant l'engagement de la responsabilité décennale du constructeur ne sont pas remplis ;
- les désordres à l'origine des préjudices des requérantes sont sans lien avec les travaux qu'elle a effectués.
Par un mémoire en défense enregistré le 4 septembre 2024, la ville de Lyon, représentée la SELARL Abeille et Associés agissant par Me Pontier conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce que les indemnisations soient réduites à de plus justes proportions et à ce que la société Colas France soit condamnée à la garantir à hauteur de 50 % des condamnations prononcées à son encontre. Elle sollicite en outre, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, qu'une somme de 2 000 euros soient mises à la charge des requérantes.
Elle soutient que :
- des travaux de réparations des réseaux du cimetière ont été réalisés par ses soins et se sont achevés le 3 décembre 2021 ; le local commercial et les logements de l'immeuble étaient parfaitement fonctionnel durant la réalisation de ces travaux qui ne mettaient pas l'immeuble en péril ;
- la part des dommages résultant de la circulation des eaux souterraines ne saurait lui être imputable ;
- les requérantes, en n'entreprenant pas de travaux de remise en état de l'immeuble après 2012, date à laquelle des fissures avaient déjà été constatées tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'immeuble, ont commis une faute ayant concouru à la réalisation des dommages ; la part des dommages imputable à cette faute pourra être évaluée à 20 % ;
- les travaux conservatoires réalisés en urgence par la société Freyssinet, qui n'ont pas été retenus par l'expert, ne sauraient être pris en compte pour l'évaluation des préjudices ; au demeurant ils ont été réalisés par le preneur auquel il appartient d'en demander le remboursement à la SCI A... ;
- les frais relatifs à la mission d'audit et de maitrise d'œuvre pour identifier l'origine des désordres n'ont pas été retenus par l'expert ; il n'est pas établi qu'elle revêtait une réelle utilité ; la demande présentée à ce titre devra être rejetée ;
- s'agissant des travaux de rénovation de l'intérieur de l'immeuble, l'expert a indiqué qu'ils devraient rester à la charge des requérantes compte tenu de l'état de vétusté des lieux ; la demande présentée à ce titre sera également rejetée ;
- les frais d'huissier, dont l'utilité n'est pas établie, ne sauraient être mis à la charge de la commune ;
- les demandes présentées au titre d'un préjudice de jouissance seront écartées ;
- les frais financiers résultant de l'emprunt contracté par la société C... Girard ne pourront être pris en compte ;
- la réalité du préjudice moral dont il est demandé réparation n'est pas établie ;
- les frais de stockage, frais de relogement ou frais fixes durant la période des travaux ne sont pas en lien avec les dommages imputables à la commune ; les demandes présentées à ce titre seront rejetées ; en tout état de cause, la réalité des préjudices invoqués à ce titre n'est pas établie ;
- les fuites dans le réseau d'évacuation des eaux traduisent un désordre de nature décennale qui est imputable à la société Colas, venue au droit de la société SCREG Sud-Est, et en ce qui concerne la canalisation fendue, il résulte de l'expertise que ce sont bien les travaux de réfection de chaussée qui sont à l'origine de ce dommage ; par suite la société Colas devra être condamnée à la garantir des sommes qui seront mises à sa charge à hauteur de 50 %.
Par ordonnance du 30 septembre 2024, la clôture immédiate de l'instruction a été prononcée en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vergnaud, première conseillère,
- les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,
- et les observations de Me Clerc, représentant la Société Colas France et celles de Me Rouxel, représentant la ville de Lyon.
