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20/06/2024 | FRANCE | N°24LY00019

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 2ème chambre, 20 juin 2024, 24LY00019


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. A... D... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 1er août 2022 par lequel la préfète de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2302852 du 21 juillet 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour



Par une req

uête, enregistrée le 4 janvier 2024, M. A... D... C..., représenté par Me Lawson-Body, demande à la cour :



1°) d'annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... D... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 1er août 2022 par lequel la préfète de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2302852 du 21 juillet 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 4 janvier 2024, M. A... D... C..., représenté par Me Lawson-Body, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, le tout sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, à verser à son conseil, une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

- le jugement attaqué est entaché d'insuffisance de motivation au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est entachée d'incompétence de son signataire ;

- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- elle méconnaît les articles L. 423-23 et L. 432-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle est illégale du fait de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.

Le préfet de la Loire, qui a reçu communication de la requête, n'a pas présenté d'observations.

M. D... C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 novembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Porée, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. D... C..., de nationalité angolaise, né le 6 avril 1998, est entré irrégulièrement sur le territoire français le 17 septembre 2015 selon ses déclarations. Il a fait l'objet d'un jugement en assistance éducative du juge des enfants de E... du 5 janvier 2016, le confiant aux services du département de la Loire jusqu'à sa majorité. M. D... C... a été autorisé à séjourner sur le territoire français sous couvert de cartes de séjour temporaire, l'une mention " étudiant " valable du 1er octobre 2018 au 30 septembre 2019, et l'autre mention " vie privée et familiale " à partir du 18 mars 2020. Il a demandé le renouvellement de ce dernier titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 1er août 2022, la préfète de la Loire a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. D... C... relève appel du jugement du 21 juillet 2023 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".

3. En premier lieu, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de se prononcer sur tous les arguments de M. D... C..., a répondu au point 6 de son jugement, de manière suffisamment circonstanciée, sur l'absence d'atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale, et par voie de conséquence, sur l'absence de méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué ne serait pas suffisamment motivé sur ce point doit être écarté.

4. En second lieu, M. D... C... soutient que le tribunal administratif a méconnu les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. De tels moyens ne relèvent pas de la régularité du jugement mais de son bien-fondé.

Sur la légalité du refus de renouvellement de titre de séjour :

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ". Aux termes de l'article L. 432-2 de ce code : " Le renouvellement d'une carte de séjour temporaire (...) peut, par une décision motivée, être refusé à l'étranger qui cesse de remplir l'une des conditions exigées pour la délivrance de cette carte dont il est titulaire (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

6. M. D... C..., arrivé sur le territoire français à l'âge de dix-sept ans, a été confié aux services du département de la Loire du 5 janvier au 6 avril 2016 jusqu'à sa majorité et a été muni par la suite de cartes de séjour temporaire en qualité d'étudiant puis au titre de la vie privée et familiale pour lui permettre de poursuivre sa scolarité et de suivre une formation professionnelle. S'il séjourne sur le territoire français depuis sept années et justifie, par la production de bulletins de salaire, d'une durée cumulée de travail de seize mois jusqu'en juillet 2021, il est constant qu'il a obtenu un certificat d'aptitude professionnelle dans la restauration et qu'il n'a pas travaillé après l'achèvement de cette formation lui donnant accès à un emploi dans un secteur en tension. Célibataire, M. D... C..., qui ne peut utilement se prévaloir de la naissance de son fils, le 19 août 2023, soit postérieurement à la date à laquelle a été pris le refus de renouvellement de titre de séjour, ne justifie pas de liens personnels et familiaux intenses, et stables en France. S'il a été pris en charge en tant que mineur isolé à son arrivée en France, cette circonstance ne suffit pas en soi à établir qu'il est dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine et, notamment, que ses parents seraient décédés au cours de la guerre civile ayant sévi en Angola. Dans ces conditions, eu égard aux conditions de son séjour en France et notamment à l'absence de justification sociale et professionnelle particulière en France, M. D... C... n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de faire droit à sa demande de renouvellement de son titre de séjour, le préfet a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise et qu'il a ainsi méconnu l'article L. 432-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas davantage méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en rejetant sa demande.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".

8. M. D... C... ne peut utilement se prévaloir de la naissance de son fils le 19 août 2023 pour contester la légalité de la décision prise sur son droit au séjour.

9. En troisième lieu, M. D... C... reprend en appel les autres moyens qu'il avait invoqués en première instance à l'encontre de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour. Il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif.

Sur la légalité des autres décisions :

10. M. D... C... reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination. Il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif.

11. Il résulte de ce qui précède que M. D... C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, et celles présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 30 mai 2024, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Courbon, présidente-assesseure,

M. Porée, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 juin 2024.

Le rapporteur,

A. Porée

Le président,

D. Pruvost

La greffière,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 24LY00019


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY00019
Date de la décision : 20/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Arnaud POREE
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : LAWSON- BODY

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-20;24ly00019 ?
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