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15/02/2024 | FRANCE | N°23LY01564

France | France, Cour administrative d'appel, 7ème chambre, 15 février 2024, 23LY01564


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure



M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 5 août 2020 par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle.



Par un jugement n° 2001843 du 9 mars 2023, le tribunal a rejeté sa demande.





Procédure devant la cour



Par une requête et un mémoire enregistrés les 9 mai et 28 août 2023, ce dernier n'ayant pa

s été communiqué, M. C..., représenté par Me Bucci, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté susmentionné ;
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 5 août 2020 par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle.

Par un jugement n° 2001843 du 9 mars 2023, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 9 mai et 28 août 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. C..., représenté par Me Bucci, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté susmentionné ;

2°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice de le réintégrer dans ses fonctions de surveillant stagiaire dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de cent euros par jour de retard et de condamner l'État à lui verser ses traitements mensuels depuis la date de son licenciement jusqu'à la date de sa réintégration et de lui attribuer les droits sociaux acquis depuis la date de son licenciement ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier ; son conseil n'a pas été destinataire du mémoire en défense du ministre ni même de l'ordonnance de réouverture d'instruction ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur de droit ; la procédure est irrégulière ; il a été sanctionné deux fois pour les mêmes faits ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire enregistré le 25 août 2023, le garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.

Par une ordonnance du 27 juin 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 28 août 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général de la fonction publique ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le décret n° 94-874 du 7 octobre 1994 ;

- le décret n° 2010-1711 du 30 décembre 2010 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ;

- et les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., qui était surveillant stagiaire au centre pénitentiaire de Moulins-Yzeure, relève appel du jugement qui a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 5 août 2020 par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle.

Sur la régularité du jugement :

2. L'article R. 611-1 du code de justice administrative dispose : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-2 à R. 611-6. ".

3. Il apparaît que le mémoire en défense produit par le garde des sceaux, ministre de la justice devant le tribunal n'a pas été communiqué à M. C.... Une telle circonstance, compte tenu du contenu de ce mémoire, a entaché le jugement attaqué d'irrégularité. M. C... est fondé à en demander l'annulation.

4. Il y a lieu ici d'évoquer l'affaire et de statuer sur les moyens présentés par M. C... en première instance et en appel.

Sur le fond du litige :

5. Par un arrêté du 23 juin 2020, régulièrement publié le 1er juillet 2020 au journal officiel, le garde des sceaux a donné délégation à Mme A..., adjointe à la cheffe du bureau de la gestion des personnels, signataire de l'arrêté en litige, en vue de signer, dans la limite de ses attributions tous actes, arrêtés et décisions, à l'exclusion des décrets. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'acte doit être écarté.

6. Si M. C... a reçu une lettre d'observations pour les mêmes faits, la règle non bis idem ne s'applique pas au licenciement pour insuffisance professionnelle qui ne constitue pas une sanction disciplinaire. Par suite le moyen tiré de l'erreur de procédure ne peut qu'être écarté.

7. Aux termes de l'article 7 du décret du 7 octobre 1994 fixant les dispositions communes applicables aux stagiaires de l'État et de ses établissements publics : " Le fonctionnaire stagiaire peut être licencié pour insuffisance professionnelle lorsqu'il est en stage depuis un temps au moins égal à la moitié de la durée normale du stage. / La décision de licenciement est prise après avis de la commission administrative paritaire prévue à l'article 29 du présent décret, sauf dans le cas où l'aptitude professionnelle doit être appréciée par un jury (...) ". Aux termes de l'article 10 du décret du 30 décembre 2010 portant code de déontologie du service public pénitentiaire, alors en vigueur : " Le personnel de l'administration pénitentiaire est astreint au devoir de réserve et au respect de la discrétion et du secret professionnels, dans les conditions prévues par les lois et règlements ". Aux termes de l'article 15 de ce même décret : " Le personnel de l'administration pénitentiaire a le respect absolu des personnes qui lui sont confiées par l'autorité judiciaire et de leurs droits. Il s'interdit à leur égard toute forme de violence ou d'intimidation. Il ne manifeste aucune discrimination. Il ne doit user ni de dénomination injurieuse, ni de tutoiement, ni de langage grossier ou familier. Il manifeste le même comportement à l'égard de leurs proches ".

8. Il est reproché à l'intéressé d'avoir tenu, en salle de repos, des propos virulents et antisémites dans la nuit du 16 au 17 juin 2019 et d'avoir refusé de procéder à la fouille intégrale d'une personne de même confession que lui le 3 août 2019. Il ressort des pièces du dossier que ces faits, dont la matérialité est établie, révèlent une inaptitude à exercer les tâches professionnelles d'un agent pénitentiaire ainsi que des manquements aux obligations mentionnées aux articles 10 et 15 ci-dessus du décret du 30 décembre 2010. Dans ces circonstances, et alors même que l'intéressé a produit des éléments dont résulterait une amélioration de son comportement depuis ces évènements, le garde des sceaux a pu, sans entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation, prononcer son licenciement pour insuffisance professionnelle.

9. Dès lors, la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand doit être rejetée ainsi que l'ensemble de ses conclusions présentées en appel.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 9 mars 2023 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulé.

Article 2 : La demande de M. C... devant le tribunal et ses conclusions en appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 1er février 2024 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2024.

La rapporteure,

C. DjebiriLe président,

V-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N 23LY01564 2

kc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY01564
Date de la décision : 15/02/2024

Analyses

36-10-06-03 Fonctionnaires et agents publics. - Cessation de fonctions. - Licenciement. - Insuffisance professionnelle.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Christine DJEBIRI
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : SCP DEMURE-GUINAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-15;23ly01564 ?
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