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21/03/2024 | FRANCE | N°23LY03274

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 7ème chambre, 21 mars 2024, 23LY03274


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure



M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, d'annuler la décision du 5 octobre 2022 par laquelle la préfète de l'Ain a refusé d'enregistrer sa demande de titre de séjour et d'enjoindre à cette autorité d'enregistrer cette demande et de lui délivrer un récépissé, d'autre part, d'annuler les décisions du 23 mars 2023 par lesquelles la même préfète a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un dél

ai de trente jours et a fixé le pays de destination, et d'enjoindre à cette autorité de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, d'annuler la décision du 5 octobre 2022 par laquelle la préfète de l'Ain a refusé d'enregistrer sa demande de titre de séjour et d'enjoindre à cette autorité d'enregistrer cette demande et de lui délivrer un récépissé, d'autre part, d'annuler les décisions du 23 mars 2023 par lesquelles la même préfète a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, et d'enjoindre à cette autorité de renouveler son titre de séjour ou, à défaut, de procéder à l'enregistrement de sa demande de renouvellement.

Par un jugement n°s 2208296, 2303279 du 21 septembre 2023, le tribunal a constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'annulation et d'injonction de la demande d'annulation du refus d'enregistrement de sa demande de titre de séjour (article 1er), annulé l'arrêté du 23 mars 2023 (article 2), enjoint à la préfète de l'Ain de renouveler le titre de séjour sollicité par M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et, dans l'attente, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour (article 3), mis à la charge de l'État une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 4) et rejeté le surplus des demandes n° 2208296 et n° 2303279 (article 5).

Procédure devant la cour

I- Par une requête enregistrée le 19 octobre 2023, sous le n° 23LY03274, la préfète de l'Ain demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 2 et 3 de ce jugement et de rejeter la demande de première instance correspondante ;

2°) d'enjoindre à M. A... de restituer, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, le titre de séjour qui lui a été remis dans le cadre de l'exécution de ce jugement.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier, étant insuffisamment motivé faute d'évoquer les éléments qu'elle avait apportés par ses observations en défense du 27 juillet 2023 pour critiquer les actes relatifs à son état civil produits par M. A... devant les premiers juges ;

- la décision du 23 mars 2023 portant refus de renouvellement d'un titre de séjour n'est pas entachée d'une erreur d'appréciation s'agissant du motif tiré de la fraude ou du caractère falsifié de l'acte d'état civil produit par M. A... à l'appui de sa demande de renouvellement, laquelle est établie sur des éléments précis et concordants ;

- à titre subsidiaire, à ce motif peut être substitué celui tiré de ce qu'au regard des dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'intéressé ne justifie pas de son état civil, les actes civils produits ou autres actes apportés par M. A..., tant à l'appui de sa demande de renouvellement que devant les premiers juges, étant irréguliers, falsifiés ou inexacts ;

- les décisions du même jour portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de destination ne sont pas illégales par voie de conséquence de l'illégalité du refus de renouvellement d'un titre de séjour ;

- les autres moyens soulevés en première instance par M. A... ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 28 décembre 2023, M. A..., représenté par Me Zoccali, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce qu'une somme de 1 500 euros hors taxe soit mise à la charge de l'État au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par la préfète de l'Ain ne sont pas fondés.

Une ordonnance du 29 décembre 2023 a fixé la clôture d'instruction au 15 janvier 2024.

II- Par une requête enregistrée le 19 octobre 2023, sous le n° 23LY03275, la préfète de l'Ain demande à la cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement en ce qu'il a annulé son arrêté du 23 mars 2023 et lui a enjoint de renouveler le titre de séjour sollicité par M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et, dans l'attente, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour.

Elle soutient que :

- elle est fondée à obtenir le sursis à exécution du jugement attaqué en application des dispositions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative ;

- les moyens qu'elle invoque, dans sa requête d'appel dirigée contre le jugement attaqué, paraissent en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier l'annulation de ce jugement et le rejet des conclusions à fin d'annulation qui ont été accueillies par celui-ci ;

- le jugement attaqué est irrégulier, étant insuffisamment motivé faute d'évoquer les éléments qu'elle avait apportés par ses observations en défense du 27 juillet 2023 pour critiquer les actes relatifs à son état civil produits par M. A... devant les premiers juges ;

