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19/10/2023 | FRANCE | N°23LY00054

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 19 octobre 2023, 23LY00054


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la régularisation de charges locatives de l'année 2016 émise à son encontre et d'individualiser le calcul des charges de chauffage par la prise en compte du compteur calorifique sans la part R2/P2 qui incombe à l'État.

Par un jugement n° 2002594, 2003051 du 1er décembre 2022, le tribunal a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 9 janvier 2023, le ministre de l'intérieur et d

es outre-mer demande à la cour d'annuler ce jugement.

Il soutient que :

- il n'était pas te...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la régularisation de charges locatives de l'année 2016 émise à son encontre et d'individualiser le calcul des charges de chauffage par la prise en compte du compteur calorifique sans la part R2/P2 qui incombe à l'État.

Par un jugement n° 2002594, 2003051 du 1er décembre 2022, le tribunal a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 9 janvier 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande à la cour d'annuler ce jugement.

Il soutient que :

- il n'était pas tenu au regard des dispositions réglementaires en vigueur pour les années en litige d'appliquer la règle de l'individualisation des charges pour l'année contestée ;

- des compteurs individuels ne sont installés que dans les concessions de logement par nécessité absolue de service des militaires mais pas dans les locaux de service technique et il n'est, en conséquence, pas possible de procéder à un calcul des charges de chauffage sans erreur ;

- l'administration avait en application des dispositions de l'article R. 131-5 du code de la construction et de l'habitation jusqu'au 31 mars 2017 pour se mettre en conformité ;

- dans l'attente de l'installation des appareils permettant d'individualiser les frais de chauffage collectif, l'administration pouvait, en application des dispositions de la circulaire n° 102000 GEND/DSF/SDIL/2BT du 28 décembre 2011, procéder à une répartition des charges de chauffage au prorata des surfaces chauffées dès lors que la caserne n'était pas intégralement dotée de compteurs calorimétriques individuels ;

- la réponse ministérielle JORF- année 2016 - n° 39 A.N (Q) - page 8829 confirme l'échelonnement de la mise en service des appareils de mesure ;

- les principes posés par les textes précités permettent une répartition équitable des charges.

M. A..., qui a reçu communication de la requête, n'a pas produit de mémoire en défense.

Par une ordonnance du 25 janvier 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 mars 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de l'énergie ;

- le code de la défense ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- la circulaire n° 102000 GEND/DSF/SDIL/2BR du 28 décembre 2011 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ;

- et les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., major de la gendarmerie nationale, qui bénéficie d'un logement pour nécessité absolue de service au sein de la caserne d'Autun, a été destinataire d'un avis, daté du 1er avril 2020, portant régularisation des charges dues au titre de l'année 2016 et faisant apparaître un montant de 911,18 euros à acquitter. Il a demandé au tribunal administratif de Dijon l'annulation de la décision du 21 juillet 2020 par laquelle le ministre de l'intérieur a annulé la décision de régularisation du 1er avril 2020 " en tant qu'elle comprend les prestations P2 ou R2 " relatives au coût des prestations de conduite, de surveillance, de contrôle de réglage et d'entretien courant de chauffage, et a enjoint au service gestionnaire de procéder à un nouveau calcul des charges 2016 au titre du chauffage collectif en excluant les prestations P2 ou R2. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer fait appel du jugement du 1er décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Dijon a annulé cette décision en tant qu'elle ne fait pas intégralement droit au recours préalable de M. A..., contestant le principe et le mode de calcul de la régularisation de ses charges de chauffage de l'année 2016.

