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26/03/2024 | FRANCE | N°23LY01655

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 6ème chambre, 26 mars 2024, 23LY01655


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 6 janvier 2023 par lesquelles le préfet de l'Isère lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.



Par un jugement n° 2300518 du 13 avril 2023, le tribun

al administratif de Grenoble a rejeté sa demande.





Procédure devant la cour :



Par une...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 6 janvier 2023 par lesquelles le préfet de l'Isère lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2300518 du 13 avril 2023, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 mai 2023, M. A... B..., représenté par la SELARL BS2A Bescou et Sabatier Avocats Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2300518 du 13 avril 2023 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler les décisions du 6 janvier 2023 par lesquelles le préfet de l'Isère lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un certificat de résidence algérien de dix ans ou de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement renverse la charge de la preuve ;

Sur le refus de renouvellement de son titre de séjour :

- cette décision méconnait les stipulations du 2 de l'article 6 et du a) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire :

- cette décision est dépourvue de base légale à raison de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

- elle est entachée d'une erreur de droit et méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision fixant le délai de départ volontaire et la décision fixant le pays de destination :

- ces décisions sont dépourvues de base légale à raison de l'illégalité des décisions lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire.

Le préfet de l'Isère, régulièrement mis en cause, n'a pas produit.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, modifié, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Vergnaud, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien né le 16 mars 1990, est entré régulièrement en France le 1er avril 2021 sous couvert de son passeport revêtu d'un visa de court séjour. Il a bénéficié d'un titre de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française pour la période du 29 juin 2021 au 28 juin 2022 dont il a sollicité le renouvellement le 13 juin 2022. Par un arrêté du 6 janvier 2023, le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office. Par un jugement du 13 avril 2023, dont M. B... interjette appel, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si M. B... a entendu soutenir que le jugement du tribunal administratif de Grenoble serait irrégulier au motif que les premiers juges auraient renversé la charge de la preuve de l'effectivité de la vie commune avec son épouse française, ce moyen, qui se rattache au bien-fondé du raisonnement suivi par le tribunal, n'est pas de nature à entacher d'irrégularité le jugement attaqué. Il en est de même du moyen tiré de ce que le tribunal aurait commis une erreur de droit.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la légalité du refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : a) Au ressortissant algérien, marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 6 nouveau 2) et au dernier alinéa de ce même article ; (...) ". Aux termes de l'article 6 du même accord : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2 ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux ".

4. Il résulte de ces stipulations que le renouvellement du certificat de résidence valable un an et la délivrance d'un premier certificat de résidence valable dix ans en qualité de conjoint de français sont subordonnés à la condition que la communauté de vie entre les époux soit effective.

5. Pour refuser à M. B... le renouvellement de son certificat de résidence algérien sur le fondement des dispositions précitées, le préfet de l'Isère s'est fondé sur la circonstance que l'effectivité de la communauté de vie avec son épouse française n'était pas démontrée dès lors que les éléments produits par l'intéressé étaient insuffisants pour en justifier et, qu'aux termes du rapport d'enquête administrative établi le 11 août 2022, la visite domiciliaire du 7 août 2022 n'avait pas permis de constater la communauté de vie du couple en raison de l'absence de M. B... et du refus d'accès au domicile opposé par son épouse aux enquêteurs. Si M. B... fait valoir qu'il était, à la date de la visite domiciliaire, en déplacement professionnel, il n'en justifie pas, alors, au demeurant, que cette visite a été effectuée un dimanche en début d'après-midi. Par ailleurs, les seules pièces produites par l'intéressé et relative à l'année 2022, à savoir une attestation du fournisseur d'énergie attestant d'un abonnement aux noms des deux époux et à l'adresse du couple depuis le 6 octobre 2021 et une facture de fourniture d'énergie du 17 novembre 2022 aux deux noms et à la même adresse ainsi que deux factures d'eau respectivement des 24 janvier et 24 août 2022, dont la première fait état d'une consommation de zéro m3, ne sont pas suffisantes à elles seules pour établir l'effectivité d'une communauté de vie à la date de la décision contestée. De plus, les bulletins de salaires de M. B... pour les mois d'août à décembre 2021 puis de mai à novembre 2022 mentionnent une adresse différente de celle du domicile commun déclaré. En outre, les autres pièces produites, à savoir une déclaration d'impôt commune au titre des revenus de l'année 2021, établie le 24 janvier 2023, une attestation d'assurance habitation pour la période du 24 janvier au 27 septembre 2023, une convocation par Pôle emploi du 25 janvier 2023, une facture d'eau de février 2023 et une facture Free de mars 2023, qui sont toutes postérieures à la date de la décision en litige, comme les attestations établies par son épouse et ses proches en 2023 ou les photographies non datées du couple, ne sont pas de nature à démontrer une communauté de vie effective à la date du refus de renouvellement du titre de séjour. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait estimé à tort qu'il ne justifiait pas d'une communauté de vie effective avec son épouse et le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit, en conséquence, être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Si M. B... fait valoir qu'il résidait en France depuis deux ans à la date de la décision contestée, qu'il est marié à une ressortissante française et qu'il a exercé une activité professionnelle sur le territoire national, il résulte cependant de ce qui a précédemment été exposé que la communauté de vie effective avec son épouse n'est pas démontrée et il ressort des pièces du dossier qu'il est sans emploi depuis novembre 2022. Par ailleurs il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses parents, ses frères et sa sœur, et où il a vécu jusqu'à l'âge de 31 ans. En conséquence, le préfet de l'Isère n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté.

En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. En premier lieu, il résulte de ce qui a été précédemment exposé que M. B... ne peut se prévaloir, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

9. En second lieu, en l'absence d'éléments supplémentaires, les moyens tirés de ce que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaitrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur de droit doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés aux points 5 et 7 du présent arrêt.

En ce qui concerne la légalité des décisions fixant le délai de départ volontaire et le pays de destination :

10. Au regard de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre les décisions fixant le délai de départ volontaire et le pays de destination.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 4 mars 2024, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Stillmunkes, président-assesseur,

Mme Vergnaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 mars 2024.

La rapporteure,

E. Vergnaud

Le président,

F. Pourny

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY01655


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY01655
Date de la décision : 26/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: Mme Edwige VERGNAUD
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU & SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-26;23ly01655 ?
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