Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La SARL APC a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer, à titre principal, la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2014 et 2015 à hauteur de la somme de 241 821 euros et, à titre subsidiaire, de prononcer la décharge de la majoration de 40 % pour manquement délibéré qui lui a été appliquée au titre de l'exercice clos en 2014 et de la majoration de 40 % pour défaut de déclaration qui lui a été appliquée au titre de l'exercice clos en 2015.
Par un jugement n° 1900875 du 29 mars 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 mai 2022 et 5 janvier 2023, la SARL APC, représentée par Mes Eveno et Berthier, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités y afférentes, ou, à défaut, de la pénalité pour manquement délibéré ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a été privée de débat oral et contradictoire au cours de la vérification de comptabilité, dès lors que l'administration a procédé à des constatations depuis l'extérieur de ses bâtiments secondaires, à l'insu de son gérant ;
- c'est à tort que l'administration a refusé d'admettre en déduction les charges correspondant aux frais de location de locaux à Rillieux-la-Pape, alors qu'elle occupe ces locaux qui sont nécessaires à son activité, en présence d'une clientèle importante implantée en région lyonnaise ; il en va de même des charges afférentes aux locaux d'Oyannax, qu'elle a pris à bail en vue d'y développer son activité en 2005 ;
- il ne saurait lui être reproché une discordance entre les montants payés et ceux mentionnés dans les baux et quittances, ou l'absence de régularisation des charges, qui sont imputables aux bailleurs, tout comme le caractère erroné des déclarations de ces bailleurs selon lesquelles les locaux seraient vacants ; l'absence d'enseigne sur les locaux tout comme l'absence de personnel sur place sont sans incidence ;
- c'est à tort que le tribunal administratif a retenu que l'administration avait constaté, sur place, l'absence d'occupation des locaux d'Oyonnax, alors que cette visite a eu lieu hors la présence de son gérant, en violation du principe du contradictoire ;
- la proposition de motivation est insuffisamment motivée s'agissant de ce chef de rectification ;
- l'administration s'est immiscée irrégulièrement dans sa gestion ;
- il convient de tirer les conséquences du statut d'ordre public des baux commerciaux, notamment s'agissant de la durée du bail et des modalités de rupture ;
- en rejetant les charges de loyers versées à la société Anapopop, qui est une société de personnes dont elle détient 10 % du capital social, elle subit une double imposition, dès lors qu'elle est imposée au titre du bénéfice réalisé par cette société à proportion de sa participation au capital ;
- les charges payées à la société Generale Elec pour l'entretien et des travaux effectués dans les locaux de Rillieux-la-Pape et Oyonnax doivent également être admises en déduction ;
- les charges payées à la société APC Finances pour des prestations de services administratifs et la refacturation d'achats sont déductibles ; s'agissant des prestations de service à caractère administratif, l'administration les a admis en 2014 et aucune raison ne justifie leur rejet en 2015, alors qu'aucune preuve n'est apportée de leur caractère fictif ; quant aux achats de consommables, ils ont effectivement été utilisés par son personnel salarié ;
- les charges payées à la société MT Conseil, qui concernent essentiellement des prestations de ménage, ont été rejetées en 2014 et 2015, mais admises en 2016 et 2017 dans le cadre d'un autre contrôle ; l'administration a méconnu le principe de confiance légitime, ces prestations étant, au cours des deux périodes, rendues dans des conditions et à des tarifs identiques ;
- le montant des impositions et pénalités doit être réduit du montant du CICE et de la réduction d'impôt mécénat de l'exercice 2015 ;
- la pénalité pour manquement délibéré n'est pas justifiée ; si l'administration s'est fondée sur la communauté d'intérêts existant entre elle et les autres sociétés qui lui ont facturé les charges en litige, qui ont le même gérant, M. A..., il convient d'apprécier globalement l'existence d'un manquement et de prendre en compte le fait que ces sociétés ont déclaré les revenus correspondants dans leurs propres déclarations si bien qu'aucune volonté d'éluder l'impôt ne peut être reprochée à M. A... ; s'agissant des facturations MT Conseil, l'administration a reconnu la réalité des prestations dans son contrôle portant sur les exercices 2016 et 2017 ;
- la pénalité pour dépôt tardif des déclarations est injustifié, le retard étant imputable à son expert-comptable, dont elle a engagé la responsabilité.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 septembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 13 juillet 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 28 juillet 2023.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Courbon, présidente-assesseure,
