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19/01/2024 | FRANCE | N°23LY01274

France | France, Cour administrative d'appel, 6ème chambre, 19 janvier 2024, 23LY01274


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 4 octobre 2022 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an et d'enjoindre au pr

fet de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et de l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 4 octobre 2022 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une attestation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 2207513 du 8 février 2023, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 avril 2023, M. A... B..., représenté par Me Huard, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2207513 du 8 février 2023 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler les décisions du 4 octobre 2022 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une attestation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

Sur le refus de titre de séjour :

- cette décision méconnait les stipulations du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et est entachée d'une erreur d'appréciation ;

- elle méconnait les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur l'obligation de quitter le territoire :

- cette décision est dépourvue de base légale à raison de l'illégalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour ;

- elle est entachée d'une erreur de droit ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Le préfet de l'Isère, régulièrement mis en cause, n'a pas produit.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 mars 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Vergnaud, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien né 10 avril 1948, est entré en France le 1er décembre 2011 sous couvert d'un visa. Il a fait l'objet le 14 août 2014 d'un arrêté portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français dont la légalité a été confirmée par le tribunal administratif de Grenoble et la cour administrative d'appel de Lyon, puis le 9 juin 2020 d'un second arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français dont la légalité a été confirmée par le tribunal administratif de Grenoble le 15 septembre 2020. Le 14 décembre 2021, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des 1° et 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Par arrêté du 4 octobre 2022, le préfet de la l'Isère lui a refusé le titre de séjour sollicité, lui à fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Par un jugement 8 février 2023, dont M. B... interjette appel, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur le moyen relatif à l'ensemble des décisions contestées :

2. En premier lieu, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté, que le requérant reprend en appel sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau, peut être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, aux termes du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / 1° au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) ".

4. Si M. B... soutient résider en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué, les pièces produites à l'appui de sa requête n'établissent pas sa présence en France avant le mois de juillet 2012 et sont insuffisamment nombreuses et probantes pour justifier de la réalité de sa présence continue en France, particulièrement au titre des années 2021 et 2022, pour lesquelles ne sont produites que des attestations de vaccination contre la Covid 19, un avis d'impôt sur les revenus de 2019 et une déclaration automatique des revenus de l'année 2020. Dans ces conditions, M. B... ne peut être regardé comme apportant la preuve qui lui incombe de sa résidence habituelle en France depuis au moins dix ans à la date de la décision attaquée. Par suite les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions précitées de l'accord franco-algérien et de l'erreur d'appréciation doivent être écartés.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 5° de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; " et aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. M. B... soutient qu'il a résidé en France plusieurs années de la fin des années 1970 au milieu des années 1980, qu'il réside de façon continue sur le territoire depuis plus de dix ans, que quatre de ses enfants résident régulièrement sur le territoire français et qu'il est hébergé par l'un de ses fils. Toutefois, il est constant que M. B... a fait l'objet d'une première obligation de quitter le territoire français le 14 août 2014 et d'une seconde le 9 juin 2020, décisions qu'il n'établit pas avoir exécutées. Il n'est par ailleurs pas contesté que son épouse et quatre de ses enfants résident en Algérie, où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de 63 ans. En outre, les pièces du dossier ne sont pas de nature à établir la stabilité et l'intensité de ses liens personnels et familiaux en France. Dans ces conditions, la décision contestée ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit donc être écarté.

7. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur la situation personnelle de l'intéressé doit également être écarté.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :

8. En premier lieu, compte-tenu de ce qui a été précédemment exposé, le requérant n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour au soutien de ses conclusions à fin d'annulation dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français.

9. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été exposé au point 4 du présent arrêt que M. B... ne remplit pas les conditions justifiant la délivrance d'un titre de séjour de plein droit à raison de la durée continue de son séjour en France, par suite le moyen tiré de l'erreur de droit doit être rejeté.

10. Enfin, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6.

11. Il résulte de ce qui précède, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 18 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Stillmunkes, président assesseur,

Mme Vergnaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 janvier 2024.

La rapporteure,

E. Vergnaud

Le président,

F. Pourny

La greffière,

F. Abdillah

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY01274


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY01274
Date de la décision : 19/01/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: Mme Edwige VERGNAUD
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : HUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 28/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-19;23ly01274 ?
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