Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La SARL Lucaloris a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er octobre 2011 au 30 septembre 2014, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014 ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1907498 du 9 décembre 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 6 février 2023, la SARL Lucaloris, représentée par Me Puy-Pomagalski, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions et pénalités ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'administration fiscale a rejeté à tort sa comptabilité ;
- les paragraphes 60, 70, 80 et 90 de la documentation de base référencée BOI-CF-IOR-10-20, 640 de la documentation de base référencée BOI-CF-IOR-10-50 et 410 de la documentation de base référencée BOI-CF-IOR-60-40-30, se rapportant au rejet de comptabilité, sont opposables à l'administration ;
- la reconstitution de chiffres d'affaires par l'administration fiscale présente de nombreuses irrégularités et incohérences ;
- concernant la reconstitution des recettes du bar de nuit Le Kube, les prix de vente des boissons retenus ne pouvaient pas être ceux en vigueur au 31 mars 2015 mais devaient être ceux applicables au cours des exercices vérifiés ; l'administration n'a pas tenu compte de sa clientèle principalement composée de saisonniers qui ne paient pas les mêmes tarifs que les touristes, ni des " happy hours " organisés durant lesquels les tarifs sont réduits ; la détermination de la marge pondérée par la vérificatrice est entachée de plusieurs erreurs ;
- concernant la reconstitution de recettes du restaurant Le Capricorne fondée sur la méthode du chiffre d'affaires liquides, la vérificatrice aurait dû prendre en considération les bières spéciales dont la marge est plus faible ; le café est offert à hauteur de 90 % ; s'il a été admis par l'administration que le génépi était systématiquement offert aux clients, il n'a pas à être remplacé par du whisky qui n'est pas un digestif et elle ne réalise aucune marge sur les digestifs ; le prix de revient du Coca-Cola est de 0,55 euro et son prix de vente est de 2,90 euros ;
- concernant la reconstitution de recettes du restaurant Le Capricorne fondée sur les marges pratiquées sur les liquides et les solides, la marge pondérée sur les liquides est erronée pour les mêmes raisons que précédemment soulevées dans le cadre de la reconstitution de recettes fondée sur la méthode du chiffre d'affaires liquides ; l'administration n'a pas pris en considération les prix de vente en vigueur lors de la saison 2012/2013 pour l'entrecôte, les pizzas calzone et 4 fromages ;
- la taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 7 560 euros a été régularisée sur la déclaration de décembre 2014 ;
- la pénalité de 40 % pour manquement délibéré n'est pas fondée.
Par un mémoire, enregistré le 9 août 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 23 novembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 26 décembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Porée, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Lucaloris, qui exploitait un restaurant et un bar de nuit sous les enseignes de, respectivement, Le Capricorne et Le Kube, dans la station des Ménuires (Savoie), a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos les 30 septembre 2012, 2013 et 2014 à l'issue de laquelle la vérificatrice, après avoir estimé que la comptabilité était irrégulière et non probante, a procédé à une reconstitution extracomptable de ses recettes. En conséquence de ce contrôle, qui a mis en évidence l'existence d'omissions de recettes et révélé l'inscription en comptabilité d'une dette de taxe sur la valeur ajoutée envers le Trésor, la SARL Lucaloris a été assujettie, suivant la procédure contradictoire, à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er octobre 2011 au 30 septembre 2014 et à des compléments d'impôt sur les sociétés au titre des exercices vérifiés, impositions auxquelles l'administration a appliqué, outre les intérêts de retard, la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts. Elle relève appel du jugement du 9 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande de décharge des impositions et pénalités maintenues à sa charge après la décision du directeur départemental des finances publiques de la Savoie du 15 octobre 2019 admettant partiellement sa réclamation.
