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04/07/2024 | FRANCE | N°22LY02096

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 6ème chambre, 04 juillet 2024, 22LY02096


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société Market Stock a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler une décision de la direction générale des finances publiques refusant de lui attribuer, pour le mois d'avril 2021, l'aide exceptionnelle au titre du premier volet du fonds de solidarité, instituée à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de covid-19.



Par un jugement n

2106926 du 24 mai 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.





Procédure ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Market Stock a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler une décision de la direction générale des finances publiques refusant de lui attribuer, pour le mois d'avril 2021, l'aide exceptionnelle au titre du premier volet du fonds de solidarité, instituée à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de covid-19.

Par un jugement n° 2106926 du 24 mai 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 juillet 2022, et un mémoire enregistré le 29 mai 2024, la société Market Stock, représentée par Me Resta, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2106926 du 24 mai 2022 du tribunal administratif de Lyon et les décisions des 8 juin et 1er juillet 2021 de la direction générale des finances publiques rejetant sa demande d'indemnisation par le fonds de solidarité au titre du mois de mai 2021 ;

2°) de la rétablir dans ses droits et de lui accorder le bénéfice de cette aide ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens ainsi qu'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Market Stock soutient que :

- en assimilant de facto aux sociétés placées en liquidation judiciaire les sociétés qui, comme elle-même, se trouvaient en situation de liquidation amiable, le tribunal a ajouté une condition à la loi et commis une erreur de droit ;

- son activité s'étant poursuivie jusqu'à la clôture des opérations de liquidation, la baisse de son chiffre d'affaires attendu de la vente du stock est une conséquence, non de la décision de liquidation amiable du 28 janvier 2020, mais des mesures gouvernementales prises dans le cadre de l'urgence sanitaire et sociale.

Par un mémoire en défense enregistré le 26 septembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Le ministre fait valoir que :

- la société Market Stock n'exerçait plus d'activité économique au 8 avril 2020, date d'enregistrement au greffe du tribunal de commerce de la décision de liquidation amiable du 28 janvier 2020, son chiffre d'affaires était d'ailleurs réalisé par la vente des actifs d'exploitation que sont les marchandises en stock, et elle n'était ainsi plus éligible au fonds de solidarité ;

- la condition d'exercice d'une activité économique posée par l'article 1er du décret n° 2020-371 ne rend pas sans objet ni portée la condition tenant à l'absence de liquidation judiciaire au 1er mars 2020 également posée par cet article.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 portant création d'un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation ;

- le décret n° 2020-371 du 30 mars 2020 relatif au fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 17 juin 2024 :

- le rapport de M. Gros, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société Market Stock, qui exerce une activité de commerce de gros d'habillement et de chaussures, a sollicité le versement d'une aide exceptionnelle pour le mois d'avril 2021, à hauteur de 10 000 euros, dans le cadre du fonds de solidarité créé au profit des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de covid-19. La direction générale des finances publiques a refusé de faire droit à cette demande par une décision du 8 juin 2021, confirmée le 1er juillet suivant. La société Market Stock interjette appel du jugement du 24 mai 2022 qui a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions des 8 juin et 1er juillet 2021.

Sur la régularité du jugement :

