Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. CNNNNNNNN... NNNNNNNN..., M. ENNNNNNNN... NNNNNNNN..., Mme FNNNNNNNN... NNNNNNNN..., Mme DNNNNNNNN... NNNNNNNN..., M. KNNNNNNNN... NNNNNNNN..., M. HNNNNNNNN... NNNNNNNN... et M. GNNNNNNNN... NNNNNNNN... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler le courrier du directeur général de l'Agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes du 20 novembre 2019 adressé aux responsables des entreprises de transports sanitaires de la région et relatif au recours aux services d'ambulanciers autoentrepreneurs pour assurer des prestations de transport sanitaire, ainsi que d'annuler la décision implicite de rejet du recours gracieux présenté par M. MNNNNNNNN....
Par un jugement n° 2001452 du 24 mars 2023, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 mai 2023, M. CNNNNNNNN... MNNNNNNNN..., Mme DNNNNNNNN... INNNNNNNN..., M. LNNNNNNNN... et M. GNNNNNNNN... ANNNNNNNN..., représentés par la SELARL Leximm Avocats agissant par Me Rigoulot, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2001452 du 24 mars 2023 du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) d'annuler le courrier du directeur général de l'Agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes du 20 novembre 2019 adressé aux responsables des entreprises de transports sanitaires de la région et relatif au recours aux services d'ambulanciers autoentrepreneurs pour assurer des prestations de transport sanitaire et la décision implicite de rejet du recours gracieux présenté par M. NNNNNNNNN... ;
3°) de mettre à la charge de l'Agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le courrier du 20 novembre 2019 du directeur général de l'Agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes adressé aux sociétés de transports sanitaires de la région Auvergne Rhône-Alpes, qui vise à imposer auxdites sociétés de cesser de faire appel aux ambulanciers indépendants afin de composer les équipages de leurs véhicules de transport sanitaire leur fait directement grief ;
- cette décision a été prise par une autorité incompétente ;
- elle méconnait les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- elle méconnait les dispositions du code de la santé publique, notamment les articles R. 612-7 et R. 612-10 de ce code, en ce qu'elle considère que les transports sanitaires ne peuvent être exercés que par les salariés des sociétés de transports sanitaires agréées ;
- elle porte une atteinte excessive à la liberté du commerce et de l'industrie ainsi qu'à la liberté d'entreprendre.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 août 2024, l'agence régionale de santé Auvergne Rhône Alpes conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- le courrier contesté a été signé par une autorité disposant d'une délégation de signature à cet effet ;
- ce courrier n'entre pas dans le champ d'application des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- au regard des dispositions de l'article L. 6312-2 du code de la santé publique, c'est à bon droit qu'il a été rappelé aux sociétés de transports sanitaires de la région Auvergne Rhône-Alpes l'interdiction de recours à un acteur qui ne dispose pas d'un agrément pour effectuer des transports sanitaires ;
- l'agence régionale de santé, qui s'est ainsi bornée à rappeler les exigences légales et réglementaires et la doctrine partagée par l'ensemble des autorités administratives compétentes, n'a édicté aucune règle nouvelle ;
- la circonstance selon laquelle d'autres agences régionales de santé auraient une position différente est sans incidence sur la légalité du courrier contesté ;
- le moyen tiré de l'impossibilité d'assurer les gardes légales sans le recours aux services des ambulanciers sous statut d'autoentrepreneur n'est pas fondé ;
- le moyen tiré de ce que le courrier litigieux porterait une atteinte excessive à la liberté d'entreprendre ou à la liberté du commerce et de l'industrie devra être écarté.
Par une ordonnance du 11 juillet 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 septembre 2024 à 16h30.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vergnaud, première conseillère,
- et les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un courrier du 20 novembre 2019, le directeur général de l'Agence régionale de santé Auvergne Rhône-Alpes a indiqué aux responsables des entreprises de transports sanitaires de la région que les conditions dans lesquelles ils sont autorisés à effectuer des transports sanitaires ne leur permettaient de recourir aux services d'un prestataire extérieur autoentrepreneur que pour faire face à un manque de personnel salarié ou un accroissement temporaire d'activité et à la condition que ce prestataire soit lui-même agréé en les informant que des contrôles seraient susceptibles d'être menés par les caisses primaires d'assurance maladie et les organismes de recouvrement des cotisations et contributions sociales. Par un courrier du 12 décembre 2019, M. MNNNNNNNN... a présenté un recours gracieux à l'encontre du courrier du 20 novembre 2024 auquel il n'a pas été répondu. Par le jugement attaqué du 24 mars 2023, dont M. MNNNNNNNN..., Mme INNNNNNNN..., M. BNNNNNNNN... et M. ANNNNNNNN... exerçant la profession d'ambulancier en qualité d'auto-entrepreneur interjettent appel, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le recours pour excès de pouvoir présenté à l'encontre de ce courrier.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Le courrier contesté du 20 novembre 2019 par lequel l'Agence régionale de santé Auvergne Rhône-Alpes a indiqué aux responsables des entreprises de transports sanitaires de la région que les conditions dans lesquelles ils sont autorisés à effectuer des transports sanitaires ne leur permettaient de recourir aux services d'un prestataire extérieur autoentrepreneur que pour faire face à un manque de personnel salarié ou un accroissement temporaire d'activité et à la condition que ce prestataire soit lui-même agréé, doit être regardé comme mettant ces entreprises en demeure de cesser recourir aux ambulanciers sous statut d'autoentrepreneur pour composer leurs équipage de transport sanitaire en dehors des conditions qu'il édicte et annonce des contrôles. Ce courrier présente ainsi le caractère d'un acte susceptible de recours et les requérants, compte tenu de leur statut d'ambulancier autoentrepreneur justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour déférer cet acte au juge de l'excès de pouvoir.
