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15/02/2024 | FRANCE | N°23LY01310

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 15 février 2024, 23LY01310


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. et Mme B... et A... C... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014, ainsi que des pénalités correspondantes.



Par un jugement n° 1904353 du 9 mars 2021, le tribunal administratif de Lyon les a déchargés de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondante

s (article 1er), et a rejeté leurs conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice admin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme B... et A... C... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1904353 du 9 mars 2021, le tribunal administratif de Lyon les a déchargés de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes (article 1er), et a rejeté leurs conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 2).

Par un arrêt n° 21LY01558 du 30 juin 2022, la cour administrative d'appel de Lyon a réduit de 719 euros les bases de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales assignées à M. et Mme C... au titre de l'année 2014 (article 1er), les a déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014 à concurrence de cette réduction des bases d'impositions ainsi que des pénalités correspondantes (article 2), a remis à la charge de M. et Mme C... les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que les pénalités correspondantes auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014, sous réserve de l'application des articles 1er et 2 de l'arrêt (article 3), a réformé l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Lyon en ce qu'il a de contraire à l'arrêt (article 4) et a rejeté le surplus des conclusions de la requête du ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Par une décision n° 467129 - 467132 du 14 avril 2023, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par M. et Mme C..., a annulé les articles 3 et 4 de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 30 juin 2022 et a renvoyé l'affaire dans cette mesure à la cour.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 19 mai 2021 et 9 juin 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de remettre à la charge de M. et Mme C... la somme déchargée en première instance au titre de l'impôt sur le revenu et des pénalités.

Il soutient que :

- la procédure d'imposition est régulière ; M. et Mme C... n'ont pas leur domicile fiscal à Saint-Martin au sens de l'article 4 B du code général des impôts ; la domiciliation fiscale à Saint-Martin relève de manœuvres destinées à égarer l'administration fiscale ;

- le montant des revenus d'origine indéterminée demeurant en litige est de 530 566 euros ; il sollicite une substitution de base légale de l'article 109-1-1° du code général des impôts à concurrence de la somme de 74 935 euros ; les revenus d'origine indéterminée ne sont contestés qu'à hauteur de la somme de 450 659 euros mais cette somme relève toujours des revenus d'origine indéterminée ;

- c'est à bon droit que les majorations de 40 % pour manquement délibéré et de 80 % pour activité occulte ont été appliquées.

Par un mémoire, enregistré le 9 mars 2022, ainsi que par un mémoire, enregistré le 10 mai 2023 à la suite de la reprise d'instance devant la cour après le renvoi du Conseil d'Etat, M. et Mme B... et A... C..., représentés par Me Bravard, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner aux dépens.

Ils soutiennent que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 28 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée 27 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Porée, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C... ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle à la suite duquel ils ont été assujettis, au titre de l'année 2014, à une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu résultant de la réintégration dans leur revenu imposable de revenus fonciers, notifiés selon la procédure de rectification contradictoire, de revenus d'origine indéterminée taxés d'office en application des articles L. 16 et L. 69 de ce livre et, enfin, du revenu d'une activité occulte d'ingénierie exercée par M. C... notifié dans la catégorie des bénéfices non commerciaux selon la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 73-2° du même livre. Le complément d'impôt sur le revenu assigné à M. et Mme C..., mis en recouvrement le 30 avril 2017, de même que les contributions sociales mises à la charge des intéressés, mises en recouvrement le 31 juillet 2017, ont été assortis des intérêts de retard, de la majoration de 80 % en cas de découverte d'une activité occulte prévue au c de l'article 1728-1 du code général des impôts s'agissant du bénéfice non commercial et de la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue à l'article 1729 a. du même code s'agissant des autres revenus. Par un jugement du 9 mars 2021, le tribunal administratif de Lyon a déchargé M. et Mme C... de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes au titre de l'année 2014. Par un arrêt n° 21LY01558 du 30 juin 2022, la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel du ministre de l'économie, des finances et de la relance, réduit de 719 euros les bases de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales assignées à M. et Mme C... au titre de l'année 2014 (article 1er), les a déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à concurrence de cette réduction des bases d'impositions ainsi que des pénalités correspondantes (article 2), a remis à la charge de M. et Mme C... les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que les pénalités correspondantes au titre de l'année 2014, sous réserve de l'application des articles 1er et 2 de l'arrêt (article 3), et a réformé l'article 1er du jugement du tribunal administratif en ce qu'il a de contraire à cet arrêt (article 4). Par une décision n° 467129 - 467132 du 14 avril 2023, le Conseil d'Etat a annulé les articles 3 et 4 de cet arrêt et a renvoyé l'affaire dans cette mesure à la cour.

Sur le motif de décharge retenu par le tribunal administratif :

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". Aux termes de l'article L. 76 du même livre : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions (...) ".

