Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mis à leur charge au titre de l'année 2012.
Par un jugement n°2101453 du 25 octobre 2022, le tribunal administratif de Lyon, après avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions aux fins de décharge de M. et Mme B... à hauteur de la somme de 137 040 euros, a rejeté le surplus de leur demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire enregistrés le 23 décembre 2022 et le 2 novembre 2023, M. et Mme B..., représentés par Me Feschet, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 25 octobre 2022, en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande.
2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités susmentionnées, restant en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice et de le condamner aux entiers dépens.
Ils soutiennent que :
- en ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée, l'administration s'est abstenue de saisir la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires en dépit de leur demande et s'est abstenue de répondre à la demande d'entretien avec le supérieur hiérarchique ;
- s'agissant des revenus de capitaux mobiliers, l'administration n'a pas répondu à leur demande de communication de documents obtenus de tiers ;
- l'administration ne présente aucune pièce justifiant que les sommes encaissées par la société Kovan Limited sur son compte bancaire devraient être considérées comme des bénéfices sommes ou valeurs de la société KGCOM qui auraient été appréhendées par M. B... ;
- les pénalités ne sont pas justifiées.
Par un mémoire enregistré le 25 octobre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dèche, présidente;
- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique ;
- les observations de Me Feschet, pour M. et Mme B... ;
Vu la note en délibéré présentée pour M. et Mme B..., enregistrée le 15 février 2024.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle portant sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013. Parallèlement, la SASU KGCOM, créée le 15 novembre 2011, dont M. B... est le gérant et l'associé unique, et qui exerce une activité de voyance par téléphone et internet, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos les 31 décembre 2012, 2013 et 2014. A l'issue de ces procédures de contrôle, par une proposition de rectification du 18 décembre 2015, l'administration a mis notamment à la charge de M. et Mme B..., des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, au titre de revenus d'origine indéterminée, ainsi que des revenus de capitaux mobiliers, déterminés, sur le fondement des dispositions du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, au titre des revenus réputés distribués correspondant aux bénéfices réintégrés dans les résultats de la SASU KGCOM. Par un jugement du 25 octobre 2022, le tribunal administratif de Lyon, après avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions aux fins de décharge de M. et Mme B... à hauteur de la somme de 137 040 euros, a rejeté le surplus de leur demande. M. et Mme B... relèvent appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En premier lieu, il résulte de l'instruction que, par un courrier du 3 janvier 2017, intitulé " Réponse à votre réponse aux observations du contribuable datée du 8 décembre 2016 ", M. et Mme B... ont demandé la possibilité de saisir la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires et d'obtenir un rendez-vous avec le supérieur hiérarchique du vérificateur. Si les requérants font valoir que c'est par une erreur de plume que ce courrier du 3 janvier 2017 a mentionné dans son objet la réponse aux observations du contribuable datée du 8 décembre 2016, au lieu de 6 décembre 2016, alors que ce courrier mentionnait clairement en objet qu'il portait sur le " Dossier : A... B... - ECSFP ", relatif aux années 2012 et 2013, il ressort des termes de ce même courrier qu'il réitère l'objet de cette demande en précisant " je fais suite à votre réponse aux observations du contribuable (...) datée du 8 décembre 2016 et relative aux années 2013 et 2014 ". Ainsi, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'administration ne peut être regardée comme s'étant méprise sur la portée de cette demande qui ne concernait pas les rehaussements en matière de revenus d'origine indéterminée dont les intéressés ont fait l'objet au titre des années 2012 et 2013. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que ces impositions, dont au demeurant seules, celles relatives à l'année 2012 demeurent en litige, ont été établies au terme d'une procédure irrégulière.
3. En second lieu, les requérants reprennent en appel le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales par l'administration fiscale qui ne leur aurait pas remis l'intégralité des pièces obtenues auprès de l'autorité judiciaire. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs circonstanciés retenus à bon droit par le tribunal au point 5 de son jugement.