- les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique,
- et les observations de Me Gagneux, représentant la SARL APC ;
Une note en délibéré présentée par la SARL APC a été enregistrée le 31 octobre 2023.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL APC, qui exerce une activité de courtage en assurances, ayant pour associés M. A..., son gérant, détenteur de 499 parts sur 500, et sa compagne, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015 à l'issue de laquelle l'administration l'a, d'une part, assujettie, selon la procédure contradictoire, à un complément d'impôt sur les sociétés, au titre de l'exercice clos en 2014, résultant du refus d'admettre en déduction de son résultat imposable des dépenses comptabilisées en charges et des amortissements somptuaires et l'a, d'autre part, taxée d'office à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2015, la déclaration de résultat de cet exercice ayant été remise en mains propres après l'expiration du délai imparti par une mise en demeure de la déposer. Le complément d'impôt assigné à la SARL APC au titre de l'exercice clos en 2014 a été assorti, selon les rappels, de la majoration de 10 % prévue au a. de l'article 1728-1 du code général des impôts et de la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue au a. de l'article 1729 du même code. L'administration a appliqué à l'imposition établie d'office au titre de l'exercice clos en 2015 la majoration de 40 % prévue au b. de l'article 1728-1 de ce code. La SARL APC relève appel du jugement du 29 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et pénalités.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En premier lieu, dans le cas où la vérification de comptabilité d'une entreprise a été effectuée, soit, comme il est de règle, dans ses propres locaux, soit, si son dirigeant ou représentant l'a expressément demandé, dans les locaux du comptable auprès duquel sont déposés les documents comptables, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat.
3. Il résulte de l'instruction que la vérification de comptabilité de la SARL APC, dont la première intervention s'est tenue le 10 janvier 2017, a eu lieu au siège de la société et a donné lieu à plusieurs rencontres entre le vérificateur et M. A..., gérant, notamment le 14 février 2017, le 3 mars 2017 et le 5 mai 2017, date de la réunion de synthèse. La société requérante n'établit pas, ni même n'allègue, que le vérificateur se serait, à ces occasions, soustrait à tout débat. Si elle soutient que le vérificateur a procédé, depuis la voie publique, à des constatations concernant les locaux qu'elle loue à Oyonnax et Rillieux-la-Pape, tenant à l'absence de signalisation de la société et de boîte aux lettres à son nom, hors la présence de son gérant, cette circonstance n'est pas, par elle-même, de nature à caractériser une violation du débat oral et contradictoire, ni même du principe du contradictoire, et ce alors que le vérificateur n'est pas entré dans les locaux pris à bail et qu'il n'était pas tenu, avant de faire ces constatations, d'en informer la société. Par suite, la SARL APC n'est pas fondée à soutenir qu'elle a été privée de la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur.
4. En second lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, d'une part : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rehaussements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.
5. La proposition de rectification du 15 mai 2018 adressée à la SARL APC mentionne, pour l'exercice clos en 2014, l'impôt concerné, l'exercice d'imposition, la base d'imposition retenue ainsi que le fondement légal des différents chefs de rectification. S'agissant de la remise en cause du caractère déductible des loyers versés aux SCI Ut Babar et Anapopop pour des locaux situés à Rillieux-la-Pape et à la SCI Kabobol pour des locaux situés à Oyonnax, le service vérificateur a détaillé, pour chacun des locaux et des bailleurs, les éléments de fait qui l'ont amené à considérer que la SARL APC n'utilisait pas ces locaux pour les besoins de son exploitation, de telle sorte que le paiement de ces charges était constitutif d'un acte anormal de gestion. Elle est ainsi suffisamment motivée au sens des articles L. 57 et R. 57-1 du livre des procédures fiscales, applicable au complément d'impôt sur les sociétés afférent à l'exercice clos en 2014, établi selon la procédure contradictoire. Si la SARL APC fait valoir que certains des éléments retenus par l'administration sont erronés, cette critique a trait au bien-fondé des impositions en litige et est, en elle-même, sans incidence sur la motivation de la proposition de rectification.
6. S'agissant de la cotisation d'impôt sur les sociétés établie d'office au titre de l'exercice clos en 2015, la proposition de rectification du 15 mai 2018 précise les bases ou éléments ayant servi à son calcul et leurs modalités de détermination, conformément à l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, aux termes duquel : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions. (...) ".
