Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 21 septembre 2020 par laquelle le directeur territorial de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a suspendu le bénéfice des conditions matérielles d'accueil qui lui étaient ouvertes en qualité de demandeur d'asile et d'enjoindre sous astreinte à cette autorité de les lui rétablir.
Par jugement n° 2008267 du 19 janvier 2022, le tribunal a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 20 mai 2022, présentée pour M. A..., il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et la décision du 21 septembre 2020 portant suspension du bénéfice des conditions matérielles d'accueil ;
2°) d'enjoindre au directeur territorial de l'OFII, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de rétablir ses conditions matérielles d'accueil ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que la décision en litige méconnaît l'article L. 744-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation compte tenu d'une situation de force majeure.
Par un mémoire enregistré le 10 septembre 2023, l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), représenté par Me de Froment, conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 avril 2022.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le règlement (UE) n° 604/2013 du parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- la directive n° 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 ;
- la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 ;
- le décret n° 2020-279 du 19 mars 2020 ;
- le décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Duguit-Larcher, présidente-assesseure ;
- et les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant guinéen né le 24 décembre 1996, entré irrégulièrement en France le 28 juin 2019, selon ses déclarations, s'est présenté à la préfecture du Rhône le 8 juillet 2019 pour solliciter son admission au séjour au titre de l'asile. La consultation du fichier européen " Eurodac " lors de l'instruction de sa demande ayant révélé que ses empreintes digitales avaient été relevées le 4 mars 2016 par les autorités de contrôle compétentes en Italie à l'occasion de l'enregistrement d'une demande de protection internationale dans ce pays. M. A... s'est vu remettre, le 8 juillet 2019, une attestation de demandeur d'asile en " procédure Dublin " et il a accepté, le même jour, le bénéfice des conditions matérielles d'accueil qui lui ont été proposées par l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Par un jugement du 16 octobre 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation des décisions du 10 octobre 2019 par lesquelles le préfet du Rhône a ordonné sa remise aux autorités italiennes et l'a assigné à résidence et, par des jugements des 19 février 2020 et 13 mars 2020 ce tribunal a également rejeté ses demandes d'annulation de l'arrêté du 13 février 2020 par lequel le préfet du Rhône a décidé de renouveler son assignation à résidence dans le département du Rhône pour une durée de quarante-cinq jours et de la décision du 10 mars 2020 par laquelle le préfet du Rhône a renouvelé son assignation à résidence pour une période de trente-huit jours. Par une lettre du 24 août 2020, le directeur territorial de l'OFII a informé M. A... de son intention de suspendre le bénéfice des conditions matérielles d'accueil puis, par une décision du 21 septembre 2020, cette même autorité a suspendu le bénéfice de ces conditions, au motif qu'il n'avait pas respecté les exigences des autorités chargées de l'asile en s'abstenant de se présenter aux autorités. Il relève appel du jugement du 19 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 21 septembre 2020 de l'OFII suspendant le bénéfice de ses conditions matérielles d'accueil.
2. Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, demeurant applicables, en vertu du III de l'article 71 de la loi du 10 septembre 2018 susvisée, aux décisions statuant sur les demandes initiales d'aide à l'asile qui comme celle de M. A..., ont été prises avant le 1er janvier 2019 : " Le bénéfice des conditions matérielles d'accueil peut être : 1° Suspendu si, sans motif légitime, le demandeur d'asile a abandonné son lieu d'hébergement déterminé en application de l'article L. 744-7, n'a pas respecté l'obligation de se présenter aux autorités, n'a pas répondu aux demandes d'informations ou ne s'est pas rendu aux entretiens personnels concernant la procédure d'asile (...) ".
