Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. F... D... a demandé au tribunal administratif de Dijon, d'une part, d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2022 par lequel le préfet de Saône-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans ainsi que l'arrêté du même jour l'assignant à résidence et, d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 000 euros en réparation du préjudice qu'il soutient avoir subi du fait de la privation de ses droits sociaux.
Par un jugement n° 2203058 du 5 décembre 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français sans délai, de l'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans et de l'assignation à résidence et renvoyé à une formation collégiale les conclusions de la demande tendant à l'annulation du refus de délivrance d'un titre de séjour ainsi que les conclusions indemnitaires.
Par un jugement n° 2203058 du 6 avril 2023, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, a enjoint au préfet de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. D....
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 4 janvier 2023, M. D..., représenté par Me Louard, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 5 décembre 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Saône-et-Loire du 21 octobre 2022 en tant qu'il l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans et l'arrêté du même jour l'assignant à résidence ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Saône-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la privation de ses droits sociaux ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les arrêtés ont été signées par une autorité incompétente ;
- le refus de délivrance d'un titre de séjour est entaché d'une erreur de droit ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreurs de fait ;
- il est bien intégré.
La requête a été communiquée au préfet de la Saône-et-Loire qui n'a produit aucune observation.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pruvost, président ;
Considérant ce qui suit :
1. M. F... D..., ressortissant guinéen né en 1991, est entré irrégulièrement en France le 6 décembre 2016 selon ses déclarations. Le 20 février 2017, il a sollicité le bénéfice de l'asile. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande par une décision du 29 juin 2018 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 16 juillet 2019. Le 17 mai 2021, il a demandé la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ". Par un arrêté du 2 août 2021, dont la légalité a été confirmée par une ordonnance du président du tribunal administratif de Dijon du 17 mars 2022, le préfet de Saône-et-Loire a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Le 22 avril 2022, M. D... a présenté une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par deux arrêtés du 21 octobre 2022, le préfet de Saône-et-Loire a, d'une part, refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai sur le fondement du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a fixé le pays de destination et prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans et l'a, d'autre part, assigné à résidence dans l'arrondissement de Mâcon pour une durée de quarante-cinq jours. Par un jugement du 5 décembre 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes d'annulation de l'obligation de quitter le territoire, de l'interdiction de retour sur le territoire et de l'assignation à résidence et renvoyé à une formation collégiale les conclusions d'annulation dirigées contre le refus de délivrance de titre de séjour ainsi que les conclusions indemnitaires. Par un jugement du 6 avril 2023, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision portant refus d'admission au séjour, a enjoint au préfet de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. D.... Celui-ci relève appel du jugement du 5 décembre 2022 en tant qu'il a rejeté ses demandes.
2. En premier lieu, les arrêtés en litige ont été signés par Mme A... G..., directrice de la citoyenneté et de la légalité de la préfecture de Saône-et-Loire, à laquelle M. C... E..., préfet de Saône-et-Loire avait délégué sa signature par un arrêté du 15 septembre 2021, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le même jour, pour signer notamment les arrêtés portant obligation de quitter le territoire avec ou sans délai de départ volontaire, fixant le délai de départ volontaire, fixant le pays de renvoi, prononçant des interdictions de retour et de circulation sur le territoire français, les assignations à résidence ainsi que les décisions de refus de titre de séjour et de refus de renouvellement de titre de séjour. Il ressort des pièces du dossier que M. C... E..., bien qu'il ait été nommé préfet des Pyrénées-Atlantiques par un décret du 5 octobre 2022, est demeuré en fonction dans le département du Saône-et-Loire jusqu'au 23 octobre 2022, son successeur, M. B... n'ayant pris ses fonctions que le 24 octobre de la même année. Dans ces conditions, la délégation de signature consentie à Mme G... par M. C... E... par l'arrêté précité du 15 septembre 2021 continuait de produire ses effets le 21 octobre 2022, date à laquelle ont été pris les arrêtés attaqués. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des arrêtés contestés doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de justice administrative : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ".
4. Il résulte des dispositions de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le prononcé par l'autorité administrative à l'encontre d'un ressortissant étranger d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 1°, 2°, 4° ou 6° de cet article n'est pas subordonné à l'intervention préalable d'une décision statuant sur le droit au séjour de l'intéressé en France. Dans la mesure où un refus de titre de séjour n'est pas le fondement d'une obligation de quitter le territoire français, l'éventuelle annulation du refus de titre de séjour ne conduit pas, par elle-même, à l'annulation par voie de conséquence de l'obligation de quitter le territoire français, qui aurait pu être légalement prise en l'absence du refus de titre de séjour et n'est pas intervenue en raison de ce refus. Il en va ainsi, en principe, pour les obligations de quitter le territoire français prises sur le fondement du 1°, 2°, 4° ou 6° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, dans le cas où serait contesté à l'occasion d'un recours dirigé contre une telle obligation un refus de titre de séjour pris concomitamment, si le juge administratif annule le refus de titre de séjour, il lui appartient, s'il est saisi d'un moyen en ce sens, d'apprécier, eu égard au motif qu'il retient, si l'illégalité du refus de titre de séjour justifie l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français. Tel est le cas notamment lorsque le motif de l'annulation implique le droit de l'intéressé à séjourner en France. De plus, et en tout état de cause, lorsque la loi prescrit l'attribution de plein droit d'un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce que l'intéressé puisse légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français.
5. En l'espèce, il ressort des termes de l'arrêté en litige que l'obligation de quitter le territoire français a pour fondement le 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non le refus de titre de séjour pris concomitamment. Si par un jugement du 6 avril 2023, devenu définitif, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision refusant de délivrer un titre de séjour à M. D... pour erreur de droit dans l'application des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce jugement n'implique pas, compte tenu de ses motifs, le droit de l'intéressé à séjourner en France. Par suite, l'annulation du refus d'admission au séjour n'emporte pas l'annulation de l'obligation de quitter le territoire ni des autres décisions prises sur le fondement de la mesure d'éloignement.
6. En troisième lieu, les mentions de l'arrêté selon lesquelles M. D... ne dispose pas de moyens de subsistance légaux et suffisants pour la durée du séjour envisagée ne sont entachées d'aucune erreur de fait dès lors que les bulletins de salaires produits pour la seule année complète de janvier à décembre 2020 établissent qu'il perçoit un revenu annuel net inférieur au SMIC.
7. En quatrième lieu, si l'intéressé fait valoir qu'il serait bien intégré, cette affirmation n'est pas assortie des précisions suffisantes permettant d'en apprécier la portée.
8. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes. Les conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 14 septembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme Courbon, présidente-assesseure,
M. Laval, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 octobre 2023.
Le président-rapporteur,
D. Pruvost
L'assesseure la plus ancienne,
(dans l'ordre du tableau)
A. CourbonLa greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 23LY00033