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18/07/2024 | FRANCE | N°23LY02103

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 4ème chambre, 18 juillet 2024, 23LY02103


Vu la procédure suivante :



Procédures contentieuses antérieures



La société Action Développement Loisir a demandé au tribunal administratif de Grenoble, d'une part, d'annuler la délibération du 6 janvier 2020 par laquelle le conseil municipal de la commune de La Plagne Tarentaise a refusé de mettre en œuvre l'article 27 du contrat de délégation de la gestion de la piscine de Plagne-Bellecôte afin de compenser les effets de la modification des conditions d'exploitation de la piscine de Plagne-Bellecôte dont elle assure l'exploitation par délé

gation de service public, d'autre part, de condamner la commune de La Plagne Tarentaise ...

Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures

La société Action Développement Loisir a demandé au tribunal administratif de Grenoble, d'une part, d'annuler la délibération du 6 janvier 2020 par laquelle le conseil municipal de la commune de La Plagne Tarentaise a refusé de mettre en œuvre l'article 27 du contrat de délégation de la gestion de la piscine de Plagne-Bellecôte afin de compenser les effets de la modification des conditions d'exploitation de la piscine de Plagne-Bellecôte dont elle assure l'exploitation par délégation de service public, d'autre part, de condamner la commune de La Plagne Tarentaise à lui verser la somme de 361 985,14 euros en indemnisation du manque à gagner escompté de l'exécution de ce contrat au titre des années 2016 à 2019.

Par jugement nos 2004679-2004682 du 25 avril 2023, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés le 22 juin 2023 et le 14 mars 2024, la société Action Développement Loisir, représentée par Me Cabanes (SELARL Cabanes avocats), demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement, en ce qu'il rejette sa demande indemnitaire ;

2°) de condamner la commune de La Plagne Tarentaise à lui verser la somme de 361 985,14 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 9 juin 2020 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de La Plagne Tarentaise la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le montant des recettes attendues des copropriétés était contractuellement garanti, à hauteur de 270 844,50 euros, par l'article 21.1 du contrat de délégation ;

- elle n'a pas à assumer le risque des impayés, étant seulement chargée de la gestion du recouvrement de ces recettes ;

- elle a dès lors subi un préjudice certain, ce montant contractuellement garanti n'ayant pas été atteint ;

- ce préjudice présente en outre un lien direct avec la faute commise par le délégant, consistant à ne pas avoir fait état, dans le contrat, d'une situation conforme à la réalité, cette faute ayant faussé l'équilibre financier de son offre, notamment le montant de la subvention forfaitaire attendue du délégant.

Par mémoires enregistrés le 13 février 2024 et le 2 avril 2024, la commune de la Plagne Tarentaise, représentée par Me Bory (SELARL Paillat Conty et Bory), conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de la société Action Développement Loisir la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle expose que :

- les moyens soulevés ne sont pas fondés ;

- le délégataire n'est, en outre, pas fondé à demander une indemnité, à défaut d'avoir préalablement mis en œuvre la procédure prévue par les articles 26 et 22 du contrat ;

- la société a commis des fautes propres à l'exonérer de toute responsabilité, en s'abstenant des diligences nécessaires pour procéder au recouvrement de ces redevances et d'informer le délégataire de ses difficultés ;

- le préjudice invoqué est dépourvu de caractère certain, l'année 2016 ayant été régularisée auprès du syndicat intercommunal de la Grande Plagne, les bilans produits n'étant pas certifiés, aucune provision n'ayant été constituée, les résultats de l'exploitation demeurant positifs, une compensation lui ayant déjà été versée pour la période 2016/2019, des droits d'entrée ayant été acquittés par les copropriétaires et seul un manque à gagner brut, hors TVA, pouvant être invoqué.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sophie Corvellec ;

- les conclusions de M. Bertrand Savouré, rapporteur public ;

- et les observations de Me Pezin, pour la société Action Développement Loisir, et celles de Me Bory, pour la commune de la Plagne Tarentaise ;

Considérant ce qui suit :