- la décision du 23 mars 2023 portant refus de renouvellement d'un titre de séjour n'est pas entachée d'une erreur d'appréciation s'agissant du motif tiré de la fraude ou du caractère falsifié de l'acte d'état civil produit par M. A... à l'appui de sa demande de renouvellement, laquelle est établie sur des éléments précis et concordants ;

- à titre subsidiaire, à ce motif peut être substitué celui tiré de ce qu'au regard des dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'intéressé ne justifie pas de son état civil, les actes civils produits ou autres actes produits par M. A..., tant à l'appui de sa demande de renouvellement que devant les premiers juges étant irréguliers, falsifiés ou inexacts ;

- les décisions du même jour portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de destination ne sont pas illégales par voie de conséquence de l'illégalité du refus de renouvellement d'un titre de séjour ;

- les autres moyens soulevés en première instance par M. A... ne sont pas fondés.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative l'affaire a été dispensée d'instruction.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Chassagne, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant de la République du Sénégal, déclare être né le 6 janvier 2001 à Kolda, et entré sur le territoire français le 7 août 2017. A la suite de deux jugements du tribunal administratif de Lyon ayant annulé notamment des décisions de refus de séjour, le préfet de l'Ain, sur injonction, lui a délivré le 25 juin 2020, un titre de séjour portant la mention " salarié ", renouvelé à deux reprises jusqu'au 24 juin 2022. Par un jugement du 27 juillet 2022, confirmé en appel, ce tribunal a également annulé un arrêté du 13 avril 2022 de la préfète de l'Ain portant en particulier retrait de ce titre de séjour et obligation de quitter le territoire français. M. A... a demandé le renouvellement de son titre de séjour le 24 juin 2022 à la préfète de l'Ain qui, après avoir refusé d'enregistrer cette demande par une décision du 5 octobre 2022, a, par des décisions du 23 mars 2023, abrogé la décision du 5 octobre 2022, opposé un refus à cette demande et fait obligation à l'intéressé de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, puis fixé le pays de destination. La préfète de l'Ain, par deux requêtes qu'il convient de joindre pour statuer par un seul arrêt, relève appel du jugement en ce que le tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions du 23 mars 2023 portant refus de séjour, éloignement et fixant le pays de renvoi (article 2) et lui a enjoint de renouveler le titre de l'intéressé (article 3), et en demande le sursis à exécution.

Sur les conclusions aux fins d'annulation et d'injonction :

En ce qui concerne le motif de censure retenu par les premiers juges

2. Aux termes de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui demande (...) le renouvellement d'un titre de séjour présente à l'appui de sa demande : / 1° Les documents justifiants de son état civil ;2° Les documents justifiants de sa nationalité / (...) La délivrance du premier récépissé et l'intervention de la décision relative au titre de séjour sollicité sont subordonnées à la production de ces documents. / (...). ". Aux termes de l'article L. 811-2 du même code : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies à l'article 47 du code civil. ". Selon l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française. ".

3. L'article 47 du code civil pose une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère dans les formes usitées dans ce pays. Il incombe à l'administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question. Il ne résulte en revanche pas de ces dispositions que l'administration française doit nécessairement et systématiquement solliciter les autorités d'un autre État afin d'établir qu'un acte d'état civil présenté comme émanant de cet État est dépourvu d'authenticité, en particulier lorsque l'acte est, compte tenu de sa forme et des informations dont dispose l'administration française sur la forme habituelle du document en question, manifestement falsifié. Il en découle que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.

4. Pour refuser un titre de séjour à M. A..., la préfète de l'Ain a relevé que le service compétent de la police aux frontières avait émis, le 25 novembre 2021, un avis défavorable quant à l'authenticité d'un acte de naissance produit en raison d'une contrefaçon notamment au niveau du timbre fiscal, puis que cet acte mentionnait que le père de l'intéressé était " Bourama ", alors qu'un acte de mariage également produit indiquait un prénom différent, pour en conclure que les documents d'état civil présentés par l'intéressé étaient entachés, sur la base d'éléments précis et concordants, d'une fraude.