Sur le bien-fondé des impositions :
4. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ".
5. D'une part, en cas de refus des rehaussements par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire des sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve tant de l'existence et du montant des distributions que de leur appréhension par le contribuable.
6. D'autre part, pour soumettre à l'impôt sur le revenu des revenus sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, il incombe à l'administration d'établir qu'ils ont été mis à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts. La circonstance que le contribuable que l'administration entend imposer est le maître de l'affaire est à cet égard sans incidence.
7. Il résulte de l'instruction et notamment de la proposition de rectification du 18 décembre 2015, que, lors de l'exercice de son droit de communication auprès des autorités judiciaires, puis auprès des autorités lettones, l'administration fiscale a eu connaissance du fait que M. B..., domicilié en France, avait créé, le 4 décembre 2008, la société Kovan Limited, dont le siège se situe à Hong-Kong, qu'il a déclaré exercer une activité de trading et consulting, qu'il disposait des pouvoirs d'administration de cette société, en vertu d'un " general power of attorney " le désignant, le 14 janvier 2009, qu'il était l'unique associé et le dirigeant de cette société et que cette société avait ouvert un compte bancaire auprès d'une banque lettone sur lequel M. B..., détenait une procuration. Enfin, l'administration a relevé qu'il ressortait des relevés du compte letton qu'au cours des années en litige, la société Kovan Limited avait reçu des virements provenant de clients de la société KGCOM, par l'intermédiaire notamment des sociétés Cyberservices et Newgora SAS, chargées de l'encaissement des paiements par carte bancaire pour le compte de la requérante. L'administration a déduit de l'ensemble de ces éléments d'une part, que le compte letton avait permis de percevoir une partie des revenus de la société KGCOM que cette dernière avait omis de déclarer, d'autre part, que M. B..., unique associé et gérant de la société KGCOM, faisait un usage de ce compte dont il avait la maîtrise totale, à titre personnel, notamment en retirant les sommes de ce compte aussitôt qu'elles étaient créditées. Si les requérants soutiennent qu'à défaut d'établir un désinvestissement pour la SASU KGCOM, aucune distribution de bénéfices ne saurait être taxée entre leurs mains, ce moyen est sans incidence sur l'application des dispositions précitées du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, lesquelles n'impliquent pas un désinvestissement au niveau de la société distributrice. Compte tenu de ces éléments, et alors que les requérants se bornent à faire valoir, sans apporter aucun élément à l'appui de leurs allégations, que la société Kovan Limited pouvait elle-même développer les activités correspondant aux mouvements financiers sur le compte bancaire letton, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'existence et du montant des revenus distribués en litige.
8. Par ailleurs, en relevant sans être utilement contredite que M. B... qui disposait seul de la maîtrise des opérations bancaires sur le compte letton de la société Kovan Limited, effectuait à titre personnel des retraits sur ce compte peu de temps après chaque versement correspondant à des revenus de la société KGCOM, appréhendant ainsi les sommes mises à sa disposition par la société KGCOM par l'intermédiaire du compte bancaire de la société Kovan Limited, l'administration établit suffisamment l'appréhension effective par les requérants des revenus en litige.
Sur les pénalités :
9. Il résulte de ce qui précède, et en l'absence de toute argumentation spécifique, que les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'ils doivent être déchargés des pénalités assortissant les impositions en litige dont l'absence de bien-fondé n'est pas établie.
10. Il résulte de ce qui précède, que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus de leur demande.
Sur les frais liés à l'instance :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. et Mme B... demandent au titre de leurs frais d'instance. Enfin, en l'absence de dépens, la demande présentée sur le fondement de l'article R. 761-1 du même code ne peut qu'être également rejetée.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Mme C... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 15 février 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Dèche, présidente,
Mme Burnichon, première conseillère,
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 mars 2024.
La présidente-rapporteure,
P. DècheL'assesseure la plus ancienne,
C. Burnichon
La greffière,
A-C. Ponnelle
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
N° 22LY03785
kc