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16/05/2024 | FRANCE | N°23LY03774

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 7ème chambre, 16 mai 2024, 23LY03774


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les cinqavis d'opposition à tiers détendeur émis le 4 juillet 2018 auprès de la banque CIC Sud-Ouest, du Crédit Lyonnais, de ING Bank Nv, de la Société Générale et de la caisse d'épargne Rhône Alpes par le comptable public de la direction départementale des finances publiques de l'Isère pour le recouvrement d'une somme de 6 106,20 euros, le titre exécutoire émis le 4 février 2010 par le rectorat de

Grenoble portant sur une somme de 6 724,79 euros et la décision par laquelle le directeur départe...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les cinqavis d'opposition à tiers détendeur émis le 4 juillet 2018 auprès de la banque CIC Sud-Ouest, du Crédit Lyonnais, de ING Bank Nv, de la Société Générale et de la caisse d'épargne Rhône Alpes par le comptable public de la direction départementale des finances publiques de l'Isère pour le recouvrement d'une somme de 6 106,20 euros, le titre exécutoire émis le 4 février 2010 par le rectorat de Grenoble portant sur une somme de 6 724,79 euros et la décision par laquelle le directeur départemental des finances publiques de l'Isère a implicitement rejeté sa réclamation du 31 août 2018.

Par un jugement n° 2007975 du 12 octobre 2023, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 8 décembre 2023, M. A..., représenté par Me Hudrisier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ainsi que les différentes décisions mentionnées ci-dessus ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement, qui n'est pas signé, est irrégulier ;

- il a contesté le titre de perception dès le 26 mai 2019 de sorte que le tribunal ne pouvait rejeter ses conclusions dirigées contre ce titre comme tardives ; ses écritures du 4 mars 2021 n'ont fait que rappeler l'objet de sa demande ; il soutenait, dans sa requête, que ce titre était prescrit ;

- les créances de l'État étaient prescrites ;

- la notification de saisie à tiers détenteur ne comporte pas les bases de la liquidation en méconnaissance de l'article 24 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

- la créance, qui ne repose sur aucun fondement légal ou réglementaire, est inexigible de sorte que l'avis à tiers détenteur est illégal.

Par un mémoire enregistré le 9 avril 2024, la rectrice de l'académie de Grenoble conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- la demande de M. A... dirigée contre le titre de perception était tardive ;

- subsidiairement, les autres moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le décret n° 92-1369 du 29 décembre 1992 ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher ;

- et les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'un trop-perçu de rémunération alors qu'il était professeur au collège de Saint-Martin-le-Vinoux (38), le rectorat de Grenoble a émis le 4 février 2010 à l'encontre de M. A... un titre de perception d'un montant de 6 724,79 euros. Le 4 juillet 2018, pour assurer le recouvrement de cette créance de laquelle ont été déduites les sommes déjà versées par M. A..., le comptable de la trésorerie " amendes et produits divers de Grenoble " a émis cinq avis d'opposition à tiers détenteur d'un montant de 6 106,20 euros. Par lettre du 31 août 2018, M. A... a saisi le directeur des finances publiques de l'Isère d'une réclamation préalable. M. A... relève appel du jugement du 12 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation du titre de perception du 4 février 2010, des cinq avis d'opposition à tiers détenteur et du rejet implicite de sa réclamation du 31 août 2018.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ".

3. Il ressort du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué comporte la signature du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience. Les dispositions précitées de l'article R. 741-7 du code de justice administrative n'exigent pas que la copie du jugement notifiée aux parties comporte ces signatures. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait pour ce motif irrégulier.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 117 du décret du 7 novembre 2012 : " Les titres de perception émis en application de l'article L. 252 A du livre des procédures fiscales peuvent faire l'objet de la part des redevables (...) d'une opposition à l'exécution en cas de contestation de l'existence de la créance, de son montant ou de son exigibilité (...) ". Aux termes de l'article 118 de ce même décret : " Avant de saisir la juridiction compétente, le redevable doit adresser une réclamation appuyée de toutes justifications utiles au comptable chargé du recouvrement de l'ordre de recouvrer. / La réclamation doit être déposée, sous peine de nullité : / 1° En cas d'opposition à l'exécution d'un titre de perception, dans les deux mois qui suivent la notification de ce titre ou du premier acte de poursuite qui procède du titre en cause ;/ 2° En cas d'opposition à poursuites, dans les deux mois qui suivent la notification de l'acte de poursuite. / L'autorité compétente délivre un reçu de la réclamation, précisant la date de réception de cette réclamation. Elle statue dans un délai de six mois dans le cas prévu au 1° et dans un délai de deux mois dans le cas prévu au 2°. A défaut d'une décision notifiée dans ces délais, la réclamation est considérée comme rejetée. ". Aux termes de l'article 119 de ce décret : " Le débiteur peut saisir la juridiction compétente dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de la décision prise sur sa réclamation ou, à défaut de cette notification, dans un délai de deux mois à compter de la date d'expiration des délais prévus à l'article 118. ".

