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11/07/2024 | FRANCE | N°22LY02104

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 2ème chambre, 11 juillet 2024, 22LY02104


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. A... et Mme F... E... D... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013, ainsi que des pénalités correspondantes.



Par un jugement n° 2000299 du 30 mai 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.



Procédure devant la cour



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ar une requête et un mémoire, enregistrés les 13 juillet 2022 et 18 juillet 2023, M. A... et Mme H... D..., représentés pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... et Mme F... E... D... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 2000299 du 30 mai 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 juillet 2022 et 18 juillet 2023, M. A... et Mme H... D..., représentés par Me Palomares, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et pénalités ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'administration a méconnu l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales en ne communiquant pas les documents ayant servi de fondement aux rehaussements suite à leur demande du 10 février 2016 ;

- les chèques de la SARL Bâtiment et Maisons en Isère, qui ont été encaissés par M. E... D..., correspondent à des remboursements d'apports effectués par celui-ci à la société ;

- la pénalité de 40 % pour manquement délibéré n'est pas fondée en raison du montant d'apports qui est supérieur à celui de l'ensemble des chèques remis par la SARL Bâtiment et Maisons en Isère à M. E... D....

Par un mémoire, enregistré le 3 avril 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 17 juillet 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 19 septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Porée, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Bâtiment et Maisons en Isère (BMI), dont M. I... était l'associé unique et le gérant et au sein de laquelle M. E... D... occupait un emploi salarié de chargé d'affaires, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013. A l'issue de ce contrôle, il a été constaté que des chèques tirés sur les comptes bancaires de la société correspondant à des factures enregistrées en comptabilité en compte " fournisseurs " et comme des prélèvements au profit de M. I..., étaient libellés à l'ordre de M. E... D... et avaient été encaissés par ce dernier sur ses comptes bancaires personnels. En conséquence, M. et Mme E... D... ont été assujettis, suivant la procédure contradictoire, à des compléments d'impôt sur le revenu au titre des années 2012 et 2013 résultant de l'inclusion dans leurs revenus imposables des montants correspondants que l'administration a regardées comme des distributions irrégulières imposables entre les mains de M. E... D... dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts. Ces impositions supplémentaires ainsi que les contributions sociales corrélativement mises à la charge de M. et Mme E... D... ont été assorties des intérêts de retard et de la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts. M. et Mme E... D... relèvent appel du jugement du 30 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions et pénalités.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ". Lorsque le contribuable lui en fait la demande, l'administration est, en principe, tenue de lui communiquer, alors même qu'il en aurait eu connaissance, les renseignements, documents ou copies de documents obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés, afin de lui permettre d'en vérifier l'authenticité ou d'en discuter la teneur ou la portée.

3. M. et Mme E... D... soutiennent que l'administration a méconnu l'obligation de communication prescrite à l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales en s'abstenant de répondre à leur demande du 10 février 2016 tendant à obtenir la communication des documents utilisés pour rehausser leurs revenus imposables.

4. Il résulte de l'instruction, et notamment de l'extrait de la proposition de rectification destinée à la SARL BMI reproduit dans la proposition de rectification du 11 décembre 2015 adressée personnellement à M. et Mme E... D... que, pour établir les impositions au titre des distributions en litige, l'administration s'est fondée, d'une part, sur les écritures enregistrées au compte " fournisseur " et au compte courant d'associé ouvert au nom de M. I... dans la comptabilité de la SARL BMI et, d'autre part, sur les copies recto-verso des chèques établis par la SARL BMI et M. E... D... et sur la procuration dont disposait la fille des requérants, Mme C... D..., sur le compte bancaire détenu par la SARL BMI à la Banque Populaire des Alpes obtenus à la suite de l'exercice d'un droit de communication auprès de cet établissement bancaire. Dans leur réponse à cette proposition de rectification, M. et Mme E... D... ont reconnu l'existence des versements, contesté leur qualification de rémunérations ou avantage occulte, soutenu qu'ils présentaient le caractère de remboursements d'avances consenties par M. E... D... à la SARL BMI et fait valoir que les écritures comptables de la société ne leur étaient pas opposables. Si M. et Mme E... D... ont, dans ce courrier, demandé à l'administration " de bien vouloir leur adresser les éléments qui leur permettent d'affirmer " que M. E... D... " aurait perçu des rémunérations occultes ", une telle demande, eu égard à l'imprécision des termes employés par les contribuables quant à son objet, ne peut en l'espèce, être regardée comme une demande de communication des documents recueillis auprès de tiers mentionnés dans la proposition de rectification du 11 décembre 2015 à laquelle l'administration était tenue de donner suite. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

5. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ".

