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05/11/2024 | FRANCE | N°22LY01560

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 1ère chambre, 05 novembre 2024, 22LY01560


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. F... G... et Mme E... C... veuve G... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 26 juin 2019 par lequel le maire de la commune de Val d'Isère ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée par Mme D... ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux formé le 20 août 2019.



Par un jugement n° 1908273 du 22 mars 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.


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Par une requête enregistrée le 19 mai 2022, et des mémoires complémentaires en...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. F... G... et Mme E... C... veuve G... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 26 juin 2019 par lequel le maire de la commune de Val d'Isère ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée par Mme D... ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux formé le 20 août 2019.

Par un jugement n° 1908273 du 22 mars 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 19 mai 2022, et des mémoires complémentaires enregistrés le 29 août 2022 et le 17 avril 2024, M. F... G..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'héritier de sa mère décédée Mme E... C... veuve G..., représenté par la SELARL CDMF Avocats Affaires publiques (Me Poncin), demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 22 mars 2022 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 juin 2019 par lequel le maire de la commune de Val d'Isère ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée par Mme D... le 6 juin 2019, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 20 août 2019 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Val d'Isère le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- M. F... G... et feu Mme E... C... veuve G... disposent, en leur qualité de voisins immédiats du terrain d'assiette du projet, d'un intérêt à agir à l'encontre de la décision de non opposition, qui autorise des travaux sur un chalet existant consistant à modifier les façades ouest, nord et est du bâtiment, en particulier par la fermeture d'un palier couvert par un auvent en façade nord, entraînant une création de surface de plancher supplémentaire et une modification du volume de la construction, située à quelques mètres de leur propriété ;

- le dossier de déclaration préalable est incomplet, en ce qu'il ne comporte ni plan de masse, ni plan de coupe, ni plan de toiture, en méconnaissance des articles R. 431-36 et R. 431-10 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article Ua 4-3 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) relatif au traitement des eaux pluviales ;

- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article Ua 7-1 du règlement du PLU relatif à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives, sans que l'antériorité de la construction initiale, que le projet ne rend pas plus conforme à la règle de distance méconnue, ne puisse justifier une construction à 1,40 mètre de la limite de propriété ;

- le projet méconnaît les dispositions du code civil relatives à la création de vues ;

- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article Ua 11 du règlement du PLU relatif à l'aspect extérieur des constructions et l'aménagement de leurs abords, et notamment les règles particulières applicables au hameau du Fornet, en ce que la toiture créée présente une pente avec un axe de faîtage perpendiculaire à l'orientation générale des toitures du hameau.

Par un mémoire enregistré le 3 avril 2024, la commune de Val d'Isère, représentée par Me Petit, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit fait application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et, en tout état de cause, à ce que soit mis à la charge de M. G... le versement d'une somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- à titre principal, les éléments produits ne permettent pas, compte tenu du caractère très limité des travaux envisagés, de considérer que les conditions exigées par l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme pour justifier d'un intérêt à agir sont réunies ;

- à titre subsidiaire, les moyens d'annulation soulevés ne sont pas fondés : le dossier de demande était complet et suffisamment précis, l'écoulement des eaux pluviales n'est pas impacté par le projet, et ce dernier consiste à modifier une construction datant de 1907 sans en modifier l'implantation ni le volume et en s'insérant parfaitement dans le bâti existant du hameau ;

- le moyen tiré de la méconnaissance du code civil est inopérant.

La requête a été communiquée à Mme D..., qui n'a pas produit de mémoire dans le cadre de l'instance d'appel.

Par ordonnance du 19 juillet 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 août 2024.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Maubon, première conseillère,

- les conclusions de Mme Djebiri, rapporteure publique,

- les observations de Me Leroy, représentant M. G...,

- et les observations de Me Corbalan, substituant Me Petit, représentant la commune de Val d'Isère.

Considérant ce qui suit :

1. M. G... relève appel du jugement du 22 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté pour irrecevabilité, faute d'intérêt à agir, sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 juin 2019 par lequel le maire de la commune de Val d'Isère ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée par Mme D... le 6 juin 2019, et de la décision implicite de rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté le 20 août 2019.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne (...) n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction ou, lorsque le contentieux porte sur un permis de construire modificatif, des modifications apportées au projet.