En ce qui concerne les moyens de légalité externe :
3. En premier lieu, l'acte attaqué du 20 novembre 2019 a été signé par M. JNNNNNNNN..., directeur de l'offre de soins à l'Agence régionale de santé Auvergne Rhône-Alpes, en vertu d'une délégation de signature du directeur de l'agence régionale de santé du 30 octobre 2019, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la région du 31 octobre suivant. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté.
4. En second lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ".
5. L'acte contesté, qui vise à rappeler aux sociétés de transports sanitaires les conditions d'exécution des prestations de transport sanitaire au regard de leur agrément, notamment les conditions permettant de recourir aux services de prestataires extérieurs autoentrepreneurs, n'entre pas dans le champ d'application des dispositions précitées de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire qu'elles instituent doit être écarté comme inopérant.
En ce qui concerne les moyens de légalité interne :
6. Aux termes de l'article L. 6312-2 du code de la santé publique : " Toute personne effectuant un transport sanitaire doit avoir été préalablement agréée par le directeur général de l'agence régionale de santé. (...) ". Aux termes de l'article R. 6312-1 du même code : " L'agrément nécessaire au transport sanitaire est délivré par le directeur général de l'agence régionale de santé (...) ". Aux termes de l'article R. 6312-6 de ce code : " L'agrément est délivré aux personnes physiques ou morales qui disposent : / 1° Des personnels nécessaires pour garantir la présence à bord de tout véhicule en service d'un équipage conforme aux normes définies à l'article R. 6312-10 ; 2° De véhicules, appartenant aux catégories A, B, C ou D mentionnées à l'article R. 6312-8, véhicules dont elles ont un usage exclusif. ". Et aux termes de l'article R. 6312-17 du code : " Les personnes titulaires de l'agrément tiennent constamment à jour la liste des membres de leur personnel composant les équipages des véhicules de transport sanitaire, en précisant leur qualification. / Cette liste est adressée annuellement à l'agence régionale de santé de la région dans laquelle les intéressés exercent leur activité. La même agence est avisée sans délai de toute modification de la liste ".
7. En premier lieu, il résulte des dispositions précitées des articles R. 6312-6 et R. 6312-17 du code de la santé publique, que toute entreprise agréée pour l'exercice d'une activité de transport sanitaire doit disposer des personnels nécessaires à la composition des équipages des véhicules de transport sanitaire ainsi que des véhicules nécessaires à cette activité dont elle a l'usage exclusif. Dès lors qu'un ambulancier qui exerce en qualité d'autoentrepreneur dispose d'un statut d'indépendant ne peut être regardé comme membre du personnel d'une entreprise titulaire d'un agrément pour l'exercice de l'activité de transport sanitaire, il ne peut être intégré aux équipages des véhicules de transport sanitaire d'une telle entreprise quand bien même il disposerait des qualifications requises pour être membre d'un équipage au sens des dispositions de l'article R. 6312-7 du code de la santé publique. Au demeurant l'article R. 6312-6 prévoyant un usage exclusif par ces entreprises de véhicules dont elles disposent, s'oppose à la conduite d'un tel véhicule par un ambulancier ayant le statut d'autoentrepreneur indépendant. Par suite, le directeur général de l'Agence régionale de santé Auvergne Rhône Alpes n'a pas fait une inexacte application de cet article en indiquant aux responsables des entreprises de transports sanitaires de la région, par le courrier contesté, que le respect des conditions de l'agrément dont elles disposent impose que les prestations de transports sanitaires effectués sous leur responsabilité soient réalisées soit par leurs salariés, soit par des prestataires extérieurs eux-mêmes agréés. En conséquence, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.
8. En second lieu, dès lors que le courrier contesté vise exclusivement à rappeler aux entreprises de transports sanitaires de la Région Auvergne Rhône-Alpes les conditions dans lesquelles elles peuvent exécuter les prestations pour lesquelles un agrément leur a été délivré dans le cadre de la législation propre au transport sanitaire, il ne porte pas une atteinte excessive à la liberté du commerce et de l'industrie ou à la liberté d'entreprendre.
9. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 24 mars 2023, le tribunal administratif a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête présentée par M. MNNNNNNNN..., Mme INNNNNNNN..., M. BNNNNNNNN... et M. ANNNNNNNN... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. CNNNNNNNN... MNNNNNNNN..., Mme DNNNNNNNN... INNNNNNNN..., M. HNNNNNNNN... BNNNNNNNN..., M. GNNNNNNNN... ANNNNNNNN... et à l'Agence régionale de santé Auvergne Rhône-Alpes.
Délibéré après l'audience du 4 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Stillmunkes, président assesseur,
Mme Vergnaud, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 novembre 2024.
La rapporteure,
E. Vergnaud
Le président,
F. Pourny
La greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne à la ministre de la santé et de l'accès aux soins, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 23LY01705