Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La SASU TCE Entreprise a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision de rejet de sa réclamation et de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2016, et des intérêts de retard correspondants.
Par un jugement n° 1901961 du 31 mai 2022, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 1er août 2022 et un mémoire, enregistré le 4 avril 2023, la société TCE Entreprise, représentée par Me Babin, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge de cette imposition et des intérêts de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- en tant que société mère du groupe d'intégration fiscale formée à compter de l'exercice débutant le 1er octobre 2015, incluant dans son périmètre les sociétés du groupe antérieur dont la société Sub Finances était la mère avant d'être acquise à plus de 95 %, elle était fondée à imputer sur son résultat d'ensemble le déficit propre de cette dernière, en application du dispositif prévu au 5. de l'article 223 I du code général des impôts dont les conditions de fond étaient satisfaites ;
- ayant déposé une déclaration rectificative en date du 28 décembre 2018 pour régulariser le manquement aux obligations déclaratives prévues aux articles 46 quater-0 ZJ bis et 46 quater-0 ZL de l'annexe III du code général des impôts pour l'application du dispositif prévu au 5. de l'article 223 I, elle est fondée à bénéficier de ce régime de faveur dès lors que la loi ne sanctionne pas le retard par la déchéance du droit et que sa situation a été régularisée dans le délai de réclamation contentieuse.
Par un mémoire, enregistré le 22 février 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 29 novembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 28 décembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Courbon, présidente assesseure,
- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. La SASU TCE Entreprise a acquis, le 17 mars 2015, l'intégralité des titres de la société Sub Finances qui était alors la société mère d'un groupe fiscalement intégré composé des sociétés Desiage et Imersion. A la clôture de l'exercice clos le 30 septembre 2015, date de dissolution de ce groupe d'intégration fiscal, le déficit d'ensemble du groupe réalisé pendant la période d'intégration fiscale encore reportable, devenu un déficit propre de la société Sub Finances, qui seule pouvait, en tant que société mère, l'imputer sur ses résultats, s'élevait à 218 377 euros. A compter du 1er octobre 2015, la SASU TCE Entreprise a opté pour le régime de l'intégration fiscale pour le nouveau groupe constitué des sociétés membres de l'ancien groupe dont la société Sub Finances était la mère et a imputé, en tant que société mère, ce déficit de 218 377 euros sur le résultat d'ensemble du groupe au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2016. Le 10 septembre 2017, la société Sub Finances a fait l'objet d'une transmission universelle de patrimoine, avec effet rétroactif au 1er octobre 2016, au bénéfice de la SASU TCE Entreprise. A la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration a, par une proposition de rectification du 24 juillet 2018, remis en cause l'imputation du déficit d'ensemble de l'ancien groupe sur le résultat du nouveau groupe pratiquée par la SASU TCE Entreprise et l'a, en conséquence, assujettie, en sa qualité de société mère, à un complément d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2016. Par une seconde proposition de rectification du même jour, l'administration a informé la SASU TCE Entreprise, en sa qualité de société intégrée venant aux droits de la société Sub Finances, que le déficit reportable de cette société au 30 septembre 2016 ne pouvait plus être imputé sur ses résultats des exercices suivants. La SASU TCE Entreprise relève appel du jugement du 31 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la décharge du supplément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie et des intérêts de retard correspondants.