2. D'une part, aux termes de l'article L. 4145-2 du code de la défense : " Les officiers et sous-officiers de gendarmerie, du fait de la nature et des conditions d'exécution de leurs missions, sont soumis à des sujétions et des obligations particulières en matière d'emploi et de logement en caserne ". Aux termes de l'article D. 2124-75 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les personnels de tous grades de la gendarmerie nationale en activité de service et logés dans des casernements ou des locaux annexés aux casernements bénéficient d'une concession de logement par nécessité absolue de service ". Aux termes de l'article R. 2124-71 du même code : " Le bénéficiaire d'une concession de logement par nécessité absolue de service (...) supporte l'ensemble des réparations locatives et des charges locatives afférentes au logement qu'il occupe, déterminées conformément à la législation relative aux loyers des locaux à usage d'habitation (...) ". Enfin, aux termes de l'article D. 2124-75-1 de ce même code : " La gratuité du logement accordé en application de l'article D. 2124-75 s'étend à la fourniture de l'eau, à l'exclusion de toutes autres fournitures ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 241-9 du code de l'énergie : " Tout immeuble collectif pourvu d'un chauffage commun doit comporter, quand la technique le permet, une installation permettant de déterminer la quantité de chaleur et d'eau chaude fournie à chaque local occupé à titre privatif / Nonobstant toute disposition, convention ou usage contraires, les frais de chauffage et de fourniture d'eau chaude mis à la charge des occupants comprennent, en plus des frais fixes, le coût des quantités de chaleur calculées comme il est dit ci-dessus.(...) / ". Aux termes de l'article R. 241-7 du même code (anciennement R. 131-2 du code de la construction et de l'habitation) : " Tout immeuble collectif, équipé d'un chauffage commun à tout ou partie des locaux occupés à titre privatif et fournissant à chacun de ces locaux une quantité de chaleur réglable par l'occupant, doit être muni d'appareils permettant d'individualiser les frais de chauffage collectif. / Ces appareils doivent permettre de mesurer la quantité de chaleur fournie ou une grandeur représentative de celle-ci ". Selon les termes de l'article R. 131-5 du code de la construction et de l'habitation : " La mise en service des appareils prévus à l'article R. 131-2 doit avoir lieu au plus tard le 31 mars 2017 (...) ". Aux termes de l'article R. 241-12 du code de l'énergie : " Dans les immeubles collectifs équipés des appareils prévus à l'article R. 241-7, les frais de chauffage afférents à l'installation commune sont divisés, d'une part, en frais de combustible ou d'énergie et, d'autre part, en autres frais de chauffage tels que les frais relatifs à la conduite et à l'entretien des installations de chauffage et les frais relatifs à l'utilisation d'énergie électrique (ou éventuellement d'autres formes d'énergie) pour le fonctionnement des appareillages, notamment les instruments de régulation, les pompes, les brûleurs et les ventilateurs. ".

4. Il ne résulte ni des dispositions citées ci-dessus, ni d'aucun texte législatif ou réglementaire que les casernements ou locaux annexés aux casernements destinés à l'hébergement des personnels de la gendarmerie nationale titulaires d'une concession de logement pour nécessité absolue de service seraient, en tant que tels, soustraits aux règles d'individualisation des charges de chauffage instituées par les dispositions du code de l'énergie citées au point 3, et ce, contrairement à ce que soutient le ministre de l'intérieur et des outre-mer, alors même que les appareils permettant d'individualiser les frais de chauffage collectif n'ont revêtu de caractère obligatoire pour l'ensemble des locaux privatifs concernés qu'à compter de 2017, soit à une date postérieure à la période concernée par l'avis en litige.

5. Dès lors que le logement en cause bénéficiait, en 2016, d'un système de chauffage commun et était pourvu d'appareils permettant d'individualiser les frais de chauffage collectif dans chacun des logements concédés, il résulte des dispositions de l'article R. 241-7 du code de l'énergie que l'administration ne pouvait légalement prévoir, par la circulaire du 28 décembre 2011 dont elle se prévaut, un système exclusif de répartition des charges de chauffage des logements concédés au prorata des surfaces chauffées et des périodes occupées. Si l'administration soutient que les dispositions de cette circulaire répondent à un souci d'équité, en ce qu'elles instaurent une péréquation systématique des charges de chauffage collectif entre occupants, elles méconnaissent en réalité le principe d'individualisation des charges. En outre, si des compteurs individuels ne sont pas installés dans les locaux de service technique, une telle circonstance était sans incidence sur la possibilité d'individualiser les charges de chauffages dans les logements individuels. Par ailleurs, si la réponse ministérielle JORF- année 2016 - n° 39 A.N (Q) - page 8829, indique que " de la souplesse a été introduite avec un échelonnement dans la mise en service des appareils de mesure. Cet échelonnement permet de conserver l'ambition de la mesure tout en y apportant de la flexibilité. Les immeubles seront alors équipés progressivement avec priorité pour les bâtiments les plus énergivores ", elle ne saurait être ici utilement invoquée alors que le logement en cause était déjà équipé, en 2016 d'un système individuel permettant de déterminer la quantité de chaleur fournie à chaque logement concédé à titre privatif.

6. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur et des outre-mer n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a annulé sa décision du 21 juillet 2020 en tant qu'elle ne fait pas intégralement droit au recours préalable de M. A....

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du ministre de l'intérieur et des outre-mer est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. B... A....

Délibéré après l'audience du 5 octobre 2023 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 octobre 2023.

La rapporteure,

C. DjebiriLe président,

V-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 23LY00054 2

al


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00054
Date de la décision : 19/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

08-01 Armées et défense. - Personnels militaires et civils de la défense.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Christine DJEBIRI
Rapporteur public ?: M. RIVIERE

Origine de la décision
Date de l'import : 29/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-10-19;23ly00054 ?
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