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18/01/2024 | FRANCE | N°22LY00593

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 18 janvier 2024, 22LY00593


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



La SARL Timbelle a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de l'exercice clos en 2014, des intérêts de retard et des pénalités correspondantes et de l'amende qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts au titre du même exercice.



Par un jugement n° 1900604 du 10 janvier 2022, le tribunal administratif

de Grenoble a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour



Par une requête et un mémoire, enr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL Timbelle a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de l'exercice clos en 2014, des intérêts de retard et des pénalités correspondantes et de l'amende qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts au titre du même exercice.

Par un jugement n° 1900604 du 10 janvier 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 février 2022 et le 15 février 2023, la SARL Timbelle, représentée par Me Albert, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de cette imposition et des pénalités correspondantes ainsi que de l'amende ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SARL Timbelle soutient que :

- le jugement est irrégulier, faute d'avoir fait droit à une demande de réouverture de l'instruction du 9 mai 2021 ;

- la procédure est irrégulière en raison du refus d'un recours hiérarchique du 13 juillet 2016 sur le fondement du I de la charte du contribuable vérifié en cas de difficultés lors du contrôle ;

- elle est également déloyale car l'administration a précipité la mise en recouvrement, privant la société d'un second recours hiérarchique sur le fondement du III de la charte du contribuable vérifié en cas de désaccord avec les rectifications proposées ;

- les impositions sont infondées car la réintégration au résultat imposable de l'exercice 2014 de la provision pour litige repose sur l'identification d'un acte anormal de gestion fondé sur une immixtion dans la gestion de l'entreprise ;

- l'identification du bénéficiaire des revenus distribués fait obstacle à ce que l'amende fiscale soit infligée à la société.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 9 octobre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 31 octobre 2023.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laval, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Timbelle, qui avait pour activité la gestion de biens immobiliers à usage d'habitation et détenait un chalet à Saint-Gervais-les-Bains (Haute-Savoie) ainsi qu'une maison à Saintenay (Côte-d'Or), dont M. B... E... et Mme C... A..., parents du gérant, M. D... E..., détenaient ensemble la quasi-totalité des parts, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, portant sur la période du 1er janvier au 31 décembre 2014. A l'issue de ce contrôle, elle a été assujettie, au titre de l'exercice clos en 2014, à un complément d'impôt sur les sociétés résultant, d'une part, de la réintégration dans son résultat de produits d'exploitation d'un montant de 9 000 euros correspondant à l'utilisation à des fins privées des biens de la société et, d'autre part, de la remise en cause d'une provision pour litige de 2 800 000 euros comptabilisée, au titre du même exercice. Elle s'est vue également infliger l'amende fiscale pour distributions occultes prévue à l'article 1759 du code général des impôts, au titre des distributions de 9 000 euros. La SARL Timbelle relève appel du jugement du 10 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande de décharge de l'imposition, en tant qu'elle résulte de la réintégration de la provision et de l'amende.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Dans l'intérêt d'une bonne justice, le juge a toujours la faculté de rouvrir l'instruction, qu'il dirige, lorsqu'il est saisi d'une production postérieure à la clôture de celle-ci. Il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de cette production avant de rendre sa décision et de la viser. S'il décide d'en tenir compte, il rouvre l'instruction et soumet au débat contradictoire les éléments contenus dans cette production qu'il doit, en outre, analyser. Dans le cas particulier où cette production contient l'exposé d'une circonstance de fait ou d'un élément de droit dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et qui est susceptible d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire, le juge doit alors en tenir compte, à peine d'irrégularité de sa décision.

