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09/07/2024 | FRANCE | N°23LY00427

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 1ère chambre, 09 juillet 2024, 23LY00427


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 11 novembre 2022 par lequel le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de circulation d'une durée d'un an et d'annuler l'arrêté du 11 novembre 2022 par lequel le préfet de l'Isère l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.



Par un jugement n° 2207370 du 17 novembre 2022,

le magistrat désigné du tribunal administratif a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour


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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 11 novembre 2022 par lequel le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de circulation d'une durée d'un an et d'annuler l'arrêté du 11 novembre 2022 par lequel le préfet de l'Isère l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2207370 du 17 novembre 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 3 février 2023, M. B... A..., représenté par Me Miran, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 novembre 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 novembre 2022, par lequel le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de circulation d'une durée d'un an et d'annuler l'arrêté du 11 novembre 2022 par lequel le préfet de l'Isère l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaît les dispositions de l'article L. 251-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce qu'il a acquis un droit au séjour permanent en France et ne peut, par conséquent, faire l'objet d'une mesure portant obligation de quitter le territoire français ;

- son comportement ne constitue pas une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à un intérêt fondamental de la société française ;

- la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire méconnaît les dispositions de l'article L. 251-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il reprend ses moyens de première instance.

La requête a été communiquée au préfet de l'Isère, qui n'a pas présenté d'observations.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 janvier 2023 du bureau d'aide juridictionnelle.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Burnichon, première conseillère.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., né le 27 août 1998 à Oradea (Roumanie) et de nationalité roumaine, déclare être entré sur le territoire français en 2016. Il relève appel du jugement du 17 novembre 2022 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 novembre 2022 par lequel le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de circulation d'une durée d'un an et de l'arrêté du 11 novembre 2022 par lequel le préfet de l'Isère l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

2. Aux termes de l'article L. 251-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger les étrangers dont la situation est régie par le présent livre, à quitter le territoire français lorsqu'elle constate les situations suivantes : / (...) 2° Leur comportement personnel constitue, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société. (...) / L'autorité administrative compétente tient compte de l'ensemble des circonstances relatives à leur situation, notamment la durée du séjour des intéressés en France, leur âge, leur état de santé, leur situation familiale et économique, leur intégration sociale et culturelle en France, et l'intensité des liens avec leur pays d'origine. ".

3. Il résulte de ces dispositions que si les citoyens européens bénéficient d'avantages conférés par le droit de l'Union, en l'espèce, la liberté de circuler librement et de séjourner sur le territoire des États membres, le législateur peut, notamment pour la protection de l'ordre public, organiser un régime moins favorable que le droit commun pour ces déplacements, notamment lorsque leur comportement personnel constitue, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société. Il appartient à l'autorité administrative d'un État membre qui envisage de prendre une mesure d'éloignement à l'encontre d'un ressortissant d'un autre État membre de ne pas se fonder sur la seule existence d'une infraction à la loi, mais d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société française. L'ensemble de ces conditions doivent être appréciées en fonction de la situation individuelle de la personne, notamment de la durée de son séjour en France, de sa situation familiale et économique et de son intégration.

4. Pour justifier la mesure d'éloignement litigieuse, le préfet de l'Isère a retenu que M. A... a été interpellé par les forces de l'ordre le 10 novembre 2022 pour des faits de tentative de vol aggravé avec deux circonstances, délit pour lequel il n'a fait l'objet que d'un rappel à la loi, et qu'il est également défavorablement connu des forces de l'ordre pour des faits de circulation avec un véhicule terrestre à moteur sans assurance commis les 4 janvier 2019, 22 janvier 2019, 20 avril 2019 et 19 novembre 2020. Ces faits ne peuvent toutefois traduire un comportement constituant, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société au sens des dispositions précitées. Dans ces conditions, M. A... est fondé à soutenir que le préfet a fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article L. 251-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La décision portant obligation de quitter le territoire français ainsi que, par voie de conséquence, les décisions de refus d'octroi d'un délai de départ volontaire, de fixation du pays de destination et d'interdiction de circuler sur le territoire français et d'assignation à résidence sont, par suite, entachées d'illégalité et doivent, dès lors, être annulées.

5. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande, et à demander l'annulation de ce jugement et des arrêtés du 11 novembre 2022.

6. Mme A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocate, Me Miran, peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à la condition de renoncer à la part contributive de l'État à l'aide juridictionnelle. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à Me Miran d'une somme de 1 500 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 17 novembre 2022 du magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble et les arrêtés du 11 novembre 2022 du préfet de l'Isère sont annulés.

Article 2 : L'État versera à Me Miran une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Miran et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 2 juillet 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Christine Psilakis, première conseillère,

Mme Claire Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juillet 2024.

La rapporteure,

C. BurnichonLa présidente,

M. C...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 23LY00427 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00427
Date de la décision : 09/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public ?: Mme MAUCLAIR
Avocat(s) : MIRAN

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-09;23ly00427 ?
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