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30/04/2024 | FRANCE | N°22LY02547

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 6ème chambre, 30 avril 2024, 22LY02547


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



L'institut de formation supérieure en ostéopathie de Vichy et de la région Auvergne (IFSO de Vichy) a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler une décision n° 2021-17 du 22 juillet 2021 du ministre des solidarités et de la santé portant renouvellement de son agrément pour dispenser une formation en ostéopathie, en tant qu'elle limite sa capacité d'accueil à 100 étudiants, toutes promotions confondues, dont 15 étudiants en provenance des éta

blissements ayant perdu leur agrément et d'enjoindre au ministre de réexaminer son dossier.


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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'institut de formation supérieure en ostéopathie de Vichy et de la région Auvergne (IFSO de Vichy) a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler une décision n° 2021-17 du 22 juillet 2021 du ministre des solidarités et de la santé portant renouvellement de son agrément pour dispenser une formation en ostéopathie, en tant qu'elle limite sa capacité d'accueil à 100 étudiants, toutes promotions confondues, dont 15 étudiants en provenance des établissements ayant perdu leur agrément et d'enjoindre au ministre de réexaminer son dossier.

Par un jugement n° 2101635 du 23 juin 2022, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé cette décision, telle qu'elle lui apparaissait modifiée par des décisions des 6 septembre et 18 octobre 2021, en tant qu'elle limite à 274, au titre de l'année universitaire 2021-2022, le nombre d'étudiants formés, dont 15 étudiants en provenance des établissements ayant perdu leur agrément, et à 150, au titre des quatre années universitaires suivantes, ce nombre d'étudiants formés, dont 55 étudiants en provenance des établissements de formation ayant perdu leur agrément et a enjoint à la ministre de la santé et de la prévention de réexaminer la situation de l'IFSO de Vichy, sous un mois.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés respectivement le 17 août 2022 et le 13 mars 2024, le ministre de la santé et de la prévention demande à la cour d'annuler le jugement n° 2101635 du 23 juin 2022 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand.

Le ministre soutient que :

- les premiers juges ont commis une erreur de droit pour n'avoir pas prononcé de non-lieu à statuer sur la demande de l'IFSO de Vichy ;

- la décision n° 2021-17 du 22 juillet 2021 et la décision n° 2022-56 du 29 avril 2022, notifiée le 3 mai suivant, ne sont pas entachées d'un vice d'incompétence de l'auteur de l'acte ;

- la décision n° 2021-17 du 22 juillet 2021 et la décision n° 2021-44 du 18 octobre 2021 sont motivées ;

- l'insuffisance de l'activité clinique de l'IFSO de Vichy conduisait à limiter à 100 étudiants, toutes promotions confondues, la capacité d'accueil de cet institut.

Par des mémoires enregistrés le 25 avril 2023 et le 19 mars 2024, l'IFSO de Vichy, représenté par la SELAS Fidal, agissant par Me Cruchaudet, demande à la cour de rejeter la requête du ministre de la santé et de la prévention, d'enjoindre à cette autorité de procéder à un nouvel examen de son dossier, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'IFSO de Vichy fait valoir que :

- le litige n'ayant pas perdu son objet, il y a toujours lieu à statuer ;

- la décision n° 2021-17 du 22 juillet 2021 est entachée d'un vice d'incompétence de l'auteur de l'acte et d'un défaut de motivation ;

- son activité clinique est supérieure aux besoins issus de la réglementation et ses ressources humaines, immobilières et financières sont suffisantes, ces dernières, ainsi que l'avenir de l'institut, étant menacés par la réduction à 100 étudiants de sa capacité d'accueil ;

- la décision n° 2022-56 du 29 avril 2022 ne procède pas du réexamen de son dossier pourtant prescrit à la ministre de la santé et de la prévention par le jugement du tribunal du 23 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu

- le code de la santé publique ;

- le décret n° 2014-1043 du 12 septembre 2014 relatif à l'agrément des établissements de formation en ostéopathie ;

- le décret n° 2021-1284 du 1er octobre 2021 modifiant le décret n° 2014-1043 du 12 septembre 2014 relatif à l'agrément des établissements de formation en ostéopathie ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 2 avril 2024 :

- le rapport de M. Gros, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,

- et les observations de Me Cruchaudet représentant l'IFSO de Vichy.