5. Il résulte des termes du courrier du 31 août 2018 adressé par M. A... au directeur des finances publiques de l'Isère et reçu le 5 septembre 2019, que sa réclamation portait tout à la fois opposition à l'exécution du titre de perception du 4 février 2010 et opposition à poursuites. Sa réclamation a, par suite, été implicitement rejetée dans un délai de deux mois en ce qui concerne l'opposition à poursuite et dans un délai de six mois en ce qui concerne l'opposition à exécution du titre de perception. Dans sa demande enregistrée le 25 avril 2019 devant le tribunal, M. A... a indiqué attaquer devant la juridiction, outre la notification de saisie à tiers détenteur, le rejet implicite né le 5 mars 2019 de sa réclamation d'opposition à l'éxécution. Il devait ainsi être regardé comme demandant également, dès l'introduction de sa requête, et bien qu'il n'ait joint cette décision qu'ultérieurement, l'annulation du titre de percéption du 4 février 2010. Par suite, c'est à tort que le tribunal a estimé que les conclusions d'annulation présentées par M. A... à l'encontre du titre de perception du 4 février 2010 n'avaient été formulées que dans son mémoire enregistré le 4 mars 2021, et auraient été tardives. En retenant à tort cette irrecevabilité, le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité. Son jugement doit être annulé dans cette mesure, en tant qu'il a statué sur les conclusions dirigées contre le titre exécutoire.

6. Il y a lieu de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur ces conclusions et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions présentées par M. A... devant le tribunal administratif.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne les avis à tiers détenteur :

7. Il n'appartient pas au juge d'appel devant lequel l'appelant ne conteste pas la fin de non-recevoir opposée à ses conclusions par le juge de premier ressort de rechercher d'office si cette fin de non-recevoir a été soulevée à bon droit.

8. Le tribunal a rejeté les conclusions dirigées par M. A... contre les avis à tiers détenteur, ensemble le rejet de la réclamation dirigée contre ces avis, comme irrecevables au motif que ce dernier était sans intérêt pour les contester. Si en appel, M. A... réitère sa demande à fin d'annulation de ces décisions, il ne conteste pas le motif d'irrecevabilité retenu par les premiers juges. Dès lors, en application du principe rappelé au point précédent, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté ses conclusions dirigées contre les avis à tiers détenteur et le rejet implicite de sa réclamation.

En ce qui concerne le titre exécutoire :

9. Aux termes du premier alinéa de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : " Les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux années à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive ".

10. Il résulte de ces dispositions qu'une somme indûment versée par une personne publique à l'un de ses agents au titre de sa rémunération peut, en principe, être répétée dans un délai de deux ans à compter du premier jour du mois suivant celui de sa date de mise en paiement sans que puisse y faire obstacle la circonstance que la décision créatrice de droits qui en constitue le fondement ne peut plus être retirée. Sauf dispositions spéciales, les règles fixées par l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 sont applicables à l'ensemble des sommes indûment versées par des personnes publiques à leurs agents à titre de rémunération, y compris les avances et, faute d'avoir été précomptées sur la rémunération, les contributions ou cotisations sociales.

11. Le titre de perception émis le 4 février 2010 porte sur la récupération, à hauteur de 6 724,79 euros, de trop perçus de traitement, d'indemnité de suivi et d'orientation des élèves et de supplément familial de traitement au cours de l'année 2009. Lorsque le titre de perception a été émis, le délai de deux années prévu à l'article 37-1 précité n'était pas échu. Par suite, le moyen tiré de ce que la créance de l'État était prescrite lorsque le titre de perception a été émis ne peut qu'être écarté.

12. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande dirigée contre les avis à tiers détenteur et qu'il n'est pas fondé à demander l'annulation du titre de perception.

Sur les frais liés au litige :

13. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'État une somme au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 12 octobre 2023 est annulé en tant qu'il a statué sur les conclusions dirigées contre le titre de perception.

Article 2 : La demande de M. A... tendant à l'annulation du titre de perception et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me Hudrisier, pour M. B... A... décédé en cours d'instance et à la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Copie en sera adressée à la rectrice de l'académie de Grenoble.

Délibéré après l'audience du 25 avril 2024 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mai 2024.

La rapporteure,

A. Duguit-LarcherLe président,

V-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

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N° 23LY03774

kc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY03774
Date de la décision : 16/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-08-02 Fonctionnaires et agents publics. - Rémunération. - Traitement.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : THESIAS

Origine de la décision
Date de l'import : 26/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-16;23ly03774 ?
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