5. Il ressort de l'avis précité émis par la police aux frontières le 25 novembre 2021 que sur l'extrait du registre des actes de naissance n° 2001-2826 du 26 octobre 2021 produit par M. A... à l'appui de sa demande, le tampon humide est de très mauvaise qualité et que le timbre fiscal n'est pas authentique, constituant une copie en impression " toner ", avec une surcharge en vue de modifier le montant de ce timbre. De plus, il ressort, de cet acte, et d'une copie littérale d'acte de naissance établie le 18 juillet 2023 ainsi que d'un extrait du registre des actes de l'état civil pour l'année 2020 du 13 décembre 2022, ces deux derniers documents ayant été produits par M. A... devant les premiers juges, que son père est désigné comme portant le prénom " Bourama ", et étant né le 25 juin 1958. Toutefois, M. A... avait déposé auprès de l'autorité préfectorale un document correspondant au " volet 1 " d'un acte de mariage célébré le 10 septembre 2020 au Sénégal, signé par lui-même et son épouse, qui mentionnait que son père se prénommait " Ibrahima ", document qui comme l'indique la préfète constitue l'acte remis aux époux le jour du mariage, mais également avait apporté en 2018 un acte d'état civil relatif à son père, un extrait du registre des actes de naissance du 17 avril 2018, mentionnant que ce dernier, se prénommant " Bourama ", était né le 25 juin 1988, alors d'ailleurs que ce document faisait état de ce qu'il était établi en vertu d'un jugement d'autorisation d'inscription de naissance du 4 mars 1983. Par ailleurs, il apparaît que, comme le fait valoir la préfète, tant la copie littérale d'acte de naissance établie le 18 juillet 2023 que l'extrait du registre des actes de l'état civil pour l'année 2020 du 13 décembre 2022 sont entachés, pour le premier, d'irrégularités au regard de plusieurs dispositions du code de la famille sénégalais produit par cette autorité, et pour le second d'incohérences, étant censé transcrire, comme extrait du registre des actes de l'état civil, l'acte original constitué vraisemblablement par le " volet 1 " d'un acte de mariage célébré le 10 septembre 2020 sus évoqué, mais comportant sur le prénom du père de l'intéressé une différence. De surcroît, la préfète de l'Ain démontre avoir saisi les autorités sénégalaises au mois de septembre 2022 par la voie diplomatique aux fins de vérification de l'état civil de l'intéressé et indique que ces dernières n'y ont pas répondu. M. A... ne remet pas sérieusement en cause ces différents éléments, et s'il fait valoir qu'il a par ailleurs produit un passeport dont l'authenticité n'a pas été remise en cause, qu'il ne verse au demeurant pas au dossier ni ne justifie sur la base de quels actes d'état civil il aurait été établi, aucune force probante particulière ne peut être attribuée à un tel document. Par suite, au regard de l'ensemble de ces éléments, en estimant que les actes d'état civil produits par M. A... à l'appui de sa demande étaient frauduleux et en refusant le renouvellement de son titre de séjour, compte tenu des dispositions précitées de l'article 47 du code civil, pour cette raison, la préfète de l'Ain n'a pas commis d'erreur d'appréciation, et est, par conséquent, fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé cet acte en retenant un tel motif.

6. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif et la cour.

En ce qui concerne les autres moyens

7. En premier lieu, si M. A... soutient que le refus de renouvellement de son titre de séjour serait entaché de " défaut d'examen sérieux de la situation, [d']une erreur de fait, [d]'un défaut de base légale, [d']une erreur de droit ", dès lors qu'il n'aurait pas présenté de demande de renouvellement de son titre de séjour, en toute hypothèse, il apparaît que la préfète de l'Ain l'a regardé comme ayant présenté une telle demande en lui délivrant un récépissé le 24 juin 2022. Le moyen ne peut qu'être écarté.

8. En deuxième lieu, si la circulaire interministérielle du 25 janvier 2016 relative à la mobilisation des services de l'État auprès des conseils départementaux concernant les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et les personnes se présentant comme tels comporte des orientations générales destinées notamment à éclairer les préfets dans l'exercice de leur pouvoir visant à la délivrance de titres de séjour à des étrangers dit " mineurs isolés " à leur majorité et s'agissant de la vérification des documents d'état civil présentés par ces derniers, toutefois, les intéressés ne peuvent faire valoir aucun droit au bénéfice de ces orientations et ne peuvent donc utilement se prévaloir de celles-ci à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir contre une décision préfectorale refusant de leur délivrer un titre de séjour. Par suite, en toute hypothèse, en admettant même que M. A... ait entendu soulever un tel moyen, il ne saurait utilement se prévaloir des énonciations de cette circulaire en ce qui concerne l'application de l'article 47 du code civil. Le moyen ne saurait être admis.