Considérant ce qui suit :
1. La SCI A... et Sœurs est nue-propriétaire d'un immeuble datant du XIXème siècle situé 42-46-48 rue Cardinal Gerlier à Lyon. Cet immeuble est composé de deux volumes de hauteur distincte comportant des locaux commerciaux au rez-de-chaussée, des locaux à usage d'habitation à l'étage et des combles. L'arrière de l'immeuble est immédiatement bordé par le cimetière de Loyasse. Par un bail en date du 19 juin 2018, Mme D... C..., en qualité d'usufruitière, a loué cet immeuble à la société Henriot-Girard qui exploite un commerce de vente de fleurs, d'articles funéraires, d'horticulture, de compositions florales et de nettoyage de sépultures. Les locaux à usage d'habitation sont occupés par Mme D... C... et sa fille, Mme E... A.... En janvier 2020, les occupants des locaux, constatant l'existence d'importantes fissures affectant l'intérieur comme l'extérieur de l'ensemble du bâtiment, ont alerté la ville de Lyon. A la suite du dépôt de deux rapports d'expertise, dans le cadre d'une expertise-constat et d'une expertise menée dans le cadre d'une procédure de péril toutes deux ordonnées par le tribunal administratif de Lyon, le maire de la ville de Lyon a ordonné l'évacuation du bâtiment par un arrêté du 19 mars 2020 et le président de la métropole de Lyon a pris un arrêté de péril imminent le 23 mars 2020. La mainlevée de l'arrêté de péril a été prononcée le 17 avril 2020, après réalisation des travaux de mise en sécurité du bâtiment. Par une ordonnance du 18 mai 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a ordonné une expertise afin de rechercher l'origine des désordres, de décrire les travaux de nature à les faire cesser et d'évaluer les préjudices en résultant. Par une ordonnance du 13 octobre 2020, les opérations d'expertise ont été étendues à la société Colas Rhône-Alpes-Auvergne, venant aux droits de la société SCREG Sud-Est. L'expert a déposé son rapport le 19 avril 2021 et l'a complété, à la demande du tribunal administratif de Lyon, le 24 juin 2021. Par des courriers des 17 juin et 29 juillet 2021, la société A... et sœurs, la société C... Girard, Mme E... A... et Mme D... C... ont adressé à la commune de Lyon une réclamation visant à l'indemnisation de leurs préjudices respectifs. Par une ordonnance du 31 janvier 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a condamné la commune de Lyon à verser une provision d'un montant de 143 600 euros à la société A... et sœurs. Par un jugement du 2 février 2023, le tribunal administratif de Lyon a condamné la commune de Lyon à verser à la société A... et sœurs la somme de de 144 824,42 euros, à la société C... Girard la somme de 32 582 euros et à Mmes A... et C... la somme de 2 000 euros chacune, a condamné la société Colas France à garantir la commune de Lyon à hauteur d'un tiers des condamnations prononcées à son encontre, a mis les frais d'expertise à la charge de la commune de Lyon pour un montant de 8 907,40 euros et de la société Colas France pour un montant de 4 453,70 euros.
2. Par une requête enregistrée sous le n° 23LY01082, la société Colas France demande à la cour de réformer le jugement n° 2108166 du 2 février 2023 du tribunal administratif de Lyon en tant qu'il l'a condamné à garantir la commune de Lyon à hauteur d'un tiers des condamnations prononcées à l'encontre de cette dernière et en tant qu'il a mis à sa charge une somme de 4 453,70 euros au titre des frais d'expertise.
3. Par une requête enregistrée sous le n° 23LY01177, la société A... et sœurs, la société C... Girard, Mme E... A... et Mme D... C... demandent à la cour de réformer le jugement n° 2108166 du 2 février 2023 du tribunal administratif de Lyon en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de leurs demandes.
4. Ces deux requêtes concernant les mêmes parties et présentant à juger des questions communes, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.
Sur le principe et l'étendue de la responsabilité :
5. Le maître de l'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement. Il ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure. Ces tiers sont tenus de démontrer le caractère grave et spécial du préjudice qu'ils subissent lorsque le dommage est inhérent à l'existence même de l'ouvrage public ou à son fonctionnement. Dans le cas d'un dommage causé à un immeuble, la fragilité ou la vulnérabilité de celui-ci ne peuvent être prises en compte pour atténuer la responsabilité du maître de l'ouvrage, sauf lorsqu'elles sont elles-mêmes imputables à une faute de la victime. En dehors de cette hypothèse, de tels éléments ne peuvent être retenus que pour évaluer le montant du préjudice indemnisable.
6. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du 19 avril 2021 que les eaux de ruissèlement du cimetière de Loyasse convergent sur l'allée principale du cimetière longeant l'arrière de l'immeuble situé 42-46-48 rue Cardinal Gerlier dont le caniveau est en très mauvais état et laisse pénétrer l'eau. Des fuites ont par ailleurs été constatées sur le réseau d'assainissement au niveau d'une canalisation affectée d'une fente de trois mètres de longueur et située à deux mètres de la façade arrière du bâtiment et au niveau des tampons de raccordements, le raccord avec la canalisation étant notamment cassé au niveau du 42 rue cardinal Gerlier. Enfin, une canalisation abandonnée de ce réseau laisse un large trou par lequel l'eau de pluie s'infiltre dans le sol et des circulations d'eaux souterraines sont présentent sous le bâtiment. L'expert expose que l'ensemble de ces phénomènes participent de façon cumulative à la déstabilisation des sols supports des fondations qui, par tassement différentiel, affecte la structure de l'immeuble en provoquant des fissures traversantes, typiques d'un cisaillement.
7. La commune de Lyon, qui ne conteste pas être en charge, d'une part, de la gestion du cimetière de Loyasse et, d'autre part, du réseau d'assainissement, doit par suite être regardée comme responsable des dommages résultant du défaut de conception et d'entretien du réseau de collecte des eaux de ruissèlement du cimetière et du caractère fuyard et non entretenu du réseau d'assainissement. En revanche, elle ne peut être regardée comme responsable de la part des dommages résultant de la circulation naturelle des eaux souterraines que l'expert a évaluée, dans son rapport complémentaire du 24 juin 2021, à 20 %, ce taux n'étant pas sérieusement contesté.
8. Il résulte de l'instruction, et notamment du procès-verbal de constat du 27 février 2012 réalisé à la demande la société SCREG Sud-Est, effectuant à cette époque des travaux dans le cimetière pour le compte de la commune, que de nombreuses et profondes fissures affectaient déjà le bâtiment à cette date tant à l'extérieur, notamment sur la façade côté cimetière présentant des lézardes équipées de témoins allant du sol jusque sous la toiture, qu'à l'intérieur, notamment dans le logement du 1er étage. Il résulte des déclarations de Mme D... C... le jour de ce constat que ces fissures existaient déjà depuis plusieurs années et n'ont pas été aggravées par les travaux réalisés en 2012. Le rapport d'expertise du 19 avril 2021 relève qu'aucune démarche n'a été engagée par les requérantes pour rechercher l'origine de désordres affectant l'immeuble depuis de nombreuses années et y remédier. Si les requérantes font valoir qu'elles ont fait réaliser une étude de structures en mars 2012, visant notamment à préconiser les réparations nécessaires, puis des travaux en 2015, il résulte des pièces produites, notamment du décompte général et définitif de la société Ranc et Genevois du 26 novembre 2015 d'un montant total de 55 868,90 euros HT, que les travaux effectués ont principalement concernés la réfection des enduits de façades et le traitement des joints entre les deux parties du bâtiment, l'agrafage des fissures existantes ne représentant qu'un sous total de 4 258,60 euros HT. Ces derniers travaux, très limités, n'ont dès lors pas été de nature à remédier aux désordres qui se sont par la suite aggravés. Dans ces circonstances, le fait pour les requérantes d'avoir attendu que l'immeuble soit dans un état de dégradation tel qu'il soit visé par un arrêté de péril imminent pour faire procéder à une étude permettant de déterminer l'origine des désordres et y pallier doit être regardé comme constituant une faute de négligence qui a contribué à aggraver l'état de l'immeuble et qui est ainsi de nature à exonérer partiellement la commune de Lyon de sa responsabilité. Dans son rapport complémentaire du 24 juin 2021, l'expert a évalué la part imputable à la faute des requérantes consistant en un défaut de suivi et d'entretien de l'immeuble dans l'aggravation des dommages à 15 %. Dans les circonstances, il y a lieu de retenir que la commune de Lyon est exonérée de sa responsabilité dans la même proportion.