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne le rejet de la comptabilité :
2. Aux termes de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable : " I - Lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, le contribuable satisfait à l'obligation de représentation des documents comptables mentionnés au premier alinéa de l'article 54 du code général des impôts en remettant au début des opérations de contrôle, sous forme dématérialisée répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget, une copie des fichiers des écritures comptables définies aux articles 420-1 et suivants du plan comptable général. / (...) / II - En présence d'une comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés et lorsqu'ils envisagent des traitements informatiques, les agents de l'administration fiscale indiquent par écrit au contribuable la nature des investigations souhaitées. Le contribuable formalise par écrit son choix parmi l'une des options suivantes : / (...) / c) Le contribuable peut également demander que le contrôle ne soit pas effectué sur le matériel de l'entreprise. Il met alors à la disposition de l'administration les copies des documents, données et traitements soumis à contrôle. Ces copies sont produites sur tous supports informatiques, répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget. L'administration restitue au contribuable avant la mise en recouvrement les copies des fichiers et n'en conserve pas de double. L'administration communique au contribuable, sous forme dématérialisée ou non au choix du contribuable, le résultat des traitements informatiques qui donnent lieu à des rehaussements au plus tard lors de l'envoi de la proposition de rectification mentionnée à l'article L. 57. / (...) ". Aux termes de l'article L. 102 B du même livre : " I. - Les livres, registres, documents ou pièces sur lesquels peuvent s'exercer les droits de communication, d'enquête et de contrôle de l'administration doivent être conservés pendant un délai de six ans à compter de la date de la dernière opération mentionnée sur les livres ou registres ou de la date à laquelle les documents ou pièces ont été établis. Sans préjudice des dispositions du premier alinéa, lorsque les livres, registres, documents ou pièces mentionnés au premier alinéa sont établis ou reçus sur support informatique, ils doivent être conservés sous cette forme pendant une durée au moins égale au délai prévu au premier alinéa de l'article L. 169. / (...) ".
3. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " (...) La charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission ou du comité. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge. (...) ". La charge de la preuve des graves irrégularités entachant la comptabilité de la société requérante incombe à l'administration.
4. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la SARL Lucaloris a disposé d'une caisse informatisée gérée par le logiciel de caisse de marque Orchestra PDV sur l'ensemble de la période vérifiée. Toutefois, la société requérante n'a pas produit, lors de la vérification de comptabilité, les fichiers relatifs aux données de caisse concernant l'établissement Le Kube au titre de la période du 1er octobre 2011 au 14 février 2012 et de l'exercice clos en 2014 et concernant l'établissement Le Capricorne au titre des exercices clos en 2012 et 2013. S'il résulte d'une attestation d'un prestataire de service qu'un dysfonctionnement important de la caisse a empêché d'émettre les bandes de caisse, la SARL Lucaloris ne produit que des tickets Z faisant état de relevés mensuels et non détaillés par jour. De plus, il résulte de l'instruction qu'il existe des ruptures de séquences dans la numérotation des tickets de caisse démontrant que des tickets ont été supprimés, en l'occurrence trente-huit tickets pour l'établissement Le Kube au titre des exercices clos en 2012 et 2013 et vingt-quatre tickets pour l'établissement Le Capricorne au titre de l'exercice clos en 2014, ainsi que des ruptures dans les numéros d'ordre de lignes de tickets démontrant la suppression d'écritures. Si la SARL Lucaloris soutient que ces ruptures sont peu nombreuses sur l'ensemble de la période vérifiée, il résulte de ce qui vient d'être dit que l'administration n'a pas eu accès aux fichiers informatisés issus de la caisse enregistreuse au titre de la période du 1er octobre 2011 au 14 février 2012 et de l'exercice clos en 2014 pour l'établissement Le Kube et au titre des exercices clos en 2012 et 2013 pour l'établissement Le Capricorne. Si la société soutient également que les ruptures sont liées au fait que le personnel est débordé lors des services, elle ne le démontre en tout état de cause pas. Enfin, il résulte de l'instruction que la société requérante a procédé à des écritures de régularisation, notamment sur l'enregistrement des recettes au titre des trois exercices en litige, afin d'équilibrer le total des recettes ressortant du compte de caisse avec le montant des recettes portées sur son compte bancaire, démontrant ainsi que l'enregistrement des recettes en caisse n'est pas probant. Eu égard à l'ensemble de ces irrégularités, c'est à bon droit que l'administration a rejeté la comptabilité de la société requérante quand bien même celle-ci a produit, depuis la vérification de comptabilité, ses inventaires de stocks.