2. L'erreur de droit invoquée se rattache au bien-fondé de la décision juridictionnelle et non à sa régularité.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. L'article 1er de l'ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 susvisée a institué " un fonds de solidarité ayant pour objet le versement d'aides financières aux personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation du covid-19 et des mesures prises pour en limiter la propagation ". Aux termes de l'article 1er du décret n° 2020-371 du 30 mars 2020 susvisé, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - Le fonds mentionné par l'ordonnance du 25 mars 2020 susvisée bénéficie aux personnes physiques et personnes morales de droit privé résidentes fiscales françaises exerçant une activité économique, ci-après désignées par le mot : entreprises, remplissant les conditions suivantes : 1° (abrogé) / 2° Elles ne se trouvaient pas en liquidation judiciaire au 1er mars 2020 / (...) / Dans le présent décret, la notion de chiffre d'affaires s'entend comme le chiffre d'affaires hors taxes ou, lorsque l'entreprise relève de la catégorie des bénéfices non commerciaux, comme les recettes nettes hors taxes (...) ". Aux termes de l'article 3-26 du même décret : " A. - Les entreprises mentionnées à l'article 1er du présent décret, n'ayant pas fait l'objet d'un arrêté pris par le préfet de département ordonnant la fermeture de l'entreprise (...) bénéficient d'aides financières prenant la forme de subventions destinées à compenser la perte de chiffre d'affaires subie au cours du mois d'avril 2021, lorsqu'elles remplissent les conditions suivantes : 1° Elles ont fait l'objet : a) D'une interdiction d'accueil du public sans interruption du 1er avril 2021 au 30 avril 2021 et ont subi une perte de chiffre d'affaires, y compris le chiffre d'affaires réalisé sur les activités de vente à distance, avec retrait en magasin ou livraison, ou sur les activités de vente à emporter, d'au moins 20 % durant la période comprise entre le 1er avril 2021 et le 30 avril 2021 / (...) / B. - Les entreprises mentionnées au a du 1 du A du I perçoivent une subvention égale soit au montant de la perte de chiffre d'affaires dans la limite de 10 000 euros soit à 20 % du chiffre d'affaires de référence mentionné au IV du présent article. Les entreprises bénéficient de l'option qui est la plus favorable. / (...) / IV. - La perte de chiffre d'affaires au sens du présent article est définie comme la différence entre, d'une part, le chiffre d'affaires au cours du mois d'avril 2021 et, d'autre part, le chiffre d'affaires de référence défini comme : - le chiffre d'affaires réalisé durant le mois d'avril 2019, ou le chiffre d'affaires mensuel moyen de l'année 2019 selon l'option retenue par l'entreprise lors de sa demande au titre du mois de février 2021 ou le cas échéant du mois de mars 2021 si aucune demande n'a été déposée au titre du mois de février 2021 ; ou si le fonds de solidarité n'a pas été demandé au titre du mois de mars 2021, le chiffre d'affaires réalisé durant le mois d'avril 2019, ou le chiffre d'affaires mensuel moyen de l'année 2019 (...) ".

4. Aux termes de l'article 1844-7 du code civil : " La société prend fin : (...) 4° Par la dissolution anticipée décidée par les associés (...) ". Aux termes de l'article L. 237-2 du code de commerce : " La société est en liquidation dès l'instant de sa dissolution pour quelque cause que ce soit sauf dans le cas prévu au troisième alinéa de l'article 1844-5 du code civil. Sa dénomination sociale est suivie de la mention " société en liquidation " / La personnalité morale de la société subsiste pour les besoins de la liquidation, jusqu'à la clôture de celle-ci. / La dissolution d'une société ne produit ses effets à l'égard des tiers qu'à compter de la date à laquelle elle est publiée au registre du commerce et des sociétés ".

5. Il est constant que M. A..., associé unique de la société Market Stock, a, le 28 janvier 2020, décidé de dissoudre par anticipation cette société et de la placer en liquidation amiable, en se conférant l'exercice des fonctions de liquidateur. Il ressort du compte définitif de liquidation que cette société n'a, en 2021, réalisé aucun chiffre d'affaires, lequel est constitué par les ventes de marchandises, et n'a d'ailleurs effectué aucun achat de marchandises, se bornant à des opérations de réalisation de l'actif, en l'espèce les marchandises en stock, jusqu'à la clôture de la liquidation, intervenue le 31 octobre 2021, la radiation de la société du registre du commerce ayant été publiée le 9 décembre suivant. Ainsi, n'exerçant, en avril 2021, aucune activité économique au sens de l'ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 et du décret n° 2020-371 du 30 mars 2020, la société Market Stock ne pouvait pas bénéficier de l'aide qu'ils instituent.

6. Il résulte de ce qui précède que la société Market Stock n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a, par le jugement attaqué, rejeté sa demande. Ses conclusions, présentées en appel, tendant à ce que la cour la rétablisse dans ses droits et lui accorde le bénéfice de l'aide sollicitée, doivent en conséquence être également rejetées.

Sur les frais d'instance :

7. La présente instance ne comprenant pas de dépens, les conclusions présentées à ce titre doivent être rejetées.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Market Stock demande au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Market Stock est rejetée.

Article 2 e : Le présent arrêt sera notifié à la société Market Stock, à M. le mandataire Jeff A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 17 juin 2024, à laquelle siégeaient :

M. Stillmunkes, président de la formation de jugement,

M. Gros, premier conseiller,

Mme Vergnaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2024.

Le rapporteur,

B. Gros

Le président,

H. Stillmunkes

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY02096


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02096
Date de la décision : 04/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-05-04 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. - Défense de la concurrence. - Aides d’Etat.


Composition du Tribunal
Président : M. STILLMUNKES
Rapporteur ?: M. Bernard GROS
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : RESTA CLÉMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-04;22ly02096 ?
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