2. Aux termes de l'article 223 A du code général des impôts : " I. - Une société, ci-après désignée par les mots : " société mère ", peut se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 % au moins du capital de manière continue au cours de l'exercice (...) ". Aux termes de l'article 223 S du même code : " Les dispositions prévues à la présente section en cas de sortie du groupe d'une société s'appliquent lorsqu'une société du groupe cesse de remplir les conditions prévues pour l'application du régime défini à cette section. (...). Le déficit d'ensemble ou la moins-value nette à long terme d'ensemble subis par le groupe pendant la période d'application du régime défini à l'article 223 A ou à l'article 223 A bis et encore reportables à l'expiration de cette période sont imputables par la société qui était redevable des impôts mentionnés audit article dus par le groupe, sur son bénéfice ou sa plus-value nette à long terme, selon les modalités prévues au troisième alinéa du I de l'article 209 ou à l'article 39 quindecies. (...) ". Aux termes de l'article 223 I de ce code : " 1. a) Les déficits subis par une société du groupe au titre d'exercices antérieurs à son entrée dans le groupe ne sont imputables que sur son bénéfice, dans les limites et conditions prévues au troisième alinéa du I de l'article 209 ; (...) / 5. Dans les situations visées aux c, d, e, f, i ou j du 6 de l'article 223 L, et sous réserve, le cas échéant, de l'obtention de l'agrément prévu au 6, la fraction du déficit qui n'a pu être reportée au titre d'un exercice dans les conditions prévues à l'article 223 S peut, dans la mesure où ce déficit correspond à celui de la société mère absorbée ou à celui des sociétés membres du groupe ayant cessé et qui font partie du nouveau groupe ou à celui des sociétés membres du groupe ayant cessé qui ont été absorbées par les sociétés précitées ou scindées au profit de celles-ci antérieurement à la cessation de ce groupe sous le régime prévu à l'article 210 A, s'imputer sur les résultats, déterminés selon les modalités prévues au 4 et par dérogation au a du 1, des sociétés mentionnées ci-dessus. Cette fraction de déficit s'impute dans les limites et conditions prévues au troisième alinéa du I de l'article 209. ". Aux termes du 6. de l'article 223 L de code : " d) Si, au cours d'un exercice, le capital d'une société mère définie aux premier, deuxième, quatrième ou cinquième alinéas du I de l'article 223 A vient à être détenu, directement ou indirectement (...) à 95 % au moins par une autre personne morale passible de l'impôt sur les sociétés, ce capital est réputé avoir été détenu selon les modalités prévues à la quatrième phrase du troisième alinéa du I de l'article 223 A si le pourcentage de 95 % n'est plus atteint à la clôture de l'exercice à la condition que les sociétés concernées indiquent à l'administration les modalités de l'opération et ses justifications juridiques, économiques ou sociales. (...) Dans cette situation, si la personne morale mentionnée au premier alinéa remplit les conditions mentionnées aux premier, deuxième, quatrième et cinquième alinéas du I de l'article 223 A et souhaite constituer un groupe avec les sociétés qui composaient celui qui avait été formé par la société mère visée au même alinéa, ou faire entrer celles-ci dans le groupe dont elle est déjà membre, l'option prévue aux premier, deuxième, quatrième ou cinquième alinéas du I de l'article 223 A est exercée au plus tard à l'expiration du délai prévu au deuxième alinéa du III du même article, décompté de la date de clôture de l'exercice considéré. Cette option est accompagnée du document mentionné au premier alinéa du c. (...) ". Le document mentionné au premier alinéa du c) du 6. de cet article mentionne " l'identité des sociétés membres de ce dernier groupe qui entrent dans le nouveau groupe ".
3. Aux termes de l'article 46 quater-0 ZJ bis de l'annexe III au code général des impôts : " 1. La fraction du déficit pour laquelle le bénéfice de l'application des dispositions du 5 de l'article 223 I du code général des impôts est demandée est calculée après qu'il a été, le cas échéant, procédé aux réintégrations mentionnées aux c, d, e, f, i ou j du 6 de l'article 223 L du même code. (...) La liste des sociétés pour lesquelles le bénéfice des dispositions du 5 de l'article 223 I du code général des impôts est demandé est jointe à l'option et figure de manière distincte sur le document prévu aux c, d, e, g, i ou j du 6 de l'article 223 L de ce code concernant l'identité des sociétés membres du nouveau groupe. ". Aux termes de l'article 46 quater-0 ZL de l'annexe III à ce code : " La déclaration du résultat d'ensemble visée à l'article 223 Q du code général des impôts comprend les éléments nécessaires à la détermination et au contrôle de ce résultat. La société mère doit joindre à cette déclaration : (...) Dans les situations visées aux c, d, e, f, g ou i du 6 de l'article 223 L du code général des impôts, des états faisant apparaître : a) La quotité du déficit qui peut s'imputer sur les résultats des sociétés membres du groupe ayant cessé ou des sociétés apportées et qui font partie du nouveau groupe, mentionnée au 5 de l'article 223 I du même code, et la quote-part de ce déficit qui provient de chacune des sociétés pour lesquelles le bénéfice de cette imputation a été demandé ; b) L'imputation de ce déficit sur le bénéfice de la société qui en est titulaire et sur les bénéfices des sociétés mentionnées ci-dessus ; c) Le montant du déficit qui ne peut plus être imputé du fait de la sortie du groupe de l'une des sociétés mentionnées ci-dessus, en application des dispositions du troisième alinéa de l'article 223 R du code général des impôts. ".
4. Les dispositions qui instituent un régime fiscal optionnel et prévoient que le bénéfice de ce régime doit être demandé dans un délai déterminé n'ont, en principe, pas pour effet d'interdire au contribuable qui a omis d'opter dans ce délai de régulariser sa situation dans le délai de réclamation prévu aux articles R. 196-1 et suivants du livre des procédures fiscales. Il en va autrement si la loi a prévu que 1'absence d'option dans le délai qu'elle prévoit entraîne la déchéance de la faculté d'exercer l'option ou lorsque la mise en œuvre de cette option implique nécessairement qu'elle soit exercée dans un délai déterminé.
