Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. D... G... et Mme B... G... ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 9 octobre 2018 par lequel le maire de la I... (Puy-de-Dôme) a délivré un permis de construire à M. et Mme C... A... pour la construction d'une pergola, d'un carport et d'un mur de soutènement sur la parcelle cadastrée BA 221 et la décision du 11 mars 2019 portant rejet de leur recours gracieux.
Par un jugement n°1900955 du 16 juin 2022, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a, dans un article 1er, annulé l'arrêté du 9 octobre 2018 et la décision implicite de rejet du recours gracieux de M. et Mme G... en tant seulement qu'ils permettent l'édification, en limite séparative, d'une clôture de 170 mètres de linéaire dont la hauteur excède 1,80 mètres en méconnaissance des dispositions de l'article U6 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune, dans un article 2, mis à la charge de la I... à verser à M. et Mme G... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, dans un article 3, rejeté les conclusions de M. et Mme C... A... présentées au titre de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme.
Procédure devant la cour
1. Par une requête, enregistrée sous le n°22LY02251 le 21 juillet 2022, M. et Mme C... A..., représentés par la SCP Collet- de Rocquigny-Chantelot-Brodiez-Gourdou et associés, avocats, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 16 juin 2022 et de rejeter la demande de première instance présentée par M. et Mme G... ;
2°) de mettre à la charge de M. et Mme G... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la demande présentée par M. et Mme G... devant le tribunal est irrecevable dès lors que le recours gracieux qu'ils ont présenté à la I... ne leur a pas été régulièrement notifié, dès lors que leur requête est tardive et dès lors qu'ils ne justifient pas de leur intérêt pour agir ;
- les ouvrages autorisés par le permis sont des murs de soutènement et non des clôtures et ne sont pas concernés par les règles de hauteur.
Par deux mémoires, enregistrés les 15 mars 2023 et 3 mai 2023, M. et Mme G..., représentés par Me Meunier :
1°) sollicitent la jonction de l'instance avec l'instance n°22LY02559 ;
2°) concluent au rejet de la requête ;
3°) demandent à la cour, par la voie de l'appel incident, d'annuler intégralement le permis de construire accordé ainsi que la décision du 11 mars 2019 ;
4°) d'ordonner la mise en conformité de la hauteur du mur à 1,80 mètres sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt ;
5°) de mettre à la charge de la I... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils font valoir que :
- ils justifient d'un intérêt pour agir dès lors que la construction du mur envisagé en limite de propriété affecte leurs conditions d'occupation et d'utilisation de leur parcelle ;
- ils ont notifié leur recours gracieux à M. et Mme C... A... et contesté dans les deux mois du rejet de leur recours gracieux le permis en litige ;
- leur requête introductive d'instance devant le tribunal est recevable ;
- le mur en litige n'est pas un mur de soutènement dès lors qu'il dépasse de 4,30 mètres la hauteur du terrain naturel ; il s'agit d'un mur de clôture dont la hauteur est limitée à 1,80 mètres par les dispositions applicables du plan local d'urbanisme (PLU) ;
- le trait de niveau du terrain naturel est volontairement erroné dans les pièces de la demande constituant une fraude ;
- les documents PCMI 6, 7 et 8 joints au dossier de demande sont insuffisants et ne présentent pas l'intégration du projet dans son environnement proche ;
- la notice descriptive du projet comporte de nombreuses anomalies qui auraient dû conduire les services instructeurs à rejeter la demande ;
- l'article U3 du règlement du PLU limite à 2,5 mètres la hauteur maximale des constructions annexes ; la hauteur du mur projeté est supérieure à près de 3 mètres par endroit ; l'ensemble du mur ne respectant pas les prescriptions de hauteur prévues dans le PLU, l'arrêté litigieux est illégal dans son intégralité.
Par un mémoire, enregistré le 11 mai 2023, la I..., représentée par Me Marion, conclut à l'annulation de l'article 1er du jugement du 16 juin 2022 et demande à la cour de mettre à la charge de M. et Mme G... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- les requérants ne démontrent pas leur intérêt pour agir ;
- les murs situés en limite de propriété des consorts G... sont des murs de soutènement et ne sont pas soumis aux règles du PLU applicables aux clôtures ;
- le moyen soulevé par les consorts G... devant le tribunal tiré de la méconnaissance de l'article AU3 du règlement du PLU n'est pas fondé ;
- le risque d'effondrement du mur allégué est inopérant dans le cadre du présent litige.
