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01/02/2024 | FRANCE | N°23LY00341

France | France, Cour administrative d'appel, 5ème chambre, 01 février 2024, 23LY00341


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



Par un jugement n°1901658 - 2004674 du 28 janvier 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande présentée par M. et Mme A... tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014 et 2015 ainsi que les majorations correspondantes.



Par une ordonnance n° 22LY00736 du 12 janvier 2023, le président de la 2ème chambre de la cour administrative d'appel de Lyon a, dans

un article 1er, constaté qu'il n'avait plus lieu de statuer sur la requête présentée par M. et Mme A...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par un jugement n°1901658 - 2004674 du 28 janvier 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande présentée par M. et Mme A... tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014 et 2015 ainsi que les majorations correspondantes.

Par une ordonnance n° 22LY00736 du 12 janvier 2023, le président de la 2ème chambre de la cour administrative d'appel de Lyon a, dans un article 1er, constaté qu'il n'avait plus lieu de statuer sur la requête présentée par M. et Mme A... et, dans un article 2, mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à M. et Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 30 janvier 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande à la cour de rectifier une erreur matérielle entachant l'ordonnance du 12 janvier 2023 en tant qu'elle a prononcé un non-lieu à statuer pour les années 2014 et 2015 au lieu de prononcer un non-lieu à statuer uniquement au titre de l'année 2014.

Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique soutient que la décision de dégrèvement du 8 novembre 2022 n'a porté que sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mis à la charge de M. et Mme A... pour l'année 2014 et qu'il avait présenté des observations en défense dans son mémoire enregistré le 4 novembre 2022 devant la cour s'agissant du bien-fondé des rectifications opérées par le service sur l'année 2015.

Une ordonnance du 18 octobre 2023 a fixé la clôture de l'instruction au 17 novembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère ;

- et les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. L'article R. 833-1 du code de justice administrative dispose que : " Lorsqu'une décision d'une cour administrative d'appel ou du Conseil d'Etat est entachée d'une erreur matérielle susceptible d'avoir exercé une influence sur le jugement de l'affaire, la partie intéressée peut introduire devant la juridiction qui a rendu la décision un recours en rectification. / Ce recours doit être présenté dans les mêmes formes que celles dans lesquelles devait être introduite la requête initiale. Il doit être introduit dans un délai de deux mois qui court du jour de la notification ou de la signification de la décision dont la rectification est demandée. / Les dispositions des livres VI et VII sont applicables. " Il résulte de ces dispositions que le recours en rectification d'erreur matérielle n'est ouvert qu'en vue de corriger des erreurs de caractère matériel de la juridiction qui ne sont pas imputables aux parties et qui ont pu avoir une influence sur le sens de la décision. L'objet de ce recours à l'encontre d'un arrêt d'une cour administrative d'appel n'est pas de remettre en question des appréciations d'ordre juridique portées par cette dernière sur l'affaire qui lui était soumise.

2. Il ressort des pièces du dossier que, dans son mémoire en défense présenté le 4 novembre 2022 dans le cadre de la requête susmentionnée, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a accordé à M. et Mme A... le dégrèvement des rappels des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mis à leur charge pour l'année 2014 ainsi que des majorations correspondantes, et demandé à la cour de prononcer un non-lieu à statuer à hauteur de ce dégrèvement pour un montant total de 10 574 euros ainsi que de rejeter le surplus de la requête. Le dégrèvement prononcé ne concernant que les suppléments d'impôt sur le revenu mis à la charge de M. et Mme A... pour l'année 2014 ainsi que les majorations correspondantes, les conclusions relatives aux suppléments d'impôt sur le revenu mis à leur charge pour l'année 2015 demeuraient en litige. Par suite, en prononçant un non-lieu à statuer sur l'ensemble des conclusions de la requête qui lui était présentée, le président de la 2ème chambre de la cour a entaché son ordonnance d'une erreur matérielle. Cette erreur matérielle a eu une influence sur la solution du litige au sens des dispositions précitées de l'article R. 833-1 du code de justice administrative. Il appartient, dès lors, à la cour de rectifier ladite erreur.

