Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2022, par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait éloigné, et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour et, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation administrative et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler.
Par un jugement n° 2205188 du 22 novembre 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 12 décembre 2022, M. A..., représenté par Me Huard, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;
2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail ;
3°) mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à son conseil sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat.
Il soutient que :
- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;
- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Le préfet de l'Isère, régulièrement mis en cause, n'a pas produit.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'accord du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Vergnaud, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant algérien, né en 1978, déclare être entré en France accompagné de sa fille le 23 novembre 2018. Il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en invoquant l'état de santé de sa fille, née en 2013. Par décisions du 6 juillet 2022, le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours. Par jugement du 22 novembre 2022, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Enfin, aux termes de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ".
3. Il ressort des termes de l'arrêté en litige que M. A..., qui ne le conteste pas, a sollicité son admission au séjour en qualité d'accompagnant de son enfant mineur malade. Toutefois, la situation des ressortissants algériens est entièrement régie par les stipulations de l'accord franco-algérien, qui ne comporte aucune stipulation permettant au parent d'un enfant dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale en France de se voir accorder une autorisation provisoire de séjour en qualité de parent accompagnant d'un enfant malade. Cette circonstance ne fait toutefois pas obstacle à ce que le préfet, dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire, autorise le séjour d'un ressortissant algérien pour l'accompagnement d'un enfant malade.
4. Le moyen tiré de ce que l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien doit être écarté dès lors que ces dispositions ne sont pas applicables à la situation de M. A... qui n'a pas demandé un titre de séjour en raison de son état de santé personnel.
5. Selon l'avis du 25 juin 2021 du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), qui a été sollicité par le préfet, l'état de santé de l'enfant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et un traitement adapté est effectivement disponible dans son pays d'origine, c'est-à-dire l'Algérie. Le collège de médecins a également précisé que l'état de santé de l'enfant ne fait pas obstacle à ce qu'il puisse, sans risque médical, voyager pour revenir dans son pays d'origine.
6. Les différentes pièces médicales produites par le requérant confirment la gravité de l'état de l'enfant qui est atteint d'arthrogrypose congénitale des quatre membres. Il ressort des pièces du dossier que l'enfant a bénéficié en France d'interventions chirurgicales et d'une prise en charge incluant des soins en kinésithérapie et en ergothérapie. Le suivi actuel inclut la mise à disposition d'aides techniques et de matériel. Des interventions chirurgicales sont envisagées dans l'avenir, elles ne présentent toutefois aucune certitude ni n'ont, à ce jour, été planifiées. Aucun élément au dossier ne permet d'établir l'absence de prise en charge de ce handicap en cas de retour en Algérie, les certificats médicaux attestant seulement de la réalité et des conditions de prise en charge de l'enfant en France.
7. Enfin, M. A... est entré en France selon ses dires au mois de novembre 2018 soit à l'âge de 40 ans. Il n'établit pas avoir constitué des attaches personnelles et sociales intenses et ancrées dans la durée. En outre, il a conservé des attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu l'essentiel de sa vie et où résident sa femme et ses deux autres enfants mineurs.
8. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Isère, en refusant le séjour à M. A..., n'a pas porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale, au regard des buts que ses décisions poursuivaient. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 6, 5° de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent en conséquence être écartés. Le préfet n'a pas davantage méconnu l'intérêt supérieur de l'enfant malade du requérant au sens de l'article 3, 1° de la convention relative aux droits de l'enfant.
9. Il découle de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 5 septembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Stillmunkes, président assesseur,
Mme Vergnaud, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 septembre 2023.
La rapporteure,
E. Vergnaud
Le président,
F. Pourny
La greffière,
F. Abdillah
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY03644