5. La SASU TCE Entreprise entend se prévaloir du régime spécial instauré par les dispositions énoncées au point 2, lesquelles prévoient, dans le cas où la société mère de l'ancien groupe est acquise à 95 % au moins par une société formant un nouveau groupe incluant dans son périmètre les sociétés membres de l'ancien groupe, la possibilité d'imputer le déficit d'ensemble du groupe antérieur sur une base élargie composée des résultats des sociétés membres de l'ancien groupe. Toutefois il est constant qu'elle n'a pas respecté les obligations auxquelles est subordonnée l'application de ce dispositif, à savoir la transmission, à l'appui de l'option pour le régime de l'intégration fiscale du nouveau groupe, de la liste des sociétés concernées par l'imputation sur une base élargie exigée par le d) du 6. de l'article 223 L du code général des impôts et par l'article 46 quater-0 ZJ bis de l'annexe III à ce code, et la transmission, à l'appui de la déclaration de résultats de l'ensemble du groupe, des états de suivi de l'origine et des quotités du déficit ainsi imputé prévus à l'article 46 quater-0 ZL de la même annexe. Il s'ensuit que la SASU TCE entreprise ne peut être regardée comme ayant valablement souscrit pour le régime de l'imputation du déficit détenu par la société Sub Finances sur une base élargie.
6. Les dispositions énoncées au point 2 ne prévoient pas, en 1'absence d'option exercée dans le délai qu'elles instituent, la déchéance de la faculté d'exercer cette option dans le délai de réclamation. En revanche, la mise en œuvre de cette option, qui impose à la société détentrice du déficit d'ensemble, d'une part, de désigner les sociétés membres du nouveau groupe d'intégration fiscale amenés à bénéficier de l'imputation du déficit et, d'autre part, de préciser la quote-part du déficit reportable qui leur sera affecté, implique nécessairement qu'elle soit exercée dans un délai déterminé dès lors que ces éléments ont une incidence à la fois sur les obligations comptables, déclaratives et fiscales de l'ensemble des sociétés membres du groupe et sur le pouvoir de contrôle dont dispose l'administration. La SASU TCE Entreprise, qui s'est bornée à produire, le 7 décembre 2018, une déclaration rectificative de résultats à laquelle était joint l'état prévu à l'article 46 quater-0 ZL de l'annexe III au code général des impôts mais pas la liste des sociétés concernées par l'imputation sur une base élargie imposée par le d) du 6. de l'article 223 L du code général des impôts et par l'article 46 quater-0 ZJ bis de l'annexe III à ce code, ne peut, dès lors et en tout état de cause, être regardée comme ayant régularisé sa situation dans le délai de réclamation. Par suite, la SASU TCE Entreprise, qui ne peut utilement se prévaloir de ce qu'elle remplissait les conditions de fond lui ouvrant doit au bénéfice du régime de l'imputation sur une base élargie pour faire échec au redressement, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a remis en cause l'imputation du déficit de 218 377 euros sur le résultat d'ensemble du nouveau groupe dont elle était la mère au titre de l'exercice clos en 2016.
7. Enfin, si la SASU TCE Entreprise a été informée, par la seconde proposition de rectification du 24 juillet 2018, en sa qualité de société venant aux droits de la société Sub Finances, qu'elle avait perdu, à la suite de la transmission universelle du patrimoine de la société Sub Finances intervenue à son profit après la dissolution anticipée de cette dernière le 15 septembre 2017, tout droit à déduction du déficit reportable au 30 septembre 2016 de cette société, faute d'avoir sollicité et obtenu l'agrément prévu au II de l'article 209 du code général des impôts, il est constant que l'administration n'a établi aucune imposition à ce titre, ni réduit un déficit déclaré. Il s'ensuit que le moyen de la SASU TCE Entreprise tiré de ce que le défaut d'agrément ne suffirait pas à lui faire perdre le droit de déduire ce déficit doit être écarté comme inopérant.
8. Il résulte de ce qui précède que la SASU TCE Entreprise n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SASU TCE Entreprise est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SASU TCE Entreprise et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 21 mai 2024, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme Courbon, présidente-assesseure,
M. Laval, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 juin 2024.
La rapporteure,
A. Courbon
Le président,
D. Pruvost
La greffière,
M. A...
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY02397