3. Il résulte des dispositions précitées que l'Office français de l'immigration et de l'intégration peut refuser le bénéfice des conditions matérielles d'accueil, après examen de sa situation particulière et par une décision motivée, au demandeur qui a refusé le lieu d'hébergement proposé ou la région d'orientation. Il peut également, dans les mêmes conditions et après avoir mis, sauf impossibilité, l'intéressé en mesure de présenter ses observations, suspendre le bénéfice de ces conditions lorsque le demandeur a quitté le lieu d'hébergement proposé ou la région d'orientation ou n'a pas respecté les exigences des autorités chargées de l'asile, notamment de se rendre aux entretiens, de se présenter aux autorités et de fournir les informations utiles afin de faciliter l'instruction des demandes.
4. Il ressort des pièces du dossier que, pour suspendre le bénéfice de ses conditions matérielles d'accueil, l'OFII s'est fondé sur le motif tiré de ce que M. A... n'avait pas respecté les obligations auxquelles il avait consenti lors de l'acceptation de l'offre de prise en charge après avoir constaté qu'il s'était abstenu, à compter du 18 mars 2020, de pointer, comme il lui appartenait de le faire en exécution des décisions d'assignation à résidence du préfet du Rhône des 10 octobre 2019, 13 février et 10 mars 2020 et avait, en outre, cessé de se présenter aux autorités chargées de l'asile pour le renouvellement de son attestation de demande d'asile. M. A... ne peut se prévaloir de ce qu'il a pu légitimement considérer qu'il n'était pas autorisé à quitter son lieu de vie, de ce qu'il aurait ignoré qu'il était autorisé à se déplacer en dehors de son domicile dans le cadre du confinement instauré pour lutter contre l'épidémie de covid-19 à compter du 18 mars 2020, ou de ce qu'il n'a pas été informé précisément et personnellement de la réinstauration de l'obligation de pointage à son égard, alors que le décret du 19 mars 2020 visé ci-dessus modifiant le décret n° 2020-260 du 16 mars 2020 portant réglementation des déplacements dans le cadre de la lutte contre la propagation du virus covid-19 prévoyait expressément que les déplacements résultant d'une obligation de présentation aux services de police imposée par l'autorité de police administrative constituaient un motif de déplacement dérogatoire à compter du 21 mars 2020 et que ce motif a été repris, à compter du 25 mars 2020, par le décret du 23 mars 2020, également visé ci-dessus, prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire. Il n'établit pas, par ses seules allégations générales, qu'il disposait d'un motif légitime de nature à justifier qu'il était dans l'impossibilité de respecter les termes de son assignation à résidence. A supposer que M. A... n'a pu se présenter à sa convocation du 18 mars 2020 en raison de la crise sanitaire liée à la Covid-19, cet élément est sans influence sur la légalité de la décision en litige qui a également été prise en tenant compte de l'absence de M. A... aux autres convocations. En se bornant à soutenir qu'il a toujours été en contact avec les autorités françaises, qui connaissaient ses coordonnées, qu'il s'est rendu à chacune des convocations qui lui ont été adressées par SMS et par courriers, et en produisant les convocations pour les 7, 11 septembre et 15 octobre 2020, sans même justifier les avoir honorées, M. A... ne conteste pas sérieusement avoir cessé de se présenter aux autorités compétentes pour le renouvellement de son attestation de demande d'asile entre le 10 avril 2020 et le 3 août 2021. Ainsi, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'OFII a méconnu les dispositions précitées en prononçant à son encontre une mesure de suspension du bénéfice des conditions matérielles d'accueil ni qu'il aurait commis une erreur manifeste d'appréciation, compte tenu de la situation de force majeure dans laquelle il se trouvait, en le suspendant du bénéfice des conditions d'accueil.
5. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de la décision suspendant le bénéfice des conditions matérielles d'accueil ainsi que, par voie de conséquences, ses demandes d'injonction et d'astreinte ainsi que celles relatives aux frais liés au litige.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
Délibéré après l'audience du 21 septembre 2023 à laquelle siégeaient :
M. Picard, président de chambre ;
Mme Duguit-Larcher, présidente-assesseure ;
Mme Djebiri, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 octobre 2023.
La rapporteure,
A. Duguit-LarcherLe président,
V.-M. Picard
La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY01610
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