5. En second lieu, la SARL Lucaloris n'est pas fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des paragraphes 60, 70, 80 et 90 de la documentation de base référencée BOI-CF-IOR-10-20, 640 de la documentation de base référencée BOI-CF-IOR-10-50 et 410 de la documentation de base référencée BOI-CF-IOR-60-40-30, qui ne font pas d'interprétation de la loi différente de celle dont il est fait application dans le présent arrêt.
En ce qui concerne la charge de la preuve :
6. La comptabilité comporte de graves irrégularités. Toutefois, l'administration, qui n'a pas suivi l'avis de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires du 29 octobre 2018 sur les tarifs pratiqués par l'établissement Le Capricorne pour ses plats figurant sur une carte de la saison 2012/2013, n'a pas établi les impositions conformément à cet avis. Elle supporte donc la charge de la preuve.
En ce qui concerne les reconstitutions de recettes :
S'agissant du bar de nuit Le Kube :
7. Il résulte de l'instruction que, si l'administration a procédé à la reconstitution des recettes du bar en se fondant sur la méthode des achats quantitatifs de boissons revendues et sur celle de la marge globale pratiquée, elle n'a toutefois retenu que les résultats issus de la première méthode. Il résulte de l'instruction que demeurent en litige les chiffres d'affaires reconstitués à concurrence de 121 636 euros au titre de l'exercice clos en 2012, de 122 957 euros au titre de l'exercice clos en 2013 et de 172 720 euros au titre de l'exercice clos en 2014.
8. En premier lieu, l'administration a retenu les tarifs relevés le 31 mars 2015, qui sont identiques à ceux résultant des justificatifs présentés pour la période portant sur l'exercice clos en 2013. Si la SARL Lucaloris se prévaut d'une carte de tarifs pour la saison 2012/2013 faisant état de tarifs différents, ce document est dépourvu de valeur probante dès lors que la mention de la saison est apposée de façon manuscrite et qu'il n'indique pas qu'il concerne le bar de nuit Le Kube à la différence des autres cartes produites. En outre, la société requérante n'est pas fondée à se prévaloir du tarif de 2,50 euros du demi de bière Kronenbourg admis par la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires pour l'établissement Le Capricorne sur la base de la carte de la saison 2012/2013 produite devant elle concernant ce restaurant.
9. En deuxième lieu, la SARL Lucaloris soutient que 70 % de la clientèle du bar Le Kube est composée de saisonniers pour lesquels elle pratique des remises de 30 % sur les tarifs publics. Toutefois, en tenant compte de remises pour les saisonniers et de tarifs spéciaux tels qu'ils ressortent des données de caisse présentées, il en résulterait des rectifications supérieures à celles notifiées. Au demeurant, la SARL Lucaloris ne démontre ni la réalité des remises alléguées en 2012, 2013 et 2014 ni les données qu'elle invoque en se limitant à produire un document de données de gestion se rapportant à l'exercice clos en 2017 mentionnant seulement un nombre de bouteilles pour les saisonniers et un prix global.
10. En troisième lieu, la SARL Lucaloris soutient que le bar pratique une période de " happy hour " de 17 heures 30 à 21 heures, ce qui représente 50 % de ses horaires d'ouverture, qu'elle vend alors des bières, des apéritifs et des softs moins chers qu'aux tarifs de nuit et que ces ventes représentent à minima 50 % de l'ensemble des ventes de ces boissons. Toutefois, en tenant compte des remises pour les saisonniers et des tarifs spéciaux tels qu'ils ressortent des données de caisse présentées, il en résulterait des rectifications supérieures à celles notifiées. Au demeurant, le document justificatif produit se borne à faire mention de " happy hour " et la SARL Lucaloris ne produit aucun élément de nature à justifier la quantité et les tarifs des boissons servies pendant cette période, la part qu'elle représente dans son chiffre total, ni d'ailleurs la durée de la période de " happy hour ".
