Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
1°) Sous le n° 2208749, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation de la décision du 3 novembre 2022 par laquelle la préfète de la Loire a procédé au retrait de son certificat de résidence algérien.
2°) Sous le n° 2303121, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation des décisions du 31 mars 2023 par lesquelles le préfet de la Loire a procédé au retrait de son certificat de résidence algérien, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé à trente jours le délai de départ volontaire et a fixé le pays de renvoi.
3°) Sous le n° 2305230, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation des décisions du 12 juin 2023 par lesquelles le préfet de la Loire a procédé au retrait de son certificat de résidence algérien, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé à trente jours le délai de départ volontaire et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2208749-2303121-2305230 du 21 septembre 2023, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision de retrait du 3 novembre 2022 et rejeté le surplus des conclusions de M. B....
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 octobre 2023, M. A... B..., représenté par Me Sangue, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2208749-2303121-2305230 du 21 septembre 2023 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du 12 juin 2023 par lesquelles le préfet de la Loire a procédé au retrait de son certificat de résidence algérien, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé à trente jours le délai de départ volontaire et a fixé le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire de lui restituer son titre de séjour, ou subsidiairement de réexaminer sa situation, dans un délai de 8 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. B... soutient que :
- la décision de retrait est entachée d'incompétence ; elle n'est pas motivée ; elle a été édictée sans examen de sa situation ; elle repose sur une appréciation erronée dès lors qu'il n'a pas commis de fraude ; elle est entachée d'erreur de droit dès lors que le préfet a omis de statuer sur sa demande de séjour en qualité de salarié ; elle méconnait son droit d'être entendu et la procédure contradictoire prévue par l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ; elle méconnait l'article 7 bis, a) de l'accord franco-algérien ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'incompétence ; elle n'est pas motivée ; elle a été édictée sans examen de sa situation ; elle repose sur une appréciation erronée dès lors qu'il n'a pas commis de fraude ; elle est entachée d'erreur de droit dès lors que le préfet a omis de statuer sur sa demande de séjour en qualité de salarié ; elle méconnait son droit d'être entendu et la procédure contradictoire prévue par l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ; elle méconnait le droit au séjour qu'il tient de l'article 7 bis, a) de l'accord franco-algérien ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Le préfet de la Loire, régulièrement mis en cause, n'a pas produit.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le traité sur l'Union européenne et le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la directive 2008/115/CE, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, modifié, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Stillmunkes, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien né le 21 février 1981, a demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation des décisions des 3 novembre 2022, 31 mars 2023 et 12 juin 2023, par lesquelles le préfet de la Loire a procédé au retrait pour fraude de son certificat de résidence algérien de dix ans, les deux dernières décisions de retrait étant en outre chacune assortie de décisions portant obligation de quitter le territoire français, fixation du délai de départ volontaire et fixation du pays de renvoi. Par le jugement attaqué du 21 septembre 2023, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 3 novembre 2022 et rejeté les autres conclusions de M. B.... Ce dernier interjette appel de ce jugement en tant seulement qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre les décisions du 12 juin 2023 par lesquelles le préfet de la Loire a procédé au retrait de son certificat de résidence algérien, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé à trente jours le délai de départ volontaire et a fixé le pays de renvoi.
Sur la légalité du retrait de titre de séjour :
2. En premier lieu, l'arrêté préfectoral du 12 juin 2023 en litige est signé par M. Shuffenecker, secrétaire général de la préfecture, sur le fondement de la délégation de signature prévue par l'arrêté préfectoral n° 2023-005 du 6 février 2023, régulièrement publié au recueil des actes de la préfecture du même jour. Le moyen tiré de l'incompétence doit, en conséquence, être écarté.
3. En deuxième lieu, le préfet a exposé les motifs de droit et de fait de sa décision, qui est ainsi régulièrement motivée. L'analyse circonstanciée développée dans l'arrêté ainsi que les pièces du dossier font par ailleurs apparaitre que le préfet a édicté la décision de retrait après un examen effectif de la situation de M. B....
4. En troisième lieu, ainsi que l'a relevé le tribunal au point 13 du jugement, le préfet a procédé au retrait après avoir invité M. B... à présenter des observations, ce que ce dernier a fait. La procédure contradictoire prévue à l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration a dès lors été régulièrement respectée. M. B... ne peut pas par ailleurs utilement invoquer le principe du droit de l'Union du droit d'être entendu, dès lors que la décision en cause ne vise pas à mettre en œuvre le droit de l'Union. En tout état de cause, eu égard à ce qui a été dit sur la procédure contradictoire appliquée, le droit d'être entendu n'a pas été méconnu.