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne l'exercice clos en 2014 :
7. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ". Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.
8. En vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis. La seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense. Le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration.
9. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la SARL APC a conclu, le 30 mars 2007, avec la SCI Ut Babar, dont le capital est détenu par M. A..., qui en est le gérant, et la compagne de celui-ci, un bail commercial portant sur des locaux à usage de bureaux et d'archives à Rillieux-la-Pape, d'une superficie de 110 m2, au prix de 11 000 euros par an. La SARL APC a comptabilisé en charges, à ce titre, une somme de 29 001,60 euros au titre de l'exercice 2014. La SARL APC a également signé, le 15 mars 2015, avec la SCI Anapopop, dont le capital est détenu majoritairement par M. A..., qui en est le gérant, et sa compagne, un bail commercial portant sur des locaux de 346 m2 situés à Rillieux-la-Pape, pour un loyer annuel de 34 335 euros. Les charges de location comptabilisées au titre de ce bail par la SARL APC se sont élevées à 44 698,96 euros au titre de l'exercice 2014. La SARL APC a enfin conclu avec la SCI Kabobol, dont le capital est détenu par M. A..., qui en est le gérant, et sa compagne, le 1er décembre 2008, un bail commercial portant sur des locaux à usage de bureau, d'une superficie de 150 m2, situés à Oyonnax, pour un loyer annuel de 18 000 euros et a comptabilisé en charges, à ce titre, une somme de 24 832,76 euros en 2014. Le service a remis en cause le caractère déductible de ces charges des résultats imposables de la SARL APC, estimant qu'elles n'avaient pas été engagées dans l'intérêt de l'entreprise.
10. Si la SARL APC a justifié des charges ainsi comptabilisées en produisant les baux et les factures émises par les trois SCI, l'administration a relevé que les montants comptabilisés par la SARL APC ne correspondaient pas à ceux mentionnés dans les différents contrats de bail. Elle a également relevé que ces montants ne correspondaient pas davantage, tant dans leurs dates que dans leurs montants, aux factures établies par les bailleurs, sans que ces discordances soient justifiées. L'administration a par ailleurs constaté que les salariés de la SARL APC ne travaillaient pas dans ces locaux, mais dans ceux de son siège à Sevrier, que la société n'avait souscrit aucun contrat d'abonnement pour l'eau, l'électricité et le téléphone, que le montant des charges locatives était identique pour les deux exercices en litige, sans qu'aucune régularisation soit intervenue, et qu'à l'occasion de visites sur place, il a été constaté l'absence de toute signalisation de la société dans les différents locaux loués. Enfin, l'administration a relevé que les SCI bailleresses ont toutes déclaré, en 2015, que les locaux concernés étaient vacants et non loués. La société requérante, qui soutient que les locaux de Rillieux-la-Pape sont utilisés à usage d'archives et pour y recevoir ses clients établis dans la région lyonnaise, n'en justifie pas par la seule production d'attestations, rédigées en termes peu circonstanciés, établies par trois salariés et trois clients, par la production de relevés de péages d'autoroute, sans lien direct avec les locaux et par la production de papiers à en-tête à l'adresse de ces locaux. Elle n'apporte par ailleurs aucun élément de nature à démontrer que l'un des locaux de Rillieux-la-Pape serait utilisé pour y stocker des archives, et ce alors qu'elle dispose déjà d'un local loué à cette fin à proximité de son siège social, et dont l'administration n'a pas remis en cause les frais de location comptabilisées à ce titre. S'agissant des locaux d'Oyonnax, la SARL APC se borne à faire valoir qu'elle les a pris à bail en vue d'y développer une clientèle, sans produire aucun justificatif à l'appui de cette allégation. Enfin, si la SARL APC indique qu'elle était tenue au paiement des loyers du fait de la signature des contrats de bail, cette circonstance ne fait pas, en elle-même obstacle à la remise en cause du caractère déductible des charges en litige, d'autant qu'ainsi qu'il a été dit, elle a versé aux trois SCI des sommes bien supérieures à celles mentionnés sur les baux. Dans ces conditions, l'administration, qui fait par ailleurs état de la communauté d'intérêts existant entre la SARL APC et les SCI Ut Babar, Anapopop et Kabobol, qui ont les mêmes associés et le même gérant, et qui ne s'est pas immiscée dans la gestion de la société, mais a contrôlé, ainsi qu'il lui appartient, les justificatifs produits par la SARL APC à l'appui des charges qu'elles a déduites de ses résultats imposables, établit que les sommes versées à ces SCI au titre des baux en litige sont dépourvues de toute contrepartie, qu'elles n'ont, dès lors, pas été engagées dans l'intérêt de la SARL APC et que leur prise en charge est constitutive d'un acte anormal de gestion. Par suite, c'est à bon droit que ces sommes ont été réintégrées dans ses résultats imposables de l'exercices 2014.