6. En cas de refus des rectifications, notifiées selon la procédure contradictoire, par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire des sommes regardées comme distribuées par une société, il incombe à l'administration d'apporter la preuve de l'existence et du montant des revenus distribués.

7. Il résulte de l'instruction que M. E... D... a encaissé en 2012 et 2013 des chèques émis par la SARL Bâtiment et Maisons en Isère pour un montant total de 86 246,02 euros comptabilisés par la SARL BMI en compte " fournisseurs ", et pour un montant total de 35 540 euros, enregistrés dans le compte-courant d'associé ouvert au nom de M. I....

8. Il résulte du compte-courant d'associé ouvert pour la fille C... des requérants au sein de la SCI MCR 822, du chèque établi le 30 avril 2012 par cette société au bénéfice de la SARL BMI et du grand livre général de la SARL BMI, que la SCI MCR 822 a versé le 30 avril 2012 une somme de 43 532 euros à la SARL BMI inscrite en comptabilité dans le compte-courant d'associé de M. I.... Il résulte du compte-courant d'associé ouvert au nom de Mme E... D... au sein de la SCI Laila, des chèques établis les 28 mai et 13 juin 2012 par cette société au bénéfice de la SARL BMI, et du grand livre général de la SARL BMI, que la SCI Laila a versé les 29 mai et 13 juin 2012 des sommes de 25 000 euros et 60 000 euros à la SARL BMI inscrites en comptabilité dans le compte-courant d'associé de M. I.... Dans la proposition de rectification, la vérificatrice a retenu qu'il résultait des éléments recueillis au cours des opérations de contrôle de la SARL BMI et du droit de communication auprès de la Banque Populaire des Alpes que le compte courant d'associé de M. I... dans la société BMI avait été alimenté essentiellement par des remises de chèques provenant de M. E... D.... Ainsi, M. E... D... doit être regardé comme ayant versé les sommes précitées de 43 532 euros, 25 000 euros et 60 000 euros, soit un total de 128 532 euros, entre le 30 avril et le 13 juin 2012, à la SARL Bâtiment et Maisons en Isère, alors qu'il ressort du point 7 du présent arrêt qu'il a encaissé des chèques établis par cette société au cours des années 2012 et 2013 pour un montant total de 121 786,02 euros. Il résulte de la proposition de rectification, et du grand livre général de la SARL Bâtiment et Maisons en Isère au titre de l'exercice clos en 2012 produit par les requérants, que M. I... a procédé le 31 décembre 2012 à un abandon de son compte-courant d'associé à hauteur de la somme de 183 477 euros, et ainsi aux sommes précitées de 43 532 euros, 25 000 euros et 60 000 euros. En outre, il ne résulte pas de l'instruction de liens entre les sommes précitées de 128 532 euros et 121 786,02 euros, alors que dix chèques établis par la SARL BMI ont été encaissés par M. E... D... au cours de la période du 16 janvier 2012 au 25 avril 2012, bien avant le premier versement de 43 532 euros du 30 avril 2012, et que vingt-trois des trente-et-un chèques établis par la SARL BMI et encaissés par M. E... D... ont été comptabilisés dans le compte " fournisseurs " de cette société afin de ne pas les faire apparaître explicitement. Dans ces conditions, il n'existe pas de relations entre les sommes versées et celles perçues par M. E... D....

Sur les pénalités :

9. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

10. Pour justifier la majoration pour manquement délibéré appliquée aux rappels d'impôt sur le revenu, l'administration relève que M. E... D... a encaissé plus de 50 000 euros sur ses comptes bancaires personnels, pour chacune des deux années 2012 et 2013, sous couvert de fausses factures de fournisseurs et de rémunérations occultes, soit plus du double de la rémunération perçue en tant que chargé d'affaires au sein de la SARL BMI. Ce faisant, l'administration établit, ainsi qu'il lui incombe en application de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales, l'intention délibérée de M. et Mme E... D... d'éluder l'impôt justifiant la pénalité appliquée.

11. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme E... D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme E... D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... et Mme F... E... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2024, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Courbon, présidente-assesseure,

M. Porée, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 juillet 2024.

Le rapporteur,

A. Porée

Le président,

D. Pruvost

La greffière,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY02104


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02104
Date de la décision : 11/07/2024
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Rectification (ou redressement) - Généralités.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables - Revenus distribués - Notion de revenus distribués - Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Arnaud POREE
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : PALOMARES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-11;22ly02104 ?
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