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18/04/2024 | FRANCE | N°23LY03065

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 4ème chambre, 18 avril 2024, 23LY03065


Vu les autres pièces du dossier ;



Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;



La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions

l'audience ;



Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;



Après a...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu le rapport de Mme Evrard au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante kosovare née en 1997, est entrée régulièrement en France le 5 novembre 2021 sous couvert d'un visa de tourisme délivré par les autorités suisses. Le 9 janvier 2023, elle a sollicité la délivrance d'une carte de résident sur le fondement des dispositions du 2° de l'article L. 424-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en se prévalant de sa qualité de conjointe d'un réfugié. Par arrêté du 2 mars 2023, le préfet de la Savoie a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme B... relève appel du jugement du 22 août 2023 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, l'arrêté attaqué a été signé par Mme E... C..., directrice de la citoyenneté et de la légalité de la préfecture de la Savoie, qui disposait d'une délégation de signature à cette fin en vertu d'un arrêté n° 70-2022 du 23 août 2022, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial du même jour. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de cet arrêté manque en fait et doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 424-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de résident prévue à l'article L. 424-1, délivrée à l'étranger reconnu réfugié, est également délivrée à : 1° Son conjoint (...), s'il a été autorisé à séjourner en France au titre de la réunification familiale dans les conditions prévues aux articles L. 561-2 à L. 561-5 ; 2° Son conjoint (...), si le mariage ou l'union civile est postérieur à la date d'introduction de sa demande d'asile, à condition que le mariage ou l'union civile ait été célébré depuis au moins un an et sous réserve d'une communauté de vie effective entre époux ou partenaires, sans que la condition de régularité du séjour ne soit exigée (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier que par une décision du 12 janvier 2024, devenue définitive, la Cour nationale du droit d'asile a déclaré sa décision reconnaissant à l'époux de Mme B... la qualité de réfugié nulle et non avenue. Mme B... n'a ainsi jamais eu la qualité de conjoint de réfugié. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 424-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an (...) / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales (...) " Et aux termes du paragraphe 1er de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

6. Mme B... fait valoir qu'elle est mariée à un compatriote bénéficiant de la qualité de réfugié depuis le 3 décembre 2022, que la communauté de vie a débuté plusieurs mois avant le mariage et qu'un enfant est né de leur union le 5 avril 2023. Toutefois, elle ne peut se prévaloir de la qualité de réfugié de son époux, la décision de la Cour nationale du droit d'asile reconnaissant cette qualité à ce dernier ayant été déclarée nulle et non avenue par cette juridiction. La requérante ne fait état d'aucun élément faisant obstacle à ce qu'elle poursuive sa vie privée et familiale avec son époux et leur enfant, qui ne sera pas séparé de ses parents, au Kosovo, pays où elle-même a vécu jusqu'à l'âge de vingt-six ans, dont l'ensemble des membres de la famille ont la nationalité et où elle conserve des attaches privées et familiales. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le refus de titre de séjour litigieux ne porte pas au droit de Mme B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a pas méconnu l'intérêt supérieur de son enfant. Dès lors, il n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et n'est pas davantage entaché d'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de la requérante.

7. En quatrième lieu, lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit précédemment, que Mme B... ne remplit pas les conditions pour obtenir un titre de séjour de plein droit. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir qu'elle ne pouvait légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire pour ce motif.

8. En cinquième lieu, pour les motifs exposés au point 6, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

9. En sixième lieu, Mme B... fait valoir qu'elle était enceinte à la date de la décision en litige, le 2 mars 2023. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le terme de la grossesse était prévu pour le mois de mai 2023, et que la requérante ne produit aucun élément de nature à établir que son état de grossesse, à la date de cette décision, faisait obstacle à l'exécution de la mesure d'éloignement prononcée à son encontre. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation ni qu'elle porterait atteinte à son intégrité physique.

10. En septième lieu, et pour les motifs exposés au point 9, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la fixation du délai de départ volontaire serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

11. En dernier lieu, si la requérante soutient que le jugement attaqué méconnaît l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elle n'assortit ce moyen d'aucune précision permettant d'en apprécier la portée et le bien-fondé.

12. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

13. Le présent arrêt rejetant les conclusions à fin d'annulation de Mme B... et n'appelant, dès lors, aucune mesure d'exécution, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées.

14. Enfin, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par Mme B....

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... épouse B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Savoie.

Délibéré après l'audience du 28 mars 2024, à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président,

Mme Evrard, présidente assesseure,

Mme Psilakis, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 avril 2024.

La rapporteure,

A. EvrardLe président,

Ph. Arbarétaz

La greffière,

F. Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

23LY03065


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY03065
Date de la décision : 18/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Aline EVRARD
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : BRUN

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-18;23ly03065 ?
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