9. En troisième lieu, M. A... se prévaut de sa présence sur le territoire français depuis l'âge de seize ans, de son isolement dans son pays d'origine qu'il a dû quitter dans son jeune âge, de ce qu'il a établi en France le centre de ses intérêts personnels, par une insertion sociale et professionnelle réussie, et de ce qu'il remplit les conditions du regroupement familial pour faire venir son épouse à ses côtés avec qui il s'est marié dans son pays d'origine le 11 décembre 2020. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que, si M. A... se trouvait en France depuis un peu plus de cinq années à la date de l'arrêté en litige, il y était également célibataire et sans enfant, alors que son épouse demeurait au Sénégal, quand bien même par un jugement du 27 juillet 2022, confirmé par arrêt de la cour du 27 avril 2023, le tribunal administratif de Lyon avait annulé une décision de refus de regroupement familial lui ayant été opposée le 13 avril 2022. S'il apparaît que M. A... est titulaire d'un contrat à durée indéterminée à temps complet, depuis le 1er septembre 2020, comme employé polyvalent dans un restaurant dit " B... ", et qu'il a bénéficié en 2020 d'un titre de séjour d'une durée d'un an en qualité de salarié, renouvelé à une reprise, il ne peut cependant être regardé comme justifiant de ce seul fait d'une insertion sur le plan professionnel particulièrement notable en France, alors qu'il ne peut se prévaloir d'aucun élément concernant son insertion sur le plan personnel ou scolaire. Par suite, le refus de renouvellement d'un titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire en litige n'ont pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Aucune méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne saurait être retenue.

10. En quatrième lieu, si M. A... fait valoir que la préfète ne pouvait lui opposer la présence au Sénégal de son épouse sans méconnaitre le principe de loyauté, un tel moyen, en toute hypothèse, n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

11. En cinquième lieu, si M. A... fait se prévaut de l'inexécution, par la préfète, de l'injonction lui ayant été faite par le tribunal administratif de Lyon de réexaminer la demande de regroupement familial qu'il avait déposée au profit de son épouse le 16 juin 2021, en toute hypothèse, à supposer que l'intéressé ait entendu soulever ainsi un moyen à l'encontre du refus de renouvellement de titre de séjour en litige, cette circonstance serait sans incidence sur cette décision.

12. En dernier lieu, il ne résulte pas de ce qui précède que l'obligation de quitter le territoire français serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour, et que la décision fixant le pays de destination le serait également. Les moyens ne peuvent qu'être écartés.

13. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur sa régularité, que la préfète de l'Ain est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 23 mars 2023 et lui a enjoint à de renouveler le titre de séjour sollicité par M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et, dans l'attente, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour. La demande correspondante de M. A... présentée devant ce tribunal, dans cette mesure, et l'ensemble de ses conclusions présentées en appel, doivent donc être rejetés.

14. Si la préfète de l'Ain demande à la cour d'enjoindre à M. A... de restituer, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, le titre de séjour qui lui a été remis dans le cadre de l'exécution du jugement attaqué, en toute hypothèse, M. A... n'étant ni une personne morale de droit public ni un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public, aucune injonction ne saurait être prononcée à son encontre en application des dispositions des articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de justice administrative. Ces conclusions ne peuvent donc qu'être rejetées.

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :

15. Le présent arrêt statuant sur l'appel de la préfète de l'Ain dirigée contre le jugement n°s 2208296, 2303279 du 21 septembre 2023 du tribunal administratif de Lyon, les conclusions de la requête n° 23LY03275 tendant ce qu'il soit sursis à son exécution ont perdu leur objet et il n'y a donc plus lieu d'y statuer.

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement n°s 2208296, 2303279 du 21 septembre 2023 du tribunal administratif de Lyon sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. A... présentées devant la cour dans l'instance n° 23LY02374 et le surplus des conclusions présentées par la préfète de l'Ain sont rejetés.

Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la préfète de l'Ain n° 23LY03275 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Lyon du 21 septembre 2023.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 7 mars 2024 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

M. Chassagne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 mars 2024.

Le rapporteur,

J. Chassagne

Le président,

V-M. Picard La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N°s 23LY03274, 23LY03275

al


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY03274
Date de la décision : 21/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: M. Julien CHASSAGNE
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : ZOCCALI

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-21;23ly03274 ?
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