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21/03/2024 | FRANCE | N°22LY02561

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 2ème chambre, 21 mars 2024, 22LY02561


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



La SARL FTL Management a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2015, ainsi que des majorations correspondantes.



Par un jugement n° 1907698 du 28 juin 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour



Par une requête et deux mémoires

, enregistrés les 18 août 2022, 21 avril et 28 septembre 2023, la SARL FTL Management, représentée par Me Colin, demande à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL FTL Management a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2015, ainsi que des majorations correspondantes.

Par un jugement n° 1907698 du 28 juin 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 18 août 2022, 21 avril et 28 septembre 2023, la SARL FTL Management, représentée par Me Colin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et majorations, ou, à défaut leur réduction ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée ;

- la cession de l'usufruit des parts de la SCI Lolykay étant intervenue en 2012, la créance revendiquée par l'administration est prescrite ;

- l'administration fiscale n'ayant pas remis en cause la valeur de cession de l'usufruit des parts de la SCI Lolykay lors d'un précédent contrôle ayant porté sur la période du 20 mars 2012 au 21 décembre 2013, elle n'est plus fondée à en réévaluer le montant au titre de l'exercice 2015 ;

- pour déterminer la valeur vénale de l'usufruit des 187 parts de la SCI Lolykay, l'administration devait recourir à une combinaison de méthodes alternatives, ce qu'elle n'a pas fait en se limitant à la méthode de l'actualisation des flux futurs ;

- cette méthode est erronée, dès lors qu'elle exclut la notion de résultat distribuable et ne tient compte ni du niveau de trésorerie disponible, ni de l'historique d'affectation des résultats, qui montre une pratique constante d'affectation de l'intégralité des bénéfices réalisées à l'apurement du report à nouveau débiteur et au remboursement de la dette ; cette méthode ne prend pas en compte le montant des loyers perçus par la SCI Lolikay, ni l'endettement des deux sociétés ;

- le prix de cession fixé entre les parties résulte d'un travail d'expertise mené par un cabinet spécialisé ;

- l'administration ne démontre pas l'existence d'un écart significatif entre le prix de vente de l'usufruit des parts de la SCI Lolykay et la valeur vénale de cet usufruit ;

- l'administration ne démontre pas l'existence d'une libéralité qui lui aurait été consentie et qu'elle aurait acceptée de recevoir ;

- la majoration de 40 % pour manquement délibéré n'est pas justifiée ;

- à supposer que la méthode de l'administration soit validée par la cour, les taux utilisés par l'administration pour déterminer le coût moyen pondéré du capital sont erronés ; il convient de retenir une prime de risque de 7,5 % au lieu de 6 % en majoration du taux sans risque ; s'agissant de la prime de risque relative au secteur d'activité, il convient de retenir un beta de 1,35 et non de 0,59 ; il y a également lieu d'appliquer une décote de 10 % afin de tenir compte des contraintes contractuelles et non uniquement une prime d'illiquidité ; au final, le taux d'actualisation à retenir est de 18,38 % et non de 7,96 %, soit une valeur de l'usufruit des titres de la SCI Lolykay ressortant à 666 195 euros au lieu de 1 276 182 euros.

Par un mémoire, enregistré le 5 avril 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 11 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 11 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Courbon, présidente-assesseure,

- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Le 4 avril 2012, la SARL FTL Management, qui a pour activité l'exploitation d'un fonds de commerce sportif et dont le capital social est détenu par M. B..., son gérant, Mme C... et Mme A..., a acquis auprès de ses associés l'usufruit temporaire de 187 des 200 parts de la SCI Lolykay, devenue, le même jour, propriétaire des locaux du centre sportif qu'elle exploite, au prix de 4 301 euros. La SARL FTL Management a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a remis en cause la valeur d'acquisition de l'usufruit de ces parts, telle que comptabilisée à l'actif de son bilan au titre de l'exercice 2015, estimant que cette acquisition avait été faite à un prix volontairement minoré. Elle a, en conséquence, été assujettie à un complément d'impôt sur les sociétés au titre de cet exercice, assorti de la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévu au a. de l'article 1729 du code général des impôts. La SARL FTL Management relève appel du jugement du 28 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette imposition et des majorations correspondantes.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rehaussements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.