3. Il résulte des dispositions précitées que, s'il appartient en principe à l'administration fiscale de notifier la proposition de rectification à l'adresse indiquée par le contribuable, elle peut toutefois, lorsqu'elle apporte la preuve de ce que le domicile dont l'adresse lui a été indiquée présente un caractère fictif, retenir une autre adresse, sous réserve d'établir que cette adresse est celle où le contribuable réside effectivement. Il appartient au juge de rechercher si l'adresse indiquée par le contribuable était inexistante ou n'avait été communiquée à l'administration fiscale que dans le but d'égarer celle-ci dans la conduite de la procédure de contrôle et de rectification de l'impôt.

4. Il résulte de l'instruction que l'avis de vérification informant M. et Mme C... de l'engagement d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle a été remis en main propre dans les locaux de l'administration fiscale de Lyon, le 15 janvier 2016. Dès le début des opérations de contrôle, M. C... a informé l'administration que les courriers le concernant devaient être envoyés à Saint-Martin où la SCI B.B, dont M. C... était le gérant et l'associé, possédait un appartement depuis 2011. Un courrier du 22 janvier 2016 contenant une demande de renseignements patrimoniaux non contraignante et une proposition d'entretien pour le 23 février envoyé à Saint-Martin est revenu au service avec la mention " pli avisé et non réclamé ". Par un courriel du 1er février 2016, adressé sur la messagerie de la direction départementale des finances publiques de la Guadeloupe, M. C... a indiqué que l'adresse " enregistrée aux impôts n'est pas la bonne " en faisant état de " problèmes de réception " des envois de l'administration et demandé que les courriers soient envoyés à Saint-Martin à l'adresse " Résidence Mississippi - lot 86 appartement 2 - Oyster Pond, rue du Coralita - 97150 Saint-Martin ". Par un courrier du 2 mars 2016, M. C... a porté cette adresse à la connaissance de la vérificatrice en justifiant son absence à l'entretien du 23 février par des " problèmes de distance entre Lyon et Saint-Martin ". Par lettre du 8 mars 2016, la vérificatrice a envoyé un courrier à Saint-Martin, en vue de fixer un entretien pour le 4 avril 2016. Le 18 mai 2016, elle a adressé à M. et Mme C... une convocation pour un deuxième entretien par un courrier envoyé à Saint-Martin et l'autre au 8 rue d'Amboise à Lyon 2ème, adresse du bureau de M. C.... L'administration a envoyé une convocation à un troisième entretien à ces deux adresses. Le 18 juillet 2016, la vérificatrice a envoyé à l'adresse de Saint-Martin une demande de justifications n° 2172 qui a été retournée au service avec la mention " pli avisé et non réclamé ". Enfin, la vérificatrice a notifié la proposition de rectification du 10 octobre 2016 portant rehaussement du revenu imposable de l'année 2014 de M. et Mme C... à l'adresse du 573 chemin de Combe Martin à Caluire-et-Cuire (Rhône). Le pli contenant cette proposition de rectification a été retourné au service revêtu de la mention " pli avisé non réclamé ".

5. Il résulte également de l'instruction que M. C... a indiqué à la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône et à la caisse d'allocations familiales du Rhône dont il relevait ainsi qu'aux quatre établissements bancaires dans lesquels il détenait des comptes l'adresse du 573 chemin de Combe Martin à Caluire-et-Cuire et que c'est à cette adresse qu'était domiciliée en 2016 sa fille, scolarisée à l'école Edouard Herriot de Caluire-et-Cuire depuis septembre 2009.

6. Si l'adresse de Saint-Martin à laquelle M. C... a demandé, au cours du contrôle, que lui soit envoyé son courrier n'est pas inexistante dès lors qu'elle était celle de l'appartement appartenant à la SCI B. B, le ministre produit un document de suivi de La Poste dont il ressort que plusieurs courriers de M. C... adressés à l'administration fiscale au cours du contrôle, qui comportaient en-tête l'adresse à Saint-Martin, étaient postés du bureau de poste de Lyon 2ème. Le ministre relève en outre que, selon les renseignements obtenus des compagnies aériennes desservant Saint-Martin dans le cadre du droit de communication, l'intéressé n'a effectué aucun voyage vers ou en provenance de cette destination.

7. Dans ces conditions, eu égard aux éléments précis et concordants relevés ci-dessus, M. C..., en communiquant à la vérificatrice l'adresse de Saint-Martin au cours de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle dont il faisait l'objet, doit être regardé comme s'étant livré à des manœuvres destinées à égarer l'administration dans la conduite de la procédure de contrôle et de rectification de l'impôt. L'administration a donc pu régulièrement adresser la proposition de rectification du 10 octobre 2016 au 573 chemin de Combe Martin à Caluire-et-Cuire, adresse dont il est établi par les pièces versées à l'instance qu'elle était celle où M. C... résidait effectivement à la date d'envoi de cet acte. Par suite, c'est à tort que, pour décharger les impositions et pénalités auxquelles M. et Mme C... ont été assujettis au titre de l'année 2014, le tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur l'irrégularité de la notification de cette proposition de rectification.