Par un mémoire enregistré le 29 avril 2024, M. et Mme C... A..., représentés par la SCP Collet- de Rocquigny-Chantelot-Brodiez-Gourdou et associés, avocats, persistent dans leurs précédentes conclusions et produisent les constats d'affichage du permis de construire délivré le 9 octobre 2018.
Par un mémoire enregistré le 16 mai 2024, M. et Mme G..., représentés par Me Meunier, persistent dans leurs précédentes conclusions.
Ils font valoir que leur recours contentieux n'est pas tardif dès lors que les dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme mentionnent que seul le recours contentieux doit faire l'objet d'une notification au pétitionnaire.
2. Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n°22LY02559 les 18 août 2022 et 11 mai 2023 (non communiqué), la I..., représentée par Me Marion, demande à la cour d'annuler l'article 1er du jugement du 16 juin 2022 et de mettre à la charge de M. et Mme G... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a considéré que les consorts G... justifiaient d'un intérêt pour agir ; la seule hauteur du mur projeté est insuffisante pour démontrer que les conditions d'occupation et de jouissance de leur bien seraient affectées ;
- le projet en litige nécessite que soit effectué un remblai du terrain naturel pour asseoir la construction dès lors que le terrain d'assiette se situe dans un secteur fortement en pente ; le mur situé en limite de propriété des consorts G... est un mur de soutènement ;
- la portion du mur en litige est incorporée à l'ensemble de l'ouvrage à construire ;
- c'est à bon droit que le tribunal a écarté les autres moyens soulevés à l'appui de leur demande par les consorts G....
Par deux mémoires, enregistrés le 14 mars 2023 et 3 mai 2023 (non communiqué), M. et Mme G..., représentés par Me Meunier :
1°) sollicitent la jonction de l'instance avec l'instance n°22LY02251 ;
2°) concluent au rejet de la requête ;
3°) demande à la cour, par la voie de l'appel incident, d'annuler intégralement le permis de construire accordé ainsi que la décision du 11 mars 2019 ;
4°) d'ordonner la mise en conformité de la hauteur du mur à 1,80 mètres tel que prévu par la zone U du PLU de la commune sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt ;
5°) de mettre à la charge de la I... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils font valoir que :
- ils justifient d'un intérêt pour agir dès lors que la construction du mur envisagé en limite de propriété affecte leurs conditions d'occupation et d'utilisation de leur parcelle ;
- ils ont notifié leur recours gracieux à M. et Mme C... A... et contesté dans les deux mois du rejet de leur recours gracieux le permis en litige ;
- le mur en litige n'est pas un mur de soutènement dès lors qu'il dépasse de 4,30 mètres la hauteur du terrain naturel ; il s'agit d'un mur de clôture dont la hauteur est limitée à 1,80 mètres par les dispositions applicables du PLU ;
- le trait de niveau du terrain naturel est volontairement erroné dans les pièces de la demande constituant une fraude ;
- les documents PCMI 6, 7 et 8 joints au dossier de demande sont insuffisants et ne présentent pas l'intégration du projet dans son environnement proche ;
- l'article U3 du règlement du PLU limite à 2,5 mètres la hauteur maximale des constructions annexes ; la hauteur du mur projeté est supérieure à près de 3 mètres par endroit ; l'ensemble du mur ne respectant pas les prescriptions de hauteur prévues dans le PLU, l'arrêté litigieux est illégal dans son intégralité.
Par un mémoire enregistré le 29 avril 2024, M. et Mme C... A... représentés par la SCP Collet-de Rocquigny-Chantelot-Brodiez-Gourdou et associés, avocats, doivent être regardés comme demandant l'annulation du jugement du 16 juin 2022 en tant qu'il a prononcé l'annulation partielle de l'arrêté du 9 octobre 2018.
Ils font valoir que la requête présentée par M. et Mme G... devant le tribunal était tardive et produisent les constats d'affichage du permis de construire délivré le 9 octobre 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère,
- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique,
- et les observations de Me Gourdou pour M. et Mme C... A..., H... pour la I... et de Me Meunier pour M. et Mme G....
