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22/05/2024 | FRANCE | N°23LY00463

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 3ème chambre, 22 mai 2024, 23LY00463


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



I- Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du directeur du centre hospitalier rhumatologique d'Uriage du 24 août 2017, en tant qu'elle l'a classée au 4ème échelon du grade d'assistant médico-administratif de classe normale à compter du 20 juin 2017, ainsi que la décision du 20 novembre 2017 portant rejet de son recours gracieux.



II- Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner le centre hos

pitalier rhumatologique d'Uriage à lui verser la somme de 8 100 euros, à parfaire, en réparation...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

I- Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du directeur du centre hospitalier rhumatologique d'Uriage du 24 août 2017, en tant qu'elle l'a classée au 4ème échelon du grade d'assistant médico-administratif de classe normale à compter du 20 juin 2017, ainsi que la décision du 20 novembre 2017 portant rejet de son recours gracieux.

II- Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner le centre hospitalier rhumatologique d'Uriage à lui verser la somme de 8 100 euros, à parfaire, en réparation de ses préjudices moral et financier résultant de l'illégalité de son classement dans le corps des assistants médico-administratifs.

Par un jugement nos 1800250 et 1800255 du 16 juin 2020, le tribunal administratif de Grenoble a condamné le centre hospitalier rhumatologique d'Uriage à verser à Mme A... C... l'équivalent du traitement indiciaire qu'elle aurait perçu si elle avait été classée à partir du 1er janvier 2012 au 3ème échelon du grade des assistants médico-administratifs dans le cadre d'un avancement à l'ancienneté moyenne jusqu'à la date de notification du jugement, dans la limite de 7 100 euros, renvoyé Mme A... C... devant le centre hospitalier pour la liquidation de cette condamnation, mis à la charge du centre hospitalier le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et rejeté le surplus des conclusions des demandes de Mme A... C....

Par deux courriers enregistrés les 21 octobre et 15 novembre 2021, Mme A... C... a demandé au tribunal d'enjoindre au centre hospitalier rhumatologique d'Uriage de prendre les mesures qu'implique l'exécution du jugement du 16 juin 2020.

Par une ordonnance du 2 décembre 2021, le président du tribunal administratif de Grenoble a prononcé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle d'exécution.

Par un jugement n° 2108220 du 13 décembre 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande d'exécution de Mme A... C....

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 9 février 2023 et un mémoire enregistré le 9 octobre 2023, Mme A... C..., représentée par Me Messerly, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 13 décembre 2022 ;

2°) d'enjoindre au centre hospitalier rhumatologique d'Uriage de procéder à la liquidation de la condamnation prononcée par le jugement du 16 juin 2020, sous une astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de centre hospitalier rhumatologique d'Uriage une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que le centre hospitalier rhumatologique d'Uriage, faute d'avoir pris en compte la reprise d'ancienneté dont elle aurait dû bénéficier lors de sa titularisation au 3ème échelon de son grade, a incomplètement exécuté le jugement du 16 juin 2020.

Par des mémoires en défense enregistrés le 12 avril 2023, le 14 septembre 2023 et le 18 octobre 2023, le centre hospitalier rhumatologique d'Uriage, représenté par Me Kovarik-Ovize, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Mme A... C... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que le jugement du 16 juin 2020 a été parfaitement exécuté.

Par ordonnance du 19 octobre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 novembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 2011-661 du 14 juin 2011 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Joël Arnould, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Bénédicte Lordonné, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Messerly, représentant Mme A... C... ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... C... a été recrutée comme agent contractuel par le centre hospitalier rhumatologique d'Uriage à compter du 9 octobre 2006 pour y exercer les fonctions de secrétaire médicale. Elle a été titularisée dans le corps de catégorie C des adjoints administratifs hospitaliers, au grade d'adjointe administrative de 1ère classe, au 1er janvier 2010. Au 1er janvier 2012, elle a été promue dans le corps de catégorie B des assistants médico-administratifs. Par décision rectificative n° 2012-008 du 6 février 2012, Mme A... C... a été classée dans ce corps au grade d'assistant médico-administratif de classe normale, et classée au 2ème échelon correspondant alors à l'indice brut 333 et à l'indice majoré 316, avec une ancienneté conservée au 20 octobre 2011. Par un jugement du 16 juin 2020, le tribunal administratif de Grenoble a jugé qu'en classant ainsi l'intéressée, le centre hospitalier avait commis une illégalité fautive de nature à engager sa responsabilité. Il l'a condamné à verser à Mme A... C... une indemnité en réparation de la perte de traitement indiciaire, équivalente au traitement indiciaire qu'elle aurait perçu si elle avait été classée à partir du 1er janvier 2012 au 3ème échelon du grade des assistants médico-administratifs, dans le cadre d'un avancement à l'ancienneté moyenne, jusqu'à la date de la notification du jugement, dans la limite de 7 100 euros. Il a renvoyé Mme A... C... devant le centre hospitalier rhumatologique d'Uriage pour la liquidation du montant de cette condamnation. Mme A... C... relève appel du jugement du 13 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint au centre hospitalier de prendre les mesures nécessaires à l'exécution intégrale du jugement du 16 juin 2020.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte ".