3. Il ressort du dossier de première instance que l'instruction devant le tribunal administratif de Grenoble a été clôturée, à compter du 18 décembre 2020, par une ordonnance du 3 décembre 2020. La SARL Timbelle a produit un mémoire, enregistré le 9 mai 2021, en se référant à la décision du Conseil d'Etat n° 430593 du 25 mars 2021 relative l'application du paragraphe 6 du chapitre I de la charte du contribuable vérifié et a demandé la réouverture de l'instruction. La décision susmentionnée, qui rappelle que la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, opposable à l'administration en vertu de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, prévoit la possibilité pour un contribuable de s'adresser au supérieur hiérarchique du vérificateur puis à l'interlocuteur départemental ou régional à deux moments distincts de la procédure d'imposition, soit, au cours de la vérification pour ce qui a trait au déroulement des opérations de contrôle et après la réponse faite par l'administration aux observations du contribuable sur la proposition de rectification qui lui a été adressée, pour ce qui a trait au bien-fondé des rectifications envisagées, ne modifie pas substantiellement les règles applicables pour la solution du litige et ne constitue pas une circonstance de droit nouvelle, de sorte que le tribunal administratif de Grenoble n'a pas entaché son jugement d'irrégularité en ne rouvrant pas l'instruction.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. Aux termes de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " (...) Les dispositions contenues dans la charte des droits et obligations du contribuable vérifié mentionnée au troisième alinéa de l'article L. 47 sont opposables à l'administration. ". La charte remise au contribuable, dans sa version remise à la société, prévoit, dans sa partie relative à l'avis de vérification, que : " En cas de difficultés, vous pouvez vous adresser à l'inspecteur divisionnaire ou principal et ensuite à l'interlocuteur désigné par le directeur. Leur rôle vous est précisé plus loin (voir p. 20). Vous pouvez les contacter pendant le contrôle ". Par ailleurs, la même charte prévoit, dans sa partie consacrée aux conclusions du contrôle, que : " Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les rectifications envisagées, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur divisionnaire ou principal (...) Si, après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur (voir p. 4) ".

5. La possibilité pour un contribuable de s'adresser, dans les conditions édictées par le paragraphe 6 du chapitre Ier et par le paragraphe 4 du chapitre III de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, au supérieur hiérarchique du vérificateur puis à l'interlocuteur départemental ou régional constitue une garantie substantielle ouverte à l'intéressé à deux moments distincts de la procédure contradictoire, en premier lieu, au cours de la vérification et avant l'envoi de la proposition de rectification, pour ce qui a trait aux difficultés affectant le déroulement des opérations de contrôle, et, en second lieu, après la réponse faite par l'administration fiscale aux observations du contribuable sur cette proposition, pour ce qui a trait au bien-fondé des rectifications envisagées. L'administration n'est pas tenue de donner suite à la demande d'entretien avec le supérieur hiérarchique du vérificateur, présentée au cours d'une vérification de comptabilité, qui ne fait état d'aucune difficulté affectant le déroulement des opérations de contrôle, susceptible de la rattacher à l'exercice de la garantie prévue au chapitre Ier de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié.

6. En premier lieu, il résulte de l'instruction que, par courrier du 13 juillet 2016 adressé au supérieur hiérarchique, le gérant de la société lui a demandé un entretien " compte tenu des difficultés rencontrées lors du contrôle dont nous comprenons qu'elles pourraient conduire à des redressements importants ". Par lettre du 25 juillet 2016, l'administration a refusé d'y faire droit au motif qu'elle présentait un caractère prématuré " à ce stade de la procédure " et a invité l'intéressé à réitérer sa demande d'entretien après réception de la réponse à ses éventuelles observations en réponse à la proposition de rectification. Cette demande d'entretien, envoyée au supérieur hiérarchique du vérificateur, le lendemain de la réunion de synthèse du 12 juillet 2016, qui évoquait le montant des redressements à venir et ne donnait aucune indication, même succincte, sur la nature des difficultés alléguées quant au déroulement des opérations de contrôle, présentait un caractère ambigu quant à son objet. Par suite, l'administration fiscale n'a pas commis d'irrégularité en refusant d'y donner suite. Le moyen tiré de ce que la société a été privée de la possibilité de s'adresser au supérieur hiérarchique du vérificateur avant l'envoi de la proposition de rectification doit, donc, être écarté.

7. En second lieu, il résulte de l'instruction que l'administration a adressé à la SARL Timbelle une réponse aux observations du contribuable, datée du 7 octobre 2016. Il est constant que la société n'a présenté aucune demande d'entretien au supérieur hiérarchique du vérificateur ou à l'interlocuteur départemental ou régional quant au bien-fondé des rectifications envisagées entre la date à laquelle elle a reçu la réponse aux observations du contribuable et celle de la mise en recouvrement de l'imposition, le 31 mai 2017. La saisine du supérieur hiérarchique du vérificateur et de l'interlocuteur départemental ou régional pouvant intervenir aussi bien avant la saisine de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires qu'après que cette dernière a rendu son avis, la SARL Timbelle, qui n'a fait aucune diligence, ne peut utilement soutenir avoir été privée de la garantie attachée à la possibilité de solliciter ces agents au seul motif que la commission ne s'est réunie que le 7 avril 2017. Le moyen doit, dès lors, également être écarté.