3. La proposition de rectification du 2 août 2018 adressée à la SARL FTL Management mentionne l'impôt concerné, l'exercice d'imposition, la base d'imposition retenue ainsi que le fondement légal de la rectification opérée et les motifs qui ont amené l'administration à considérer que la société avait procédé à une valorisation insuffisante, à l'actif de son bilan, de l'usufruit temporaire de 187 parts du capital social de la SCI Lolikay. Elle est ainsi suffisamment motivée au sens des dispositions précitées. Si la SARL FTL Management fait valoir que l'administration ne rapporte pas la preuve de la minoration du prix de cession de l'usufruit temporaire des parts de la SCI Lolikay, cette critique a trait au bien-fondé de l'imposition en litige et est, en elle-même, sans incidence sur la motivation de la proposition de rectification.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

4. D'une part, aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " 1. (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises (...) / 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt (...). L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. (...) / 4 bis. Pour l'application des dispositions du 2, pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci. (...) ". Aux termes de l'article 38 quinquies de l'annexe III au même code : " 1. Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. / Cette valeur d'origine s'entend : / a. Pour les immobilisations acquises à titre onéreux par l'entreprise, du coût d'acquisition, c'est-à-dire du prix d'achat minoré des remises, rabais commerciaux et escomptes de règlement obtenus et majoré des coûts directement engagés pour la mise en état d'utilisation du bien et des coûts d'emprunt dans les conditions prévues à l'article 38 undecies. (...) / b. Pour les immobilisations acquises à titre gratuit, de la valeur vénale ; ". Il résulte de ces dernières dispositions que, dans le cas où le prix de l'acquisition d'une immobilisation a été volontairement minoré par les parties pour dissimuler une libéralité faite par le vendeur à l'acquéreur, l'administration est fondée à corriger la valeur d'origine de l'immobilisation, comptabilisée par l'entreprise acquéreuse pour son prix d'acquisition, pour y substituer sa valeur vénale, augmentant ainsi son actif net dans la mesure de l'acquisition faite à titre gratuit.

5. D'autre part, aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour (...) l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due ".

6. L'inscription au bilan de la valeur d'un élément d'actif acquis à titre onéreux ne constitue pas une décision de gestion définitive opposable à l'administration. La circonstance que la cession de l'usufruit temporaire des 187 parts de la SCI Lolykay soit intervenue en 2012 et qu'il ait été inscrit au bilan au cours d'un exercice prescrit, en application des dispositions de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, ne fait pas obstacle, dès lors qu'il figure toujours au bilan de l'exercice au titre duquel est prononcé le redressement, à ce que l'administration rectifie la valeur qui lui est attribuée, alors même qu'aucun événement ni aucune écriture comptable n'a concerné le bien au cours de l'exercice au titre duquel l'administration rectifie sa valeur au bilan. En l'espèce, l'usufruit temporaire des parts de la SCI Lolykay était inscrit à l'actif du bilan d'ouverture de l'exercice 2015 de la SARL FTL Management, exercice qui n'était pas prescrit à la date de notification de la proposition de rectification du 2 août 2018. Par suite, l'administration a pu, à bon droit, rectifier la valeur pour laquelle cet usufruit figurait au bilan, alors même que la cession de celui-ci est intervenue au cours de l'exercice 2012, qui était prescrit.

7. D'une part, la valeur vénale des titres d'une société non admise à la négociation sur un marché réglementé doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où la cession est intervenue. L'évaluation des titres d'une telle société doit être effectuée, par priorité, par référence au prix d'autres transactions intervenues dans des conditions équivalentes et portant sur les titres de la même société ou, à défaut, de sociétés similaires. En l'absence de telles transactions, celle-ci peut légalement se fonder sur la combinaison de plusieurs méthodes alternatives.

8. D'autre part, en cas de démembrement de droits sociaux, l'usufruitier, conformément à l'article 582 du code civil qui lui accorde la jouissance de toute espèce de fruits, n'a droit qu'aux dividendes distribués. Il en résulte que l'évaluation du revenu futur attendu par un usufruitier de parts sociales ne peut avoir pour objet que de déterminer le montant des distributions prévisionnelles, qui peut être fonction notamment des annuités prévisionnelles de remboursement d'emprunts ou des éventuelles mises en réserves pour le financement d'investissements futurs, lorsqu'elles sont justifiées par la société.