9. Il résulte de ce qui précède sur les différents facteurs ayant contribué à la dégradation de l'immeuble que la commune de Lyon doit être regardée comme responsable des désordres l'affectant à hauteur de 68 %.
Sur les demandes indemnitaires :
En ce qui concerne les travaux de sécurisation de l'immeuble :
10. Il résulte de l'instruction que, suite à l'expertise du 20 mars 2020 ordonnée par le juge des référé du tribunal administratif de Lyon à la demande de la communauté d'agglomération de Lyon constatant l'état de péril de l'immeuble situé 42-46-48 rue Cardinal Gerlier, le président de la communauté d'agglomération a pris un arrêté de péril imminent le 23 mars 2020 ordonnant notamment à la société A... et Sœurs de faire réaliser, sous la conduite d'un professionnel qualifié, les travaux de mise en sécurité du bâtiment. Ces travaux, à savoir sécuriser les façades fissurées par la mise en place de renforts puis stabiliser le sol par injections, ont été réalisés en avril 2020 par la société Freyssinet. La réalisation de ces travaux a conduit le président de la communauté d'agglomération de Lyon à prononcer la mainlevée de l'arrêté de péril par une décision du 17 avril 2020. Par suite, ces travaux, dont l'utilité n'est pas contestable, présentent un lien de causalité direct avec les dommages quand bien même ils n'ont pas été pris en compte par l'expert pour l'évaluation des préjudices. La SARL C... Girard, locataire de l'immeuble et qui est assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, justifie de la prise en charge du coût de ces travaux, à hauteur d'un montant total de 59 240 euros HT, par la production de deux factures établies à son nom par la société Freyssinet les 29 et 31 mai 2020 . Elle est par suite fondée à en demander le remboursement. Compte tenue de sa part de responsabilité dans la réalisation des dommages, telle que définie au point 9 du présent arrêt, une somme de 40 283,20 euros sera mise à la charge de la commune de Lyon à ce titre.
11. Il résulte de l'instruction que le diagnostic préalable à ces travaux, leur conception et leur suivi ont été effectués par la société Moeris sur la base d'un rapport expertal réalisé en mars 2020 par le cabinet d'expertise géotechnique Michel Brangier. L'utilité de ces études, au regard de la situation de l'immeuble, ne saurait être sérieusement contestée. Selon les factures établies les 11 mars et 22 avril 2020, le montant des honoraires correspondant s'établit à un total de 8 832,50 euros HT La SARL C... Girard justifie avoir pris en charge ces honoraires par la production de factures rectificatives établies à son nom. Dans ces conditions, et compte tenu de la part de responsabilité de la commune de Lyon dans la réalisation des dommages, la SARL C... a droit au remboursement par la commune de Lyon d'une somme de 6 006,10 euros à ce titre.
12. La SARL Henriot-Girard fait valoir qu'elle a dû contracter un emprunt bancaire de 50 000 euros pour financer les travaux urgents de mise en sécurité du bâtiment et demande le remboursement des frais financiers relatifs à cet emprunt. Il résulte des pièces produites à l'instance que le contrat de prêt, souscrit par la SARL le 18 mars 2020, mentionne que le financement consenti a pour objet l'" Aménagement de bâtiment à usage professionnel - Travaux Bâtiment à usage professionnel ". Compte tenu de son objet et de la date à laquelle il a été souscrit, cet emprunt doit être regardé comme ayant été contracté pour contribuer au financement des travaux de mise en sécurité du bâtiment d'un montant de 65 164 euros TTC. Dans ces conditions, la SARL est fondée à demander le remboursement des frais financiers en résultant qui s'élèvent à un montant de 3 059,47 euros selon le tableau d'amortissement édité le 22 juillet 2020. Compte tenu de la part de responsabilité de la commune de Lyon dans la réalisation des dommages, une somme de 2 080,43 euros sera mise à sa charge à ce titre.