5. En quatrième lieu, le préfet de la Loire a procédé au retrait pour fraude du certificat algérien de dix ans qui avait été délivré à M. B... en qualité de conjoint d'une ressortissante française. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a épousé en Algérie le 8 septembre 2011 une ressortissante française. Il a sollicité la première délivrance d'un certificat de résidence de dix ans, qui est conditionnée à une communauté de vie effective, en se prévalant d'une telle communauté de vie, et en a obtenu la délivrance le 6 juillet 2015. Ce n'est qu'en juillet 2022 qu'il a demandé un changement de statut en indiquant pour la première fois son divorce. Le jugement de divorce, qui date du 8 juin 2018, sur demande de M. B... et sans opposition de son épouse, constate toutefois une séparation définitive au plus tard le 1er octobre 2015. Le préfet de la Loire produit des pièces qui établissent que M. B... n'habitait en réalité plus dans le domicile conjugal allégué, mais à une autre adresse, distincte de celle de son épouse, au plus tard à partir de décembre 2014, soit avant même la délivrance du titre de séjour litigieux. Le titre de séjour retiré n'avait ainsi été délivré que sur la déclaration frauduleuse d'une communauté de vie qui avait cessé. Le préfet de la Loire pouvait, en conséquence, sans erreur de droit ni de fait, procéder à son retrait. Le préfet de la Loire n'a pas davantage entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation.
6. En cinquième lieu, dès lors que la fraude à la communauté de vie, ainsi qu'il vient d'être exposé, est établie, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le retrait de son titre de séjour méconnaitrait l'article 7 bis, a) de l'accord franco-algérien, dont les conditions n'étaient ainsi pas réunies.
7. En sixième lieu, le préfet de la Loire n'était pas tenu, pour procéder au retrait d'un titre de séjour obtenu par fraude d'examiner simultanément une demande de titre de séjour formée par ailleurs sur un autre fondement. Le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur de droit en n'examinant pas la délivrance à M. B... d'un titre de séjour en qualité de salarié doit donc être écarté.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
8. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence doit être écarté pour les motifs exposés au point 2.
9. En deuxième lieu, le préfet a motivé sa décision d'éloignement, en droit et en fait, et elle a été édictée après un examen effectif de la situation de M. B....
10. En troisième lieu, M. B... ne peut utilement invoquer la méconnaissance de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, qui ne s'applique pas à la procédure d'édiction des décisions portant obligation de quitter le territoire français, qui est entièrement régie par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, il résulte de ce qui a été dit au point 4 sur la consultation préalable de M. B... que son droit d'être entendu n'a pas été méconnu.
11. En quatrième lieu, pour les motifs qui ont été exposés au point 5, le préfet a pu retenir dans son appréciation d'ensemble de la situation de M. B..., sans erreur de droit ni de fait et sans méconnaitre l'article 7 bis, a) de l'accord franco-algérien, que la délivrance d'un titre de séjour n'avait été obtenue qu'au moyen d'une fraude.
12. En cinquième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B... est né en Algérie le 21 février 1981 et qu'il est de nationalité algérienne. Il est entré en France en février 2014 à l'âge de 33 ans. S'il a obtenu la délivrance d'un titre de séjour, il a été dit que ce n'est qu'au moyen d'une déclaration frauduleuse. La communauté de vie avec son épouse de nationalité française, avec qui il s'était marié en Algérie en 2011, a pris fin au plus tard en décembre 2014. Il a épousé en Algérie en mars 2022 une ressortissante algérienne. Si M. B... a travaillé en 2017 et 2018, puis depuis 2021, comme agent de sécurité, il n'en résulte pas une insertion professionnelle ancrée dans la durée sur le territoire français et il ne justifie pas d'attaches privées et familiales significatives en France. Compte tenu de ces éléments, le préfet de la Loire n'a pas entaché sa décision d'éloignement d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B....
13. En sixième lieu, le seul dépôt d'une demande de titre de séjour ne saurait faire obstacle à ce que l'autorité administrative décide de l'éloignement d'un étranger qui se trouve dans le cas mentionné à l'article L. 611-1, 3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ne saurait en aller autrement que lorsque la loi ou une convention bilatérale prescrit l'attribution de plein droit d'un titre de séjour à l'intéressé, cette circonstance faisant alors obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français. M. B..., qui ne justifie notamment d'aucune autorisation de travail, ne justifie pas relever d'une hypothèse de délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié sur le fondement de l'accord franco-algérien. Il ne peut dès lors utilement invoquer la circonstance qu'il aurait demandé la délivrance d'un tel titre pour contester l'obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet sur le fondement du retrait de son titre de séjour pour fraude.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté les conclusions de sa demande qui sont en litige en appel. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Loire.
Délibéré après l'audience du 1er juillet 2024, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Stillmunkes, président assesseur,
Mme Vergnaud, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juillet 2024.
Le rapporteur,
H. Stillmunkes
Le président,
F. Pourny
La greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 23LY03302