3. Il y a lieu de déclarer l'ordonnance n° 22LY00736 du 12 janvier 2023 nulle et non avenue en tant qu'elle constate un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et majorations auxquelles M. et Mme A... ont été assujettis au titre de l'année 2015, d'ordonner la réouverture de l'instruction de l'instance n°22LY00736 et de rejuger l'affaire dans cette mesure.

4. Devant la cour, M. et Mme A... soutiennent que l'administration a méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, qu'aucune demande de renseignements ou proposition de rectification n'avait directement été adressée aux SNC, que l'attestation écrite d'engagement d'exploitation a bien été prise par l'exploitant dès l'origine du schéma de défiscalisation, que les textes ne prévoient pas les modalités formelles que doit revêtir l'attestation d'engagement d'exploitation, ni le délai dans lequel cette attestation doit être prise, et, à titre subsidiaire, si l'absence d'attestation à l'origine du schéma était avérée, conformément à la jurisprudence du Conseil d'Etat, une simple défaillance déclarative de la part du contribuable ne peut pas le priver pour autant de son droit de bénéficier d'un avantage fiscal.

5. En premier lieu, les impositions contestées ne résultent pas de l'imposition entre les mains de M. et Mme A... des résultats de la SNC Morelle mais de la remise en cause de la réduction d'impôt, prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts, à raison d'investissements outre-mer déclarés au titre de l'année 2015. Il résulte de l'instruction que l'administration s'est bornée à procéder à un contrôle sur pièces du dossier fiscal des requérants, associés, en utilisant des informations recueillies lors de la vérification de comptabilité de la société exploitante, la SARL Eco Soley Développement, dont les conséquences n'impliquaient aucune rectification des résultats de la SNC Morelle. Par suite, en raison de l'indépendance des procédures d'imposition, les requérants ne sauraient utilement invoquer le fait qu'aucune demande de renseignements ou proposition de rectification n'avait directement été adressée à la SNC Morelle.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". Il résulte de ces dispositions qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Toutefois, cette obligation ne peut porter que sur les documents effectivement détenus par les services fiscaux et ne s'impose à l'administration que pour les renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications.

7. Si les requérants font valoir qu'ils ont explicitement demandé, dans leurs observations du 17 janvier 2018, la communication de l'intégralité des documents, ainsi que la teneur et l'origine des renseignements obtenus par le service et sur lesquels il s'est fondé pour établir les impositions litigieuses, il résulte de l'instruction et notamment de la réponse apportée par l'administration le 26 mars 2018 que les documents concernés n'étaient pas détenus par l'administration, mais par la société Eco Soley Développement qui avait fait l'objet d'une vérification de comptabilité. Ainsi, M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que l'administration n'a pas respecté l'obligation résultant des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales de leur communiquer, avant mise en recouvrement, la copie des documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir les impositions litigieuses.

8. Les autres moyens susvisés ont été écartés à bon droit par le jugement attaqué, dont il y a lieu pour la cour d'adopter les motifs.

9. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2015 ainsi que des majorations correspondantes. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le recours en rectification d'erreur matérielle présenté par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est admis.

Article 2 : L'ordonnance n° 22LY00736 du 12 janvier 2023 du président de la 2ème chambre de la cour administrative d'appel de Lyon est déclarée nulle et non avenue en tant qu'elle constate un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme A... ont été assujettis au titre de l'année 2015 ainsi que des majorations correspondantes.

Article 3 : L'instance n° 22LY00736 est rouverte.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête n° 22LY00736 est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à M. et Mme A....

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2024 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre ;

Mme Dèche, présidente assesseure ;

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er février 2024.

La rapporteure,

V. Rémy-Néris

Le président,

F. Bourrachot

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY00341

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00341
Date de la décision : 01/02/2024
Type de recours : Rectif. erreur matérielle

Analyses

54-08-05 Procédure. - Voies de recours. - Recours en rectification d'erreur matérielle.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : BANCEL ZEEN LAW

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-01;23ly00341 ?
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