8. Il en résulte, alors, au demeurant, que l'administration a rappelé à la société dans la lettre du 13 juillet 2016 qu'elle pouvait saisir le supérieur hiérarchique après la réponse aux observations du contribuable, que le principe de loyauté n'a, en tout état de cause, pas été méconnu.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

9. Il résulte des articles 38 et 39 du code général des impôts, dont les dispositions sont applicables à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code, que le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale. Constitue un acte anormal de gestion l'acte par lequel une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt. Il appartient, en règle générale, à l'administration, qui n'a pas à se prononcer sur l'opportunité des choix de gestion opérés par une entreprise, d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour invoquer ce caractère anormal.

10. Le vérificateur a réintégré dans le résultat de l'exercice clos en 2014 la provision " pour litige " d'un montant de 2 800 000 euros comptabilisée par la SARL Timbelle au motif que le versement d'une indemnité à la société Europort Consulting était sans cause. Dans la réponse aux observations du contribuable, le rappel a été maintenu sur le terrain de l'impossibilité de déduire, à ce titre, une charge exceptionnelle.

11. La SARL Timbelle explique avoir conclu, le 3 avril 2013, avec la société Europort Consulting AG, société de droit suisse, un contrat de courtage par lequel celle-ci s'est engagée à lui proposer des biens pour la réalisation d'investissements immobiliers principalement destinés à l'habitation, en Suisse et en Allemagne, stipulant une clause de confidentialité selon laquelle " le client a l'obligation de traiter toutes les informations sur les projets dont il n'avait pas connaissance de manière confidentielle et en aucun cas de les transmettre à des tiers. Si des informations sont transmises et que cela aboutit à la conclusion d'un contrat d'achat par un tiers, cela rendra la commission exigible comme si le client avait acheté lui-même le projet ". Elle soutient que le courtier suisse lui avait proposé plusieurs projets de construction d'immeubles dont, en juillet 2013, un projet d'investissement dans la tour Main Tor Porta à Francfort en Allemagne porté par un important promoteur allemand, qu'elle a refusé ce projet, le 21 août 2013, au motif qu'il ne correspondait pas à ses critères mais que le courtier suisse a été informé par le promoteur allemand, après la vente de l'immeuble au fonds immobilier allemand Union Investment Real Estate, en décembre 2013, que la vente s'était conclue sur la base d'informations divulguées à l'acheteur final par M. B... E..., en méconnaissance de l'obligation de confidentialité. Ayant considéré qu'elle avait perdu le bénéfice d'une commission de vente, la société Europort Consulting AG lui a réclamé le versement d'une indemnité de 3 348 000 euros, outre intérêts, correspondant à la commission de 2 % sur le montant du projet Main Tor Porta d'une valeur de 155 millions, laquelle a été finalement ramenée à 2 800 000 euros après la signature d'un protocole transactionnel avec la société Europort Consulting AG, constaté, le 16 décembre 2014, la chambre patrimoniale cantonale du canton de Vaux.

12. Pour remettre en cause la déduction de la provision de 2 800 000 euros, l'administration soutient, à titre principal, que l'indemnité due au courtier suisse est sans cause faute de violation de la clause contractuelle de confidentialité. Elle fait valoir que l'opération proposée à la SARL Timbelle, consistant en la construction d'un immeuble à usage de bureaux, d'une hauteur de 70 m et d'une superficie de 22 600 m² dans le quartier d'affaires de Francfort, était nécessairement connue des milieux spécialisés compte tenu de son envergure, qu'à la date à laquelle l'investissement lui a été proposé par le courtier suisse, en août 2013, le projet était déjà presque abouti dans ses composantes architecturales et économiques, la construction ayant débuté en 2013 pour s'achever en 2015-2016 et, enfin, que, selon un article de presse de janvier 2012, le promoteur allemand avait déjà conclu un bail portant sur 70 % des locaux avec une entreprise allemande, faisant partie du même groupe que l'acquéreur, pour y implanter le siège du fonds d'investissement allemand, acquéreur final. A titre subsidiaire, l'administration relève qu'une opération immobilière d'un montant de 155 millions d'euros, effectuée en dehors du domaine habituel d'intervention de la SARL Timbelle, limité à l'investissement dans des locaux d'habitation, était hors de sa portée économiquement et que la commission, calculée sur la base du prix de vente de l'immeuble, excédait très largement le seuil d'investissement de 2 millions d'euros, stipulé au contrat de courtage, de sorte que l'indemnité à laquelle la SARL Timbelle pouvait s'exposer en vertu du contrat, au titre la méconnaissance de l'obligation de confidentialité, ne pouvait, en tout état de cause, excéder 104 000 euros. L'administration estime enfin que la transaction était peu opportune compte tenu de la faiblesse et du caractère peu convaincant des faits reprochés par le cocontractant, le courrier du promoteur, qui évoque en termes évasifs les informations qu'aurait fournies le père de son gérant, étant dépourvu de valeur probante.