9. Pour évaluer la valeur vénale de l'usufruit des 187 parts de la SCI Lolikay acquises par la SARL FTL Management, le vérificateur, après avoir constaté l'absence de comparables pertinents permettant de mettre en œuvre la méthode par comparaison, ce que ne conteste pas la requérante en appel, a utilisé la méthode d'actualisation des flux de revenus futurs qui seront perçus pendant la durée de l'usufruit, dite discounted cash flow (DCF), qui n'a pas nécessairement à être combinée avec d'autres méthodes alternatives lorsqu'elle est adaptée aux particularités de la société en cause. Après avoir retenu un taux d'actualisation de 7,96 %, le vérificateur a pris en compte les flux financiers impactant la trésorerie de la SCI, à savoir les loyers, les charges, incluant notamment la taxe foncière, les remboursements, en capital et intérêts, des deux emprunts souscrits par la société pour financer l'achat de l'ensemble immobilier qu'elle détient, dont il a obtenu copie par l'exercice du droit de communication, l'avance en compte courant d'associé de 170 000 euros demandée à titre de garantie par les établissements bancaires, ainsi que les intérêts y afférents. Il a retenu que le bénéfice distribuable correspondait au niveau de trésorerie disponible et que ce bénéfice était totalement distribué, en se fondant, en l'absence d'historique des distributions compte tenu de la date de création de la société en mars 2012, sur ses statuts qui prévoient, au point 35 relatif à l'affectation des résultats, la distribution du bénéfice réalisé entre les associés à proportion de leurs droits. Il a également pris en compte la fiscalité grevant le bénéfice de la SCI, en appliquant le taux forfaitaire de l'impôt sur les sociétés conformément au guide de l'évaluation des entreprises et titres de sociétés édité par la direction générale des finances publiques.

10. Contrairement à ce que soutient la SARL FTL Management, la méthode appliquée par le vérificateur, telle que décrite ci-dessus, ne se limite pas en prendre en compte le bénéfice réalisé par la SCI Lolikay, mais également son endettement ainsi que la fiscalité. Si elle fait valoir, à cet égard, que la SCI n'est pas imposée à l'impôt sur les sociétés, elle n'apporte aucun élément de nature à établir que le taux forfaitaire appliqué, destiné à prendre en compte l'imposition du bénéfice de la SCI, qui existe quand bien même les redevables en sont ses associés, serait incorrectement évalué. La SARL FTL ne saurait, par ailleurs, utilement critiquer l'absence de prise en compte de ses propres emprunts, de son niveau de trésorerie, de l'historique de distribution de ses résultats et de son régime fiscal, dès lors que c'est la valeur vénale de l'usufruit des titres de la SCI Lolikay qu'il convient de déterminer. Elle n'établit pas que cette dernière avait des projets d'investissements ayant nécessité la mise en réserve de fonds, ni qu'elle se serait, en pratique, abstenue au titre de la période ayant suivi la cession de l'usufruit en litige, de distribuer ses bénéfices. Enfin, si elle indique que le prix de 4 301 euros auquel cet usufruit lui a cédé a été déterminé par un expert, elle ne produit pas l'expertise en cause. Quant à la méthode alternative qu'elle propose, fondée " sur le solde actualisé de la trésorerie disponible, correspondant à la différence entre l'excédent brut d'exploitation et le besoin en fonds de roulement, les annuités d'autofinancement et la rémunération des associés ", elle ne l'explicite pas et ne donne aucun élément chiffré quant à l'évaluation de la valeur de l'usufruit en ressortant. Dans ces conditions, la SARL FTL Management ne remet pas en cause la pertinence de la méthode utilisée par le vérificateur, qui est conforme aux principes énoncés au point 8 ci-dessus.

