La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/02/2024 | FRANCE | N°22LY01072

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 15 février 2024, 22LY01072


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge de son obligation solidaire au paiement de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et aux pénalités mises à la charge du foyer fiscal qu'elle formait avec M. D... B... au titre de l'année 2015.

Par un jugement n° 1906606 du 10 février 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.





Procédure devant la cour



Par u

ne requête et des mémoires, enregistrés le 8 avril 2022, le 8 septembre 2023, et le 19 décembre 2023, ce dernier non commu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge de son obligation solidaire au paiement de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et aux pénalités mises à la charge du foyer fiscal qu'elle formait avec M. D... B... au titre de l'année 2015.

Par un jugement n° 1906606 du 10 février 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 8 avril 2022, le 8 septembre 2023, et le 19 décembre 2023, ce dernier non communiqué, Mme A..., représentée par Me Colin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de son obligation solidaire au paiement ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme A... soutient que :

- le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen tiré de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales et méconnu ces dispositions ainsi que l'article L. 9 du code de justice administrative ;

- l'administration a pris une position formelle sur sa situation, qui lui est opposable sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, en faisant droit à sa demande de décharge de son obligation solidaire de paiement des impositions établies au nom du foyer fiscal au titre des années 2008 à 2013 ;

- la décision de refus de décharge de son obligation solidaire est insuffisamment motivée ;

- elle remplit les conditions prévues au 2° du II de l'article 1691 bis du code général des impôts pour pouvoir être déchargée de son obligation solidaire de paiement.

Par des mémoires, enregistrés le 13 avril 2023 et le 27 septembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 11 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 11 octobre 2023.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laval, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique,

- et les observations de Me Colin, représentant Mme A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Le 28 janvier 2019, Mme A..., a sollicité, sur le fondement de l'article 1691 bis du code général des impôts, la décharge de son obligation solidaire de paiement de la cotisation d'impôt sur le revenu, d'un montant de 58 040 euros en droits, mise en recouvrement le 30 avril 2018, à laquelle le foyer fiscal qu'elle formait avec M. B..., son ancien époux, dont elle a divorcé par un jugement du 6 décembre 2016, avec effet au 1er janvier 2016, a été assujetti, au titre de l'année 2015. Par une décision du 29 juillet 2019, le directeur départemental des finances publiques de la Haute-Savoie a refusé de faire droit à sa demande au motif qu'il n'existait pas de disproportion marquée entre le montant de sa dette fiscale et sa situation financière et patrimoniale nette de charges, à la date de cette demande. Mme A... relève appel du jugement du 10 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande de décharge de son obligation solidaire de paiement de cette somme.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".

3. Si Mme A... entend soutenir que le jugement contesté est irrégulier, faute pour le tribunal d'avoir répondu au moyen tiré de l'invocation d'une prise de position formelle de l'administration sur la décharge de responsabilité solidaire, en vertu de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, elle n'a pas invoqué ce moyen dans ses écritures de première instance.

4. Le jugement du tribunal administratif de Grenoble, qui n'était pas tenu de se prononcer sur l'ensemble des arguments de la demande, se prononce sur l'ensemble des moyens invoqués en première instance par Mme A....

5. S'il est soutenu que les premiers juges ont commis des erreurs de droit et de fait, de tels moyens ne relèvent pas de la régularité du jugement mais de son bien-fondé.

6. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué doit être écarté.

Sur l'obligation solidaire de paiement de l'imposition :

7. Aux termes de l'article 1691 bis du code général des impôts : " I. - Les époux et les partenaires liés par un pacte civil de solidarité sont tenus solidairement au paiement : / 1° De l'impôt sur le revenu lorsqu'ils font l'objet d'une imposition commune (...) II. - 1° Les personnes divorcées ou séparées peuvent demander à être déchargées des obligations de paiement prévues au I ainsi qu'à l'article 1723 ter-00 B lorsque, à la date de la demande : / a) Le jugement de divorce ou de séparation de corps a été prononcé (...) 2° La décharge de l'obligation de paiement est accordée en cas de disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et, à la date de la demande, la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur (...) ".