13. Si, par ses considérations sur le risque excessif pris par la SARL Timbelle et sur les choix de la société d'investir dans l'immobilier à usage de bureau plutôt que dans les locaux à usage d'habitation et d'accepter une transaction peu favorable plutôt que la voie judiciaire, le vérificateur s'est prononcé sur l'opportunité de décisions de gestion de l'entreprise alors qu'il lui appartenait seulement d'apprécier si le versement de l'indemnité en cause relevait d'une gestion commerciale normale au regard de son seul intérêt propre, les autres éléments relevés, dont la matérialité n'est pas contestée, établissent que la société requérante n'a pu méconnaître la clause de confidentialité stipulée au contrat et, partant, qu'en s'estimant tenue au paiement de l'indemnité en cause, elle a accordé à la société Europort Consulting AG un avantage sans contrepartie.

14. Enfin, il résulte de l'instruction que M. B... E..., associé et père du gérant de la SARL Timbelle, est devenu administrateur unique de trois sociétés suisses en remplacement du gérant de la société Europort Consulting AG. Dans ces conditions, compte tenu des relations d'intérêt entre les parties au contrat, le caractère intentionnel de l'opération est présumé et l'appauvrissement doit être regardé comme délibéré sans que la SARL Timbelle puisse utilement faire valoir, pour faire échec à la rectification que l'imposition correspondante n'a pas été assortie de la majoration pour manquement délibéré, l'application de pénalités étant, en soi, sans incidence sur la qualification d'acte anormal de gestion.

15. Dans ces conditions, l'administration était fondée à remettre en cause la provision comptabilisée.

Sur l'amende prévue par l'article 1759 du code général des impôts :

16. Aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. / En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759 ". Aux termes de l'article 1759 de ce code : " Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à 100 % des sommes versées ou distribuées (...) ".

17. L'administration a demandé, à la SARL Timbelle, dans la proposition de rectification de désigner le bénéficiaire des distributions d'un montant de 9 000 euros correspondant à l'utilisation à des fins privées des biens de la société. En l'absence de réponse de la société, elle lui a infligé l'amende fiscale pour distributions occultes, prévue à l'article 1759 du code général des impôts.

18. La société soutient que, dès lors que les dispositions du 2° de l'article 109-1 du code général des impôts désignent elles-mêmes les bénéficiaires des revenus distribués, à savoir les actionnaires, associés ou porteurs de parts, il ne peut lui être reproché de ne pas avoir répondu à une demande de désignation en application de l'article 117 du code général des impôts, laquelle n'est pas justifiée.

19. Toutefois, l'article 117 du code général des impôts qui vise la masse des revenus distribués excédant le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale n'exclut pas du champ de ces dispositions les revenus distribués imposées entre les mains de leurs bénéficiaires sur le fondement du 2° de l'article 109-1 du code général des impôts. Au demeurant, la circonstance que l'administration soit susceptible, en vertu de la loi ou de circonstances de fait, de connaître le ou les bénéficiaires de sommes regardées comme des revenus réputés distribués n'est pas de nature à lui interdire d'inviter la société distributrice à désigner l'identité et l'adresse des bénéficiaires et ne fait pas obstacle à l'application de l'amende prévue à l'article 1759, à défaut de réponse dans le délai de trente jours, comme en l'espèce.

20. Il résulte de ce qui précède que la SARL Timbelle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Timbelle est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Timbelle et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Courbon, présidente-assesseure,

M. Laval, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 janvier 2024.

Le rapporteur,

J.-S. Laval

Le président,

D. Pruvost

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

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N° 22LY00593


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