Sur les autres moyens :

8. Il appartient toutefois à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. et Mme C... tant en première instance qu'en appel.

En ce qui concerne les droits :

9. Aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) / Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés ". Aux termes de l'article L. 69 de ce livre : " Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16. ".

10. M. et Mme C..., qui ont été taxés d'office sur le fondement de ces dispositions, faute d'avoir répondu aux demandes de justifications portant sur les crédits bancaires demeurés inexpliqués, supportent la charge de démontrer le caractère non imposable des sommes imposées en tant que revenus d'origine indéterminée en application de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales.

11. En premier lieu, M. et Mme C... soutiennent que la somme de 400 000 euros créditée le 20 novembre 2014 sur le compte bancaire détenu par la SCI ORB auprès de la société Monte Paschi Banque, provient d'un prêt consenti par un ressortissant biélorusse à la SCI B.B, dont M. C... est le seul associé, en vue de l'achat d'un bien immobilier situé à Villeurbanne, que le vendeur du bien immobilier s'étant rétracté, le prêt a été partiellement remboursé à hauteur de 309 008 euros, entre mai 2015 et janvier 2017, par les sociétés Etude Foncière Bellecour et EFB Investissement, dont M. C... est le gérant et l'associé unique. Toutefois, M. et Mme C... n'apportent aucune précision sur le motif ayant conduit ces deux sociétés à procéder au remboursement d'un prêt octroyé à la SCI B.B, dont la somme a été versée sur un compte bancaire de la SCI ORB avant d'être virée sur le compte courant dont M. C... dispose au sein de cette SCI.

12. En deuxième lieu, si les requérants soutiennent que la somme de 5 000 euros créditée le 13 janvier 2014 sur le compte bancaire détenu par M. C... auprès de la société HSBC, correspond à un prêt consenti par la sœur de ce dernier, ils ne l'établissent pas en se limitant à produire la copie du chèque, le bordereau de remise du chèque, l'acte de naissance et la carte d'identité de la sœur, en l'absence de tout document constatant l'existence d'un prêt et en tout état de cause du remboursement d'un prêt.

13. En troisième lieu, si les requérants soutiennent que la somme de 4 000 euros créditée le 15 avril 2014 sur le compte bancaire détenu par M. C... auprès de la société HSBC, correspond à la vente d'une moto, ils ne produisent aucune pièce tendant à établir que M. C... aurait été propriétaire d'une moto.

14. En quatrième lieu, si M. et Mme C... soutiennent que les sommes de 3 840 euros et 6 100 euros créditées au crédit du compte bancaire détenu par M. C... auprès de la société HSBC correspondent à des retraits des comptes courants d'associé ouverts respectivement au sein de la société Etude Foncière Bellecour et de la SCI B.B, ces sommes n'apparaissent pas au débit de ces comptes courants.

15. En cinquième lieu, si les requérants font valoir que la somme de 5 000 euros portée au crédit du compte bancaire détenu par M. C... auprès de la Monte Paschi Banque le 10 décembre 2014, correspond à la vente d'un bar des années cinquante, ils ne produisent aucun justificatif permettant d'établir que M. C... aurait été propriétaire d'un tel bar.

16. En sixième lieu, si les requérants soutiennent que la somme de 4 000 euros inscrite le 30 septembre 2014 au crédit du compte bancaire détenu par Mme C... auprès de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel, correspond à un prêt consenti par un tiers qui aurait été remboursé par l'intermédiaire du compte courant d'associé de M. C... au sein de la SCI ORB, ils ne produisent toutefois aucun contrat de prêt et il ne résulte pas du compte courant d'associé qu'un remboursement a été effectué.

17. En septième lieu, si les requérants soutiennent que la somme de 700 euros inscrite au crédit du compte bancaire détenu par le fils de M. C... auprès de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel, correspond à un chèque tiré sur le compte courant ouvert au nom de M. C... dans la SCI Corneille, ils ne l'établissent pas par la seule production de la copie d'un chèque de 700 euros émis par la SCI Corneille.

18. En huitième lieu, si les requérants soutiennent que la somme de 6 300 euros inscrite au crédit du compte bancaire détenu par le fils de M. C... auprès de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel, correspond à la vente d'un véhicule appartenant à la SCI ORB, ils ne l'établissent pas.