Considérant ce qui suit :

1. Par agrément quinquennal délivré le 3 mars 2016 par la ministre chargée de la santé, l'IFSO de Vichy a été autorisé à accueillir, en vue de leur dispenser une formation en ostéopathie, un nombre total d'étudiants au titre des différentes années de formation, de 97 en 2016-2017, 172 en 2017-2018, 224 en 2018-2019, 249 en 2019-2020 et 274 en 2020-2021. En octobre 2020, l'IFSO de Vichy a déposé une demande de renouvellement de cet agrément. Le ministre chargé de la santé a fait droit à cette demande, par décision n° 2021-17 du 22 juillet 2021, en limitant toutefois à 100 étudiants la capacité d'accueil de l'institut pour les cinq années à venir. Cette décision ayant été suspendue le 31 août 2021 par le juge des référés du tribunal administratif de Clermont-Ferrand, le ministre, le 6 septembre suivant, a porté à 150 étudiants cette capacité d'accueil. Puis, sur sa demande, l'institut a été autorisé à accueillir, à titre provisoire et pour l'année scolaire 2021-2022, jusqu'à 274 étudiants, par une décision n° 2021-44 du 18 octobre 2021, capacité d'accueil pérennisée pour les quatre années suivantes par décision n° 2022-56 du 29 avril 2022. Le ministre chargé de la santé relève appel du jugement du 23 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé la décision du 22 juillet 2021 en tant qu'elle fixe la capacité maximale d'accueil de l'institut à 274 étudiants en 2021-2022, et à 150 étudiants pour les quatre années suivantes.

2. Aux termes de l'article 2 du décret n° 2021-1284 du 1er octobre 2021 modifiant le décret n° 2014-1043 du 12 septembre 2014 relatif à l'agrément des établissements de formation en ostéopathie : " Par dérogation à l'article 4 du décret du 12 septembre 2014 susvisé dans sa rédaction résultant du présent décret, pour les établissements de formation ayant déposé un dossier de demande en 2019 ou 2020 et dont l'agrément a été refusé ou la capacité d'accueil réduite par rapport à celle de l'année 2020 par décision en date du 22 juillet 2021, le ministre chargé de la santé peut, à la demande des établissements concernés formulée dans le délai de dix jours suivant la date de publication du présent décret, délivrer l'agrément mentionné au deuxième alinéa du même article 4 sans nouvel avis de la commission consultative nationale d'agrément instituée par l'article 26 du décret du 13 février 2018 susvisé / L'agrément provisoire délivré en application du présent article expire le 31 août 2022 / Le ministre chargé de la santé porte à la connaissance des établissements de formation concernés les dispositions du présent article ". Aux termes de l'article 4 du décret n° 2014-1043 du 12 septembre 2014, dans sa rédaction issue de sa modification par le décret n° 2021-1284 du 1er octobre 2021 : " L'agrément est accordé pour une durée de cinq ans par décision du ministre chargé de la santé après avis de la Commission nationale consultative mentionnée à l'article 25 du décret n° 2018-90 du 13 février 2018 relatif à l'agrément des établissements de formation en chiropraxie / Toutefois, lorsque l'agrément ne peut être accordé en raison du non-respect d'un nombre limité de critères, autres que ceux relatifs à la sécurité des étudiants, des personnels et des usagers de la clinique interne, pouvant faire l'objet d'une régularisation à brève échéance, le ministre chargé de la santé peut délivrer un agrément provisoire d'un an / La décision d'agrément provisoire précise les éléments devant être régularisés au regard des critères mentionnés à l'article 2 dans le délai qu'elle fixe. A l'issue de ce délai et au plus tard avant la fin de l'année scolaire, le ministre chargé de la santé, au vu des éléments produits et après un nouvel avis de la commission consultative nationale, décide ou non d'accorder l'agrément pour la durée restante de quatre ans ".