En ce qui concerne les travaux de réparation et de rénovation définitifs :
13. Il résulte de l'instruction que l'étude relative à la conception de ces travaux a été effectuée par la société Moeris pour un montant de 3 900 euros HT selon la note d'honoraire établie le 20 avril 2020. Il résulte de l'instruction que cette étude était imposée par les dispositions de l'arrêté de péril du 23 mars 2020. Le lien de causalité avec les dommages comme l'utilité de cette étude ne sauraient donc être sérieusement contestés. La SARL C... Girard justifie avoir pris en charge ces honoraires par la production de factures rectificatives établies à son nom. Dans ces conditions, et compte tenu de la part de responsabilité de la commune de Lyon dans la réalisation des dommages, la SARL C... a droit au remboursement par la commune de Lyon d'une somme de 2 652 euros à ce titre.
14. Il résulte de l'instruction, notamment du descriptif des travaux établis par la société Moeris et des conclusions de l'expertise du 19 avril 2021, que les mesures destinées à remédier aux désordres nécessitent des travaux de gros œuvre, comprenant notamment le traitement des sols sous fondations, le renforcement des maçonneries, le traitement des fissures extérieures et intérieures et l'installation d'un dallage en béton armé, ont été évalués à un montant total de 160 512 euros TTC selon le devis établi par l'entreprise Freyssinet le 23 juin 2020, qui n'est pas sérieusement contesté. La nature de ces travaux et leur utilité pour assurer la stabilité de l'immeuble et remédier définitivement aux désordres ne sont pas davantage sérieusement contestés. Si la SCI A... et Sœurs, nue propriétaire en charge de ces travaux et dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, demande à ce que cette somme soit actualisée par application du taux de l'indice BT01, elle n'établit ni même n'allègue ne pas avoir été en mesure de réaliser les travaux de réparation de l'immeuble depuis le dépôt du rapport d'expertise et notamment depuis la réalisation, par la commune, des travaux de réparations des réseaux d'assainissement qui ont été achevés le 3 décembre 2021, alors, en outre, qu'elle a reçu le versement d'une provision d'un montant de 143 600 euros à cet effet par une ordonnance du juge des référé du tribunal administratif de Lyon du 31 janvier 2022. Dans ces conditions, ses conclusions tendant à ce que le coût de ces travaux soit actualisé doivent, être rejetées. Compte tenu de la part de responsabilité imputable à la commune de Lyon dans la survenance des dommages, une somme de 109 148,16 euros sera mise à sa charge au bénéfice de la société A... et Sœurs au titre de ce chef de préjudice.
15. La société A... et Sœurs sollicite également l'indemnisation des travaux d'embellissement, comprenant la réfection du local commercial et du local d'habitation, pour un montant total de 143 525,38 euros sur la base d'un devis établi par l'entreprise Reno Pro le 24 juin 2020. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que l'intérieur de l'immeuble, dégradé depuis une date antérieure à 2012, est dans un état de vétusté avancée. Dans ces conditions, il convient en l'espèce d'appliquer au coût des travaux un coefficient de vétusté qui doit être évalué à hauteur de 50 %. Si la SCI A... et Sœurs, nu propriétaire en charge de ces travaux, demande à ce que cette somme soit actualisée par application du taux de l'indice BT01, elle n'établit ni même n'allègue ne pas avoir été en mesure de réaliser ces travaux depuis le dépôt du rapport d'expertise. Dans ces conditions, sa demande d'actualisation doit être rejetée. Il s'ensuit que, compte tenu du taux de vétusté de 50 %, le préjudice de la société A... et Sœurs doit être fixé à la somme de 71 762,90 euros. Compte tenu de la part de responsabilité imputable à la commune de Lyon dans la survenance des dommages, une somme de 48 798,77 euros sera mise à sa charge au bénéfice de la société A... et Sœurs au titre de ce chef de préjudice.