1. Par convention du 2 décembre 2013, le syndicat intercommunal de la Grande Plagne a délégué à la société Action Développement Loisir, sous le nom commercial d'Espace Recrea, la gestion de la piscine de Plagne-Bellecôte. Faisant état de redevances impayées par des copropriétés depuis 2016, celle-ci a, par courriers du 26 septembre 2019 et du 6 décembre 2019, sollicité la mise en œuvre de l'article 26 de la convention organisant une procédure de réexamen des conditions financières de la délégation, ainsi que la prise en charge par la commune de la Plagne Tarentaise, venue aux droits du syndicat intercommunal à compter du 1er janvier 2017, des sommes non recouvrées. Le conseil municipal a rejeté cette demande par délibération du 6 janvier 2020. La société Action Développement Loisir a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler cette délibération et de condamner la commune à lui verser une indemnité de 361 985,14 euros en réparation du préjudice subi. Par jugement du 25 avril 2023, le tribunal a rejeté ces demandes. La société Action Développement Loisir ne relève appel que du rejet de sa demande indemnitaire.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, la société Action Développement Loisir, qui ne soutient pas que la convention du 2 décembre 2013 serait entachée de nullité et se prévaut des clauses de ce contrat à l'appui de sa demande indemnitaire, ne peut utilement reprocher à son cocontractant d'avoir faussé l'équilibre financier de son offre en ne faisant pas état, dans ce contrat, d'une situation conforme à la réalité. Il suit de là que le défaut d'information, dont elle soutient avoir été victime lors de la mise en concurrence préalable à sa désignation en tant que délégataire, est dépourvu d'effet utile sur l'exécution des obligations de la commune découlant de ce contrat.

3. En second lieu, aux termes de l'article 21-1 de la convention conclue le 3 décembre 2013, relatif aux recettes commerciales du délégataire : " La rémunération du délégataire est assurée par la perception des recettes commerciales suivantes : (...) des recettes d'accès à la piscine versées par les copropriétaires et multipropriétaires de Plagne-Bellecôte qui ont été évaluées par le délégant à un minimum de 270 844,50 euros HT, montant qui sera soumis à indexation annuelle (...) / La rémunération est établie au vu d'un compte d'exploitation prévisionnel établi par l'exploitant sur la durée du contrat et annexé à ce dernier. Cette rémunération est réputée permettre au délégataire d'assurer l'équilibre financier de la gestion du service délégué dans les conditions normales d'exploitations. Le délégataire aura la responsabilité des encaissements (...) ". Aux termes de son article 22 relatif à l'intéressement du délégataire : " Le délégant pourra bénéficier d'un intéressement (...) lié aux recettes issues des copropriétés et (...) du résultat annuel (...). (...) si les recettes émanant des copropriétés (...) se révélaient inférieures d'au moins 10 % au montant contractuel indexé, les parties se rencontreront sans délai pour déterminer l'impact de cette situation sur le compte d'exploitation, étant précisé que le délégataire assume la totale responsabilité du recouvrement de ces créances (...) ". Enfin, aux termes de son article 26, relatif à la révision des conditions financières : " Pour tenir compte de l'évolution des conditions économiques et techniques et pour s'assurer que la formulation d'indexation est bien représentative des coûts réels, les conditions financières du contrat devront être soumises à réexamen, si l'une des hypothèses suivantes est réalisée : (...) 6 - en cas de variation de +/- 10 % du montant des redevances encaissées auprès des copropriétés, dans le respect des dispositions de l'article 11 du présent contrat ", celui-ci prévoyant notamment que " le délégataire doit : (...) être diligent et rigoureux dans le recouvrement des redevances copropriétaires (...) ".

4. Il résulte de ces stipulations combinées, lesquelles mettent à la charge du délégataire tant le recouvrement des redevances auprès des copropriétaires que le risque financier inhérent à ce recouvrement et prévoient uniquement une procédure de réexamen de l'équilibre financier de la délégation en cas de variation de ces recettes, que la mention du montant des recettes escomptées auprès de ces copropriétaires figurant à l'article 21-1 de la convention ne comportait aucun engagement contractuel du délégant de verser cette somme au délégataire en cas de difficultés de recouvrement. Par suite, la société Action Développement Loisir, qui, en tout état de cause, avait été expressément informée par courrier du 1er août 2013 de la charge de ce risque et, nonobstant les réserves qu'elle avait émises à cet égard au cours de la procédure de passation, l'avait accepté en concluant le contrat, n'est pas fondée à solliciter de la commune de La Plagne Tarentaise le versement d'une indemnité en compensation du non-paiement de redevances par certains copropriétaires de la station.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la société Action Développement Loisir n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande indemnitaire.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de la Plagne Tarentaise, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la société Action Développement Loisir. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière le versement d'une somme de 2 000 euros à la commune de la Plagne Tarentaise, en application de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Action Développement Loisir est rejetée.

Article 2 : La société Action Développement Loisir versera à la commune de la Plagne Tarentaise une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Action Développement Loisir et à la commune de la Plagne Tarentaise.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2024, où siégeaient :

M. Philippe Arbarétaz, président de chambre,

Mme Aline Evrard, présidente-assesseure,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juillet 2024.

La rapporteure,

S. CorvellecLe président,

Ph. Arbarétaz

La greffière,

F. Faure

La République mande et ordonne au préfet de la Savoie en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY02103


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY02103
Date de la décision : 18/07/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Notion de contrat administratif - Diverses sortes de contrats - Délégations de service public.

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Rémunération du co-contractant.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : CABANES & ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-18;23ly02103 ?
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