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04/09/2024 | FRANCE | N°23LY00973

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 1ère chambre, 04 septembre 2024, 23LY00973


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 20 septembre 2022 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2207729 du 23 décembre 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour



Par une req

uête enregistrée le 17 mars 2023, M. B... A..., représenté par la SCP Robin Vernet, demande à la cour :



1°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 20 septembre 2022 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2207729 du 23 décembre 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 17 mars 2023, M. B... A..., représenté par la SCP Robin Vernet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 23 décembre 2022 ;

2°) d'annuler les décisions du 20 septembre 2022 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Rhône de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de trois mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- le refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire national et donnant un délai de départ volontaire de trente jours sont illégales en raison de l'illégalité du refus de délivrance de titre de séjour ; elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ; l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est, à tout le moins, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.

M. A... a accepté de lever le secret médical, par un courrier enregistré le 13 avril 2024.

L'Office français de l'immigration et de l'intégration a présenté des pièces et un mémoire, qui ont été enregistrés respectivement les 26 avril 2024 et 16 mai 2024, et communiqués.

La requête a été communiquée à la préfète du Rhône, qui n'a pas présenté d'observations.

M. B... A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 15 février 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Burnichon, première conseillère,

- et les observations de Me Lulé substituant Me Vernet, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., né le 20 septembre 1956 à Kinshasa (République démocratique du Congo) et de nationalité congolaise, est entré irrégulièrement sur le territoire français le 23 janvier 2021. Suite au rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 3 juin 2021 et la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 2 février 2022, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé. Il relève appel du jugement du 23 décembre 2022 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 20 septembre 2022 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une reconduite d'office.

Sur le refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. / (...) ".

3. Par un avis du 24 janvier 2022, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a estimé que, si l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans son pays d'origine, y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et son état de santé lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Dans ses observations en défense, l'OFII produit notamment son avis et le rapport médical.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. A... présente tout d'abord une pathologie psychiatrique, qui n'était pas mentionnée dans le certificat médical transmis à l'OFII, se traduisant par un syndrome dépressif et un trouble de stress post-traumatique (TSPT). Si M. A... soutient que les traitements mis en place par deux ordonnances du 22 août 2022 et 19 septembre 2022, qu'il produit, établies par la permanence d'accès aux soins et à la santé du Vinatier et consistant en la prise des médicaments Cyamémazine (Tercian) et Buspirone (Buspar), ne sont pas disponibles dans son pays d'origine, ces deux traitements, utilisés pour l'anxiété, sont, s'agissant du Tercian, substituable par des antipsychotiques plus récents, et, s'agissant de la Buspirone, disponible en République démocratique du Congo (RDC) selon les observations non contredites de l'OFII. Par ailleurs la duloxétine (Cymbalta), qui est un antidépresseur prescrit par un médecin généraliste le 12 octobre 2022, est, selon l'OFII, également disponible en RDC. Ensuite, aucun suivi en consultation psychiatrique n'est précisé dans le dossier médical de M. A..., lequel ne peut dès lors pas se prévaloir de l'insuffisance de psychiatre dans son pays d'origine pour un tel suivi, étant en tout état de cause relevé qu'il ressort des pièces du dossier que des suivis psychiatriques spécialisés pour le TSPT sont disponibles à Kinshasa. Enfin, M. A... présente une pathologie somatique, sans complication, consistant en un diabète de type indéterminé, traité par l'association d'insuline lente et d'hypoglycémiants oraux. Selon une prescription du 24 mai 2022 émanant d'un médecin du service d'endocrinologie diabète, nutrition du centre hospitalier Lyon sud, il bénéficie d'un traitement par les médicaments Abasaglar 24 UI (insuline glargine), Janumet 50/1000 mg (sitagliptine et metformine chlorhydrate) et le Neurontin 300 g (gabapentine), qui est un antiépileptique utilisé dans le traitement des douleurs neuropathiques du diabétique. M. A... fait état de ce que les principes actifs des médicaments composant son traitement ne figurent pas sur l'extrait de la " liste des médicaments essentiels : draft 1/révision octobre 2020 " disponibles en RDC, ses allégations sont démenties par les fiches Medcoi produites par l'OFII et qui permettent d'établir que l'ensemble de ce traitement est disponible dans son pays d'origine et il n'est pas démontré que l'intéressé ne peut pas prendre en charge financièrement ce traitement ni faire appel au système social de son pays d'origine. Compte tenu de ces éléments, et des précisions apportées par l'OFII en appel et non sérieusement contredites, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour en litige méconnaît les dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. En deuxième lieu, le moyen tiré de ce que le refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté par les motifs retenus par le premier juge, qu'il y a lieu pour la cour d'adopter.

6. En dernier lieu, M. A..., entré sur le territoire français à l'âge de soixante-quatre ans, ne démontre pas être dépourvu d'attaches privées et familiales dans son pays d'origine, n'apporte aucun élément susceptible d'établir une quelconque insertion sociale ou professionnelle sur le territoire français, et il ressort enfin de ce qui précède qu'il ne peut sérieusement se prévaloir de son état de santé. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que le refus de séjour en litige est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours :

7. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision de refus de titre de séjour, soulevé à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français et fixant le délai de départ volontaire à trente jours, n'est pas fondé et doit, par suite, être écarté.

8. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 4, 5 et 6 il y a lieu d'écarter les moyens tirés respectivement de la méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation.

Sur la décision fixant le pays de destination :

9. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision de refus de titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français, soulevé à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, doit être écarté.

10. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 23 décembre 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 septembre 2022. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie sera adressée à la préfète du Rhône.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Anne-Gaëlle Mauclair, présidente-assesseure,

Mme Claire Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 septembre 2024.

La rapporteure,

C. BurnichonLa présidente,

M. C...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 23LY00973 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00973
Date de la décision : 04/09/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public ?: Mme DJEBIRI
Avocat(s) : SCP ROBIN VERNET

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-09-04;23ly00973 ?
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