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 9 octobre 2018, le maire de la I... a délivré un permis de construire à M. et Mme C... A... pour la construction d'une pergola, d'un carport et d'un mur de soutènement sur la parcelle cadastrée section BA leur appartenant. M. et Mme G..., propriétaires de la parcelle mitoyenne, ont présenté un recours gracieux le 2 janvier 2019, qui a été rejeté par décision du 11 mars 2019 du maire de la commune. Ils ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'annulation de ces décisions. M. et Mme C... A... relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a notamment annulé les décisions attaquées en tant seulement qu'elles permettent l'édification, en limite séparative, d'une clôture de 17 mètres de linéaire dont la hauteur excède 1,80 mètres en méconnaissance des dispositions de l'article U6 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune. Par la voie de l'appel incident, M. et Mme G... sollicitent l'annulation totale de ces décisions.
Sur la demande de jonction :
2. Les requêtes susvisées présentées par M. et Mme C... A... et la I... présentent à juger des questions semblables. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
3. Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, ou d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un certificat d'urbanisme, ou une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. (...) " Aux termes de l'article R. 600-2 du même code : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15. " Aux termes de l'article R. 424-15 du même code : " Mention du permis explicite ou tacite ou de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite ou la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquis et pendant toute la durée du chantier. (...) / Cet affichage mentionne également l'obligation, prévue à peine d'irrecevabilité par l'article R. 600-1, de notifier tout recours administratif ou tout recours contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable. / (...) ".
4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que la règle selon laquelle l'irrecevabilité tirée de l'absence d'accomplissement des formalités de notification prescrites par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ne peut être opposée qu'à la condition, prévue à l'article R. 424-15 du même code, que l'affichage du permis de construire ait fait mention de cette obligation, cette règle étant applicable non seulement en première instance, mais également en appel et en cassation. En outre, il résulte de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme que l'auteur d'un recours administratif à l'encontre d'un document d'urbanisme est tenu de notifier la copie intégrale de son recours à l'auteur de la décision qu'il attaque et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation.
5. Il ressort des pièces versées au dossier que les requérants ont produit en appel les constats d'affichage établis les 26 novembre 2018, 4 janvier 2019 et 1er février 2019 démontrant un affichage régulier et continu pendant deux mois du permis de construire qui leur a été délivré le 9 octobre 2018, sur le terrain litigieux. A ce titre, les photographies produites du panneau à l'entrée de la parcelle, prises par un huissier, permettent de démontrer que la mention effective de l'obligation, prévue à peine d'irrecevabilité par l'article R. 600-1, de notifier tout recours administratif ou tout recours contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis y était parfaitement lisible. M. et Mme G... se sont bornés, par un courrier du 2 janvier 2019 adressé à M. et Mme C... A..., à informer les pétitionnaires de l'existence du recours gracieux qu'ils avaient adressé à la I... sans que ce courrier ne contienne l'intégralité du recours gracieux exercé auprès de celle-ci ni même les moyens soulevés à l'encontre du permis en cause. Par suite, faute d'avoir notifié la copie intégrale de leur recours administratif à M. et Mme C... A..., le recours administratif exercé par M. et Mme G... auprès de la I... n'a pas eu pour effet de conserver le délai de recours contentieux. Il s'en suit que, alors même que la commune a, par décision du 11 mars 2019 rejeté ce recours gracieux, le recours contentieux exercé par M. et Mme G... auprès du tribunal administratif de Clermont-Ferrand le 6 mai 2019 était tardif et donc irrecevable. Dès lors, M. et Mme C... A... et la I... sont fondés à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement attaqué.
6. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... A... et la I... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé partiellement l'arrêté du 9 octobre 2018 et la décision de rejet du recours gracieux présenté par M. et Mme G....
Sur les frais liés au litige :
7. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions des parties présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n°1900955 du 16 juin 2022 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. et Mme G... et les surplus des conclusions des parties en appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C... A..., à Mme F... C... A..., à M. D... G..., à Mme B... G... et à la I....
Délibéré après l'audience du 23 mai 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Dèche, présidente,
Mme Vergnaud, première conseillère,
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 juin 2024.
La rapporteure,
V. Rémy-Néris
La présidente,
P. Dèche
Le greffier en chef,
C. Gomez
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
Le greffier en chef
2
N° 22LY02251, 22LY02559
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