Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble, d'une part, d'annuler les décisions du 14 novembre 2022 par lesquelles le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de l'Isère, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement, de lui délivrer un certificat de résidence algérien en qualité de conjoint d'une ressortissante française ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler.
Par un jugement n° 2300665 du 26 mai 2023, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 15 juin 2023, M. B... A..., représenté par Me Borges de Deus Correia, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2300665 du 26 mai 2023 du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) d'annuler les décisions du 14 novembre 2022 par lesquelles le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt, de lui délivrer un certificat de résidence algérien en qualité de conjoint d'une ressortissante française ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou, en toute hypothèse, une somme qui ne saurait être inférieure au montant de l'aide juridictionnelle majoré de 50 %.
Il soutient que :
- il remplit les conditions justifiant la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française, par suite la décision lui refusant un tel titre est entachée d'un vice de procédure faute pour le préfet d'avoir saisi la commission du titre de séjour préalablement à son édiction ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen individualisé de sa situation dès lors qu'il n'a, notamment, pas tenu compte de son état de santé ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il apporte la preuve que le centre de ses intérêts privés et familiaux se situe en France ;
- les décisions contestées sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation au regard de leurs conséquences sur sa situation personnelle.
Le préfet de l'Isère, régulièrement mis en cause, n'a pas produit.
Par une décision du 16 août 2023, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, conclue à Rome le 4 novembre 1950 ;
- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, modifié, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Vergnaud, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant algérien né le 10 mai 1968, est entré en France le 30 décembre 2017 selon ses déclarations. Le 29 novembre 2021, il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence algérien en se prévalant de son union avec une ressortissante française. Par un arrêté du 14 novembre 2022, le préfet de l'Isère lui a opposé un refus, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. Par le jugement attaqué du 26 mai 2023, dont M. A... interjette appel, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de ces décisions.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière (...). / Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2) ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux. ". En application de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet est tenu de saisir la commission du titre du séjour du seul cas des algériens qui remplissent effectivement les conditions prévues par l'accord franco-algérien auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les demandeurs qui se prévalent de ces stipulations. Les dispositions de l'article L. 435-1 du même code n'étant pas applicables aux ressortissants algériens, la saisine de la commission du titre de séjour prévue par ces dernières dispositions est en revanche sans portée utile pour ces ressortissants.
3. M. A..., qui s'est marié le 21 septembre 2021 avec une ressortissante française, n'établit pas être entré régulièrement en France, dès lors, il ne justifie pas remplir les conditions permettant la délivrance de plein droit d'un certificat de résidence algérien sur le fondement des dispositions précitées. Dans ces conditions, le préfet de l'Isère n'a pas entaché sa décision d'un vice de procédure en ne consultant pas la commission du titre de séjour.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. M. A... se prévaut de sa présence sur le territoire français depuis décembre 2017, de son mariage le 21 septembre 2021 avec une ressortissante française avec laquelle il entretient des relations de couple depuis 2019, de ses liens avec sa belle-famille, notamment avec sa belle-fille, ainsi que de la présence en France de ses frères et sœurs. Cependant, compte tenu du caractère récent de son mariage, son union avec une ressortissante française ne permet pas de justifier à elle seule de la stabilité et de l'intensité de ses liens familiaux sur le territoire français. Par ailleurs, les seules attestations produites à l'appui de sa requête ne sont pas de nature à démontrer une intégration particulière en France. En outre, s'il fait valoir qu'il souffre d'une lithiase rénale récidivante et qu'il est suivi au centre d'urologie de Vienne, il n'établit pas qu'il ne pourrait faire l'objet d'une prise en charge dans son pays d'origine ou qu'il ne pourrait voyager sans risque. Ainsi, il ne justifie d'aucune circonstance particulière faisant obstacle à ce qu'il retourne dans son pays d'origine le temps d'obtenir un visa afin de régulariser son entrée sur le territoire français, la séparation temporaire d'avec son épouse ou sa belle-famille pouvant en résulter n'étant pas susceptible, en l'espèce, de constituer une telle circonstance. S'il se prévaut de la présence régulière en France d'un frère et d'une sœur, il n'établit pas être dépourvu de toute attache en Algérie, pays dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de 49 ans au moins. Dans ces conditions, le préfet de l'Isère n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et en lui faisant obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
6. En troisième lieu, compte tenu de ce qui a été exposé au point 5 du présent arrêt, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Isère aurait entaché les décisions contestées d'un défaut d'examen de sa situation particulière ou d'une erreur manifeste d'appréciation.
7. Il résulte de tout ce qui précède, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 19 juillet 1991 doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 2 avril 2024, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Stillmunkes, président-assesseur,
Mme Vergnaud, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 avril 2024.
La rapporteure,
E. Vergnaud
Le président,
F. Pourny
La greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 23LY02053