3. Un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif. Si, avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être critiqué dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait lieu, pour le juge de la légalité, de statuer sur le mérite du recours dont il était saisi, quand bien même l'acte rapporté aurait reçu exécution.

4. La décision du 22 juillet 2021 a réduit la capacité d'accueil de l'IFSO de 274 étudiants en 2021-2021 à 100 étudiants pour chacune des cinq années à compter du 1er septembre 2021. En application des dispositions de l'article 2 du décret n° 2021-1284 du 1er octobre 2021, qui conduisaient au réexamen du dossier de demande de renouvellement d'agrément, l'IFSO de Vichy a, par courriel du 6 octobre 2021, sollicité auprès des services ministériels la délivrance d'un agrément provisoire pour l'année 2021-2022 qui rétablirait sa capacité d'accueil 2020-2021. Le ministre a fait droit à cette demande par un arrêté du 18 octobre 2021, qui fixe à 274 étudiants la capacité d'accueil de l'institut pour l'année 2021-2022, et prescrit à l'institut, s'il entendait conserver cette capacité d'accueil, de régulariser sa situation au regard du nombre de consultations pour la formation clinique et des modalités d'organisation des enseignements théoriques. L'IFSO s'est conformé à cette prescription en déposant un dossier de régularisation que la commission consultative nationale d'agrément a examiné le 8 mars 2022. Par sa décision du 29 avril 2022, prise également postérieurement à l'enregistrement de la demande de première instance, publiée au journal officiel du 5 mai 2022, le ministre chargé de la santé a autorisé l'établissement à accueillir jusqu'à 274 étudiants pour chacune des quatre années à compter du 1er septembre 2022. Les décisions du 18 octobre 2021 et du 29 avril 2022, qui, ensemble, renouvellent l'agrément de l'IFSO pour une durée de cinq années à compter du 1er septembre 2021, avec une capacité d'accueil annuelle associée de 274 étudiants, ont eu pour effet de retirer la décision attaquée du 22 juillet 2021 qui, sur la même période, restreignait cette capacité à 100 étudiants par an. L'IFSO n'a jamais contesté la décision du 18 octobre 2021, qui, d'ailleurs, répondait à sa demande, dont il a eu connaissance acquise le 18 janvier 2022, date d'enregistrement par le tribunal du mémoire en défense du ministre chargé de la santé. La décision du 29 avril 2022 quant à elle a été notifiée à l'IFSO, accompagnée d'un courrier indiquant les voies et délais de recours à son encontre, par courriel du 3 mai 2022 qui a été lu le jour même.

5. Si cette décision du 29 avril 2022, n'était pas encore devenue définitive à la date du jugement attaqué le 23 juin 2022, ce qui faisait alors obstacle à ce que le tribunal administratif prononce un non lieu à statuer, elle n'a pas été contestée dans le délai de recours contentieux et est devenue définitive avant l'introduction de la requête présentée le 17 août 2022 devant la cour. Par suite, la décision du 22 juillet 2021 ayant été définitivement retirée après réexamen de la situation de l'IFSO au regard des dispositions nouvelles du décret n° 2021-1284 du 1er octobre 2021, les décisions des 18 octobre 2021 et 29 avril 2022 qui se sont substituées à la décision du 22 juillet 2021 annulée par le jugement attaqué ont rendu sans objet l'appel du ministre dirigé contre ce jugement. Par suite, l'appel du ministre est irrecevable.

6. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme à la charge de l'Etat au titre des frais non compris dans les dépens exposés par l'IFSO de Vichy.

DECIDE :

Article 1er : La requête du ministre de la santé et de la prévention est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'IFSO de Vichy présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'IFSO de Vichy et au ministre du travail, de la santé et des solidarités.

Délibéré après l'audience du 2 avril 2024, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Stillmunkes, président assesseur,

M. Gros, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 avril 2024.

Le rapporteur,

B. Gros

Le président,

F. Pourny

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre du travail, de la santé et des solidarités, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY02547


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02547
Date de la décision : 30/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-05-03-01 Procédure. - Incidents. - Intervention. - Recevabilité.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Bernard GROS
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 12/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-30;22ly02547 ?
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