11. En quatrième lieu, il résulte de la proposition de rectification et de la décision d'acceptation partielle de réclamation de la société requérante que, si l'administration a déduit des offerts à concurrence de vingt-deux bouteilles de vodka au titre de l'exercice clos en 2012, elle a fait de même au titre des exercices clos en 2013 et 2014 à concurrence respectivement de quarante-huit et trente-neuf bouteilles de vodka en les déduisant directement des achats.
12. En cinquième et dernier lieu, ainsi qu'il a été dit au point 7 ci-dessus, si l'administration a eu recours à deux méthodes de reconstitution des recettes du bar, celle des achats quantitatifs de boissons revendues et celle de la marge globale pratiquée, elle n'a retenu que les chiffres d'affaires reconstitués sur la base de la première de ces méthodes, dont les montants sont inférieurs à ceux déterminés sur la base de cette seconde méthode. Par suite, les moyens de la SARL Lucaloris tirés des erreurs entachant la méthode de la marge globale pratiquée doivent être écartés comme inopérants.
S'agissant du restaurant Le Capricorne :
13. Il résulte de l'instruction que la vérificatrice a eu recours à deux méthodes de reconstitution de recettes, l'une à partir du chiffre d'affaires liquides du restaurant, en multipliant les achats liquides revendus par un coefficient de marge pondérée puis en appliquant la constante chiffre d'affaires liquides / chiffre d'affaires total, l'autre de reconstitution du chiffre d'affaires liquides et du chiffre d'affaires solides avec application des marges pratiquées sur les liquides et les solides, et qu'elle a appliqué la première de ces méthodes à l'exercice clos en 2014 et la seconde de ces méthodes aux exercices clos en 2012 et 2013. Les chiffres d'affaires reconstitués du restaurant ont été fixés, en dernier lieu, à 474 190 euros, 546 023 euros et 530 874 euros au titre, respectivement, des exercices clos en 2012, 2013 et 2014.
14. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la vérificatrice a retenu une marge de 6 pour le demi de bière Kronenbourg de 25 cl. Si la SARL Lucaloris soutient qu'il fallait également prendre en considération de nombreuses bières spéciales dont la marge est inférieure à 4,46, il n'est pas contesté que les ventes de bières au restaurant représentent 7 % de son chiffre d'affaires total, que la bière pression représente 93,47 % de ces 7 % et que la bière pression Kronenbourg représente plus de 62 % de la bière vendue au restaurant. Ainsi, c'est à bon droit que l'administration s'est limitée à prendre en considération cette bière pression et non les bières spéciales en bouteille.
15. En deuxième lieu, si la SARL Lucaloris soutient que le café est offert en proportion de 90 %, elle ne le justifie pas alors que ce montant est manifestement excessif au regard des pratiques de la profession et qu'il résulte de la proposition de rectification qu'elle a vendu l'équivalent de 56 kilogrammes de café, selon la comptabilisation des recettes, pour un total de 80 kilogrammes achetés au titre de l'exercice clos en 2012.
16. En troisième lieu, l'administration a estimé que le digestif génépi était systématiquement offert à la clientèle du restaurant. L'administration a toutefois déterminé la marge des digestifs à partir non plus du génépi mais du whisky. Il résulte de l'annexe 5 de la proposition de rectification que le whisky fait partie des digestifs, la société requérante ne démontrant pas le contraire. En outre, il résulte de cette même annexe que les digestifs représentent 1,28 % du résultat total du restaurant au titre de l'exercice clos en 2014, d'après l'étude effectuée sur les bandes de caisse présentées au titre de cet exercice. La société requérante ne démontre pas qu'elle ne dégage pas de marge sur les digestifs.