8. L'article 1691 bis du code général des impôts instituant un droit à décharge de la solidarité au bénéfice des contribuables qui remplissent les conditions qu'il énonce, la demande d'annulation de la décision par laquelle l'administration fiscale rejette la demande de décharge présentée sur le fondement de ces dispositions ne tend pas à la contestation d'une décision prise en matière fiscale sur une demande de remise gracieuse au sens du 8° de l'article R. 222-13 du code de justice administrative. La décision est prise après une appréciation de la situation financière et patrimoniale, nette de charge, du demandeur, rapportée à sa dette fiscale, quelles que soient les impositions qui la composent et le recours formé contre cette décision ne porte ni sur l'assiette ni sur le recouvrement de l'impôt.

9. Pour rejeter la demande de décharge de responsabilité solidaire formée par Mme A... pour le paiement des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles M. B... et elle ont été assujettis au titre de l'année 2015, le directeur régional des finances publique a rappelé, dans sa décision, les dispositions du II de l'article 1691 bis du code général des impôts, donné le montant des impositions concernées et indiqué qu'il n'y avait pas de disproportion marquée entre le montant de cette dette et la situation financière et patrimoniale, nette de charges, de la requérante, à la date de la demande. Ainsi le directeur régional a suffisamment motivé son refus d'accorder la décharge sollicitée. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision au regard des exigences posées par l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration selon lequel " doivent être motivées les décisions qui refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir " ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.

10. Il résulte de l'instruction que, pour rejeter la demande présentée par Mme A..., l'administration a pris en compte, d'une part, la valeur de son patrimoine, constitué, notamment par l'usufruit des parts de la SCI La Chiesaz d'une valeur de 289 950 euros, d'un contrat d'assurance-vie d'un montant de 76 074 euros et de son véhicule d'une valeur de 7 442 euros, et d'autre part, ses ressources, d'un montant de 2 352 euros mensuels, constituées de son salaire et de la prestation compensatoire versée par son ancien conjoint, rapportées aux charges de l'intéressée, évaluées à 1 245 euros par mois à partir des éléments qu'elle a communiqués, complétés des charges de la vie courante évaluées par le service selon le barème de la Banque de France, soit une situation nette mensuelle de 1 287 euros. Dans ces conditions, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que l'administration a estimé que la dette de Mme A..., d'un montant de 62 804,44 euros, n'était pas manifestement disproportionnée par rapport à sa situation financière et patrimoniale, nette de charges.

11. Si Mme A... fait valoir qu'elle a obtenu la décharge de son obligation solidaire de paiement pour les impositions d'un montant total de 414 483 euros mises à la charge du foyer fiscal au titre des années 2008 à 2013 par une décision du 21 octobre 2016, cette décision ne crée aucun droit à la décharge de son obligation solidaire au titre de la dette de l'année en litige. Si elle entend invoquer la méconnaissance du principe d'annualité de l'impôt sur le revenu et soutenir que cette précédente décision de décharge vaut prise de position formelle de l'administration sur une situation de fait au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, de tels moyens, qui ont trait à l'assiette de l'imposition, sont inopérants pour fonder la décharge de l'obligation solidaire de paiement prévue à l'article 1691 bis du code général des impôts. Il en va de même du moyen fondé sur l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'application de la documentation administrative référencée BOI-CTX-DRS-10.

12. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A..., et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Courbon, présidente-assesseure,

M. Laval, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 février 2024.

Le rapporteur,

J.-S. Laval

Le président,

D. Pruvost

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N°22LY01072


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY01072
Date de la décision : 15/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

19-01-05-02-01 Contributions et taxes. - Généralités. - Recouvrement. - Paiement de l'impôt. - Solidarité entre époux.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Jean-Simon LAVAL
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : CABINET GL CONSEILS & ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-15;22ly01072 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award