3. D'une part, contrairement à ce que fait valoir le centre hospitalier rhumatologique d'Uriage, la chose jugée n'est pas attachée au seul dispositif du jugement mais également aux motifs qui en sont le soutien nécessaire. D'autre part, il n'appartient pas en principe au juge saisi d'une demande tendant à l'exécution d'une décision juridictionnelle sur le fondement des dispositions de l'article L. 911-4 du code de justice administrative d'interpréter cette décision. Toutefois, si cette décision est entachée d'une obscurité ou d'une ambiguïté qui, en rendant impossible la détermination de l'étendue des obligations qui incombent aux parties du fait de cette décision, font obstacle à son exécution, il lui revient alors de l'interpréter dans la mesure nécessaire pour en définir les mesures d'exécution.

4. En deuxième lieu, aux termes du III de l'article 13 du décret du 14 juin 2011 visé ci-dessus, portant dispositions statutaires communes à divers corps de fonctionnaires de la catégorie B de la fonction publique hospitalière, dans sa version applicable au 1er janvier 2012 : " (...) III. - Les fonctionnaires appartenant à un corps ou un cadre d'emplois de catégorie C ou de même niveau qui détiennent un grade situé en échelle 5, en échelle 4 ou en échelle 3 sont classés conformément au tableau de correspondance ci-après :

SITUATION DANS LES ÉCHELLES 5, 4 ET 3

de la catégorie CSITUATION DANS LE PREMIER GRADE DU CORPS D'INTÉGRATION

de catégorie BPremier grade

EchelonsAncienneté conservée

dans la limite de la durée de l'échelon(...)(...)(...)3ème échelon- à partir d'un an3eAncienneté acquise au-delà d'un an- avant un an2eAncienneté acquise majorée d'un an(...)(...)(...)".Aux termes de l'article 24 du même décret : " La durée moyenne du temps passé dans chacun des échelons des grades des corps régis par le présent décret est fixée ainsi qu'il suit :

GRADES ET ÉCHELONSMOYENNE(...)(...)Premier grade(...)7ème échelon3 ans6ème échelon3 ans5ème échelon3 ans4ème échelon2 ans3ème échelon2 ans(...) "La durée moyenne des 5ème, 6ème et 7ème échelons a toutefois été ramenée à deux ans par le 4° de l'article 9 du décret n° 2014-71 du 29 janvier 2014 modifiant divers décrets relatifs aux carrières des fonctionnaires des catégories C et B de la fonction publique hospitalière.