4. Il ressort des pièces du dossier que le projet auquel l'arrêté du 26 juin 2019 ne s'oppose pas concerne la modification d'une maison d'habitation individuelle existante, située sur une parcelle cadastrée section C n° B..., qui possède deux entrées : l'une par une porte de plein pied située au rez-de-chaussée côté est (sud-est), l'autre au niveau du premier étage accessible par un escalier extérieur construit le long de la façade nord (nord-est) qui mène à un auvent protégeant une porte percée dans la façade nord. Le projet consiste, en ce qui concerne les travaux extérieurs, d'une part, à condamner l'escalier extérieur d'accès au premier étage, en supprimant le garde-corps et en recouvrant les marches d'un toit de lauzes, d'autre part, à fermer l'auvent extérieur situé au niveau du premier étage côté nord par des lambris de bois pour le transformer en une surface habitable de 3,33 m² et, enfin, à remplacer le bardage bois présent sous l'auvent façade nord et au niveau inférieur de la façade ouest (nord-ouest) par un enduit gris similaire à celui recouvrant le reste du bâtiment.

5. Mme C... veuve G... était propriétaire, et son fils M. G... est occupant et en outre héritier depuis le décès de sa mère le 31 janvier 2022, de la parcelle cadastrée section C n° A..., immédiatement voisine de la parcelle assiette du projet. M. G... soutient que les travaux envisagés sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation et d'utilisation de sa parcelle dès lors que le projet modifie, à proximité immédiate de sa propriété, l'aspect extérieur de la construction, son volume et son implantation, crée une ombre supplémentaire et va aggraver les écoulements d'eau de pluie.

6. Toutefois, si la localisation du projet se situe au centre du hameau du Fornet, à proximité immédiate de la propriété de M. G..., celui-ci n'expose pas quel est l'usage de la parcelle cadastrée section C A... lui appartenant, d'une superficie de 186 m², à propos de laquelle il n'évoque qu'une " cave en pierres sèches vieille de deux siècles ", un " mur " et un " jardin " et dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle supporterait une maison d'habitation. Les travaux projetés autorisés sur la parcelle voisine sont d'une importance réduite, et ont pour objet de supprimer un accès extérieur à la maison existante en réduisant les ouvertures situées côté nord, puisque l'auvent ceint d'une simple rambarde ajourée et abritant une porte-fenêtre sera clos, pour ne laisser subsister, à la place de cet espace ouvert disposant d'une vue plongeante sur la parcelle des consorts G..., qu'une fenêtre en hauteur. Les éléments dont M. G... fait état en ce qui concerne la modification du volume et de l'utilisation de la construction ne sont ainsi pas de nature à caractériser une atteinte aux conditions d'utilisation ou de jouissance de son bien. En ce qui concerne la modification de l'aspect extérieur de la construction, M. G... ne fait état d'aucun élément de nature à caractériser une atteinte aux conditions de jouissance de son bien, alors que le projet précise que le remplacement du bardage bois par de l'enduit gris vise à harmoniser la construction avec le reste du bâtiment. Les éléments relatifs à l'ensoleillement, alors que l'auvent préexistait, que la rambarde de l'escalier va être supprimée et que sa propriété est située au nord du projet, ne sont pas non plus de nature à caractériser une atteinte aux conditions d'utilisation ou de jouissance de son bien. L'affirmation relative à l'aggravation de l'écoulement des eaux de pluie ne l'est pas davantage, alors que ni l'auvent ni la pente de l'escalier, recouvert d'un toit de lauzes, ne seront modifiés. Ainsi, le requérant ne fait pas état d'éléments relatifs à la nature, à l'importance et à la localisation du projet de construction justifiant que lui soit reconnu un intérêt pour agir contre la décision contestée.

7. Il résulte de ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande comme irrecevable.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Val d'Isère, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à M. G... une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

9. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune de Val d'Isère présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. G... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Val d'Isère tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... G..., à la commune de Val d'Isère et à Mme H... D....

Délibéré après l'audience du 11 octobre 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Agathe Duguit-Larcher, présidente assesseure,

Mme Gabrielle Maubon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 novembre 2024.

La rapporteure,

G. MaubonLa présidente,

M. I...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au préfet de la Savoie en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N° 22LY01560 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22LY01560
Date de la décision : 05/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-06-01-02 Urbanisme et aménagement du territoire. - Règles de procédure contentieuse spéciales. - Introduction de l'instance. - Intérêt à agir.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Gabrielle MAUBON
Rapporteur public ?: Mme DJEBIRI
Avocat(s) : ADALTYS AFFAIRES PUBLIQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-05;22ly01560 ?
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