19. En neuvième et dernier lieu, si les requérants soutiennent que le crédit de 15 000 euros figurant au compte courant d'associé de M. C... dans la SCI Corneille, à la date du 7 mars 2014, correspond à un prêt consenti par la SA Boyauderie Panier à la SCI ORB qui aurait été apporté en compte courant à la SCI Corneille et que ce prêt aurait été remboursé par le compte courant de la SCI ORB, ils n'apportent aucun justificatif se rapportant à l'existence d'un prêt.

En ce qui concerne les pénalités :

20. En premier lieu, aux termes du 1. de l'article 1728 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : a. 10 % en l'absence de mise en demeure ou en cas de dépôt de la déclaration ou de l'acte dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ; b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ; c. 80 % en cas de découverte d'une activité occulte. ".

21. Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi de laquelle elles sont issues, que dans le cas où un contribuable n'a ni déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire, ni fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, l'administration doit être réputée apporter la preuve, qui lui incombe, de l'exercice occulte de l'activité professionnelle si le contribuable n'est pas lui-même en mesure d'établir qu'il a commis une erreur justifiant qu'il ne se soit acquitté d'aucune de ces obligations déclaratives.

22. L'administration a appliqué la majoration de 80 % prévue au c. du 1. de l'article 1728 du code général des impôts aux droits mis à la charge de M. et Mme C... au titre de l'année 2014 à raison de l'imposition, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, d'une somme de 13 000 euros tirée d'une activité de prestation d'ingénierie réalisée par M. C... que celui-ci n'avait pas fait connaître à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce et pour laquelle il n'avait souscrit aucune déclaration de résultats. Pour faire échec à la présomption d'activité occulte, M.. C... soutient avoir commis une erreur quant à la qualification catégorielle de ce revenu qu'il soutient avoir fait figurer dans la catégorie des traitements et salaires de sa déclaration de revenus. S'il est établi par la proposition de rectification du 10 octobre 2016 que M. et Mme C... ont effectivement déclaré ce revenu en tant que rémunération salariale, le ministre fait valoir, sans être contredit, que la prestation d'ingénierie fournie par M. C... a donné lieu à l'émission d'une facture mentionnant non pas l'intéressé mais la SCI Corneille comme le bénéficiaire du règlement. Dans ces conditions, M. C... ne peut qu'être regardé comme ayant cherché à dissimuler les conditions réelles de cette activité non déclarée en recourant à une telle facture et l'administration justifie le bien-fondé de la majoration de 80 % applicable en cas de découverte d'une activité occulte imposable aux droits résultant de l'imposition de ce revenu non commercial.

23. En second lieu, aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

24. En relevant que M. et Mme C... se sont délibérément domiciliés à Saint-Martin afin de bénéficier d'un abattement de 30 % sur leurs revenus imposables, que l'intéressé a sciemment minoré ses revenus fonciers de manière importante, alors que ceux-ci proviennent de sociétés dont il est l'associé ou le dirigeant et, s'agissant des revenus d'origine indéterminée taxés d'office, que M. et Mme C... ont cherché à dissimuler l'origine des sommes inscrites au crédit de ses comptes bancaires ou de ses comptes courants d'associé par le biais de sociétés qu'il dirigeait, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe de l'intention délibérée de M. et Mme C... d'éluder l'impôt justifiant l'application de la majoration de 40 % pour manquement délibéré aux droits procédant des autres chefs de rectifications.

25. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle M. et Mme C... ont été assujettis au titre de l'année 2014 et des pénalités correspondantes à l'exception des droits et pénalités mentionnés aux articles 1er et 2 de l'arrêt 21LY01558 du 30 juin 2022.

Sur les frais liés au litige :

26. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. et Mme C... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il en va de même, en tout état de cause, pour les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme C... ont été assujettis au titre de l'année 2014 ainsi que les pénalités correspondantes, dont le tribunal administratif de Lyon a prononcé la décharge par son jugement n° 1904353 du 9 mars 2021, sont, sous réserve de l'application des articles 1er et 2 de l'arrêt°21LY01558 du 30 juin 2022, remises à la charge de M. et Mme C....

Article 2 : Les conclusions de M. et Mme C... relatives à l'article L. 761-1 du code de justice administrative et aux dépens sont rejetés.

Article 3 : Le jugement n° 1904353 du tribunal administratif de Lyon du 9 mars 2021 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à M. et Mme B... et A... C....

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Courbon, présidente-assesseure,

M. Porée, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 février 2024.

Le rapporteur,

A. Porée

Le président,

D. Pruvost

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY01310


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY01310
Date de la décision : 15/02/2024
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-01-03-02-02 Contributions et taxes. - Généralités. - Règles générales d'établissement de l'impôt. - Rectification (ou redressement). - Proposition de rectification (ou notification de redressement).


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Arnaud POREE
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : KPMG

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-15;23ly01310 ?
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