En ce qui concerne les frais divers :
16. La société C... Girard indique que la porte de l'immeuble, précédemment changée en avril 2014, devra être remplacée après les travaux de réparation définitive qui impliquent le remplacement des châssis. Elle demande le remboursement des frais de changement de la porte qui s'élèvent à un montant de 6 211,40 euros HT au regard de la facture acquittée du 23 avril 2014. Elle sollicite également le remboursement des frais de pose d'un verrou et d'une serrure, effectuée en mai 2022, la déformation du châssis et l'affaissement de la porte actuelle du fait des désordres ayant imposé le remplacement des dispositifs de fermeture et de sécurisation de l'immeuble. Elle produit à cet égard deux factures d'intervention d'un serrurier de mai 2022 pour un montant total de 986,68 euros HT. Le lien de causalité entre les dommages et le changement des serrures et le remplacement de la porte après les travaux n'étant pas contesté, le préjudice subi de ce fait sera évalué à la somme totale de 7 198,08 euros HT. Compte tenu de la part de responsabilité imputable à la commune de Lyon dans la survenance des dommages, une somme de 4 894,69 euros sera mise à sa charge au bénéfice de la société C... et Girard au titre de ce chef de préjudice.
17. En revanche si la société C... Girard sollicite le remboursement d'une somme de 444,09 euros correspondant aux frais d'un constat d'huissier effectué à sa demande le 8 juillet 2020 pour constater la présence, à la suite d'un orage, d'un trou dans la chaussée au niveau du 42 rue Cardinal Gerlier, l'utilité d'un tel constat, sans lien avec les désordres qui ont été évoqués, n'est pas établie dans le cadre de la présente instance. Par suite, la demande présentée à ce titre doit être rejetée.
En ce qui concerne les autres préjudices :
S'agissant de la société C... Girard :
18. Il résulte de l'instruction que la société C... Girard n'a pas pu poursuivre son activité du 23 mars 2020 au 17 avril 2020, période durant laquelle l'immeuble, visé par un arrêté de péril imminent, a été totalement évacué. Le préjudice de jouissance en résultant pour la société, qui n'a pu poursuivre son activité dans les locaux commerciaux de l'immeuble pendant une période de près d'un mois sera évalué, en l'absence d'éléments établissant un préjudice supérieur, à 1 000 euros. Compte tenu de la part de responsabilité imputable à la commune de Lyon dans la survenance des dommages, une somme de 680 euros sera mise à sa charge à ce titre.
19. La société C... Girard indique qu'elle devra assumer des frais fixes pendant la période de fermeture du commerce durant la réalisation des travaux de réparation et de rénovation définitive, dont la durée a été estimée à quatre mois. Cependant, la seule attestation de son expert-comptable, aux termes de laquelle une période de quatre mois représente un coût fixe d'un montant de 100 000 euros sur un montant annuel de 297 622 euros au regard des comptes de résultats 2019, n'est pas suffisante pour attester de la réalité d'un tel préjudice qui, en outre, ne présente pas, à ce jour, un caractère certain. La demande présentée à ce titre doit donc être rejetée.
20. De même les frais de déménagement et de garde meubles dont la société C... sollicite le remboursement ne présente pas à ce jour un caractère certain. En outre, il ressort des devis produits, qui ont été établis le 18 mars 2021 et font état d'un montant de 21 500 euros HT pour le déménagement et de 1 100 euros par mois pour le garde meubles, que les biens meubles concernés sont ceux des locaux d'habitation et non ceux des locaux commerciaux. La demande présentée à ce titre par la société Henriot-Girard doit donc être rejetée.
S'agissant de la société A... et Sœurs :
21. La société A... sollicite un montant de 10 000 euros au titre des frais de relogement qu'elle devra exposer au profit de Mme C... durant la période de travaux définitifs, d'une durée prévisible de quatre mois. Le caractère réel et certain de ce préjudice n'est cependant pas établi à la date du présent arrêt. Par suite, la demande présentée à ce titre doit être rejetée.
22. Par ailleurs, la société A... et sœurs n'est pas fondée, en qualité de personne morale nu propriétaire de l'immeuble, à se prévaloir d'un préjudice moral.
S'agissant de Mme C... et de Mme A... :
23. Il résulte de l'instruction que Mme C... et Mme A... n'ont pu occuper les locaux d'habitation de l'immeuble du 23 mars 2020 au 17 avril 2020, période durant laquelle l'immeuble, visé par un arrêté de péril imminent, a été totalement évacué. Le préjudice de jouissance en résultant pour chacune d'elles pourra être évalué à la somme de 1 000 euros.
