Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 2 mars 2023 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2306235 du 18 décembre 2023, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 18 janvier 2024, M. C..., représenté par Me Schürmann, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Drôme du 2 mars 2023 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, et de lui délivrer dans l'attente et sans délai une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
M. C... soutient que :
- le refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 421-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en l'absence de consultation de la commission du titre de séjour ;
- il méconnaît l'article 6-1) de l'accord franco-algérien eu égard à sa présence de plus de dix ans France et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- il méconnaît l'article 6-5) de l'accord franco-algérien et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le délai de départ volontaire est entachée d'un défaut d'examen de sa situation particulière ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été dispensée d'instruction en application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 avril 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord du 27 décembre 1968 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. Laval, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant algérien, né le 11 juin 1966, est entré en France, le 30 juin 2001, sous couvert d'un visa court séjour, selon ses déclarations. Le 4 janvier 2022, il a présenté une demande de titre de séjour en application de l'article 6 1) de l'accord franco-algérien. Par un arrêté du 2 mars 2023, le préfet de la Drôme a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays de renvoi. M. C... relève appel du jugement du 18 décembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité du refus d'admission au séjour :
2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) ".
3. M. C... soutient résider en France de façon continue depuis 2001 à la date de l'arrêté du 2 mars 2023 rejetant sa demande de certificat de résidence. Toutefois, il se borne, essentiellement, à produire des relevés bancaires de livret A attestant d'opérations bancaires éparses et non régulières où ne figurent, en particulier, en 2015, que les intérêts acquis au titre de l'année 2014, ainsi que des courriers administratifs du gestionnaire de l'aide médicale d'Etat sans relevé de prestations, en particulier de 2013 à 2016. Ces éléments ne sont pas suffisants pour établir sa présence en France depuis au moins dix ans à la date de l'arrêté attaqué. Si l'intéressé produit, également, plusieurs attestations de sympathie témoignant de ce qu'il réside régulièrement à Saint-Nazaire-en-Royan auprès d'un oncle qu'il assisterait dans la vie quotidienne, ou à Saint-Hilaire-du-Rosier où il aurait été hébergé en 2018, ainsi qu'une attestation d'un organisme d'aide sociale, ces attestations, d'ordre général, ne permettent pas d'établir sa présence continue sur le territoire d'au moins dix ans. Ainsi, le préfet de la Drôme n'a pas méconnu les stipulations de l'article 6-1) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 en refusant de lui délivrer un certificat de résidence sur ce fondement.
4. Pour les mêmes motifs et en l'absence d'argumentation particulière, M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de l'admettre au séjour, le préfet de la Drôme a commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
5. Aux termes enfin de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. M. C... qui ne démontre pas résider sur le territoire français depuis plus de dix ans, et s'est maintenu sur le territoire français à la suite d'une précédente mesure d'éloignement, confirmée en dernier lieu par un arrêt de la cour administrative d'appel, du 2 octobre 2014. Il est célibataire, sans charge de famille, et n'établit pas assister son oncle, qui l'hébergerait, alors qu'il dispose en Algérie de ses parents et de ses frères et sœurs. M. C..., qui ne justifie d'aucune insertion professionnelle, se borne à invoquer une promesse d'embauche qu'il ne fournit pas et sa prise en charge par une association caritative. Dans ces conditions, et eu égard aux conditions de séjour du requérant en France, le préfet de la Drôme n'a pas méconnu l'article 6-5) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ni porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et n'a, dès lors, pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en refusant de l'admettre au séjour.
7. En application de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet est tenu de saisir la commission du titre du séjour du seul cas des algériens qui remplissent effectivement les conditions prévues par l'accord franco-algérien auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les demandeurs qui se prévalent de ces stipulations. Les dispositions de l'article L. 435-1 du même code n'étant pas applicables aux ressortissants algériens, la saisine de la commission du titre de séjour prévue par ces dernières dispositions est en revanche sans portée utile pour ces ressortissants. Dans ces conditions, dès lors que M. C... ne réunit pas les conditions de délivrance du certificat de résidence de plein droit dont il se prévaut, le préfet n'avait pas à saisir la commission du titre de séjour.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
8. Le refus d'admission au séjour n'étant pas illégal, M. C... n'est pas fondé à exciper de son illégalité à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français.
9. Pour les motifs déjà exposés, le moyen selon lequel la décision obligeant le requérant à quitter le territoire français méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés doit être écarté.
Sur la légalité de la décision sur le délai de départ :
10. Aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. / L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / Elle peut prolonger le délai accordé pour une durée appropriée s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. L'étranger est informé par écrit de cette prolongation ".
11. Si M. C... soutient que les particularités de sa situation justifiaient une prorogation du délai de départ volontaire, il ne donne aucune précision sur les circonstances qui seraient de nature à faire regarder le délai de trente jours qui lui a été accordé comme inadapté à sa situation.
12. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C.... Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et des outre-mer au préfet de la Drôme.
Délibéré après l'audience du 30 mai 2024, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme Courbon, présidente-assesseure,
M. Laval, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 juin 2024.
Le rapporteur,
J-S. Laval
Le président,
D. Pruvost
La greffière,
M B...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 24LY00152