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02/07/2024 | FRANCE | N°23LY01934

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 6ème chambre, 02 juillet 2024, 23LY01934


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



Mme H... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 9 janvier 2023 par lesquelles le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, en lui impartissant un délai de départ volontaire de trente jours pour ce faire, et a désigné son pays de renvoi.



Par un jugement n° 2300797 du 11 mai 2023, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cett

e demande.





Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 6 juin 2023, M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme H... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 9 janvier 2023 par lesquelles le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, en lui impartissant un délai de départ volontaire de trente jours pour ce faire, et a désigné son pays de renvoi.

Par un jugement n° 2300797 du 11 mai 2023, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 juin 2023, Mme H..., représentée par la SELARL BS2A Bescou et Sabatier avocats associés, agissant par Me Sabatier, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2300797 du 11 mai 2023 du tribunal administratif de Grenoble et les décisions préfectorales du 9 janvier 2023 ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Savoie de lui délivrer un certificat de résidence algérien de dix ans, ou d'un an portant la mention " vie privée et familiale " ou, à tout le moins, de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à venir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme B... soutient que :

- la décision de refus de séjour a été prise en méconnaissance des stipulations du b) de l'article 7bis et du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et se trouve entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la mesure d'éloignement est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de séjour et méconnaît également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les décisions lui impartissant un délai de trente jours pour quitter le territoire français et désignant son pays de renvoi sont illégales en conséquence de l'illégalité du refus de séjour et de la mesure d'éloignement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mai 2024, le préfet de la Savoie conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 27 décembre 1968 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Gros, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique du 17 juin 2024.

Considérant ce qui suit :

1. Mme H..., ressortissante algérienne née en 1953, est entrée en France sous couvert d'un visa à entrées multiples, pour une durée totale cumulée de séjour de 90 jours, valable du 27 mai au 22 novembre 2022. Elle a, le 11 octobre 2022, sollicité la délivrance d'un certificat de résidence de dix ans, en qualité d'ascendant à charge d'un ressortissant français, et subsidiairement, en invoquant sa vie privée et familiale, la délivrance d'un certificat de résidence d'une durée d'un an. Par des décisions du 9 janvier 2023, le préfet de la Savoie lui a opposé un refus, assorti d'une mesure d'éloignement, avec délai de départ volontaire de trente jours, et a désigné son pays de renvoi. Mme B... relève appel du jugement du 11 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Grenoble rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions préfectorales.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : (...) b) À l'enfant algérien d'un ressortissant français si cet enfant a moins de vingt et un ans ou s'il est à la charge de ses parents, ainsi qu'aux ascendants d'un ressortissant français et de son conjoint qui sont à sa charge. ". Il résulte de ces stipulations que, pour refuser à un ressortissant algérien la délivrance d'un certificat de résidence en qualité d'ascendant à charge d'un ressortissant français, le préfet peut légalement fonder sa décision sur la circonstance que le demandeur ne saurait être regardé comme étant à la charge de son descendant, dès lors qu'il dispose de ressources propres lui permettant de subvenir aux besoins de la vie courante dans son pays d'origine dans des conditions décentes, que son descendant de nationalité française ne pourvoit pas régulièrement à ses besoins ou qu'il ne justifie pas des ressources nécessaires pour le faire.

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... perçoit, depuis janvier 2013, une pension de retraite algérienne d'un montant mensuel de 19 079,33 dinars en avril 2022, de peu inférieure au salaire minimum algérien s'élevant à 20 000 dinars depuis 2020. De plus, les relevés bancaires du compte qu'elle détient auprès de la société générale Algérie, qu'elle-même a produits, font apparaître, hormis les sommes alléguées provenir de son fils, des versements que la requérante n'explique pas davantage en appel qu'en première instance. La requérante n'établit donc pas être dépourvue des ressources lui permettant de subvenir aux besoins de la vie courante en Algérie. Par ailleurs, ce n'est qu'à compter de mai 2019 que son fils aîné C... A..., de nationalité française, qui l'héberge, lui a versé mensuellement 200 euros, jusqu'en octobre, avant de reprendre ces versements, de janvier à juillet 2020, et il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B... aurait bénéficié de versements ultérieurs provenant de M. C... A.... La requérante n'apparaissant ainsi pas être à la charge de son fils de nationalité française et de sa conjointe, la décision de refus de séjour attaquée n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations visées ci-dessus du b) de l'article 7bis de l'accord franco-algérien.

4. En second lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Et aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ".

5. Il est vrai que trois fils de Mme B..., M. C... A..., né en 1977, M. F... A..., né en 1981, de nationalité française également et M. D... A..., titulaire d'un titre de séjour de dix ans en qualité de membre de la famille d'un ressortissant de l'Union européenne, résident en France avec leurs épouses et enfants. Toutefois, la requérante n'est pas isolée en Algérie, son pays d'origine qu'elle a quitté pour la dernière fois le 6 octobre 2022, âgée de 69 ans, peu avant la décision de refus de séjour contestée prise le 9 janvier 2023, pays où elle a nécessairement conservé des attaches et où réside d'ailleurs un autre de ses fils, M. G... A..., né en 1978, qui souffre d'une affection psychiatrique. Dans ces conditions, en opposant le refus de séjour contesté, le préfet de la Savoie ne peut pas être regardé comme ayant porté une atteinte disproportionnée au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations visées ci-dessus de l'article 6 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, par suite, être écarté.

6. En dernier lieu, pour les mêmes motifs précédemment exposés, c'est sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que le préfet de la Savoie a refusé d'admettre Mme B... au séjour.

Sur les autres décisions :

7. Il résulte de ce qui précède que Mme B... ne peut pas exciper de l'illégalité du refus de séjour à l'encontre de la mesure d'éloignement et, en tout état de cause, à l'encontre de la décision désignant son pays de renvoi.

8. Pour les mêmes motifs exposés au point 5 du présent arrêt, la mesure d'éloignement n'a pas été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. Il résulte de ce qui précède que la requérante ne peut pas exciper de l'illégalité de cette même mesure d'éloignement à l'encontre de la décision lui impartissant un délai de trente jours pour quitter le territoire français et de celle désignant son pays de renvoi.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Savoie.

Délibéré après l'audience du 17 juin 2024, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Stillmunkes, président assesseur,

M. Gros, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juillet 2024.

Le rapporteur,

B. Gros

Le président,

F. Pourny

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY01934


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY01934
Date de la décision : 02/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Bernard GROS
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU & SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-02;23ly01934 ?
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