24. Mme C... et Mme A... se prévalent en outre du préjudice moral résultant pour elles du stress provoqué par les désordres affectant leur immeuble, des craintes qu'elles ont éprouvées et de leur obligation d'évacuer les lieux. Dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation de leur préjudice respectif en l'évaluant à la somme de 1 000 euros chacune.
25. Compte tenu de la part de responsabilité imputable à la commune de Lyon dans la survenance des dommages, cette dernière versera à Mme C... et à Mme A... une somme de 1 360 euros chacune au titre de leur préjudice de jouissance et de leur préjudice moral respectifs.
26. Il résulte de tout ce qui précède que la société C... Girard et la société A... et sœurs sont uniquement fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon n'a pas porté les sommes que la ville de Lyon a été condamnée à leur verser aux montants respectifs de 56 596,42 euros pour la société C... Girard et 157 946,93 euros de laquelle sera déduite la provision de 143 600 euros qui lui a été versée en exécution de l'ordonnance du juge des référé du tribunal administratif de Lyon du 31 janvier 2022 pour la société A... et sœurs. La ville de Lyon est en revanche uniquement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le même jugement, le tribunal n'a pas limité les sommes qu'elle a été condamnée à verser à Mme C... et à Mme A... à 1 360 euros chacune.
Sur les conclusions d'appel en garantie de la commune de Lyon :
27. En premier lieu, la fin des rapports contractuels entre le maître d'ouvrage et l'entrepreneur, consécutive à la réception sans réserve d'un marché de travaux publics, fait obstacle à ce que, sauf clause contractuelle contraire, l'entrepreneur soit ultérieurement appelé en garantie par le maître d'ouvrage pour des dommages dont un tiers demande réparation à ce dernier, alors même que ces dommages n'étaient ni apparents ni connus à la date de la réception. Il n'en irait autrement que dans le cas où la réception n'aurait été acquise à l'entrepreneur qu'à la suite de manœuvres frauduleuses ou dolosives de sa part. Toutefois, si le dommage subi par le tiers trouve directement son origine dans des désordres affectant l'ouvrage objet du marché, la responsabilité de l'entrepreneur envers le maître d'ouvrage peut être recherchée sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs.
28. Il est constant que la société SCREG Sud-est, au droit de laquelle est venue la société Colas France, a réalisé, en 2012, des travaux de réfection des allées du cimetière " Loyasse Nouveau " sous la maitrise d'ouvrage de la commune de Lyon, dans le cadre d'un marché public notifié le 26 septembre 2011. Il est également constant que ces travaux ont donné lieu à une réception sans réserve à compter du 19 juin 2012 ainsi qu'en atteste le procès-verbal de réception signé le 25 juin 2012 par le représentant du maitre de l'ouvrage et notifié à la société SCREG Sud-est le 29 juin suivant. Il n'est pas allégué par la commune de Lyon que cette réception aurait été acquise à la suite de manœuvres frauduleuses ou dolosives de la part de la société SCREG Sud-est. Dans ces conditions, la commune de Lyon n'est pas fondée à appeler en garantie la société Colas, venue aux droits de la société SCREG Sud-Est, sur le fondement de la responsabilité contractuelle.