5. En dépit de la rédaction ambigüe de son dispositif, il est constant que l'indemnité que le jugement du 16 juin 2020 condamne le centre hospitalier rhumatologique d'Uriage à verser à Mme A... C... en réparation de la perte de traitement indiciaire subie par celle-ci, est égale à la différence entre le traitement qu'elle aurait perçu si elle avait été classée au troisième échelon de son grade le 1er janvier 2012, évoluant dans le cadre d'un avancement à l'ancienneté moyenne, et le traitement qu'elle a effectivement perçu, entre le 1er janvier 2012 et la date de notification du jugement. Si le jugement du 16 juin 2020 ne précise pas si le classement de l'intéressée au 3ème échelon devait se faire avec une reprise de son ancienneté dans son grade antérieur, il ne l'exclut pas. Par ailleurs, la circonstance que tribunal n'a pas enjoint au centre hospitalier de procéder à une reconstitution de la carrière de l'intéressée, dont le classement a été jugé définitif, n'excluait pas non plus que l'indemnité destinée à réparer le préjudice résultant de l'illégalité de ce classement soit calculée en considération de la situation exacte qui aurait été celle de la requérante si elle avait été classée conformément aux dispositions applicables. Le tribunal administratif de Grenoble ayant jugé que la requérante aurait dû être classée au 3ème échelon en application du III de l'article 13 du décret du 14 juin 2011, et que l'indemnité devait être liquidée sur la base d'un avancement à l'ancienneté moyenne, l'application des règles d'ancienneté impliquait nécessairement la reprise d'ancienneté prévue par les mêmes dispositions du III de l'article 13 du décret. Contrairement néanmoins à ce que soutient la requérante, ces règles ne prévoyaient pas une reprise de l'ancienneté totale, mais uniquement de celle excédant une durée d'un an. En l'espèce, Mme A... C... ayant atteint le 3ème échelon de son ancien grade d'adjointe administrative de 1ère classe le 20 octobre 2010, l'indemnité doit être calculée sur la base du traitement qu'elle aurait perçu si elle avait été classée au 3ème échelon de son nouveau grade au 1er janvier 2012 avec une reprise d'ancienneté de deux mois et onze jours. Par suite, compte tenu des dispositions de l'article 24 du même décret et de leur modification en 2014, cette indemnité est égale à la différence entre le traitement indiciaire attaché au 3ème échelon du 1er janvier 2012 au 19 octobre 2013, celui attaché au 4ème échelon du 20 octobre 2013 au 19 octobre 2015, celui attaché au 5ème échelon du 20 octobre 2015 au 19 octobre 2017, puis celui attaché au 6ème échelon du 20 octobre 2017 au 19 octobre 2019, et enfin celui attaché au 7ème échelon à compter du 20 octobre 2019, d'une part, et le traitement qu'elle a effectivement perçu durant cette période, d'autre part. Dès lors, le centre hospitalier, en liquidant l'indemnité litigieuse sur la base du traitement que la requérante aurait perçu si elle avait été classée au 3ème échelon sans reprise de son ancienneté antérieure, a incomplètement exécuté le jugement du 16 juin 2020. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de lui enjoindre de procéder à une liquidation de l'indemnité selon les modalités décrites ci-dessus et au règlement du solde de celle-ci dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, sous une astreinte de 50 euros par jour de retard. Par suite, Mme A... C... est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande d'exécution.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A... C..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par le centre hospitalier rhumatologique d'Uriage. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier le versement d'une somme de 2 000 euros à Mme A... C..., en application de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2108220 du tribunal administratif de Grenoble du 13 décembre 2022 est annulé.

Article 2 : Il est enjoint au centre hospitalier rhumatologique d'Uriage de procéder à la liquidation de l'indemnité mise à sa charge par l'article 1er du jugement du 16 juin 2020, en prenant en considération la reprise d'ancienneté de deux mois et onze jours dont Mme A... C... aurait dû bénéficier lors de son classement, et un avancement à l'ancienneté moyenne, et de régler le solde de cette indemnité, après déduction de la somme de 2 533,14 euros déjà versée à la requérante.

Article 3 : Une astreinte de 50 euros par jour est prononcée à l'encontre du centre hospitalier rhumatologique d'Uriage s'il n'est pas justifié de l'exécution du présent arrêt dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Le centre hospitalier rhumatologique d'Uriage communiquera à la cour copie des actes justifiant de la liquidation et du paiement prescrits à l'article 1er.

Article 5 : Le centre hospitalier rhumatologique d'Uriage versera à Mme A... C... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions présentées par le centre hospitalier rhumatologique d'Uriage sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... C... et au centre hospitalier rhumatologique d'Uriage.

Délibéré après l'audience du 30 avril 2024, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,

M. Joël Arnould, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 mai 2024.

Le rapporteur,

Joël ArnouldLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne au préfet de l'Isère en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY00463


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00463
Date de la décision : 22/05/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-06-07-01 Procédure. - Jugements. - Exécution des jugements. - Astreinte.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Joël ARNOULD
Rapporteur public ?: Mme LORDONNE
Avocat(s) : KOVARIK-OVIZE

Origine de la décision
Date de l'import : 26/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-22;23ly00463 ?
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