11. Dans le dernier état de ses écritures, la SARL FTL Management sollicite, à titre subsidiaire, que des correctifs soient apportés au calcul du taux d'actualisation de la méthode DCF utilisée par l'administration. Elle demande d'abord la prise en compte d'un taux de risque sur le marché des actions de 7,5 %, au lieu de 6 % retenu par le vérificateur. Toutefois, le bulletin n° 207 de la Banque de France de septembre-octobre 2016 qu'elle invoque, consacré au coût des capitaux propres, évoque un taux moyen de 7 % pour la France, mais sur la période de 1900 à 2001 ainsi qu'un taux moyen de 5 à 6 % pour les quatre plus grands pays européens sur une période de référence non précisée, mais antérieure à la cession, ressortant d'une enquête publiée en 2012. Si elle s'appuie également sur un article publié en janvier 2013 dans Le cercle des Echos, celui-ci se borne à relater que le taux de risque du marché des actions diffère selon les sources, allant de moins de 5 % à plus de 8 %. Dans ces conditions, elle ne remet pas valablement en cause le taux de 6 % retenu par le service. Elle n'apporte, ensuite, pas davantage d'élément probant pour remettre en cause la prime de risque liée au secteur d'activité de la SCI Lolikay utilisée par l'administration en se prévalant du coefficient beta de 1,35 de janvier 2023 du secteur Real State (Operations et Services) issu du site internet d'un professeur D... school of business at New York University, dont il n'est pas démontré qu'il concerne l'activité de la SCI, alors que le vérificateur a retenu, à partir de la même source, le coefficient beta du secteur REIT, qui correspond aux sociétés foncières cotées. Enfin, si elle revendique, en se fondant sur le guide de l'évaluation des entreprises et des titres de sociétés établi par la direction générale des finances publiques, l'application d'une décote au titre des contraintes contractuelles de 10 %, afin de prendre en compte la procédure d'agrément, prévue à l'article 11 des statuts de la SCI Lolikay en cas de cession des parts à tiers, il ressort de l'article 27 des mêmes statuts que la SCI a fait usage de la dérogation, prévue au dernier alinéa de l'article 1844 du code civil, permettant d'accorder, pour toutes les décisions, le droit de vote à l'usufruiter des parts au lieu du nu-propriétaire, de telle sorte que la SARL FTL Management, qui détient 10 parts en pleine propriété et 187 parts en usufruit sur les 200 qui composent le capital social, est majoritaire pour toute prise de décision, y compris les cessions de parts. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à obtenir la décote pour clause d'agrément en cas de titres minoritaires prévue par ce guide. Il s'ensuit que la SARL FTL Management n'est pas fondée à soutenir que le taux d'actualisation retenu par le service de 7,96 % est erroné.

12. Il résulte de ce qui précède que la valeur vénale de l'usufruit, pendant sa durée de quatorze ans, des 187 titres de la SCI Lolikay acquis par la SARL FTL Management, déterminée selon la méthode DCF, est égale à la somme de 1 193 230 euros. Cette valeur vénale s'écarte significativement du prix de cession de 4 301 euros consenti par les vendeurs à la société requérante, sans qu'il soit fait état d'une contrepartie à cette minoration de prix. Compte tenu de la communauté d'intérêts unissant les trois cédants à la SARL FTL Management, dont ils sont les associés, l'intention libérale est présumée. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a procédé à la correction de la valeur d'origine de l'immobilisation que constitue cet usufruit, comptabilisé par la SARL FTL Management pour son prix d'acquisition, pour y substituer sa valeur vénale, augmentant ainsi son actif net dans la mesure de l'acquisition faite à titre gratuit.

13. Enfin, la circonstance que le prix de cession de l'usufruit des parts de la SCI Lolykay n'a pas été remis en cause par l'administration lors du contrôle de cette SCI ayant porté sur l'ensemble de ses opérations et déclarations afférentes à la période du 20 mars 2012 au 31 mars 2013, ne constitue pas, en tout état de cause, une prise de position formelle sur la situation de fait de la SARL FTL Management dont elle pourrait se prévaloir sur le fondement des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales.

Sur les pénalités :

14. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

15. L'administration relève l'importance de la minoration du prix d'acquisition de l'usufruit temporaire des parts de la SCI Lolikay et la circonstance que la SARL FTL Management, dont les associés sont également ceux de la SCI dont ils ont cédé l'usufruit des parts sociales, avait nécessairement connaissance qu'elle réalisait, au moyen de l'acquisition à vil prix d'un actif incorporel très rémunérateur, un profit exceptionnel non comptabilisé. Ce faisant, l'administration établit, ainsi qu'il lui incombe en application de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales, l'intention délibérée de la SARL FTL Management d'éluder l'impôt et justifie, par conséquent, du bien-fondé de la pénalité appliquée.

16. Il résulte de ce qui précède que la SARL FTL Management n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL FTL Management est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL FTL Management et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 22 février 2024, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Courbon, présidente-assesseure,

M. Laval, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 mars 2024.

La rapporteure,

A. Courbon

Le président,

D. Pruvost

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY02561


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02561
Date de la décision : 21/03/2024
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-01-03 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Bénéfices industriels et commerciaux. - Évaluation de l'actif.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Audrey COURBON
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : CABINET GL CONSEILS & ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-21;22ly02561 ?
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