11. En deuxième lieu, la circonstance que la SARL APC détient une partie du capital de la SCI Anapopop, et qu'elle est, à ce titre, imposable, au prorata de ses droits dans cette société, sur une part du bénéfice réalisé par celle-ci, lequel est notamment constitué des loyers qui lui sont facturés, n'est pas de nature à caractériser une double imposition, les résultats des deux sociétés, qui sont des contribuables distincts, étant indépendants l'un de l'autre.
12. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que la SARL APC a comptabilisé en charges une somme de 45 985, 20 euros en 2014 correspondant à des travaux d'entretien et de réparation réalisés par la SARL Generale Elec, dont M. A... est l'associé et le gérant, dans les locaux pris à bail à Rillieux-la-Pape et Oyonnax. Dès lors qu'ainsi qu'il a été dit au point ci-dessus, les frais de location de ces locaux n'ont pas été engagés dans l'intérêt de l'entreprise, les frais de travaux et de réparation y afférents ne le sont pas davantage. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a réintégré les sommes en cause dans le résultat imposable de la SARL APC.
13. En quatrième lieu, la SARL APC a comptabilisé en charges, au titre de l'exercice 2014, une somme de 24 500 euros correspondant à la refacturation d'achats divers par la SARL APC Finances, dont M. A... est le gérant et détient 94 % du capital social. Ainsi que le relève l'administration, ces refacturations, qui correspondent à la fourniture de petit matériel, à des cadeaux, des achats de gâteaux et boissons et des frais de restaurant, ne sont organisées par aucune convention liant les deux sociétés, sont toutes datées du 29 décembre 2014 et présentent un caractère forfaitaire. Elle ajoute que la SARL APC n'a produit, au cours du contrôle, aucune valorisation détaillée de ces frais, ni aucun justificatif. Dans ces conditions, l'administration, qui rappelle les relations d'intérêts existant entre les deux sociétés qui ont le même dirigeant, les mêmes associés et le même siège social, établit que les dépenses en cause n'ont pas été engagées dans l'intérêt de l'entreprise et qu'elles sont constitutives d'un acte anormal de gestion. Par suite, c'est à bon droit que la somme de 24 500 euros a été réintégrée dans le résultat imposable de la SARL APC.
14. En cinquième lieu, la SARL APC a comptabilisé en charges, à hauteur de 24 095 euros en 2014, des prestations facturées par Mme B..., compagne de M. A..., qui exerce une activité individuelle de prestations de ménage sous le nom commercial MT Conseil. Pour remettre en cause le caractère déductible de ces charges, présentées comme correspondant au ménage des locaux de Rillieux-la-Pape et Doussard, l'administration a d'abord relevé l'absence de convention liant la SARL APC et Mme B..., l'existence d'anomalies dans la facturation, qu'il s'agisse de la présentation formelle des factures, de la mention de périodes de réalisation postérieures à leur établissement et de l'absence d'indication du lieu de réalisation des prestations ainsi que la circonstance que les factures étaient réglées avant leur établissement. Elle a également relevé que la SARL APC emploie une salariée comme agent d'entretien pour les locaux de Sevrier et que cette dernière réalisait, au vu des déclarations de salaires établies par la société, en moyenne 14 heures par semaine, alors que, selon les informations données par M. A... lors du contrôle, le ménage des locaux de Sevrier ne l'occupait que 4 à 5 heures par semaine. L'administration a également noté, d'une part, que les locaux de Rillieux-la-Pape n'étaient pas utilisés pour les besoins de l'exploitation de la SARL APC et que celle-ci a également payé à la SARL Generale Elec des prestations d'entretien du bâtiment de Doussard. Elle a, enfin, relevé le prix très élevé des prestations facturées par Mme B... au regard de leur nature et l'absence de justificatif du détail de celles-ci. Par ces éléments, et eu égard à la relation d'intérêt liant les deux sociétés, l'administration établit que les dépenses en cause n'ont pas été engagées dans l'intérêt de l'exploitation de la SARL APC et qu'elles sont constitutives d'un acte anormal de gestion. Par suite, c'est à bon droit qu'elle a remis en cause leur caractère déductible des résultats imposables de l'intéressée.