17. En quatrième lieu, si la SARL Lucaloris soutient que le prix de vente du Coca-Cola est de 2,90 euros, il résulte de la proposition de rectification que le prix retenu est de 2,50 euros pour le soft Coca-Cola, et de la décision d'acceptation partielle de sa réclamation que le prix de vente du soft est de 2,50 euros, et que cette mention d'un tarif de 2,50 euros n'est pas préjudiciable à la société requérante. En outre, si la SARL Lucaloris soutient que le prix de revient du Coca-Cola est de 0,55 euro, il résulte de la facture de la SAS Tresallet-Arragone que la bouteille de Coca-Cola de 150 cl lui a été vendue 1,756 euro de sorte que le prix de revient du verre de 25 cl est de 0,30 euro et non de 0,55 euro.
18. Dans ces conditions, la SARL Lucaloris n'est pas fondée à contester la méthode de reconstitution de recettes basée sur le chiffre d'affaires liquides, ni celle basée sur la marge pondérée sur les liquides.
19. En cinquième et dernier lieu, il résulte de l'annexe 5 de la proposition de rectification, établie sur la base des fichiers de caisse produits par la SARL Lucaloris que le tarif de l'entrecôte était de 17 euros et les prix des pizzas calzone et 4 fromages de 12,50 euros au titre de l'exercice clos en 2014. Si la SARL Lucaloris se prévaut d'une carte de tarifs pour la saison 2012/2013 faisant état de tarifs différents, ce document est dépourvu de valeur probante dès lors que la mention de la saison y est apposée de façon manuscrite et qu'il n'indique pas qu'il concerne le restaurant Le Capricorne à la différence des autres cartes produites, ce quand bien même la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a estimé que la reconstitution du chiffre d'affaires devait tenir compte des tarifs figurant sur la carte de la saison 2012/2013 produite le 14 novembre 2016.
En ce qui concerne le rappel de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 7 560 euros :
20. Il résulte de l'instruction que le compte 44580000 de la comptabilité de la SARL Lucaloris mentionne des montants de taxe sur la valeur ajoutée à régulariser de 2 403 euros au titre de l'exercice clos en 2013 et de 5 157 euros au titre de l'exercice clos en 2014, soit un total de 7 560 euros. Si la société requérante soutient qu'elle a régularisé cette taxe sur la valeur ajoutée dans sa déclaration de taxe sur le chiffre d'affaires souscrite au titre du mois de décembre 2014, il résulte de cette déclaration qu'elle a inscrit un montant de taxe sur la valeur ajoutée collectée de 16 020 euros et elle n'apporte aucun élément de nature à établir que la taxe sur la valeur ajoutée de 7 560 euros est incluse dans cette somme. En outre, s'il résulte également de cette déclaration un montant de 39 117 euros au titre " d'opérations non imposables - régularisations ", la société requérante ne démontre pas davantage qu'une partie de cette somme a été incluse dans la taxe sur la valeur ajoutée brute due de 16 020 euros, ni au demeurant que cette partie de la somme de 39 117 euros recouvrirait la somme précitée de 7 560 euros. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a procédé au rappel de taxe sur la valeur ajoutée de 7 560 euros.
Sur les pénalités :
21. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".
22. En relevant que la comptabilité de la SARL Lucaloris est entachée de graves irrégularités eu égard à l'absence de justificatifs de recettes et l'existence de ruptures, d'inventaires de marchandises non justifiés, d'achats revendus négatifs et d'écritures de régularisations destinées à équilibrer les recettes et les encaissements bancaires, que ces manquements et irrégularités ont concerné l'ensemble des exercices contrôlés, que le montant des recettes omises a été de 67 219 euros, 49 968 euros et 29 852 euros au titre respectivement des trois exercices, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe de l'existence d'une intention délibérée de la SARL Lucaloris d'éluder l'impôt justifiant l'application de la majoration pour manquement délibéré aux impositions en litige.
23. Il résulte de ce qui précède que la SARL Lucaloris n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Lucaloris est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Lucaloris et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 21 mai 2024, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme Courbon, présidente-assesseure,
M. Porée, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 juin 2024.
Le rapporteur,
A. Porée
Le président,
D. Pruvost
La greffière,
M. A...
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
N° 23LY00414