29. En second lieu, la commune invoque également la responsabilité décennale du constructeur. Or, il résulte de l'instruction, notamment du décompte général et définitif du 29 mars 2012, que les travaux réalisés par la société SCREG Sud-Est au cimetière de Loyasse comportaient seulement la démolition d'enrobé avec décapage sur 30 cm de profondeur, la dépose de caniveaux en éléments pavés, la pose d'un nouvel enrobé, y compris couche de fondation, la fourniture et la pose de bordure et de caniveau béton, ainsi que la remise à la côte de tampons et de regards. Par ailleurs, d'une part il résulte de l'instruction, notamment du procès-verbal de constat du 27 février 2012 réalisé à la demande la société SCREG Sud-Est, que de nombreuses et profondes fissures affectaient déjà le bâtiment des requérantes à cette date tant à l'extérieur, notamment sur la façade côté cimetière, qu'à l'intérieur. D'autre part, il ne résulte pas de l'instruction que les pentes des allées du cimetières, dont les eaux de ruissellement convergent vers l'allée longeant l'arrière de l'immeuble, ce qui résulte d'un défaut de conception initiale de l'ouvrage, extérieur à l'objet du marché conclu avec la société SCREG Sud-Est, auraient été concernées ou modifiées par ces travaux. Il ne résulte pas non plus de l'instruction que la qualité des enrobés ou des caniveaux mis en place par la société SCREG Sud-Est soit en cause dans l'aggravation des dommages affectant l'immeuble ni que cette société aurait été amenée à intervenir sur les canalisations du réseau d'assainissement. Enfin, la mise à la côte des tampons et regards a seulement consisté en leur remise à niveau en surface après réalisation du nouveau revêtement. Par suite, il n'est pas établi en l'espèce que l'aggravation des dommages en cause soit susceptible de trouver son origine dans l'exécution du marché conclu entre la commune de Lyon et la société SCREG Sud-Est. Dans ces conditions, la commune de Lyon n'est pas fondée à rechercher la responsabilité de la société Colas France au titre de la garantie décennale.
30. Il résulte de ce qui précède que la société Colas France est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a accueilli les conclusions à fin d'appel en garantie formées à son encontre par la commune de Lyon.
Sur les frais d'expertise :
31. Au regard de ce qui précède, les frais et honoraires de l'expert, taxés et liquidés à la somme de 2 035,88 euros pour le référé-constat par une ordonnance du président du tribunal administratif de Lyon du 16 avril 2020, et à la somme de 11 325,22 euros pour l'expertise judiciaire par une ordonnance de la présidente du tribunal administratif de Lyon du 1er juillet 2021 doivent être mis à la charge de la commune de Lyon.
Sur les frais d'instance :
32. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire droit aux conclusions présentées par les requérantes sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en mettant à la charge de la commune de Lyon, tenue aux dépens, une somme de 2 000 euros. Il y a également lieu de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement par la société Colas France dans l'instance n° 23LY01082 en mettant à la charge de la commune de Lyon une somme de 1 500 euros. En revanche, il y lieu dans les circonstances de l'espèce de rejeter les demandes de frais d'instance présentée par la société Colas France dans l'instance n° 23LY01177 ainsi que les demandes de frais d'instance présentées par la commune de Lyon, partie tenue aux dépens.
DECIDE :
Article 1er : La commune de Lyon est condamnée à verser à la société C... Girard une somme totale de 56 596,42 euros, à la société A... et sœurs une somme totale de 157 946,93 euros de laquelle sera déduite la provision de 143 600 euros qui lui a été versée en exécution de l'ordonnance du juge des référé du tribunal administratif de Lyon du 31 janvier 2022 ainsi qu'une somme de 1 360 euros chacune à Mme C... et à Mme A....
Article 2 : Les frais et honoraires de l'expert, taxés et liquidés à la somme de 2 035,88 euros pour le référé-constat et à la somme de 11 325,22 euros pour l'expertise judiciaire, sont mis à la charge de la commune de Lyon.
Article 3 : Le jugement n° 2108166 du 2 février 2023 du tribunal administratif de Lyon est réformé en tant qu'il est contraire au présent arrêt.
Article 4 : La commune de Lyon versera, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 2 000 euros à la société A... et sœurs et autres et une somme de 1 500 euros à la société Colas France.
Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société A... et sœurs, à la société C... Girard, à Mme E... A..., à Mme D... C..., à la commune de Lyon et à la société Colas France.
Copie en sera adressée à M. Duc B..., expert.
Délibéré après l'audience du 18 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Stillmunkes, président de la formation de jugement,
M. Gros, premier conseiller,
Mme Vergnaud, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2024.
La rapporteure,
E. Vergnaud
Le président,
H. Stillmunkes
La greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne à la préfète du Rhône, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
2
N° 23LY01082-23LY01177