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20/06/2024 | FRANCE | N°23LY00449

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 7ème chambre, 20 juin 2024, 23LY00449


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure



M. Yann Bielak a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision du 17 octobre 2019 par laquelle la responsable de la gestion des ressources humaines du service administratif régional (SAR) de la Cour d'appel de Riom a fixé le montant mensuel de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE) à 490,19 euros, soit un montant annuel de 5 882,28 euros et d'enjoindre, sous astreinte, à la directrice déléguée à l'administration interré

gionale judiciaire de réexaminer sa situation et de prendre une nouvelle décision fixant le m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. Yann Bielak a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision du 17 octobre 2019 par laquelle la responsable de la gestion des ressources humaines du service administratif régional (SAR) de la Cour d'appel de Riom a fixé le montant mensuel de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE) à 490,19 euros, soit un montant annuel de 5 882,28 euros et d'enjoindre, sous astreinte, à la directrice déléguée à l'administration interrégionale judiciaire de réexaminer sa situation et de prendre une nouvelle décision fixant le montant annuel de cette indemnité à 6 300 euros à compter du 1er janvier 2019.

Par un jugement n° 1902613 du 8 décembre 2022, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 8 février 2023, M. A..., représenté par Me Bucci, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 17 octobre 2019 ;

3°) d'enjoindre à la directrice déléguée à l'administration interrégionale judiciaire de réexaminer sa situation et de prendre une nouvelle décision fixant le montant annuel de cette indemnité à 6 300 euros à compter du 1er janvier 2019, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

Il soutient que :

- sa requête, présentée dans le délai d'appel, est recevable ;

- l'administration n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation en lui attribuant ce montant d'IFSE dès lors qu'il perçoit 417,72 euros de moins qu'un greffier accédant au grade de greffier principal postérieurement au 1er janvier 2019 et que ce montant correspond au montant attribué à plusieurs de ses collègues qui ont accédé au grade de greffier principal à des dates différentes ;

- l'administration n'a pas plus procédé à un examen particulier de sa situation lors de la détermination du montant de son IFSE au titre de l'année 2022.

Par un mémoire enregistré le 25 janvier 2024, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 25 janvier 2024, l'instruction a été close au 1er mars 2024.

Un mémoire présenté pour M. A... a été enregistré le 3 juin 2024, postérieurement à la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;

- l'arrêté du 17 décembre 2018 pris pour l'application au corps des greffiers des services judiciaires des dispositions du décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 portant création du RIFSEEP ;

- la circulaire du garde des sceaux, ministre de la justice, du 3 juillet 2019, portant sur les modalités de gestion du régime indemnitaire du corps des directeurs des services de greffe judiciaires et greffiers des services judiciaires ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, présidente-assesseure ;

- et les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Par décision du 17 octobre 2019, la responsable de la gestion des ressources humaines du service administratif régional (SAR) de la cour d'appel de Riom a classé M. Yann Bielak, greffier affecté au tribunal de grande instance de Moulins, qui avait été promu au grade de greffier principal le 1er janvier 2018, dans le groupe de fonctions 3 du corps des greffiers des services judiciaires pour la détermination du montant de son indemnité de fonctions, de sujétion et d'expertise (IFSE) et a fixé le montant mensuel de celle-ci à 490,19 euros, soit un montant annuel de 5 882,28 euros. M. A... relève appel du jugement du 8 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à ce qu'il soit enjoint à la directrice déléguée à l'administration interrégionale judiciaire de réexaminer sa situation et de fixer le montant annuel de cette indemnité à 6 300 euros à compter du 1er janvier 2019.

2. Aux termes de l'article 2 du décret du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RISEEP) dans la fonction publique de l'État : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise est fixé selon le niveau de responsabilité et d'expertise requis dans l'exercice des fonctions. / Les fonctions occupées par les fonctionnaires d'un même corps (...) sont réparties au sein de différents groupes au regard des critères professionnels suivants : 1° Fonctions d'encadrement, de coordination, de pilotage ou de conception ; 2° Technicité, expertise, expérience ou qualification nécessaire à l'exercice des fonctions ; 3° Sujétions particulières ou degré d'exposition du poste au regard de son environnement professionnel. / Le nombre de groupes de fonctions est fixé pour chaque corps (...) par arrêté du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget et, le cas échéant, du ministre intéressé. / Ce même arrêté fixe les montants minimaux par grade (...), les montants maximaux afférents à chaque groupe de fonctions (...) ". Aux termes de son article 3 : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise fait l'objet d'un réexamen : 1° En cas de changement de fonctions ; 2° Au moins tous les quatre ans, en l'absence de changement de fonctions et au vu de l'expérience acquise par l'agent ; 3° En cas de changement de grade à la suite d'une promotion ". Aux termes de l'article 6 du même décret : " Lors de la première application des dispositions du présent décret, le montant indemnitaire mensuel perçu par l'agent au titre du ou des régimes indemnitaires liés aux fonctions exercées ou au grade détenu et, le cas échéant, aux résultats, à l'exception de tout versement à caractère exceptionnel, est conservé au titre de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise jusqu'à la date du prochain changement de fonctions de l'agent, sans préjudice du réexamen au vu de l'expérience acquise prévu au 2° de l'article 3 ". L'arrêté interministériel du 17 décembre 2018 pris pour l'application au corps des greffiers des services judiciaires du décret du 20 mai 2014 portant création du RIFSEEP a fixé à trois le nombre de groupes de fonctions dans lesquels doivent être classés les greffiers des services judiciaires, les plafonds annuels de l'IFSE afférents à chacun de ces trois groupes, ainsi que les montants minimaux annuels de l'indemnité pour chacun des deux grades de ce corps.