En ce qui concerne l'exercice clos en 2015 :
15. La SARL APC, ainsi qu'il a été dit au point 1, a été taxée d'office au titre de l'exercice clos en 2015 sur le fondement du 2° de l'article L. 66 et de l'article L. 68 du livre des procédures fiscales, sa déclaration de résultat ayant été déposée plus de trente jours après la mise en demeure qui lui a été notifiée le 20 août 2016. Par suite, il lui appartient, en application de l'article L. 193 du même livre, d'établir le caractère exagéré des impositions mises à sa charge.
16. En premier lieu, eu égard à ce qui a été dit aux points 9 à 14 ci-dessus, la SARL APC, qui ne produit aucun justificatif en ce sens, n'établit pas que les charges comptabilisées au cours de l'exercice clos en 2015, correspondant à la location des locaux de Rillieux-la-Pape et d'Oyonnax (soit 20 001, 60 euros, 44 698, 96 euros et 24 832,76 euros), aux frais d'entretien de ces locaux (33 16,46 euros), aux prestations facturées par Mme B... (34 500 euros) et aux refacturations d'achats divers par la SARL APC Finances (36 500 euros) ont été engagées dans l'intérêt de son exploitation.
17. En deuxième lieu, s'agissant des prestations administratives facturées par cette même société, à hauteur de 75 600 euros en 2015, la SARL APC fait valoir que l'administration n'a pas remis en cause le montant comptabilisé à ce titre au cours de l'exercice 2014. Il résulte toutefois de l'instruction que l'administration s'est fondée sur le changement d'effectifs intervenu au sein de la SARL APC Finances, qui employait, en 2014, quatre salariés (une agent d'entretien et une directrice administrative et financière sur l'ensemble de l'année ainsi qu'un responsable de projet et une assistante administrative sur les six premiers mois de l'année) et n'employait plus, en 2015, qu'une agent d'entretien, sa directrice administrative et financière travaillant désormais pour la SARL APC, pour en déduire que la SARL APC Finances ne disposait plus, en 2015, des moyens humains nécessaires à la réalisation de prestations de gestion administrative. Dans ces conditions, la société requérante, qui ne conteste pas le constat opéré par l'administration et se borne à faire état d'une volonté de recentrage de son activité sur le courtage en assurances, n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de ce que ces dépenses ont été engagées dans l'intérêt de son exploitation.
18. En troisième lieu, si la SARL APC indique que l'administration n'a pas pris en compte, dans l'établissement de la cotisation d'impôt sur les sociétés mise à sa charge au titre de l'exercice 2015, un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi de 14 265 euros et une réduction d'impôt mécénat de 1 200 euros, elle ne justifie pas de l'existence et du montant de ce crédit et de cette réduction d'impôt.
Sur les pénalités :
19. En premier lieu, s'agissant de la pénalité de 40 % pour manquement délibéré appliquée par l'administration, sur le fondement du a. de l'article 1729 du code général des impôts, au titre de l'exercice clos en 2014, la contestation de la SARL APC, énoncée dans les mêmes termes qu'en première instance, doit être écartée par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif au point 19 du jugement attaqué.
20. En second lieu, aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : (...) / b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ; (...) ".
21. Il est constant que la SARL APC a remis en mains propres au vérificateur sa déclaration de résultat de l'exercice clos en 2015, le 3 mars 2017, soit postérieurement à l'expiration du délai de trente jours qui lui était imparti par la mise en demeure du 18 août 2016, réceptionnée le 20 août 2016. Il s'ensuit que l'administration était en droit de lui infliger la pénalité de 40 % prévue par les dispositions précitées, la SARL APC ne pouvant utilement se prévaloir de la circonstance, au demeurant non établie, que ce dépôt tardif serait uniquement imputable à son expert-comptable.
22. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le ministre en défense, que la SARL APC n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL APC est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL APC et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 24 octobre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme Courbon, présidente-assesseure,
M. Porée, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 novembre2023.
La rapporteure,
A. Courbon
Le président,
D. Pruvost
La greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
N° 22LY01636