3. La circulaire du garde des sceaux, ministre de la justice, du 3 juillet 2019, portant sur les modalités de gestion du régime indemnitaire du corps des directeurs des services de greffe judiciaires et greffiers des services judiciaires prévoit, d'une part, à son paragraphe 1.2, que ce qu'elle qualifie de " socle indemnitaire " " correspond à un montant minimum et non pas à un montant indemnitaire unique par groupe. Au sein d'un même groupe de fonctions, les agents peuvent ainsi bénéficier de montants individuels différents en raison, notamment, de la diversité de leurs parcours professionnels ". L'annexe 3 de cette circulaire fixe le " socle indemnitaire " de l'IFSE pour chacun des trois groupes des greffiers, en distinguant ceux qui exercent leurs fonctions à l'administration centrale du ministère de la justice et ceux qui exercent dans les juridictions, les services déconcentrés et les écoles de formation. Le garde des sceaux, ministre de la justice, a fixé à 5 800 euros le montant minimum de l'IFSE pour les fonctionnaires membres du corps des greffiers affectés en juridictions et classés dans le groupe 3, quel que soit leur grade. A son paragraphe 6, cette circulaire dispose, d'autre part, que : " Le changement de grade se traduit par une revalorisation automatique du montant de l'IFSE perçu par l'agent avant sa promotion, dans la limite du plafond réglementaire applicable au groupe de fonctions correspondant au poste occupé par l'agent. / Les montants de revalorisation, fixés par la présente circulaire, sont forfaitaires et identiques pour tous les périmètres d'affectation " et renvoie à l'annexe 4 la fixation à 1 000 euros du montant de cette revalorisation pour les greffiers qui deviennent greffiers principaux à compter de son entrée en vigueur le 1er janvier 2019.

4. Ainsi que le mentionne au demeurant cette circulaire, la fixation par le ministre de la justice d'un " socle indemnitaire ", qu'il définit comme le montant minimum d'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise garanti à un agent en raison des fonctions exercées, pour chacun des trois groupes de fonctions des greffiers des services judiciaires, ne fait pas obstacle à ce que le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise attribué aux membres d'un même groupe de fonctions soit différent entre ces agents pour tenir compte de l'expérience et de la technicité acquise par chacun dans l'exercice de ces fonctions, sous réserve de ne pas dépasser le plafond annuel de cette indemnité fixé par arrêté interministériel. En prévoyant que les greffiers des services judiciaires exerçant dans les juridictions et classés dans le groupe de fonctions n° 3 bénéficient d'un socle indemnitaire d'un montant de 5 300 euros au 1er janvier 2019, l'annexe 3 de cette circulaire n'a pas entendu interdire que l'expérience et la technicité acquise par un greffier et reconnue notamment par sa réussite à l'examen professionnel de greffier principal avant la mise en œuvre du nouveau régime indemnitaire au 1er janvier 2019 soit prise en compte par l'attribution par son gestionnaire d'un montant d'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise au moins égal au montant attribué aux greffiers qui accèdent à ce grade à compter de cette date, majoré de la revalorisation de 1 000 euros prévue par l'annexe 4 de cette circulaire.

5. Il ressort des pièces du dossier que l'administration a alloué à M. A... un montant d'IFSE correspondant à la garantie indemnitaire individuelle prévue par l'article 6 du décret du 20 mai 2014. Dans ses écritures, l'administration a indiqué qu'elle était tenue, de par ces dispositions, d'arrêter le montant d'indemnité de M. A... à ce montant. Ainsi, il apparaît que l'administration n'a pas procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé lui permettant de prendre en compte l'expérience et la technicité acquise par M. A... et reconnue notamment par sa réussite à l'examen professionnel de greffier principal avant la mise en œuvre du nouveau régime indemnitaire au 1er janvier 2019 et lui permettant, le cas échéant, à l'issue de cet examen, de lui attribuer une indemnité plus élevée. Par suite, il y a lieu de faire droit au moyen tiré de ce que l'administration n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation.

6. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande.

7. Eu égard à ses motifs, le présent arrêt implique seulement qu'il soit enjoint au garde des sceaux, ministre de la justice de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

DÉCIDE :

Article 1er : La décision du 17 octobre 2019 par laquelle la responsable de la gestion des ressources humaines du service administratif régional (SAR) de la Cour d'appel de Riom a fixé le montant mensuel de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE) de M. A... à 490,19 euros et le jugement n° 1902613 du 8 décembre 2022 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au garde des sceaux, ministre de la justice de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Yann Bielak et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 6 juin 2024 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

M. Chassagne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2024.

La rapporteure,

A. Duguit-LarcherLe président,

V-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY00449

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00449
Date de la décision : 20/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. - Rémunération. - Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : SCP DEMURE-GUINAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-20;23ly00449 ?
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